TJ de Marseille, 12 décembre 2024, RG n° 22/02590  

– Contrat d’assurance – vol – garantie – clause abusive – dommages et intérêts – 

  

EXTRAITS   

« La garantie vol prend en charge dans la limite de la valeur de remplacement à dire d’expert ou dans les conditions des garanties valeur à neuf et valeur majorée lorsque celles-ci sont acquises, les dommages consécutifs à la disparition totale du véhicule par :
actes de violence à l’encontre du conducteur effraction du véhicule caractérisée par des traces matérielles c’est-à-dire cumulativement : effraction de l’habitacle ou du coffre, forcément de la colonne de direction, la détérioration du faisceau de démarrage ou d’un système antivol en fonctionnement ;effraction d’un garage privatif, clos et verrouillé effraction électronique du véhicule constatée et attestée par expertise. 

En l’espèce, [I] [D] se contente d’indiquer que la clause est abusive sans en justifier. Force est néanmoins de constater que la clause ne fait que définir les événements garantis et ne limite pas les moyens de preuves dont dispose l’assuré pour démontrer l’existence d’un vol. Dès lors, elle ne présente pas de caractère abusif au sens du code de la consommation ».  

  

ANALYSE    

Le tribunal judiciaire de Marseille a été saisi par un assuré qui avait conclu un contrat d’assurance pour son véhicule avec la société SERENIS ASSURANCES (ci- après l’assureur).  

 l’issue d’un sinistre survenu sur le véhicule, causé par un vol, l’assureur a informé à son assuré qu’il ne serait pas indemnisé au motif qu’aucune effraction n’avait pu être constatée. L’assuré considère que la clause vol du contrat est abusive parce qu’elle fait obstacle à l’indemnisation des vols sans effraction alors qu’il existe des techniques modernes mises en œuvre pour le vol des véhicules permettant de les ouvrir sans effraction. A cet égard, la Cour d’appel de Paris avait jugé que la clause qui limite indûment les moyens de preuve du vol de véhicule est abusive (CA Paris, Pole 4 ch.8, 1er février 2022, RG N° 20/01378) https://www.clauses-abusives.fr/jurisprudence/la-clause-qui-limite-indument-les-moyens-de-preuve-du-vol-de-vehicule-est-abusive/ Le défendeur considère que la clause n’est pas abusive car elle se borne à définir les événements garantis sans limiter les moyens de preuve.  

Ainsi, le tribunal judiciaire de Marseille a dû, à la demande de l’assuré, analyser la clause pour relever son éventuel caractère abusif.   

La clause stipulait que « La garantie vol prend en charge dans la limite de la valeur de remplacement à dire d’expert ou dans les conditions des garanties valeur à neuf et valeur majorée lorsque celles-ci sont acquises, les dommages consécutifs à la disparition totale du véhicule par : actes de violence à l’encontre du conducteur, effraction du véhicule caractérisée par des traces matérielles c’est-à-dire cumulativement : effraction de l’habitacle ou du coffre, forcément de la colonne de direction, la détérioration du faisceau de démarrage ou d’un système antivol en fonctionnement ; effraction d’un garage privatif, clos et verrouillé, effraction électronique du véhicule constatée et attestée par expertise ». Le tribunal judiciaire déclare que la clause n’est pas abusive. Cette décision est justifiée par le fait que la requérante invoque le caractère abusif de cette dernière sans apporter des éléments de justification. Surtout, le juge relève que la clause ne fait que décrire les actes qui peuvent être garantis, sans limiter les moyens de preuve dont l’assuré dispose pour prouver l’existence d’un vol. Ainsi, la clause ne présente aucun caractère abusif qui produirait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de l’assuré envers l’assureur.   

TJ de Versailles, 15 novembre 2024, RG 23/00053 

– contrat de crédit immobilier – clause abusive – clause illicite – relevé d’office – 

 

EXTRAITS  

« La clause de déchéance du terme contenue dans l’acte notarié indique que “le prêt sera résilié et les sommes prêtées deviendront immédiatement exigibles par notification faite à l’emprunteur dans l’un ou l’autre des cas suivants (…) défaut de paiement des sommes exigibles en capital, intérêts et autres accessoires, quinze jours après mise en demeure de régler les sommes dues restée infructueuse”. 

 

[…] il apparait que la clause de déchéance du terme contenue dans l’acte notarié qui sert de titre exécutoire, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des débiteurs qui ont été exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la mise en demeure ne prévoyant pas un préavis d’une durée raisonnable. Par ailleurs, les formalités de mise en demeure n’ont été réalisées que concernant un seul des prêts alors que la déchéance du terme des deux prêts a été prononcée ». 

 

 

ANALYSE   

Deux emprunteurs ont contracté un crédit immobilier au près d’un établissement bancaire. Dans l’acte notarié, la clause de déchéance du terme stipulait que « le prêt sera résilié et les sommes prêtées deviendront immédiatement exigibles par notification faite à l’emprunteur dans l’un ou l’autre des cas suivants (…) défaut de paiement des sommes exigibles en capital, intérêts et autres accessoires, quinze jours après mise en demeure de régler les sommes dues restée infructueuse ». Après des échéances impayées, l’établissement de crédit a expédié une lettre de recommandée aux emprunteurs avec accusé de réception valant mise en demeure de payer des échéances impayées. Par le biais d’une seconde lettre, l’établissement bancaire a prononcé la déchéance du terme. L’établissement bancaire a décidé de poursuivre la vente forcée des biens immobiliers acquis.  

 

Au visa des articles L.311-2, R.121-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution et de l’article L.241-1 du Code de la consommation, le TJ de Versailles a rappelé qu’: « […] il est établi par la jurisprudence que crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, une clause d’un contrat de prêt immobilier qui prévoit la résiliation de plein droit du contrat après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d’une durée raisonnable. En outre, il importe peu que la déchéance du terme n’ait été effectivement prononcée que dans un délai supérieur, car le fait que le professionnel n’ait pas appliqué une clause n’exempte pas le juge national de son obligation de tirer toutes les conséquences du caractère abusif de cette clause. »   

 

 

Le TJ en conclut que la clause de déchéance du prêt «[…] crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des débiteurs qui ont été exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la mise en demeure ne prévoyant pas un préavis d’une durée raisonnable. […]. Cette clause qui apparait abusive sera donc réputée non écrite. ».  

 

Il en déduit que la demande de vente forcée fondée sur une clause réputée non écrite doit être rejetée  (TJ Versailles 15 nov. 2004 RG-000523). 

 

Voir également :

Recommandation n°04-03 relative au prêt immobilier 

TJ de Versailles, 15 novembre 2024, RG n°23/00053
– contrat de crédit immobilier – déchéance du terme – mise en demeure – préavis non raisonnable – clause abusive – relevé d’office – 

 

EXTRAIT
« Par conséquent, il apparait que la clause de déchéance du terme contenue dans l’acte notarié qui sert de titre exécutoire, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des débiteurs qui ont été exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la mise en demeure ne prévoyant pas un préavis d’une durée raisonnable. Par ailleurs, les formalités de mise en demeure n’ont été réalisées que concernant un seul des prêts alors que la déchéance du terme des deux prêts a été prononcée. » 

 

ANALYSE
Une banque française, le Crédit Foncier de France, a accordé à un couple un prêt immobilier se composant de deux échelons : un montant principal de 146 248 €, remboursable sur 336 échéances mensuelles à un taux fixe de 2,65 %, et un second montant de 97 498,80 €, remboursable sur 300 échéances mensuelles à taux zéro. À la suite d’impayés, la banque a déclenché une procédure de saisie immobilière. Par la suite, la banque a demandé au Tribunal judiciaire de Versailles de prononcer la vente forcée des biens. 

 

Le créancier a avancé que la clause de déchéance du terme, incluse dans l’acte notarié constitutif du prêt, prévoyait une résiliation immédiate du contrat en cas de non-paiement, quinze jours après mise en demeure infructueuse. Cependant, le juge a soulevé d’office le caractère abusif de cette clause. 

 

Le Tribunal judiciaire de Versailles a examiné les termes du contrat et relevé que cette clause imposait un déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs en aggravant subitement leurs conditions de remboursement. En outre, la banque n’avait effectué les formalités de mise en demeure que pour l’un des deux prêts, tout en appliquant la déchéance aux deux montants. 

 

Le juge a rappelé que, conformément à l’article L. 241-1 du Code de la consommation, les clauses abusives doivent être réputées non écrites. Il a également confirmé que le pouvoir du juge de l’exécution, en vertu de l’article R. 121-1 du Code des procédures civiles d’exécution, ne lui permet ni d’annuler ni de modifier un titre exécutoire, mais uniquement d’en tirer les conséquences sur les mesures d’exécution (Cass. civ. 2ème, 11 juillet 2024, n° 24-70.001).

 

En l’espèce, après avoir constaté que la somme due initialement (5 810,82 € pour l’échéance impayée) avait déjà été remboursée avant la délibération, le juge a rejeté la demande de vente forcée. Il a également rejeté la demande de frais irrépétibles (article 700 du CPC) et laissé les dépens à la charge de la banque.  

Voir également :

Cass. civ. 2ème, 11 juillet 2024, n° 24-70.001  

 

TJ de Paris, 5 novembre 2024, RG n° 22/04005  

 

Contrat de prêt — devise étrangère — transparence – déséquilibre significatif – devoir d’information du banquier   

 

EXTRAITS : 

«[le tribunal relève qu’] En application des dispositions susvisées du code de la consommation, il convient donc d’examiner si ces stipulations sont rédigées de façon claire et compréhensible et, en cas contraire, d’apprécier si elles créent un déséquilibre significatif au détriment de l’emprunteur. » 

 

ANALYSE : 

Le 16 mars 2009, un couple a souscrit auprès d’une banque un prêt libellé en devise étrangère. L’épouse a adhéré, par l’intermédiaire de son prêteur, à l’assurance emprunteur proposée par cette banque. Le 31 mars 2016, à la suite du divorce des emprunteurs, la banque a consenti au transfert de la totalité du prêt à l’ex-mari et un procédé à la résiliation de l’assurance emprunteur de l’ex-épouse. En 2020, l’emprunteur décède, laissant pour unique héritière sa fille, née de son union avec l’ex-épouse. Le 10 septembre 2021, la banque informe l’ex-épouse, agissant dans l’intérêt de sa fille mineure, d’une prise en charge à hauteur de 100 % du capital restant dû, assortie d’un second décompte. L’ex-épouse assigne alors la banque et à la société d’assurance, contestant certaines clauses qu’elle estime abusives dans le cadre du contrat souscrit.  

 

Dans cette décision, le tribunal relève, dans un premier temps, que les stipulations contractuelles manquent de clarté et de compréhension, notamment en raison de l’insuffisance des explications fournies aux emprunteurs concernant les mécanismes financiers sous-jacents. Ces derniers présentent une technicité manifeste, privant les ex-époux des informations nécessaires à une prise de décision éclairée. Le tribunal conclut ainsi à un défaut de transparence imputable au prêteur dans ses relations avec ses clients. Dans un second temps, le tribunal a mis en évidence un déséquilibre significatif entre les obligations respectives des parties au contrat, au détriment de l’emprunteur. Le prêt ne comporte en effet aucune disposition visant à limiter l’impact du risque d’augmentation substantielle du capital restant dû en fonction des fluctuations du taux de change pendant l’exécution du contrat, ni des mesures pour atténuer les conséquences d’un éventuel défaut de paiement. Or, en respectant l’exigence de transparence à l’égard des emprunteurs, le prêteur ne pouvait pas raisonnablement s’attendre à ce que les ex-époux acceptent un tel risque. Ainsi, le tribunal en déduit l’existence de clauses abusives qui seront réputées non écrites et le contrat restera applicable dans ses autres stipulations, à la condition qu’il puisse subsister sans les clauses ainsi écartées. 

 

Voir également : 

Cass. civ.1ère, 14 février 2024, n°22-21.135  

 

TJ de Marseille, 5 novembre 2024, RG n° 24/00156  

 

Contrat de prêt — saisie immobilière — déchéance du terme – office du juge — mise en demeure  

 

EXTRAITS : 

«[le tribunal relève que ] la clause qui ne prévoit aucune mise en demeure ni sommation préalable ni préavis sans délai raisonnable doit donc être considérée comme abusive car elle a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat,»  

 

ANALYSE : 

Le 5 juillet 2024, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel alpes Provence a fait assigner le défendeur, par acte huissier a comparaitre devant le Tribunal Judiciaire de Marseille.  

Le créancier poursuivant a été appelé à conclure sur la validité de la clause d’exigibilité du capital restant dû figurant au contrat de prêt, dans l’hypothèse de non paiement à la date prévue des échéances, et sur les conséquences de droit et de fait qui en découlent. Elle alors a soutenu qu’en cas d’échéances impayées, bien que le capital soit immédiatement exigible, elle avait, dans les faits, accordé au débiteur un délai suffisant pour régulariser sa situation. 

Dans cette décision, le tribunal judiciaire a relevé d’office la présence d’une clause abusive dans le contrat de prêt litigieux 

La Cour juge que la clause de déchéance du terme qui ne prévoit aucune mise en demeure ni sommation préalable ni préavis sans délai raisonnable doit être considérée comme abusive car elle a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Il importe peu, comme en l’espèce, que les modalités utilisées par la banque pour obtenir le paiement des échéances soient plus favorables au débiteur, un délai de 8 mois s’étant écoulé entre la date de la première échéance impayée et la déchéance du terme.  

Cette clause, abusive, sera donc considérée comme non écrite. 

 

Voir également :  

 CJUE, 4 juin 2019, Pannon, C-243/08 

Cass. civ. 1ère, 22 mars 2023, n°21-16476 

 

Tribunal Judiciaire de Paris, Service du Juge de l’éxécution, 11 janvier 2024, RG 23/00185 

 

– contrat de crédit – déchéance du terme – mise en demeure – saisie immobilière – acte notarié 

 

EXTRAIT 

(…) la directive de 1993 ne s’oppose pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui permet à un notaire ayant établi, dans le respect des exigences formelles, un acte authentique concernant un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, de procéder à l’apposition de la formule exécutoire sur ledit acte ou de refuser de procéder à sa suppression alors que, ni à un stade ni à un autre, un contrôle du caractère abusif des clauses dudit contrat n’a été effectué (CJUE, Ier octobre 2015, C-32/15, sur question préjudicielle hongroise). 

Tel est le cas en France, où la loi n’impose pas au notaire de s’assurer de l’absence de clauses abusives dans les contrats qu’il reçoit en la forme authentique. 

(…) le prêt stipule à la rubrique « Exigibilité immédiate », §1, p. 18, que le contrat est résilié et que les sommes dues deviennent immédiatement exigibles, après mise en demeure de l’emprunteur restée infructueuse dans le délai fixé par ce courrier pour remédier à l’inexécution contractuelle au cas, notamment, de retard de paiement d’une échéance durant plus de 30 jours.  

En ce qu’elle laisse à l’entière appréciation du prêteur le délai séparant la mise en demeure de la résiliation du contrat, cette clause comporte un déséquilibre significatif des droits et obligations respectives du professionnel et du consommateur, au détriment du second». 

 

ANALYSE 

Une banque a consenti à un consommateur deux prêts par actes notariés, destinés au refinancement de sa résidence principale. Sur le fondement de ces deux actes authentiques, la banque a saisi les droits réels de l’emprunteur sur un immeuble au 110 boulevard de la Chapelle et 4 rue des Islettes à Paris. La banque a assigné l’emprunteur en orientation pour vente forcée du bien saisi et fixation de sa créance. L’emprunteur a contesté la validité des clauses des contrats de prêt et a demandé l’annulation de la procédure de saisie immobilière. 

 

Le juge de l’exécution commence par énoncer qu’en vertu de la jurisprudence de la CJUE, il  est, d’une manière générale, au stade de l’exécution forcée d’un quelconque titre exécutoire, nonobstant l’autorité de chose jugée pouvant lui être attachée, tenu d ‘examiner d ‘office le caractère abusif des clauses du contrat ayant donné lieu à I ‘émission ou à la constitution de ce titre, pourvu qu’il dispose des éléments de droit et de fait permettant cet examen, au premier chef desquels le contrat.  

 

Il rappelle ensuite que la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a reconnu au juge de l’exécution le pouvoir de statuer sur la nullité d’un engagement résultant d ‘un acte notarié (Cass. 2e Civ. , 18 juin 2009, n 08-10.843, publié). Il en déduit que « pouvant annuler toute clause d’un contrat passé en la forme authentique fondant les poursuites, le juge de l’exécution peut aussi dire qu’une telle clause est réputée non écrite comme abusive et en tirer les conséquences ». Il observe que cette solution est d’autant plus nécessaire que « la directive de 1993 ne s’oppose pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui permet à un notaire ayant établi, dans le respect des exigences formelles, un acte authentique concernant un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, de procéder à l’apposition de la formule exécutoire sur ledit acte ou de refuser de procéder à sa suppression alors que, ni à un stade ni à un autre, un contrôle du caractère abusif des clauses dudit contrat n’a été effectué (CJUE, Ier octobre 2015, C-32/15, sur question préjudicielle hongroise) ». Il remarque que « tel est le cas en France, où la loi n’impose pas au notaire de s’assurer de l’absence de clauses abusives dans les contrats qu’il reçoit en la forme authentique ». 

 

S’étant reconnu compétent pour juger du caractère abusif de la clause d’un prêt notarié, le juge de l’exécution analyse la stipulation du contrat de prêt aux termes de laquelle « le contrat est résilié et (…) les sommes dues deviennent immédiatement exigibles, après mise en demeure de l’emprunteur restée infructueuse dans le délai fixé par ce courrier pour remédier à l’inexécution contractuelle au cas, notamment, de retard de paiement d’une échéance durant plus de 30 jours ». Il juge qu’ « en ce qu’elle laisse à l’entière appréciation du prêteur le délai séparant la mise en demeure de la résiliation du contrat, cette clause comporte un déséquilibre significatif des droits et obligations respectives du professionnel et du consommateur, au détriment du second ». 

 

Il déduit du caractère non écrit de cette clause que « la déchéance du terme est rétroactivement privée de fondement juridique et que le contrat de prêt, selon le tableau d’amortissement annexé au contrat authentique, est toujours en cours. De là, seule est exigible, partant susceptible d’exécution forcée, la somme correspondant aux échéances mensuelles impayées prévues à ce tableau d’ amortissement, à I ‘ exclusion du capital restant dû et des pénalités contractuelles ». 

 

Ayant recalculé la créance de la banque, il observe que celle-ci est fondée à poursuivre le recouvrement de ses créances exigibles par voie de saisie immobilière et qu’il n’y a lieu ni d’annuler la procédure ni de radier le commandement. 

Tribunal Judiciaire de Paris, 11 janvier 2024, n° RG 20/81791 

Clause abusive – juge de l’exécution – demande d’avis – clauses de déchéance du terme – contrats de consommation 

 

EXTRAITS : 

 

« En l’espèce, le contrat signé par Mme Z le 30 janvier 1998 a été produit ; en son article 4, il stipule qu’en cas de défaillance de l’emprunteur dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, outre une indemnité de résiliation égale au plus à 8% du capital dû. 

 

Cette formulation reconnaît au prêteur la possibilité de résilier le contrat sans préavis. 
L’exigibilité de la créance résultant du jeu de cette clause était la condition légale du recours à la procédure d’injonction de payer. 

 

Or l’ordonnance portant injonction de payer du 12 novembre 2003 fondant les poursuites est désormais irrévocable, le juge des contentieux de la protection ayant, le 8 octobre 2021, déclaré irrecevable comme tardive l’opposition formée par Mme Z ; elle produit tous les effets d’un jugement contradictoire par lequel, en accueillant la requête du prêteur pour la totalité des sommes dues après déchéance du terme, le juge d’instance a nécessairement jugé que toutes les sommes réclamées au titre du contrat, en particulier le capital restant dû et l’indemnité de résiliation, étaient exigibles. 

 

S’il entre désormais assurément dans les pouvoirs du juge de l’exécution de dire abusive une clause de déchéance du terme telle que celle figurant au contrat du 30 janvier 1998, les arrêts rendus par la Cour de cassation en février et en mars 2023 ne permettent pas de déterminer si le juge de l’exécution doit statuer ainsi dans le dispositif de son jugement lorsque le titre fondant les poursuites est une décision judiciaire équivalente à un jugement contradictoire ni surtout, dans l’affirmative, quelles conséquences doivent en être tirées. » 

 

ANALYSE : 

 

En l’espèce, le 30 janvier 1998, une ouverture de crédit est souscrite par un emprunteur auprès d’une société. Le 12 novembre 2003, le juge d’instance du XIVe arrondissement de Paris a fait injonction à cet emprunteur de payer diverses sommes au titre du crédit du 30 janvier 1998 à la société, société qui, le 1er avril 2010, est absorbée par une autre qui cède sa créance sur cet emprunteur le 28 juillet 2017 à la société EOS Credirect, aujourd’hui EOS France. Le 17 janvier 2019, la société EOS France fait délivrer à l’emprunteur, sur le fondement de l’ordonnance d’injonction de payer, un commandement de payer aux fins de saisie-vente ; puis, le 19 octobre 2020, lui a dénoncé un procès-verbal d’indisponibilité du certificat d’immatriculation de son véhicule. Le 9 novembre 2020, l’emprunteur forme opposition à l’ordonnance portant injonction de payer. Le 18 novembre 2020, l’emprunteur assigne la société EOS France devant le juge de l’exécution. Le 24 février 2021, ce juge sursoit à statuer dans l’attente de la décision à intervenir sur l’opposition à injonction de payer. Le 8 octobre 2021, le juge des contentieux de la protection du TJ de Paris l’a déclarée irrecevable. Le 28 août 2023, les parties sont convoquées à une nouvelle audience. L’emprunteur demande au juge de l’exécution de notamment dire abusive et réputée non écrite la clause de déchéance du terme n°4 du contrat du 30 janvier 1998. 

 

Le tribunal rappelle que, en droit commun, si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle (1ère Civ, 3 juin 2015, n°14-15.655). 

 

Le tribunal rappelle que selon l’article R.212-2 du code de la consommation, est présumée abusive la clause qui a pour objet ou pour effet de : 
4° Reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d’une durée raisonnable. 

 

Le tribunal rappelle ensuite la solution posée par l’arrêt Banco Primus du 26 janvier 2017 (C-421/14) dans laquelle la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) pose des critères permettant d’apprécier le caractère abusif d’une clause de déchéance du terme dans un contrat, critères ni cumulatifs ni alternatifs (CJUE, 8 décembre 2022, C-600/21). 

Le tribunal rappelle que le 22 mars 2023, dans le prolongement de cette jurisprudence, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a décidé qu’était abusive comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur, exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la clause d’un contrat de prêt prévoyant la résiliation de plein droit du contrat après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d’une durée raisonnable (Cass. civ. 1ère, 22.03.2023, n°21-16.044), rappelant dans un arrêt du même jour (Cass. civ. 1ère, 22.03.2023, n°21-16.476) qu’il incombait au juge d’examiner d’office l’existence d’un tel abus. Dans l’une de ces affaires (n° 21-16.476), la déchéance du terme était stipulée acquise immédiatement, sans mise en demeure préalable, en cas défaut de paiement d’une des échéances du prêt à sa date, dans l’autre (n° 21-16.044), acquise de plein droit huit jours après mise en demeure. 

 

Le juge de l’exécution énonce qu’il entre désormais dans les pouvoirs du juge de l’exécution de dire abusive une clause de déchéance du terme telle que celle figurant au contrat du 30 janvier 1998. Néanmoins, il constate que les arrêts rendus par la Cour de cassation en février et en mars 2023 ne permettent pas de déterminer si le juge de l’exécution doit statuer ainsi dans le dispositif de son jugement lorsque le titre fondant les poursuites est une décision judiciaire équivalente à un jugement contradictoire ni surtout, dans l’affirmative, quelles conséquences doivent en être tirées. C’est la raison pour laquelle en l’espèce, le juge de l’exécution sollicite l’avis de la Cour de cassation sur la question de savoir s’il peut, dans le dispositif de son jugement, déclarer réputée non écrite comme abusive la clause d’un contrat de consommation ayant donné lieu à la décision de justice fondant les poursuites. Question qui, si sa réponse est affirmative, pose la question des effets de cette réponse : le jugement antérieur disparaît-il ainsi que l’interruption de prescription et le nouveau délai de prescription ? Quel juge sera compétent pour rejuger de la créance ? 

 

Pour conclure on relèvera que ces importantes questions pour avis ont été posées par M. Cyril Roth (1er vice-président adjoint, juge de l’exécution par délégation du Président du TJ de Paris) qui a été vice-président de la Commission des clauses abusives. 

Voir également :

Cass. civ. 1ère, 22.03.2023, n°21-16.044

Cass. civ. 1ère, 22.03.2023, n°21-16-476

Tribunal Judiciaire de Cahors, 18 novembre 2022, n° RG 19/00001 

Clauses abusives – contrats – juge de l’exécution – consommateur – prêt – suisse – taux d’intérêt –risque – taux de change 

 

EXTRAITS : 

 

Sur l’existence de clauses abusives : 

 

« une clause d’indexation faisant supporter le risque de change inhérent au contrat par le consommateur est une clause qui crée un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et qui, partant, est abusive. » 

 

« la clause de reconnaissance d’information contenue par le bordereau d’acceptation du contrat de prêt HELVET IMMO […] ne peut exonérer BNP PPF de sa responsabilité et ne peut valoir, par le consommateur, reconnaissance de la bonne exécution par le professionnel de ses obligations  d’information, de conseil et de mise en garde. 

Il convient de constater que cette clause crée même un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur. Cette clause est également abusive et doit donc être réputée non écrite conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. » 

 

« Dans le prêt HELVET IMMO, trois clauses sont relatives à la variation du taux d’intérêt et utilisent trois indices différents selon l’hypothèse […] ces trois clauses relatives à la révision du taux d’intérêt ne sont pas conformes aux exigences de transparence fixées par la CJUE dès lors que les consommateurs ne peuvent pas comprendre les effets concrets qu’elles auront sur leurs obligations financières. Il en résulte que ces clauses d’intérêt ne sont ni claires ni intelligibles et, en conséquence, doivent être déclarées abusives et réputées non écrites conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. » 

Sur l’anéantissement rétroactif du contrat de prêt : 

 

« Les stipulations de la clause implicite d’indexation nécessitent une lecture croisée et globale en ce qu’elles sont éclatées dans de nombreux paragraphes du contrat. Elles constituent un ensemble indivisible, de sorte que le contrat dépourvu de l’ensemble de ces stipulations n’a plus aucun sens. Le juge n’a pas la possibilité de le réécrire pour lui permettre de fonctionner. Il convient dès lors de juger que le contrat de prêt HELVET IMMO ne peut pas subsister sans cette clause implicite d’indexation. Les clauses de révision du taux d’intérêt sont également essentielles au fonctionnement du contrat et celui-ci ne peut subsister sans elles. En conséquence, il y a lieu de juger que le contrat HELVET IMMO proposé par BNP PPF et souscrit par D Y doit être annulé dans son ensemble. » 

 

ANALYSE : 

 

En l’espèce, en 2009, BNP PPF a consenti à X un prêt afin de financer l’acquisition d’un appartement pour un montant en principal de 180.188,89 francs suisses, outre les intérêts conventionnels au taux variable initial de 4,60% et les accessoires (cf offre HELVET IMMO n°65086287 datée du 9 mars 2009 pour 121.749,25 euros empruntés avec un TEG affiché de 5,11%.). X ayant cessé de procéder aux règlements de ses échéances, BNP PPF a notamment prononcé la déchéance du terme et l’exigibilité du prêt le 10/02/2017 après l’avoir mis en demeure de payer les sommes dont il était redevable. 

Par acte du 2/01/2019, BNP PPF a fait délivrer une assignation devant le juge de l’exécution près le tribunal de grande instance de Cahors pour une audience d’orientation et sommation de prendre connaissance du cahier des conditions de la vente et d’assister aux audiences d’orientation et d’adjudication. L’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises à la demande des parties. 

A l’audience du 17/06/2022, BNP PPF a, entre autres, demandé au juge de l’exécution près du tribunal judiciaire de Cahors de débouter X de ses demandes et contestations, de juger que le montant de la créance BNP Paribas Personal Finance en principal, accessoires, intérêts et frais s’élève à la somme globale de 148.873,31 euros selon décompte arrêté au 17/06/2022 avec intérêts au taux contractuel de 2,14%, à parfaire jusqu’à la date effective de paiement outre les dépens sur la présente saisie, et de juger que le quantum de la créance revendiquée par BNP Paribas Personal Finance est bien fondé et justifié. A titre subsidiaire, dans le cas où la vente amiable serait accordée par le juge de l’exécution, BNP souhaite que soient jugées irrecevables les demandes de M.Y formées sur le fondement des clauses abusives pour défaut d’intérêt à agir. De plus, BNP demande à ce que les clauses relatives au risque de change et à la variation du taux d’intérêt soient jugées comme ne relevant pas du contrôle des clauses abusives en ce qu’elles sont rédigées de manière claire et compréhensible. A titre infiniment subsidiaire, BNP demande à ce que les clauses relatives au risque de change et à la variation du taux d’intérêt soient jugées comme ne créant pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et, en conséquence, à débouter M.Y de ses demandes sur le fondement des clauses abusives. 

 

Après avoir relevé que X avait bien un intérêt à agir sur le fondement des clauses abusives, le tribunal se penche sur la question de l’existence de ces clauses abusives. 

 

Il rappelle tout d’abord que, selon l’article L 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.  

Il énonce ensuite que le caractère abusif d’une clause s’apprécie « en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat ». Le tribunal termine par expliquer que le juge national a l’obligation de relever d’office le caractère abusif d’une clause au regard des critères posés par les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) lorsqu’il dispose des éléments de fait et de droit à cet effet (Civ. 1ère, 20 avril 2022, n°20-16.942). Il doit en effet vérifier si la clause d’indexation du prêt est claire et intelligible pour au consommateur moyen, et notamment si l’emprunteur a reçu des informations suffisantes et exactes afin qu’il puisse évaluer le risque des conséquences économiques négatives de cette clause sur ses obligations financières. 

 

Concernant la clause d’indexation, le tribunal commence par rappeler que le déséquilibre significatif induit par une clause d’indexation ou une clause de remboursement en devise étrangère est caractérisé par l’absence de transparence de cette clause (Civ. 1ère 20 avril 2022, n°20-16.316). 

La CJUE s’est prononcée au regard de la clause d’indexation implicite du prêt HELVET IMMO, par deux arrêts du 10 juin 2021 (CJUE, 10 juin 2021, aff. C 609/19 et aff. jointes C- 776/19 à C-782/19). Elle y précise en outre les différents critères qui doivent être appliqués par les juges nationaux pour déterminer si la clause d’indexation du prêt HELVET IMMO, compte tenu des spécificités et du fonctionnement singulier de ce contrat, est abusive. 

En l’espèce, le prêt HELVET IMMO ne contenant pas les termes « risque de change », ni aucun autre avertissement explicite relatif aux risques inhérents aux prêts libellés sur une devise étrangère, la CJUE estime que compte tenu des connaissances du professionnel relatives au contexte économique prévisible et des moyens dont il dispose pour anticiper l’évolution d’un cours de change, une clause d’indexation faisant supporter le risque de change inhérent au contrat par le consommateur est une clause qui crée un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et qui, partant, est abusive. 

Le tribunal explique ensuite que, concernant la clause implicite d’indexation du prêt HELVET IMMO, celle-ci est abusive en ce qu’elle créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de M.Y et au profit de BNP PPF, avec un risque de change non plafonné. En effet, le risque de change supporté par l’emprunteur n’est pas limité car l’exercice de l’option par ce dernier est si onéreux qu’il s’avère en pratique inenvisageable. 

 

Concernant la clause de reconnaissance d’information contenue par le bordereau d’acceptation du contrat de prêt HELVET IMMO qui stipule que les « emprunteurs déclarent (…) avoir été informés que le présent crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement », celle-ci ne peut exonérer BNP PPF de sa responsabilité et ne peut valoir, par le consommateur, reconnaissance de la bonne exécution par le professionnel de ses obligations  d’information, de conseil et de mise en garde. 

Le tribunal décide qu’il convient de constater que cette clause crée même un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur. Cette clause est, par conséquent, également abusive et doit donc être réputée non écrite conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. 

 

Enfin, concernant les trois clauses relatives à la variation du taux d’intérêt du prêt HELVET IMMO, celles-ci utilisent trois indices différents selon l’hypothèse : le SWAP francs suisses 5 ans, le TME ou le TIBEUR. 

Or, comme le fait valoir M. Y, ces indices sont peu compréhensibles pour un consommateur moyen et ce d’autant que BNP PPF n’a pas mis à sa disposition les historiques de variation de ces indices et n’a pas explicité les effets concrets que ces indices auront sur ses obligations financières. En conséquence, ces trois clauses relatives à la révision du taux d’intérêt ne sont pas conformes aux exigences de transparence fixées par la CJUE dès lors que les consommateurs ne peuvent pas comprendre les effets concrets qu’elles auront sur leurs obligations financières. Il en résulte que ces clauses d’intérêt ne sont ni claires ni intelligibles et, en conséquence, doivent être déclarées abusives et réputées non écrites conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. 

 

Après avoir rappelé que, selon l’article L.241-1 du code de la consommation : « Les clauses abusives sont réputées non écrites. (…) Les dispositions du présent article sont d’ordre public » ; le tribunal explique ensuite que ce même article L.241-1 du code de la consommation précise, en conséquence du réputé non écrit d’une clause abusive, que : « Le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans ces clauses ». Les alinéas 6 et 8 de l’article L. 132-1 ancien du code de la consommation, eux, disposent que : « les clauses abusives sont réputées non écrites » et que « le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses ». 

 

Selon le tribunal, les stipulations de la clause implicite d’indexation étant éclatées dans de nombreux paragraphes du contrat et constituant un ensemble indivisible, de sorte que le contrat dépourvu de l’ensemble de ces stipulations n’aurait plus aucun sens, il convient dès lors de juger que le contrat de prêt HELVET IMMO ne peut pas subsister sans cette clause implicite d’indexation. 

Concernant les clauses de révision du taux d’intérêt, celles-ci sont également essentielles au fonctionnement du contrat et ce dernier ne peut subsister sans elles. En conséquence, il y a lieu de juger que le contrat HELVET IMMO proposé par BNP PPF et souscrit par D Y doit être annulé dans son ensemble. 

 

Voir également : 

–  Civ. 1ère, 20 avril 2022, n°20-16.942

Civ. 1ère 20 avril 2022, n°20-16.316

TJ de Villefranche sur Saône, 30 Août 2022, RG 22/00077 

– contrat de crédit accessoire à une vente – gage sans dépossession -déchéance du terme – reprise du véhicule gagé – clause abusive – clause illicite – relevé d’office – 

EXTRAITS  

« il sera jugé que cette société, ayant fait le choix du seul gage sans dépossession, plutôt que de la garantie alternative découlant d’une réserve de propriété et sans ajouter une clause de transfert de propriété fondée sur l’article 2348 précité, ne pouvait dès lors pas prétendre à bénéficier d’un droit de reprise, ce qu’elle ne pouvait ignorer, sauf à priver le consommateur des garanties encadrant la saisie d’un bien gagé, notamment de l’exigence d’obtention préalable d’un titre exécutoire (…). Les clauses de restitution du bien financé après déchéance du terme ne prévoit pas la vente en justice du bien « repris » dans les conditions de l’article 2346 du code civil ou l’évaluation de la valeur du bien dans les conditions prévues à l’article 2348 alinéa 2 du Code civil. Ces clauses illicites en ce qu’elle sont stipulées en contravention des dispositions impératives des articles 2346 et 2348, alinéa 2 du code civil créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties en défaveur du consommateur dès lors qu’elles ont pour objet ou pour effet de le placer dans une situation juridique moins favorable que celle prévue par le droit national ».  

ANALYSE :  

Le TJ de Villefranche sur Saône a été saisi par la société DIAC qui avait accordé à des consommateurs un contrat de crédit accessoire à la vente d’un véhicule automobile. Les échéances de remboursement n’ayant pas été honorées, la société DIAC a sommé les emprunteurs de restituer le véhicule et a vendu celui-ci aux enchères publiques. N’étant pas parvenue à obtenir paiement du solde restant dû, elle a assigné les consommateurs en paiement dudit solde avec exécution provisoire outre les intérêts au taux annuel.  

Les défendeurs n’ont pas comparu à l’instance.  

Le TJ de Villefranche sur Saône a relevé d’office, sur le fondement de l’article R. 632-1 du code de la consommation, le caractère abusif de la clause numérotée 2-C qui énonce: « Avertissement en cas de défaillance de l’emprunteur. En cas de défaillance de votre part dans le remboursement, vous encourez la déchéance du terme. Vous devrez alors nous régler immédiatement le montant du capital restant dû, majoré des intérêts et indemnités. Si vous ne restituez pas le véhicule, malgré l’injonction qui vous est faite, nous pouvons vous y contraindre par tous moyens de droit et notamment par ordonnance sur requête et nous serons en droit de procéder à la restitution du véhicule. » 

Le Tribunal judiciaire a constaté que le contrat de crédit stipulait au bénéfice du prêteur un gage sans dépossession du véhicule en garantie de l’exécution du prêt. Il a observé qu’à raison de la nature de ce gage, le véhicule financé est entré en la propriété des consommateurs, dès son acquisition et était justement détenue par ces derniers.  

Il a observé qu  « il ne peut dès lors être prétendu à la possession indue induite par le verbe restituer figurant au sein de cette stipulation.  

La société DIAC, partie professionnelle au prêt et rédactrice de ce contrat d’adhésion a fait le choix de ne pas proposer à l’acceptation de ses clients une réserve de propriété qui lui aurait permis de prétendre à la propriété même de ce bien.  

En ce sens, qu’elle laisse croire à une possession indue des emprunteurs et ce faisant, à un droit de propriété du prêteur sur le bien finance, la rédaction de cette clause 2 C est trompeuse ». 

Le Tribunal juge par conséquent que le prêteur « ayant fait le choix du seul gage sans dépossession, plutôt que de la garantie alternative découlant d’une réserve de propriété et sans ajouter une clause de transfert de propriété fondée sur l’article 2348 précité, ne pouvait dès lors pas prétendre à bénéficier d’un droit de reprise, ce qu’elle ne pouvait ignorer, sauf à priver le consommateur des garanties encadrant la saisie d’un bien gagé, notamment de l’exigence d’obtention préalable d’un titre exécutoire ». Il observe que les écritures du prêteur « entretiennent cette confusion en rappelant son droit de saisir, lequel n’est pas contestable, quand le débat porte en réalité sur son droit de reprise », hors des garanties protégeant la partie débitrice saisie en son bien ». 

S’appuyant sur la recommandation n°21-01 relative aux contrats de crédit à la consommation, il juge que la clause de restitution du bien financé après déchéance du terme qui ne prévoit pas la vente en justice du bien « repris » dans les conditions de l’article 2346 du code civil ou l’évaluation de la valeur du bien dans les conditions prévues à l’article 2348 alinéa 2 du Code civil est illicite en ce qu’elle est stipulée en contravention des dispositions impératives des articles 2346 et 2348, alinéa 2 du code civil. Le Tribunal judiciaire de Villefranche Sur Saône en déduit que la stipulation crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties en défaveur du consommateur dès lors qu’elle a pour objet ou pour effet de le placer dans une situation juridique moins favorable que celle prévue par le droit national et qu’elle est donc abusive. 

Le Tribunal ajoute que « la prise de possession du véhicule par le préteur s’est inscrite comme une pratique commerciale trompeuse». 

Voir égal. Recommandation n°21-01 relative aux contrats de crédit à la consommation