CJUE, 8 juin 2023, aff. C-455/21 

Contrat entre professionnel et consommateur – Contrat d’adhésion – Notion de consommateur – Avantage financier – Clause abusive – Directive 93/13/CEE –  

 

EXTRAIT  

« (…) relève de la notion de « consommateur », au sens de cette disposition, une personne physique qui adhère à un système mis en œuvre par une société commerciale et permettant, notamment, de bénéficier de certains avantages financiers dans le cadre de l’acquisition, par cette personne physique ou par d’autres personnes participant à ce système à la suite de sa recommandation, de biens et de services auprès des partenaires commerciaux de cette société, lorsque ladite personne physique agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ».  

 

 

ANALYSE 

A l’occasion d’un contentieux survenu dans le cadre d’un contrat d’adhésion, la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue préciser la notion de consommateur au sens de la législation sur les clauses abusives.  

La Cour était saisie d’un contentieux relatif à un système mis en œuvre par une société commerciale et permettant, notamment, de bénéficier de certains avantages financiers dans le cadre de l’acquisition, par une personne physique ou par d’autres personnes participant à ce système à la suite de sa recommandation, de biens et de services auprès des partenaires commerciaux de cette société, 

Pour ce faire, la Cour commence par rappeler le principe de loi applicable pour les contrats de consommation qui est celle de la résidence habituelle du consommateur. Elle rappelle également que selon une disposition impérative les clauses abusives  ne lient pas les consommateurs (voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2022, Ibercaja Banco, C-600/19, EU :C :2022 :394 point 36 . Les règles uniformes concernant les clauses abusives doivent s’appliquer à « tout contrat » conclu entre un professionnel et un consommateur, tels que définis à l’article 2, sous b) et c), de la directive 93/13/CEE (arrêt du 27 octobre 2022, C-485/21, EU:C:2022:839, point 22). La notion de consommateur a un caractère objectif et est indépendante des connaissances concrètes que la personne concernée peut avoir ou des informations dont cette personne dispose réellement (arrêt du 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C-590/17, EU:C:2019:232, point 24).  

Par conséquent, dans le cas d’une personne physique qui adhère à un système tel que celui en cause au principal, il appartient au juge national d’établir, en prenant en considération également la nature des services offerts par le professionnel concerné, si cette personne physique a agi dans le cadre de son activité professionnelle ou si elle a agi à des fins étrangères à cette activité.  

En d’autres termes, si la personne a adhéré à des fins personnelles pour bénéficier des avantages commerciaux en question, elle est un consommateur et non un professionnel. 

CJUE, 8 juin 2023, aff. C-570/21 – I.S and KS c. YYY 

 

Contrat entre professionnel et consommateur – Contrat à double finalité – Notion de “consommateur” – Critères – Protection des consommateurs   

  

EXTRAIT  

L’article 2, sous b), de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs,  

doit être interprété en ce sens que :  

relève de la notion de « consommateur », au sens de cette disposition, une personne ayant conclu un contrat de crédit destiné à un usage en partie lié à son activité professionnelle et en partie étranger à cette activité, conjointement avec un autre emprunteur n’ayant pas agi dans le cadre de son activité professionnelle, lorsque la finalité professionnelle est si limitée qu’elle n’est pas prédominante dans le contexte global de ce contrat.  

 

L’article 2, sous b), de la directive 93/13  

doit être interprété en ce sens que :  

afin de déterminer si une personne relève de la notion de « consommateur », au sens de cette disposition, et, plus particulièrement, si la finalité professionnelle d’un contrat de crédit conclu par cette personne est si limitée qu’elle n’est pas prédominante dans le contexte global de ce contrat, la juridiction de renvoi est tenue de prendre en considération toutes les circonstances pertinentes entourant ce contrat, tant quantitatives que qualitatives, telles que, notamment, la répartition du capital emprunté entre une activité professionnelle et une activité extraprofessionnelle ainsi que, en cas de pluralité d’emprunteurs, le fait qu’un seul d’entre eux poursuit une finalité professionnelle ou que le prêteur a subordonné l’octroi d’un crédit destiné à des fins de consommation à une affectation partielle du montant emprunté au remboursement de dettes liées à une activité professionnelle.  

»  

  

ANALYSE   

 La CJUE était saisie du point de savoir su peut être qualifiée de « consommateur » une personne ayant conclu un contrat de crédit destiné à un usage en partie lié à son activité professionnelle et en partie étranger à cette activité, conjointement avec un autre emprunteur n’ayant pas agi dans le cadre de son activité professionnelle, lorsque le lien existant entre ce contrat et l’activité professionnelle de cette personne est non pas marginal au point d’avoir un rôle négligeable dans le contexte global dudit contrat, mais est à ce point limité qu’il n’est pas prédominant dans ce contexte. 

 

La CJUE commence par rappeler qu’elle a eu à traiter de cette question dans le cadre de l’interprétation des règles de compétence en matière de contrats conclus avec les consommateurs prévues par la convention de Bruxelles. Elle rappelle qu’elle avait jugé que qu’une personne qui a conclu un contrat pour un usage se rapportant en partie à son activité professionnelle, et n’étant donc qu’en partie seulement étranger à celle-ci, n’est pas en droit de se prévaloir du bénéfice des règles de compétence spécifiques en matière de contrats conclus avec les consommateurs prévues par la convention de Bruxelles, sauf si l’usage professionnel est marginal au point d’avoir un rôle négligeable dans le contexte global de l’opération en cause (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2005, Gruber, C464/01, EU:C:2005:32, points 39 et 54). 

 

Cependant, la présente affaire est l’occasion pour la CJUE d’indique que l’article 2, sous b), de la directive 93/13 n’est pas une disposition devant faire l’objet d’une interprétation stricte et que compte tenu de la ratio legis de cette directive visant à protéger les consommateurs en cas de clauses contractuelles abusives, l’interprétation stricte de la notion de « consommateur » retenue dans l’arrêt Gruber, aux fins de la détermination de la portée des règles de compétence dérogatoires prévues aux articles 13 à 15 de la convention de Bruxelles en cas de contrat à double finalité, ne saurait être étendue, par analogie, à la notion de « consommateur », au sens de l’article 2, sous b), de la directive 93/13. 

 

Elle en déduit que relève de la notion de « consommateur », au sens de cette disposition, une personne ayant conclu un contrat de crédit destiné à un usage en partie lié à son activité professionnelle et en partie étranger à cette activité, conjointement avec un autre emprunteur n’ayant pas agi dans le cadre de son activité professionnelle, lorsque la finalité professionnelle est si limitée qu’elle n’est pas prédominante dans le contexte global de ce contrat. 

 

En d’autres termes, il suffit que la finalité professionnelle ne soit pas prédominante pour que la personne puisse être qualifiée de consommateur. Il n’est pas nécessaire qu’elle soit marginale.  

 

La CJUE précise ensuite les critères pour déterminer, dans un contrat de prêt « mixte » (lorsque les fonds alloués sont partiellement affectés à une activité professionnelle et une autre partie à des fins de consommation étrangères à une activité professionnelle), si la finalité professionnelle n’est pas prédominante.  

 

Elle indique que le juge est tenu de prendre en considération toutes les circonstances pertinentes entourant ce contrat, tant quantitatives que qualitatives. La Cour précise que c’est le cas de la répartition du capital emprunté entre une activité professionnelle et une activité extraprofessionnelle ainsi que, en cas de pluralité d’emprunteurs, le fait qu’un seul d’entre eux poursuit une finalité professionnelle ou que le prêteur a subordonné l’octroi d’un crédit destiné à des fins de consommation à une affectation partielle du montant emprunté au remboursement de dettes liées à une activité professionnelle (pt 57). 

 

Elle ajoute que ces critères ne sont ni exhaustifs ni exclusifs, de sorte qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’examiner l’ensemble des circonstances entourant le contrat en cause au principal et d’apprécier, sur la base des éléments de preuve objectifs dont il dispose, dans quelle mesure la finalité professionnelle ou non professionnelle de ce contrat est prédominante dans le contexte global de ce dernier (pt 58). 

CJUE, 4 mai 2023, aff. C-200/21 BRD Groupe Société Générale SA, Next Capital Solutions Ltd

Mots-clés : Contrat entre professionnel et consommateur – Juge de l’exécution – Délai d’opposition à l’exécution forcée – Garantie financière – clauses abusive 

  

EXTRAIT   

  

« La directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens que : elle s’oppose à une disposition de droit national qui ne permet pas au juge de l’exécution, saisi, en dehors du délai de quinze jours imparti par cette disposition, d’une opposition à l’exécution forcée d’un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel, formant titre exécutoire, d’apprécier, d’office ou à la demande du consommateur, le caractère abusif des clauses de ce contrat, alors que ce consommateur dispose, par ailleurs, d’un recours au fond qui lui permet de demander au juge saisi de ce recours de procéder à un tel contrôle et d’ordonner la suspension de l’exécution forcée jusqu’à l’issue dudit recours, conformément à une autre disposition de ce droit national, dès lors que cette suspension n’est possible que moyennant le versement d’une garantie dont le montant est susceptible de dissuader le consommateur d’introduire et de maintenir un tel recours, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. À défaut de pouvoir procéder à une interprétation et à une application de la législation nationale conformes aux exigences de cette directive, le juge national saisi d’une opposition à l’exécution forcée d’un tel contrat a l’obligation d’examiner d’office si les clauses de celui-ci présentent un caractère abusif, en laissant au besoin inappliquées toutes dispositions nationales qui s’opposent à un tel examen. »  

  

ANALYSE   

  

En vertu de l’article 6 paragraphe 1 et de l’article 7 paragraphe 1 de la directive 93/13, les clauses abusives figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur ne lient pas les consommateurs ; les Etats membres veillent à ce que les consommateurs disposent de moyens adéquats et efficaces pour faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats qu’ils concluent avec les professionnels.  

 

La CJUE veille à l’effectivité de cette disposition. 

 

Or, la Cour se demande en l’espèce si un texte national prévoyant un délai de quinze jours pour soulever le caractère abusif d’une clause, dans le cadre d’une procédure d’opposition à l’exécution forcée d’un contrat, est conforme ou pas au principe d’effectivité posé par la directive 93/13.  

Cette question se pose pour deux raisons principales. Premièrement, selon la jurisprudence de la CJUE, l’action permettant de faire constater le caractère abusif d’une clause n’est soumise à aucun délai en vertu de la directive 93/13. Deuxièmement, le droit national impliqué dans cette affaire (droit roumain en l’occurrence) permet à la partie intéressée de soulever le caractère abusif d’une clause et de demander ainsi la suspension de l’exécution forcée du contrat dans le cadre d’un recours au fond, non-soumis au délai de forclusion applicable en matière d’opposition à l’exécution forcée.       
 

La Cour avait déjà affirmé qu’une disposition nationale empêchant un consommateur de contester le caractère abusif d’une clause dans le cadre d’une opposition à l’exécution forcée du contrat conclu, au motif que le délai de forclusion imparti serait écoulé, est contraire à la directive 93/13  (voir en ce sens ordonnance du 6 novembre 2019, BNP Paribas Personal Finance SA Paris Sucursala Bucureşti et Secapital, C-75/19, point 34). Dans cette affaire qui concernait aussi le droit roumain, la Cour avait précisé qu’une telle règle demeure contraire à la directive 93/13, quand bien même le droit national concerné permettrait au consommateur de contester les clauses abusives du contrat conclu dans le cadre d’un recours au fond soumis à aucun délai particulier. En effet, la solution rendue au fond est sans effet sur celle résultant de la procédure d’exécution forcée, qui peut s’imposer au consommateur avant l’issue du recours engagé au fond.  

 

En l’espèce, la Cour se demande toutefois si la solution de 2019 évoquée ci-dessus est applicable ou pas dans l’hypothèse où le juge saisi du recours au fond serait compétent pour suspendre l’exécution forcée du contrat conclu.  

Etait en jeu une disposition nationale qui subordonnait le recours au fond à la constitution préalable d’une garantie financière. La Cour, rappelant que le montant de frais de justice est susceptible de dissuader les consommateurs de contester les clauses abusives (voir en ce sens arrêt du 17 mai 2022, Impuls Leasing România C-725/19 point 60) énonce que  la juridiction nationale de renvoi doit vérifier si le montant de la garantie financière exigée est susceptible ou pas de décourager les consommateurs d’engager une action au fond. 

 

La Cour précise en outre qu’à défaut de pouvoir procéder à une interprétation et à une application de la législation nationale conformes aux exigences de cette directive, le juge national saisi d’une opposition à l’exécution forcée d’un contrat a l’obligation d’examiner d’office si les clauses de celui-ci présentent un caractère abusif. Dès lors si la disposition nationale empêche l’examen du caractère abusif des clauses, elle doit être purement et simplement écartée, (voir en ce sens arrêt du 7 novembre 2019, Profi Credit Polska, C-419/18 et C-483/18, point 76).

CJUE, 20 avril 2023, Ocidental – Companhia Portuguesa de Seguros de Vida, C-263/22 

Assurance de groupe – transparence – clause d’exclusion – faute du preneur d’assurance – clause portant sur l’objet du contrat – connaissance préalable du contenu 

 

EXTRAITS : 

« L’article 3, paragraphe 1, et les articles 4 à 6 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens que : lorsqu’une clause d’un contrat d’assurance relative à l’exclusion ou à la limitation de la couverture du risque assuré, dont le consommateur concerné n’a pas pu prendre connaissance avant la conclusion de ce contrat, est qualifiée d’abusive par le juge national, ce juge est tenu d’écarter l’application de cette clause afin qu’elle ne produise pas d’effets contraignants à l’égard de ce consommateur ». 

 

ANALYSE : 

Un couple conclut un contrat de prêt auprès d’un établissement bancaire. A cette fin, il adhère à un contrat d’assurance de groupe auprès de la banque (le preneur de l’assurance) pour couvrir le risque de d’incapacité permanente de l’adhérent par un tiers assureur. 

 

Durant l’exécution du contrat de prêt, l’adhérent subit un sinistre (une incapacité permanente) et le déclare à l’assureur qui dénie sa garantie.  

 

C’est ainsi que les emprunteurs ont saisi la justice aux fins d’obtenir le remboursement des échéances du prêt payées par eux à compter de la date de l’incapacité permanente et le montant du prêt restant dû à compter de l’incapacité constatée. 

 

La Cour de justice se prononce sur les conséquences à l’égard du consommateur d’une clause d’exclusion dont ce dernier n’aurait pas pris connaissance avant la conclusion du contrat (CJUE, 20 avril 2023, Ocidental – Companhia Portuguesa de Seguros de Vida, C-263/22). 

 

Par cette question, la Cour de justice s’interroge sur le fait de savoir si « une clause d’un contrat d’assurance relative à l’exclusion ou à la limitation de la couverture du risque assuré, dont le consommateur n’a pas pu prendre connaissance avant la conclusion de ce contrat, peut être opposée à ce consommateur, et cela même lorsque le preneur d’assurance peut être tenu responsable d’une telle absence de prise de connaissance et bien qu’une telle responsabilité ne place pas ledit consommateur dans la même situation que celle qui aurait été la sienne s’il avait bénéficié de cette couverture » (Pt 37). 

 

Puisque la Cour de justice ne peut que donner des indications sur la manière dont la juridiction de renvoi doit apprécier le caractère abusif d’une clause (CJUE, 3 septembre 2020, Profi Credit Polska, C84/19, C222/19 et C252/19, point 91), elle rappelle en premier lieu la nécessite de transparence des clauses du contrat conformément à sa jurisprudence antérieure (CJUE, 12 janvier 2023, D.V. (Honoraires d’avocat – Principe du tarif horaire), C395/21, point 47) comme élément à prendre en compte dans l’appréciation du caractère abusif d’une clause.  

 

En second lieu, elle précise que l’appréciation du déséquilibre nécessite d’abord de s’interroger sur le respect du principe de bonne foi, avant de s’interroger sur le déséquilibre significatif qui découle de la disposition contractuelle pour le consommateur (CJUE, 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank, C621/17, point 49). 

 

En outre, le juge doit s’interroger sur toutes les circonstances qui entourent le contrat.  

 

Pour la Cour de justice, l’exigence de bonne foi suppose de « tenir compte de la force des positions respectives de négociation des parties et de la question de savoir si le consommateur a été encouragé par quelque moyen à donner son accord à la clause concernée » (pt 43). 

 

Le juge national devra donc, dans le cadre de son contrôle, s’intéresser au fait que l’adhérent se soit vu contraint de souscrire un contrat d’assurance, sans avoir été informé du contenu dudit contrat et dont l’adhésion a été remplie par l’employé de la banque. 

 

Selon la Cour de justice, il conviendra aussi de « vérifier si le professionnel, en traitant de façon loyale et équitable avec le consommateur, pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce dernier accepte cette clause à la suite d’une négociation individuelle » (CJUE, 3 septembre 2020, Profi Credit Polska, C84/19, C222/19 et C252/19, point 93, et CJUE, 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C776/19 à C782/19, point 98). 

 

Les circonstances qui entourent la conclusion du contrat sont relevées par la Cour de justice dans la mesure où « ledit consommateur peut donc se voir confronté à une situation dans laquelle, eu égard à une perte de revenus résultant de son incapacité permanente, il lui est difficile voire impossible de rembourser ces échéances, alors que c’est précisément contre ce risque qu’il a voulu s’assurer par l’adhésion à un contrat d’assurance, tel que celui en cause au principal » (pt 49)  

 

Le fait de ne pas informer le consommateur fait donc peser sur lui le risque qui découle de l’incapacité, au moins en partie.  

 

La Cour rappelle que la sanction du caractère abusif de la clause est  est l’absence d’effet contraignant de cette clause pour le consommateur. Concrètement la clause d’exclusion est inopposable au consommateur puisqu’il s’agit « de rétablir la situation en droit et en fait qui aurait été celle du consommateur en l’absence de cette clause abusive [arrêt du 12 janvier 2023, D.V. (Honoraires d’avocat – Principe du tarif horaire), C395/21, EU:C:2023:14, point 54 et jurisprudence citée] ». La responsabilité de la banque dans le défaut de communication d’information au consommateur ne saurait avoir pour objet ou pour effet de rendre opposable la clause abusive à son égard. Le non-respect des obligations de la banque en matière d’information se résout par le biais de la responsabilité civile à l’égard de l’assureur et non dans les rapports avec le consommateur.  

 

Le juge national est donc tenu d’écarter l’application de la clause abusive à l’égard du consommateur.  

 

Voir également : 

CJUE, 23 avril 2015,  Van hove, C-96/14
CJUE, 20 avril 2023, Ocidental – Companhia Portuguesa de Seguros de Vida, C-263/22 

CJUE, 20 avril 2023, Ocidental – Companhia Portuguesa de Seguros de Vida, C-263/22 

Assurance de groupe – transparence – clause d’exclusion – faute du preneur d’assurance – clause portant sur l’objet du contrat – connaissance préalable du contenu 

 

EXTRAITS : 

« L’article 4, paragraphe 2, et l’article 5 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du vingtième considérant de cette directive, doivent être interprétés en ce sens que : un consommateur doit toujours avoir la possibilité de prendre connaissance, avant la conclusion d’un contrat, de toutes les clauses que ce dernier contient ». 

 

ANALYSE : 

Un couple conclut un contrat de prêt auprès d’un établissement bancaire. A cette fin, il adhère à un contrat d’assurance de groupe auprès de la banque (le preneur de l’assurance) pour couvrir le risque de d’incapacité permanente de l’adhérent par un tiers assureur. 

 

Durant l’exécution du contrat de prêt, l’adhérent subit un sinistre (une incapacité permanente) et le déclare à l’assureur qui dénie sa garantie.  

 

C’est ainsi que les emprunteurs ont saisi la justice aux fins d’obtenir le remboursement des échéances du prêt payées par eux à compter de la date de l’incapacité permanente et le montant du prêt restant dû à compter de l’incapacité constatée. 

 

La Cour de justice statue en premier lieu sur la question de savoir si le consommateur adhérent à une assurance emprunteur de groupe proposée par l’établissement prêteur doit toujours avoir la possibilité de prendre connaissance des clauses du contrat avant sa conclusion.  

 

La Cour rappelle que l’exigence de transparence ne se limite pas au caractère compréhensible sur le plan formel et grammatical, mais doit s’interpréter de manière extensive, de sorte « qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret d’une telle clause et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, de cette clause sur ses obligations » (CJUE, 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C609/19, points 42 et 43, et CJUE, 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C776/19 à C782/19, points 63 et 64). 

 

Concernant le moment de la transmission de ces informations, il est fondamental que le consommateur ait connaissance des conditions contractuelles avant la conclusion du contrat (CJUE, 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C154/15, C307/15 et C308/15, point 50, et CJUE, 12 janvier 2023, D.V. (Honoraires d’avocat – Principe du tarif horaire), C395/21, point 39). 

 

Ainsi, le contrôle du juge en matière de contrat d’assurance de groupe souscrite par une banque au bénéfice des emprunteurs induit une vigilance particulière et la transparence nécessite « l’exposé des particularités du mécanisme de prise en charge des échéances dues au prêteur en cas d’incapacité totale de l’emprunteur, de sorte que ce consommateur soit mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui » (CJUE, 23 avril 2015, Van Hove, C96/14, points 41 et 48). 

 

La clause d’exclusion du risque d’incapacité résultant de maladies antérieures à la conclusion du contrat d’assurance de groupe auprès du prêteur n’est pas claire et compréhensible si l’adhérent ne peut évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques et financières qui en découlent pour lui. Cette information est d’autant plus essentielle pour le consommateur qu’il ne saurait être exigé de ce dernier, « lors de la conclusion de contrats liés, la même vigilance quant à l’étendue des risques couverts par ce contrat d’assurance que s’il avait conclu séparément ce dernier et ce contrat de prêt » (CJUE, 20 avr. 2023, aff. C-263/22, Ocidental – Companhia Portuguesa de Seguros de Vida, pt 28)/ 

 

La nécessité de transmettre les clauses du contrat avant la conclusion de celui-ci découle clairement du considérant 20 de la directive 93/13, ce qui permet à la Cour d’affirmer que « le législateur de l’Union européenne a souligné l’intérêt d’une prise de connaissance préalable de toutes les clauses d’un contrat afin de permettre au consommateur de décider, en connaissance de cause, s’il souhaite être lié par ces clauses » (Pt 31). 

 

De plus, l’existence d’une législation spéciale relative aux assurances de groupe n’est pas de nature à remettre en cause l’interprétation de la directive puisqu’elle s’applique en raison de la qualité du contractant et non en raison de la nature du contrat (CJUE, 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C590/17, point 23 et Ord., 10 juin 2021, X Bank, C198/20, non publiée, point 24). 

 

La Cour précise notamment le principe d’interprétation conforme qui justifie de garantir la pleine effectivité de la directive afin d’aboutir à une solution en accord avec la finalité poursuivie par celle-ci (CJUE, 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C590/17, point 23). 

 

Le consommateur doit donc toujours pouvoir prendre connaissance du contrat avant sa conclusion.  

 

 

 

 

Voir également : 

CJUE, 9ème chambre, 21 mars 2024, aff. C-714/22 – Profi Credit Bulgaria EOOD contre T.I.T. 

  

Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Crédit à la consommation – Objet principal du contrat – Services accessoires à un contrat de crédit – Possibilité d’appréciation du caractère abusif 

 

  

EXTRAIT  

« […] L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses portant sur des services accessoires à un contrat de crédit à la consommation, qui accordent au consommateur achetant ces services une priorité dans l’examen de sa demande de crédit et la mise à disposition de la somme empruntée ainsi que la possibilité de reporter le remboursement des mensualités ou d’en réduire le montant, ne relèvent pas, en principe, de l’objet principal de ce contrat, au sens de cette disposition, et n’échappent donc pas à l’appréciation de leur caractère abusif […] » 

 

  

ANALYSE   

  

 

En l’espèce, la quatrième question de la juridiction de renvoi concerne la question de savoir si des dispositions régissant des services accessoires à un contrat de crédit à la consommation, peuvent être considérées comme faisant partie de l’essence même de ce contrat, au sens de ladite disposition, et par conséquent, échapper à l’examen de leur caractère abusif. 

  

À titre liminaire, la Cour rappelle que, étant intimement liées au contrat principal, les clauses concernant des services accessoires ne peuvent pas être considérés comme autonomes à ce contrat. Ces clauses doivent être examinées dans le contexte global du contrat, qu’elles soient inclues dans le contrant principal ou qu’elles figurent dans une convention accessoire. 

 

La Cour rappelle que les clauses considérées comme l’objet principal du contrat sont celles qui définissent les éléments essentiels du contrat, le caractérisant en tant que tel. Les clauses relevant de cette disposition échappent à l’examen de leur caractère abusif, uniquement si elles sont rédigées de manière claire et compréhensible par le professionnel (arrêt du 5 juin 2019, GT, C-38/17, EU:C:2019:461, point 31). 

  

La Cour confirme que les éléments essentiels d’un contrat de crédit incluent l’engagement du prêteur à mettre à disposition une somme d’argent, tandis que l’emprunteur s’engage à rembourser cette somme avec des intérêts selon les échéances prévues (arrêt du 16 mars 2023, Caixabank (Commission douverture du prêt), C-565/21, EU:C:2023:212, point 18). 

  

La Cour considère que les services accessoires, tels que ceux offrant au consommateur une priorité dans le traitement de sa demande de crédit ou la possibilité de reporter ou réduire les paiements mensuels, ne peuvent pas être considérés comme des prestations essentielles du contrat de crédit. L’inclusion de divers types de frais dans le coût global d’un crédit à la consommation ne constitue pas un critère décisif pour déterminer si ces frais font partie des prestations fondamentales d’un contrat de crédit (arrêt du 3 septembre 2020, Profi Credit Polska SA e.a. contre QJ e.a., C-84/19, C-222/19 et C-252/19, EU:C:2020:631, point 69). 

  

Dans ces conditions, l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses concernant des services accessoires ne peuvent pas être considérés comme faisant partie de l’objet principal du contrat de crédit. Par conséquent, ces clauses ne bénéficient pas de l’exclusion prévue par l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 et peuvent donc être soumises à l’appréciation de leur caractère abusif. 

   

Voir également :  

   CJUE, 16 mars 2023, Caixabank (Commission d’ouverture du prêt), C-565/21. 

CJUE, 16 mars 2023, aff. C-565/21 – Caixabank SA c/ X 

  

– Contrat de crédit – Commission d’ouverture – Déséquilibre significatif – 

  

EXTRAIT  

  

« L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que : il ne s’oppose pas à une jurisprudence nationale qui considère qu’une clause contractuelle prévoyant, conformément à la réglementation nationale pertinente, le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture destinée à rémunérer les services liés à l’examen, à la constitution et au traitement personnalisé d’une demande de prêt ou de crédit hypothécaire, peut, le cas échéant, ne pas créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat, à condition que l’existence éventuelle d’un tel déséquilibre fasse l’objet d’un contrôle effectif de la part du juge compétent, conformément aux critères issus de la jurisprudence de la Cour. » 

 

 

ANALYSE   

  

En vertu de l’article 3 § 1 de la directive 93/13, « une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat ». 

Or, la règle susvisée permet-elle à une jurisprudence nationale de considérer qu’une clause prévoyant le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture ne crée pas, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ? Telle est l’une des questions posées à la Cour dans cette affaire, qui a également tranché le point de savoir si la commmission d’ouverture porte sur l’objet principal du contrat (La clause prévoyant le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture dans un contrat de crédit ne relève pas de l’objet principal du contrat) une fois qu’elle sera en ligne) et comment doit s’apprécier le défaut de clarté d’une prestation accessoire (Le caractère compréhensible d’une clause de commission d’ouverture suppose que l’emprunteur soit mis en mesure d’en évaluer les conséquences économiques).  

La Cour rappelle que l’existence d’un déséquilibre significatif ne s’apprécie pas uniquement du point de vue économique, par une comparaison entre le montant total de l’opération contractuelle et les coûts pesant sur le consommateur du fait de la clause litigieuse. Le déséquilibre peut résulter aussi d’une atteinte suffisamment grave à la situation juridique du consommateur (voir en ce sens arrêt du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank, C-621/17, point 51).  

Le contrôle du juge en la matière doit être concret : il doit tenir compte par exemple de la nature des biens ou services relevant de l’objet du contrat et de toutes les circonstances entourant sa conclusion (voir en ce sens arrêt du 16 juillet 2020, Caixabank et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, C-224/19 et C-259/19, point 76). La Cour ajoute que ce contrôle concret du juge national doit s’appliquer également à la clause du contrat de crédit prévoyant le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture, pour savoir si elle entraîne ou pas un déséquilibre significatif au détriment du consommateur. Au regard des documents contractuels remis au consommateur, le juge national doit vérifier notamment si les services fournis en contrepartie du paiement de cette commission relèvent réellement de l’examen, de la constitution et du traitement personnalisé de la demande de crédit ; il doit également vérifier s’il y a ou pas une disproportion entre la commission payée par le consommateur et le montant total de l’emprunt souscrit (voir en ce sens le point 59).  

C’est seulement après cette évaluation préalable que la jurisprudence nationale peut considérer qu’une clause prévoyant une commission d’ouverture ne crée pas de déséquilibre significatif au détriment du consommateur, et donc qu’elle n’est pas abusive. N’est pas admissible une jurisprudence nationale énonçant qu’une telle clause est insusceptible d’être abusive du seul fait qu’elle a pour objet des services inhérents à l’activité du prêteur, sans appréciation concrète.  

La jurisprudence nationale peut donc considérer qu’une clause d’un contrat de crédit prévoyant le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture n’est pas abusive, à condition d’avoir effectué au préalable une évaluation concrète de cette clause.   

 

 

Voir également :  

CJUE, 16 mars 2023, C-565/21 – Caixabank  

Prêts hypothécaires – Commission d’ouverture du prêt – Caractère clair et compréhensible – Prestations accessoires 

EXTRAITS : 

« L’article 5 de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que aux fins de l’appréciation du caractère clair et compréhensible d’une clause contractuelle prévoyant le paiement par l’emprunteur d’une commission d’ouverture, le juge compétent est tenu de vérifier, au regard de l’ensemble des éléments de fait pertinents, que l’emprunteur a bien été mis en mesure d’évaluer les conséquences économiques qui en découlent pour lui, de comprendre la nature des services fournis en contrepartie des frais prévus par ladite clause et de vérifier qu’il n’existe pas de chevauchement entre les différents frais prévus par le contrat ou entre les services que ces derniers rémunèrent. » 

 

 

ANALYSE : 

Par le présent arrêt, la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue préciser les différents éléments que les juges nationaux doivent vérifier pour apprécier le caractère clair et compréhensible d’une clause de commission d’ouverture contenue dans un contrat de crédit hypothécaire.  

 

Pour ce faire, la Cour commence par rappeler que l’article 5 de la directive 93/13 pose une exigence générale de transparence selon laquelle les clauses contractuelles doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible (pt.28). Elle énonce qu’il s’agit de la même exigence de transparence que celle visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13. Les deux exigences ayant la même « portée », il en résulte que l’interprétation extensive du principe de transparence des clauses s’applique de la même façon aux clauses portant sur l’objet principal du contrat (art. 4, paragraphe 2 de la dorective93/13) et à aux autres clauses (art. 5 de la directive 93/13). 

 

Par conséquent, en application de cette interprétation extensive du principe de transparence, une clause de commission d’ouverture ne peut être considérée comme claire et compréhensible si elle ne l’est que d’un point de vue grammatical et formel (pt.30) (CJUE, 16 juillet 2020, C-224/19 et C-259/19, Caixabank et Banco Bilbao Vizacaya Argentaria).  

 

La Cour considère ainsi que pour satisfaire à l’exigence de transparence susmentionnée, une clause de commission d’ouverture doit être intelligible pour le consommateur d’un point de vue grammatical mais il faut aussi que le contrat expose de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel se réfère ladite clause ainsi que, le cas échéant, la relation entre ce mécanisme et celui prescrit par d’autres clauses. Il faut ainsi vérifier que le consommateur a bien été mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques découlant d’une clause de commission d’ouverture (pt. 31) (CJUE, 16 juillet 2020, C-224/19 et C-259/19, Caixabank et Banco Bilbao Vizacaya Argentaria).  

 

La Cour appuie notamment sa position en rappelant sa jurisprudence selon laquelle il importe que la nature des services fournis puisse être raisonnablement compris ou déduite à partir du contrat considéré dans sa globalité et que le consommateur puisse vérifier qu’il n’existe pas de chevauchement entre les différents frais ou entre les services que ces derniers rémunèrent (pt. 32) (CJUE, 3 octobre 2019, C-621/17, Kiss et CIB Bank).  

 

La Cour conclut en précisant que pour apprécier la clarté et la compréhensibilité d’une clause de commission d’ouverture, telles que définies ci-dessus, les juges nationaux doivent se fonder sur des éléments de fait pertinents. La Cour précise que peuvent ainsi constituer des éléments de faits pertinents la publicité (pt. 43) et les informations que l’établissement financier est légalement tenu de fournir à l’emprunteur (pt. 42), le niveau d’attention attendu d’un consommateur moyen vis-à-vis d’une telle clause (pt. 44) ainsi que l’emplacement et la structure d’une telle clause (pt. 46). La Cour retient néanmoins que la notoriété d’une clause de commission d’ouverture ne saurait constituer un élément de fait pertinent dans le cadre de l’appréciation de son caractère clair et compréhensible (pt. 42).  

Voir également :

CJUE, 16 mars 2023, aff. C-565/21 – Caixabank SA c/ X 

  

– Contrat de crédit – Commission d’ouverture – Objet principal – 

  

EXTRAIT  

  

« L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que : il s’oppose à une jurisprudence nationale qui, eu égard à une réglementation nationale prévoyant que la commission d’ouverture rémunère les services liés à l’examen, à l’octroi ou au traitement du prêt ou du crédit hypothécaire ou d’autres services similaires, considère que la clause établissant une telle commission relève de l’« objet principal du contrat », au sens de cette disposition, au motif qu’elle représente l’une des composantes principales du prix. »  

  

ANALYSE   

  

En vertu de l’article 4 § 2 de la directive 93/13 sur les clauses abusives, l’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat, ni sur l’adéquation entre le prix ou la rémunération et les biens ou services fournis, pour autant que ces clauses soient rédigées de manière claire et compréhensible. 

La question en l’espèce est de savoir si une clause d’un contrat de crédit prévoyant le paiement d’une commission d’ouverture par l’emprunteur relève ou non de l’objet principal de ce contrat, cette clause étant une composante du prix de ce contrat.  

La Cour commence par rappeler le principe selon lequel les clauses relevant de l’objet principal d’un contrat sont celles qui fixent les prestations essentielles d’un contrat, qui définissent son essence même (voir en ce sens arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C-186/16).  

La Cour rappelle également que l’article 4 § 2 de la directive 93/13 encadrant les clauses relevant de l’objet principal du contrat constitue une exception, qui doit être interprétée strictement afin de garantir une protection optimale des consommateurs contre les clauses abusives. Dans un contrat de crédit, l’objet principal consiste en la mise à disposition par le prêteur d’une certaine somme d’argent au profit de l’emprunteur, tenu à son tour de rembourser ladite somme (voir en ce sens  arrêt du 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C-776/19 à C-782/19, point 57). L’objet principal d’un contrat de crédit n’inclut donc pas les prestations simplement accessoires à la mise à disposition et au remboursement.  

La Cour avait déjà énoncé qu’une commission d’ouverture ne saurait être considérée comme étant une prestation essentielle d’un contrat de crédit du seul fait qu’elle était comprise dans le coût total de ce contrat (voir en ce sens Caixabank et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria C-224/19 et C-259/19, point 64).  

Dans cette continuité, la présente décision énonce que la clause prévoyant une commission d’ouverture ne relève pas de l’objet principal du contrat et peut donc être contrôlée par le juge au titre des clauses abusives, peu importe le fait qu’elle soit claire et compréhensible ou pas. En effet, cette clause est accessoire aux prestations essentielles du contrat de crédit, que sont la mise à disposition d’une somme d’argent et le remboursement de ladite somme.  

 

Voir également :