COUR D’APPEL DE RENNES, 13 octobre 2023, RG n° 21/00297 

– contrat de prêt – demande en remboursement du prêt – clause abusive – déchéance du terme – délai de mise en demeure –  

 

EXTRAITS  

«Il est de principe que, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la clause d’un contrat de prêt qui prévoit la résiliation de plein droit de celui-ci en cas d’échéance impayée sans mise en demeure laissant à l’emprunteur un préavis d’une durée raisonnable pour régulariser la situation, une telle clause étant abusive au sens de l’article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation.  

Or, en l’occurrence, il est stipulé aux conditions générales du contrat de prêt que ‘en cas de défaillance de la part de l’emprunteur dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés’. 

Une telle clause laisse ainsi croire aux emprunteurs qu’ils ne disposent d’aucun délai pour régulariser l’arriéré ou saisir le juge des référés en suspension de l’obligation de remboursement du prêt sur le fondement de l’article L. 314-20 du code de la consommation, et que le prêteur peut se prévaloir sans délai de la déchéance du terme pour une seule échéances impayée, sans considération de la gravité du manquement au regard de la durée et du montant du prêt, consenti en l’espèce pour un montant de 25 500 euros pendant douze ans. » 

 

ANALYSE   

 

Des époux, ont contracté un prêt auprès d’un établissement de Crédit – le Crédit agricole- le 4 novembre 2015. En septembre 2018, les époux ont cessé de payer leurs échéances. Le 6 février 2019, l’établissement de crédit leur a adressé une mise en demeure afin de régulariser leur situation, sans réponse de ces derniers. L’établissement de crédit a alors assigné les époux en paiement et demandé de prononcer la déchéance du terme.  

Faisant application de la jurisprudence européenne et de la jurisprudence de la Cour de cassation s’y conformant sanctionnant les clauses de déchéance du terme sans préavis d’une durée raisonnable (cf : CJUE 26-1-2017 aff. 421/14  Cass. 1e civ. 22-3-2023 n° 21-16.044 FS-B) , la Cour d’appel de Rennes a rejeté la demande de l’établissement de crédit de prononcer la déchéance du terme du contrat de prêt conclu avec les époux. Elle a déclaré la clause de déchéance abusive et l’a écartée d’office. Les juges de la CA de Rennes ont considéré que la clause de déchéance du terme était abusive, car elle créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment des emprunteurs. 

En effet, cette clause ne prévoit pas de délai de mise en demeure préalable. Or, un délai de mise en demeure permet à l’emprunteur de régulariser sa situation avant que le prêteur ne puisse se prévaloir de la déchéance du terme. Utilisant une expression de la Commission des clauses abusives, la Cour d’appel a également considéré que la clause « laissait croire » à l’emprunteur qu’il ne dispose d’aucun délai pour régulariser l’arriéré ou saisir le juge des référés en suspension de l’obligation de remboursement du prêt sur le fondement de l’article L. 314-20 du code de la consommation, qui prévoit un délai de grâce. Ce faisant, ladite faculté « déroge aux règles de droit commun applicables en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques » (Banco Primus, pt 66). En outre, la clause laisse croire que le prêteur pouvait se prévaloir sans délai de la déchéance du terme pour une seule échéance impayée sans considération de la gravité du manquement au regard de la durée et du montant du prêt, consenti. Cette décision se conforme là encore à l’arrêt Banco Primus.  

CA RENNES, 29 SEPTEMBRE 2023, N°21/00700 

– contrat de prêt – clause de déchéance de terme – clause abusive  

 

EXTRAITS  

 

« crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la clause d’un contrat de prêt qui prévoit la résiliation de plein droit du contrat en cas d’échéance impayée sans mise en demeure laissant à l’emprunteur un préavis d’une durée raisonnable pour régulariser la situation, une telle clause étant abusive au sens de l’article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation. En l’occurrence, la clause de déchéance du terme des conditions générales de l’offre de prêt acceptée le 24 novembre 2005 reproduite ci-dessus laisse croire aux emprunteurs qu’ils ne disposent d’aucun délai pour régulariser l’arriéré, et que le prêteur peut se prévaloir de la déchéance du terme pour une seule échéances impayée sans considération de la gravité du manquement au regard de la durée et du montant du prêt consenti pour un montant de 50 000 euros pendant 18 ans. Ainsi, elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment des emprunteurs, exposés à l’obligation de rembourser immédiatement la totalité du capital restant dû, et doit être déclarée non écrite. » 

 

 

ANALYSE   

 

La Cour d’appel de Rennes (CA ci-après) a été saisi par la Banque populaire Grand-Ouest (BPGO) au sujet différents contrat de prêt conclu entre la banque et un couple. A la suite de manquements dans le paiement des mensualités d’un prêt, la banque assigne les emprunteurs devant le tribunal judiciaire de Lorient. Le 15 juin 2020, le tribunal a débouté la BGPO de l’intégralité de ses demandes et a condamné la BPGO à payer aux époux la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civil. La BGPO a interjeté appel de ce jugement.  

 

La CA de Rennes considère comme abusive la clause des conditions générales du contrat de prêt, aux termes de laquelle ‘toutes les sommes dues en principal, intérêts et accessoires par l’emprunteur seront exigibles (…) si bon semble (à la banque, notamment en cas de) défaut de paiement d’une échéance de prêt’, 

 

Pour considérer qu’elle était abusive, la cour se fonde sur l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 3 juillet 2010 au 1er juillet 2016 et rappelle notamment que : la clause de déchéance du terme des conditions générales de l’offre de prêt acceptée le 24 novembre 2005 reproduite ci-dessus laisse croire aux emprunteurs qu’ils ne disposent d’aucun délai pour régulariser l’arriéré, et que le prêteur peut se prévaloir de la déchéance du terme pour une seule échéances impayée sans considération de la gravité du manquement au regard de la durée et du montant du prêt consenti pour un montant de 50 000 euros pendant 18 ans 

 

Ainsi, elle en déduit que la clause des conditions générales du contrat de prêt présente un caractère abusif au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation en ce qu’elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment des emprunteurs, exposés à l’obligation de rembourser immédiatement la totalité du capital restant dû, et doit être déclarée non écrite 

 

Voir également : Cass. civ 1ère, 22 mars 2023, n° 21-16.044

Cour d’appel de Montpellier, 2è Chambre, 14 septembre 2023, RG n° 23/00812 

 

clause abusive – contrat de prêt – clause d’indexation – déséquilibre significatif – prêt libellé en devise étrangère 

  

EXTRAITS  

« Dès lors en considérant que, par une description technique d’un mécanisme complexe, par des informations diverses éclatées dans le contrat, sans que les risques ne fassent l’objet d’un réel avertissement, la SA BNP n’avait pas satisfait à l’exigence de transparence qui lui est imposée, en considérant en outre que la clause implicite d’indexation du prêt HELVET IMMO n’était ni claire ni intelligible sans le respect de cette exigence de transparence, et en jugeant même que ladite clause était volontairement inintelligible, le premier juge a fait une exacte analyse des éléments de la cause. » 

  

ANALYSE :  

 

En l’espèce, la BNP Paribas Personal finance consent un prêt libellé en devise étrangère ‘Helvet Immo’ à deux emprunteurs.  

La banque a ensuite fait délivrer à ses co-contractants un commandement de payer puis les a assigné en justice. 

Le juge de l’exécution a prorogé la validité des effets du commandement de payer dans un premier jugement. Puis, dans un second jugement, a jugé abusives certaines clauses du contrat de prêt. 

 

Se fondant sur les articles 3 $1, 4 et 5 de la directive européenne 93/13/CEE du 5 avril 1993, la Cour dappel (CA ci-après) de Montpellier qualifie la clause litigieuse de clause d’indexation déguisée abusive car elle impose au consommateur une lecture croisée de notions trop complexe. 

 

La CA considère que, n’ayant pas averti les emprunteurs des risques liés au contrat de prêt libellé en devise étrangère et qu’en ayant fait une description technique d’un mécanisme complexe, la banque a manqué à son obligation de transparence. 

 

C’est pourquoi la CA déduit qu’une telle clause était volontairement inintelligible et crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment des emprunteurs. 

La clause doit donc être réputée non-écrite car abusive. 

 

Par cet arrêt, la CA de Montpellier rappelle que l’appréciation du caractère abusif d’une clause dans un prêt libellé en devise étrangère s’effectue au regard de l’exigence de transparence du professionnel envers le consommateur, ainsi que l’avait jugé la CJUE dans la décision BNP Paribas du 10 juin 2021, jurisprudence désormais appliquée par la Cour de cassation (Cass. civ. 1ère, 20 avril 2022, 20-16.316) et par les juges du fond. 

Cette exigence comprend, d’une part, l’obligation pour la banque de décrire les mécanismes contractuels de telle sorte à ce que l’emprunteur puisse les comprendre facilement et, d’autre part, l’obligation d’avertir l’emprunteur des risques liés au contrat de prêt conclu. 

 

Voir également :   

 COUR D’APPEL DE VERSAILLES, 29 juin 2023 nº 23/00740 

– déséquilibre significatif – déchéance du terme – exigibilité – contrat de prêt –  

 

 

EXTRAITS 

 

Il est de droit ( 1ère Civ., 22 mars 2023, pourvoi nº 21-16.044) que crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, une clause d’un contrat de prêt immobilier qui prévoit la résiliation de plein droit du contrat après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d’une durée raisonnable. Une telle clause est abusive au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi nº 2008-776 du 4 août 2008. » 

 

ANALYSE 

 

La Cour d’appel de Versailles (CA) a été saisi à la suite d’un litige opposant la banque la Société générale et des époux emprunteurs dans le cadre d’un contrat de prêt immobilier.  

L’offre de contrat de crédit affecté prévoyait une clause de déchéance du terme permettant au professionnel d’exiger un remboursement anticipé et immédiat en cas de non-paiement à l’échéance sans possibilité de régularisation de l’impayé.  

 

Le Fonds Commun de Titrisation Castanea venant aux droits de la Société générale, qui poursuit le recouvrement d’une créance contenant prêt des deux sommes par la saisie immobilière du bien de ses débiteurs, a saisi le juge de l’exécution.  

Un jugement a été rendu le 6 janvier 2023 par le juge de l’exécution statuant en matière de saisie immobilière du tribunal judiciaire de Versailles qui a constaté la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière délivré à l’encontre des emprunteurs.  

Le Fonds Commun de Titrisation Castanea a interjeté appel de ce jugement.  

 

Les époux emprunteurs soutiennent que le créancier ne dispose pas d’une créance exigible mais surtout que la clause d’exigibilité anticipée contenue dans le prêt constitue une clause abusive. La Cour d’appel fait droit à leur demande. 

La clause d’exigibilité anticipée revêt en effet selon la Cour de toutes les caractéristiques d’une clause abusive, tant au regard du droit communautaire que du droit national, le déséquilibre significatif résultant d’une part du caractère discrétionnaire et unilatéral en faveur de la Société Générale, renforcé par les termes vagues employés, et d’autre part, de la sévérité de la clause, qui peut être mise en oeuvre à partir d’une seule mensualité, pour un prêt de 300 mensualités, et sans possibilité de régularisation de l’impayé. 

 

Conformément à la jurisprudence européenne (CJUE, 8 décembre 2022, aff. C-600/21) également mise en œuvre par la Cour de cassation dans la décision sur laquelle elle se fonde (Cass. civ. 1ère, 22 mars 2023, n° 21-16.476), la Cour d’appel déboute le Fonds Commun de Titrisation Castanea de ses demandes au motif que la clause de déchéance du terme dont la Société Générale a fait application constitue une clause abusive, qui doit pour ce motif être écartée. 

 

 

Voir également : Cour d’appel de Colmar, 11 décembre 2023, SA Eurotitrisation, RG n° 23/00903 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES, 4 MAI 2023, RG n°22-03023
– déséquilibre significatif – clause abusive – contrat de prêt – nullité – prescription  

 

EXTRAITS  

 

le fait qu’une personne morale n’ait, par principe, aucun but lucratif, n’est pas exclusif de l’exercice d’une activité professionnelle et l’application du droit de la consommation à une opération de crédit dépend non point de la personnalité de la personne physique ou morale qui s’engage mais de la destination contractuelle du prêt, fût-elle accessoire, comme cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass com, 04 novembre 2021, pourvoi n° 20-11099, Cass civ 1ère, 20 mai 2020, pourvoi n° 19-13461, publiés au bulletin). 

Au cas particulier, c’est à juste titre que la société Dexia se prévaut du fait que le contrat de prêt  destiné à financer des investissements de l’emprunteur est intervenu dans le cadre des activités professionnelles d’Arc en ciel et étaye son affirmation en évoquant le procès-verbal du Conseil d’administration d’Arc en ciel du 20 décembre 2007 selon lequel le prêt a pour objet de financer l’acquisition de l’immeuble de l’établissement construit par Nouveau Logis Provençal sur un terrain propriété de l’association, de financer les immobilisations immobilières de l’établissement Grande Linche, de consolider la trésorerie globale de l’association’ 

Par suite, la destination professionnelle de ce contrat de financement exclut l’application au litige du droit de la consommation. » 

 

ANALYSE  

 La Cour d’appel de Versailles (CA) a été saisie à la suite d’un litige opposant la société Dexia Crédit Local, ayant consenti à l’association de Parents et Amis d’Enfants Handicapés Chrysalide Arc en ciel un prêt au montant de 3.000.000 euros destiné à financer des investissements liés à ses activités de personnes en situation de handicap. Ce prêt était consenti pour une durée de 19 ans et 11 mois avec différents taux. Ce contrat relatif au remboursement anticipé du prêt possédait un article 9 dans lequel il est indiqué les méthodes de remboursement et stipulait qu’en cas de réponse négative ou à défaut de réponse dans un certain délai, le remboursement anticipé n’aurait pas lieu.

En raison de difficultés financières, l’association Arc en Ciel a procédé à un transfert partiel d’actif à l’Association Régionale pour l’Intégration qui comprenait le contrat de prêt litigieux avec l’accord de la société Dexia. La société. Le 13 février 2013, la société Dexia a été assignée devant le tribunal de grande instance de Nanterre par l’association ARI au motif que le prêt entrait dans la catégorie des emprunts qualifiés de “toxiques” et de ce fait il devait y avoir une annulation du contrat pour manquement de la banque à ses obligations. L’appelante soutenait également que la clause créait un déséquilibre significatif caractérisé par l’avantage disproportionné qu’elle procure à la société Dexia en regard du coût du manque à gagner enregistré à la date de réalisation. Par ordonnance rendue le 30 août 2019, le juge de la mise en état déboute l’association ARI de sa demande de calcul de l’indemnité de remboursement anticipé au motif que la procédure de l’article 9 du contrat de prêt n’a pas été respectée en ce que l’association n’a présenté aucune demande de remboursement.

Par ordonnance du 21 octobre 2020, le juge déboute l’association ARI de sa nouvelle demande de communication des pièces au motif que la demande de remboursement anticipé n’a pas été maintenue au jour de la fixation et condamne l’association ARI au versement d’une indemnité de procédure. Par un jugement contradictoire rendu le 04 février 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a déclaré irrecevable car prescrite l’action engagée par l’Association Régional pour l’Intégration. La société ARI fait appel et soutient l’annulation de ce contrat au motif que cette clause doit être qualifiée d’abusive du fait du déséquilibre significatif et que la qualité de non professionnel de l’association Arc en ciel lui permet de bénéficier des dispositions de l’article L132-1 du code de la consommation.

La Cour d’appel de Versailles, par un arrêt du 4 mai 2023, confirme les ordonnances rendues en 2019 et en 2020 et rejette la demande de nullité du contrat de prêt fondé sur l’existence d’une clause abusive et déclare donc irrecevable la demande formée par l’association Association Régionale d’Insertion à l’encontre de la société Dexia Crédit Local. Elle considère que l’association ne peut être qualifiée de non-professionnelle. A cet égard, l’article liminaire du code de la consommation définit le non-professionnel comme « toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles ». 

Se fondant sur la circonstance que le contrat de prêt était destiné à financer des investissements de l’association dans le cadre de ses activités professionnelles, la Cour d’appel en déduit la finalité professionnelle de l’emprunt et écarte par conséquent la qualité de non professionnel. L’association ne peut donc pas bénéficier, sur le fondement du code de la consommation, de la caractérisation du déséquilibre significatif affectant le prêt. 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE, 27 AVRIL 2023, RG 21/03683 

Contrat de prêt – TEG (Taux Effectif Global) – déséquilibre significatif   

 

EXTRAITS  

 

« Il en résulte que l’exclusion du calcul du TEG des effets de la période d’anticipation n’a pas créé, au préjudice des appelants, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, ne permettant pas à ces consommateurs (il s’agit d’un prêt immobilier destiné à l’acquisition de l’habitation des époux [C], éligibles en outre à un prêt à taux 0) d’apprécier le taux réel du TEG, ainsi que le montant réel du coût de leur acquisition, puisque ces montants dépendaient de l’engagement des travaux, obligation leur incombant». 

  

 

ANALYSE :  

 

La Cour d’appel de Grenoble a été saisie par deux consommateurs ayant contracté un prêt immobilier avec Crédit Immobilier de France Développement. La Cour était saisie d’une contestation sur le coût de l’assurance (CA Grenoble, 27 avril 2023, RG 21/03683). En outre, l’offre initiale comprenait un taux fixe suivi d’un taux variable, mais les époux ont constaté des anomalies dans les calculs d’intérêts et l’absence d’un TEG intégrant la période d’anticipation. Le tribunal de commerce a rejeté leur action comme prescrite, mais en appel, les époux demandent la recevabilité de leur action, l’annulation de la clause d’intérêts, la substitution du taux légal, la réévaluation des tableaux d’amortissement, la restitution des trop-perçus, la déchéance des intérêts conventionnels, des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté, et une indemnité de 6000 euros. 

 

La Cour d’appel de Grenoble n’a pas considéré l’exclusion du taux effectif global comme étant abusive. La Cour justifie l’exclusion de la période d’anticipation du calcul du TEG en raison de la spécificité du prêt concernant l’acquisition d’un bien avec des travaux. La Cour a souligné que les modalités de l’amortissement de la créance ne pouvaient être calculées à l’offre de prêt, car le coût de la période d’anticipation dépendait de l’action des emprunteurs.  

 

Ainsi, la Cour d’appel de Grenoble a estimé que cela n’a pas empêché les consommateurs d’apprécier le taux réel du TEG et le coût réel de leur acquisition, étant donné que ces montants dépendaient de l’engagement des travaux, une obligation incombant aux emprunteurs. 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE, 27 AVRIL 2023, RG 21/03683 

 

Assurance – contrat de prêt – obligation de loyauté – clause abusive 

 

EXTRAITS  

 

Il résulte de ces éléments d’une part qu’aucune clause abusive n’a été stipulée dans l’offre de prêt, alors que d’autre part, l’intimée n’a pas manqué à son obligation de loyauté dans la formation et l’exécution du contrat. La cour note que selon le tableau d’amortissement édité en 2019, le montant du taux d’intérêt a toujours varié à la baisse, au profit des appelants.  

 

ANALYSE : 

 

En l’espèce, la cour d’appel de Grenoble a été saisie par deux consommateurs qui ont contracté un contrat de prêt avec la société Crédit Immobilier de France Développement (CIFD). La Cour était saisie d’une contestation sur le calcul du TEG (CA Grenoble, 27 avril 2023, RG 21/03683) rendue sur la même décision). Elle était également saisie d’une contestation sur une assurance couvrant le bien financé prévue dans ce contrat, pour laquelle les consommateurs avaient assigné la société CIFD devant le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère à leur payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté contractuelle. 

 

La cour d’appel de Grenoble a considéré qu’une telle clause ne pouvait être considéré comme abusive. En effet, selon la cour d’appel le coût d’une assurance couvrant un bien financé n’est pas une condition subordonnant la conclusion du prêt, notamment lorsque le montant des primes d’assurances n’est pas inclus dans le calcul du taux effectif global au sens de l’article L313-1 (ancien) du Code de la consommation. Ainsi, aucune clause abusive n’a été stipulée dans l’offre de prêt.  

D’autre part, l’intimée n’a pas manqué à son obligation de loyauté dans la formation et l’exécution du contrat. La cour note que selon le tableau d’amortissement édité en 2019, le montant du taux d’intérêt a toujours varié à la baisse, au profit des appelants. En conséquence, le jugement déféré ne peut qu’être confirmé en ce qu’il a débouté les appelants de l’ensemble de leurs demandes, en ce qu’il les a condamnés au paiement des frais irrépétibles et des dépens. 

 

Voir également : Recommandation relative à une assurance complémentaire à un crédit

COUR D’APPEL DE PARIS, 19 Avril 2023, RG 19/19454 

– contrat de crédit immobilier – clause d’indexation – clause abusive – clause illicite –restitution 

 

EXTRAITS  

« c’est à juste titre que les emprunteurs font valoir que la conséquence du caractère non écrit d’un contrat dans son ensemble impose de considérer qu’il n’a jamais existé, que l’emprunteur doit être replacé dans la situation dans laquelle il aurait été en l’absence de telles clauses qui, si elles ont imposé un paiement devenu indu entraîne sa restitution et que ce droit à restitution, comparable, en droit interne, à celui issu des effets de l’annulation d’un contrat, naît de la reconnaissance du caractère abusif des clauses 

considérées. ». 

  

 

ANALYSE :  

 

La Cour d’appel de Paris (CA ci-après) a été saisie par deux consommateurs ayant conclu un contrat de crédit immobilier avec la société Union de Crédit pour le Bâtiment (ci-après UCB). Dans le contrat, il était stipulé des clauses prévoyant que la monnaie de compte était le franc suisse et la monnaie de paiement, l’euro. Le risque de change pesait sur les emprunteurs. Par assignation délivrée le 23 décembre 2015 à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de l’UCB, les consommateurs ont demandé la nullité de la stipulation conventionnelle d’intérêt ainsi que la restitution des intérêts indûment perçus et l’application de l’intérêt légal pour l’avenir au tribunal de grande instance de Paris. Le 4 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Paris a jugé les demandes irrecevables en raison de la prescription. Suite à un sursis à statuer ordonné par le conseiller de la mise en état le 4 janvier 2022 en attente d’arrêt à intervenir de la Cour de cassation (Cass. civ. 1ère, 24 mars 2022, 30 mars 2022 et 20 avril 2022), les consommateurs ont sollicité la constatation de la survenance de la cause du sursis le 20 avril 2022 et ont saisi la CA de Paris le 1er juillet 2022. 

 

La CA de Paris a considéré que les clauses litigieuses étaient abusives. Elle a ainsi décidé que ces clauses devaient donc être réputées non écrites. Conformément à la jurisprudence de la CJUE, elle a considéré que l’action en restitution pouvait être soumise à un délai de prescription de 5 ans à compter de la date où le titulaire a eu connaissance de ses droits et qu’en l’occurrence le délai n’était pas prescrit puisque celui-ci court à compter de la reconnaissance du caractère abusif des clauses.  

Pour fixer le montant des restitutions, la Cour juge que la conséquence du caractère non écrit d’un contrat dans son ensemble « impose de considérer qu’il n’a jamais existé, que l’emprunteur doit être replacé dans la situation dans laquelle il aurait été en l’absence de telles clauses qui, si elles ont imposé un paiement devenu indu entraîne sa restitution et que ce droit à restitution, comparable, en droit interne, à celui issu des effets de l’annulation d’un contrat, naît de la reconnaissance du caractère abusif des clauses considérées. ». Elle approuve la demande des emprunteurs considérant qu’il convient de restituer la contrevaleur en euros des sommes selon le taux de change applicable au moment de chacun des paiements 

 

 

Voir égal.  

Cass. civ. 1ère, 12 juillet 2023, n°22-17.030 

 CA Douai, 19 octobre 2023, RG 22/01024

COUR D’APPEL DE PARIS, 19 Avril 2023, RG 19/19454 

– contrat de crédit immobilier – clause d’indexation – clause abusive – clause illicite – 

 

EXTRAITS  

« S’il résulte de ces stipulations une énonciation, compréhensible sur les plans formel et grammatical, des conditions et modalités d’exécution du prêt, il n’en reste pas moins qu’au-delà de cette description de ses caractéristiques – se voulant exhaustive sur le plan technique au prix d’une prise de connaissance de longues stipulations non dénuées de complexité -, les effets de l’évolution de la parité entre l’euro et le franc suisse n’y sont pas mis en relief ni même explicités en eux-mêmes de telle sorte que l’emprunteur puisse envisager concrètement l’impact économique, potentiellement significatif, d’une évolution défavorable de la parité des monnaies sur ses obligations et évaluer, en toute connaissance de cause, le risque auquel il accepte de s’exposer, le cas échéant.». 

 

 

ANALYSE   

 

La Cour d’appel de Paris (CA ci-après) a été saisi par deux consommateurs ayant conclu un contrat de crédit immobilier avec la société Union de Crédit pour le Bâtiment (ci-après UCB). Dans le contrait, il était stipulé des clauses prévoyant que la monnaie de compte était le franc suisse et que la monnaie de paiement l’euro. Le risque de change pesait sur les emprunteurs. Par assignation délivrée le 23 décembre 2015 à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de l’UCB, les consommateurs ont demandé la nullité de la stipulation conventionnelle d’intérêt ainsi que la restitution des intérêts indûment perçus et l’application de l’intérêt légal pour l’avenir au tribunal de grande instance de Paris. Le 4 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Paris a jugé les demandes irrecevables en raison de la prescription. Suite à un sursis à statuer ordonné par le conseiller de la mise en état le 4 janvier 2022 en attente d’arrêt à intervenir de la Cour de cassation, les consommateurs ont sollicité la constatation de la survenance de la cause du sursis le 20 avril 2022 et ont saisi la CA de Paris le 1er juillet 2022.  

 

 

 

La CA de Paris a considéré que les clauses portaient sur l’objet principal du contrat. Aussi, pour considérer qu’elles étaient abusives, il fallait d’abord se fonder, comme elle l’a fait, sur les anciens articles L.131-1 du Code de la consommation, L.132-1 alinéa 7 du Code de la consommation ainsi que l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 tel qu’interprété par les arrêts C-609/19 et C-288/20 du 10 juin 2021 de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE ci-après), et décider que les clauses contestées n’étaient pas claires et compréhensibles. En effet, à la lecture des clauses litigieuses, elle affirme que : « S’il résulte de ces stipulations une énonciation, compréhensible sur les plans formel et grammatical, des conditions et modalités d’exécution du prêt, il n’en reste pas moins qu’au-delà de cette description de ses caractéristiques – se voulant exhaustive sur le plan technique au prix d’une prise de connaissance de longues stipulations non dénuées de complexité -, les effets de l’évolution de la parité entre l’euro et le franc suisse n’y sont pas mis en relief ni même explicités en eux-mêmes de telle sorte que l’emprunteur puisse envisager concrètement l’impact économique, potentiellement significatif, d’une évolution défavorable de la parité des monnaies sur ses obligations et évaluer, en toute connaissance de cause, le risque auquel il accepte de s’exposer, le cas échéant. ».  

 

 Ainsi, elle en a déduit qu’il y’avait lieu d’examiner si les clauses contestées avaient pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les obligations des parties au contrat au détriment de l’emprunteur. La CA de Paris s’est livrée à cet examen à la lumière des arrêts C-609/19 et C-288/20 du 10 juin 2021 de la CJUE. Elle a conclu que la banque ne pouvait s’attendre à ce que les consommateurs puissent accepter de contracter s’ils avaient été « normalement informées du fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et en mesure d’évaluer les conséquences économiques négatives potentielles. » Autrement dit, elle a déduit que les droits et obligations des parties étaient déséquilibrées au détriment des consommateurs. Les clauses étaient donc abusives.  

 Voir également :

CJUE 10 juin 2021 C-609/19
CJUE 10 juin 2021 C-776/19 à C-782/19