CJUE, 30 mai 2024, aff. C176/23, Raiffeisen Bank SA 

  

Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Exclusion des clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives – Jurisprudence nationale excluant le contrôle juridictionnel du caractère abusif d’une clause contractuelle contenue dans un tel avenant  

  

EXTRAIT   

«L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’appréciation du caractère abusif de clauses contenues dans un contrat de crédit à la consommation conclu entre un consommateur et un professionnel dans des circonstances où des modifications ont été apportées par ce professionnel à ces clauses afin d’assurer la conformité de ce contrat à une réglementation nationale impérative relative aux modalités de détermination du taux d’intérêt, si cette réglementation ne fait qu’établir un cadre général en vue de la fixation du taux d’intérêt dudit contrat, tout en laissant audit professionnel une marge d’appréciation en ce qui concerne tant le choix de l’indice de référence de ce taux que l’importance de la marge fixe pouvant être ajoutée à ce dernier.»  

  

ANALYSE   

  

La Cour de justice de l’Union européenne était invitée à se demander si l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’appréciation du caractère abusif de clauses contenues dans un contrat de crédit à la consommation conclu entre un consommateur et un professionnel dans des circonstances où des modifications ont été apportées par ce professionnel à ces clauses afin d’assurer la conformité de ce contrat de crédit à une réglementation nationale impérative relative aux modalités de détermination du taux d’intérêt en vertu de laquelle ce taux doit être remplacé par un taux d’intérêt déterminé sur la base de l’un des indices de référence prévus par cette réglementation et augmenté d’une marge fixe établie par ce professionnel pour toute la durée du contrat. 

L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 relative aux clauses abusives exclut du champ d’application de celle-ci les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives.  

La CJUE rappelle que pour qu’une clause contractuelle « reflète » une disposition législative ou réglementaire impérative, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, cette clause doit reproduire le contenu normatif d’une disposition impérative applicable au contrat en cause, de sorte qu’elle puisse être considérée comme exprimant, de façon concrète, la même norme juridique que celle visée à cette disposition impérative (arrêt du 6 juillet 2023, First Bank, C593/22, EU:C:2023:555, point 25). 

La CJUE rappelle également que dans son arrêt du 3 mars 2020, Gómez del Moral Guasch (C125/18, EU:C:2020:138, points 33 à 37), la Cour a dit pour droit que l’exclusion prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 ne s’appliquait pas à une clause contractuelle qui prévoyait que le taux d’intérêt applicable au prêt était fondé sur l’un des indices de référence officiels prévus par la réglementation nationale, lorsque cette réglementation ne prévoyait pas l’application impérative de cet indice, mais laissait à la banque la possibilité de définir le taux d’intérêt variable d’une autre manière. 

Elle observe que si la réglementation nationale en cause prévoyait que le taux d’intérêt des contrats de crédits devait être remplacé par un taux d’intérêt déterminé sur la base d’un indice de référence et d’une marge fixe, applicable pour toute la durée du contrat, il ressort néanmoins que les banques disposaient d’une marge d’appréciation en ce qui concerne tant le choix de l’indice de référence que l’importance de cette marge fixe. 

 

Elle en déduit que l’exclusion prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 ne s’applique pas dans une situation où des modifications ont été apportées par un professionnel à des clauses d’un contrat de crédit à la consommation pour assurer la conformité de ce contrat à une réglementation nationale, adoptée après la conclusion de celui-ci, si cette réglementation ne fait qu’établir un cadre général en vue de la fixation du taux d’intérêt de ce contrat de crédit, tout en laissant à ce professionnel une marge d’appréciation en ce qui concerne tant le choix de l’indice de référence de ce taux que l’importance de la marge fixe pouvant être ajoutée audit taux. 

Par conséquent la directive n’empêche pas l’examen d’un potentiel caractère abusif de clauses dans un contrat de crédit à la consommation, même si ces clauses se conforment à une réglementation nationale, dès lors que cette réglementation se contente d’établir un cadre général pour déterminer le taux d’intérêt, mais laisse au professionnel une marge de manoeuvre concernant le choix de l’indice de référence. 

L’exclusion de la directive ne s’applique que si la clause reproduit strictement une disposition législative impérative sans laisser de marge d’appréciation au professionnel. 

Voir également :  

CJUE 6 juillet 2023, First Bank, aff. C- 593/22 

 

CJUE, 30 mai 2024, aff. C176/23,UG v/ SC Raiffeisen Bank SA 

 

CJUE, 25 avril 2024,aff. C-561/21–– GP,BG contre Banco Santander SA

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrat de prêt hypothécaire – Clause prévoyant le paiement des frais liés au contrat à charge du consommateur – Décision judiciaire définitive constatant le caractère abusif de cette clause et annulant celle-ci – Action en restitution des sommes acquittées au titre de la clause abusive – Point de départ du délai de prescription de l’action en restitution » 

  

EXTRAIT  

 

« (…) l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ainsi que le principe de sécurité juridique doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que le délai de prescription d’une action en restitution de frais qui ont été acquittés par le consommateur au titre d’une clause contractuelle dont le caractère abusif a été constaté par une décision judiciaire définitive rendue postérieurement au paiement de ces frais commence à courir à la date à laquelle cette décision est devenue définitive»  

ANALYSE   

 

La Cour de Justice de l’Union Européenne était saisie d’une première question concernant la compatibilité du principe de sécurité juridique avec un délai de prescription qui commence à courir à la date de la décision judiciaire définitive constatant le caractère abusif d’une clause contractuelle dans le cadre d’une action en restitution des frais acquittés par le consommateur au regard de  l’article 6 paragraphe 1  , et de l’article 7, paragraphe 1 de la [directive 93/13  

 

En l’espèce, des consommateurs avaient souscrit, le 29 juin 1999, un prêt hypothécaire auprès de la Banco Santander, comportant une clause leur imposant la prise en charge de l’intégralité des frais liés au contrat. En 2017, ils sollicitent l’annulation de cette clause et le remboursement des sommes versées. La banque fait appel, et la cour d’appel accueille partiellement sa demande, estimant que le délai de prescription avait commencé à courir dès la conclusion du contrat en 1999. Les consommateurs se pourvoient en cassation devant l’Audiencia Provincial de Barcelone, soutenant que le point de départ du délai de prescription ne devrait pas être fixé à la date de conclusion du contrat. 

La Cour rappelle d’abord qu’en l’absence de réglementation spécifique de l’Union européenne, les États membres disposent d’une certaine liberté pour définir les modalités procédurales, à condition de respecter les principes d’équivalence et d’effectivité (arrêt Profit Crédit Slovzkia, C-485/19)   Elle précise que les délais de prescription doivent être suffisamment flexibles pour permettre aux consommateurs d’exercer leurs droits, sans que leur application ne rende cet exercice excessivement difficile. (arrêt BNP Paribas Personal Finance)   

La jurisprudence antérieure indique que des délais de prescription de trois à quinze ans peuvent être considérés comme compatibles avec le principe d’effectivité, à condition qu’ils soient préalablement connus des parties et suffisants pour permettre au consommateur concerné de préparer et de former un recours effectif. 

De plus, la Cour souligne qu’un consommateur doit être informé du caractère abusif d’une clause pour que le délai de prescription soit applicable, tenant compte de la situation d’infériorité du consommateur par rapport au professionnel. (arrêt Caixabank c-224/19 ) 

Enfin, la Cour conclut que la charge de la preuve incombe au professionnel, qui doit démontrer que le consommateur avait ou pouvait raisonnablement avoir connaissance de la clause abusive avant la décision judiciaire. Ainsi, l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive ne s’opposent pas à l’application d’un délai de prescription .

CJUE, 25 avril 2024, Caixabank, C-484/21 

Contrat de prêt hypothécaire – Clause prévoyant le paiement des frais liés au contrat à charge du consommateur – Décision judiciaire définitive constatant le caractère abusif de cette clause et annulant celle-ci – Action en restitution des sommes acquittées au titre de la clause abusive – Point de départ du délai de prescription 

 

EXTRAIT :  

« 2) L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13  

doivent être interprétés en ce sens que : 

ils s’opposent à ce que le délai de prescription d’une action en restitution de frais qui ont été  acquittés  par  le  consommateur  au  titre  d’une  clause  d’un  contrat  conclu  avec  un professionnel  dont  le  caractère  abusif  a  été  constaté  par  une  décision  judiciaire définitive, prenne cours à la date à laquelle la juridiction suprême nationale a prononcé un arrêt antérieur, dans une affaire distincte, déclarant abusive une clause standardisée correspondant à cette clause de ce contrat. » 

 

ANALYSE :  

Dans cet arrêt la Cour était saisie de trois questions préjudicielles. La deuxième portait sur la possibilité, pour les Etats membres, de faire courir le délai de prescription de l’action en restitution du consommateur à la date à laquelle une juridiction nationale avait déclaré abusive, dans un arrêt antérieur et distinct de l’affaire, une clause standardisée correspondant à la clause litigieuse en l’espèce. 

Pour répondre à cette question, la Cour retient qu’on ne peut pas attendre du consommateur qu’il ait lui-même pris conscience que la clause contenue dans son contrat correspondait à une clause standardisée déclarée abusive dans une autre affaire. 

En outre, la Cour affirme que lorsqu’une clause standardisée est déclarée abusive dans un contrat en particulier, il appartient aux juridictions nationales d’apprécier, au cas par cas, si une clause similaire doit être jugée abusive dans un autre contrat.  

En conséquence, on ne peut pas exiger du consommateur raisonnablement attentif et avisé que, d’une part, il se tienne informé par lui-même des décisions de justice relatives au caractère abusif des clauses standardisées similaires à celles contenues dans son contrat, et d’autre part qu’il détermine, sur le fondement de ces décisions, si les clauses de son contrat son abusives. 

Ainsi, le délai de prescription de l’action en restitution de frais acquittés par le consommateur sur le fondement d’une clause dont le caractère abusif a été constaté, ne peut pas commencer à courir au jour où une décision de justice antérieure et distincte a constaté le caractère abusif d’une clause standardisée correspondant à la clause litigieuse en l’espèce. En effet, à ce moment précis, le consommateur ne peut pas prendre conscience que la clause de son contrat est similaire à une telle clause standardisée et qu’elle est donc potentiellement abusive.  

 Voir également :

CJUE, 25 avril 2024, Caixabank, C-484/21

CJUE, 25 avril 2024, Caixabank, C-484/21   

Contrat de prêt hypothécaire – Clause prévoyant le paiement des frais liés au contrat à charge du consommateur – Décision judiciaire définitive constatant le caractère abusif de cette clause et annulant celle-ci – Action en restitution des sommes acquittées au titre de la clause abusive – Point de départ du délai de prescription 

 

EXTRAIT :  

« 1) L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d’effectivité, 

doivent être interprétés en ce sens que : 

ils s’opposent à ce que le délai de prescription d’une action en restitution de frais qui ont été acquittés par le consommateur, au moment de la conclusion d’un contrat passé avec un  professionnel,  au  titre  d’une  clause  contractuelle  dont  le  caractère  abusif  a  été constaté par une décision judiciaire définitive rendue postérieurement au paiement de ces frais, commence à courir à la date de ce paiement, indépendamment de la question de savoir si ce consommateur avait ou pouvait raisonnablement avoir connaissance du caractère  abusif  de  cette  clause  dès  ledit  paiement,  ou  avant  que  la  nullité  de  cette clause ait été constatée par cette décision. » 

 

ANALYSE :  

A titre liminaire, la Cour rappelle sa jurisprudence CJUE, 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo, C-154/15 qui prévoit que la constatation du caractère abusif d’une clause emporte, en principe, un effet restitutoire au profit du consommateur, et ce dans l’objectif d’assurer l’effet dissuasif de la directive.  

Saisie de trois questions préjudicielles par le tribunal de première instance de Barcelone, la Cour a décidé de répondre simultanément à la première et troisième question portant toutes les deux sur le point de départ du délai de prescription de l’action en restitution de frais acquittés par le consommateur au moment de la conclusion d’un contrat passé avec un professionnel, au titre d’une clause déclarée postérieurement abusive par une décision de justice devenue définitive.  

Le tribunal espagnol se demandait si le fait que le délai de prescription de l’action en restitution commence à courir à compter de la date de paiement ou avant la constatation de la nullité de la clause en raison de son caractère abusif, était contraire à la Directive 93/13.   

La Cour rappelle son arrêt CJUE,  22 avril 2021, Profi Credit Slovakia, C-485/19  dans lequel elle avait décidé qu’en l’absence de règlementation communautaire, les Etats membres, en vertu du principe d’autonomie procédurale, devait régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits des justiciables issus du droit communautaire et ce en respectant le principe d’équivalence et le principe d’effectivité. Dans cette affaire, seul le principe d’effectivité est en cause. Ainsi, les modalités procédurales mises en œuvre par les Etats membres ne doivent pas rendre impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive. 

Dans sa décision CJUE, 10  juin  2021,  BNP  Paribas  Personal  Finance,  C-776/19  la Cour avait retenu que la demande aux fins de la constatation du caractère abusif d’une clause n’était pas soumise à prescription, mais que rien ne s’opposait à ce que l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de cette constatation soit soumise à un délai de prescription. En raison de la situation d’infériorité du consommateur, elle avait décidé qu’un délai de prescription qui commence à courir après la signature du contrat était contraire au principe d’effectivité en ce que le consommateur pouvait ignorer le caractère abusif d’une clause ou ne pas connaitre l’étendue de ses droits issus de la directive.  

A la lumière de cette jurisprudence, la Cour retient que la date de conclusion du contrat contenant la clause abusive et la date du paiement réalisé en vertu de cette clause ne peuvent constituer le point de départ du délai de prescription de l’action en restitution. En effet, tant que le consommateur n’a pas eu connaissance de l’étendue de ses droits ou du caractère abusif de cette clause par une décision de justice déclarant sa nullité, le délai de prescriptio n ne peut commencer à courir.  

La Cour de cassation retient déjà cette approche depuis un arrêt Cass. civ. 1ère, 12 juillet 2023, n°22-17.030 

 

Voir également :  

CJUE, 25 avril 2024, Caixabank, C-484/21 

CJUE, 11 avril 2024, C-173/23- e Air Europa Líneas Aéreas   

 

 

 

Cession à une société commerciale de la créance du passager à l’égard du transporteur aérien – Directive 93/13/CE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrôle d’office du caractère abusif de la clause interdisant la cession des droits des passagers – Conséquences de ce contrôle dans le cadre d’un litige opposant la société cessionnaire au transporteur aérien – Principe du contradictoire » 

 

EXTRAITS :  

 

Le principe du contradictoire doit être interprété en ce sens que :  

 

lorsque le juge national constate d’office le caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat de transport conclu entre un passager aérien et un transporteur aérien à l’occasion d’une action en réparation formée, contre ce transporteur, par une société commerciale cessionnaire de la créance de dommages et intérêts de ce passager à l’égard dudit transporteur, ce juge n’est pas tenu d’en informer ledit passager ni de lui demander s’il entend se prévaloir du caractère abusif de cette clause ou s’il consent à l’application de cette dernière. En revanche, ledit juge doit en informer les parties au litige pendant devant lui, afin de leur donner la possibilité de faire valoir leurs arguments respectifs dans le cadre d’un débat contradictoire, et s’assurer du fait que la société commerciale cessionnaire souhaite que ladite clause soit déclarée inapplicable. 

 

ANALYSE :  

 

La Cour de Justice de l’Union Européenne a été saisie d’une question préjudicielle par le tribunal de commerce de Majorque concernant un litige opposant Eventmedia Soluciones SL, cessionnaire de la créance d’un passager aérien, à Air Europa Líneas Aéreas SAU (ci-après « Air Europa ») au sujet de la réparation du dommage résultant d’un retard dans le transport des bagages de ce passager à l’occasion d’un vol effectué par Air Europa. La première question était de savoir si le juge est tenu d’examiner d’office le caractère éventuellement abusif d’une clause qui interdit au consommateur de céder ses droits dès lors que l’action en réparation a été exercée par le cessionnaire qui n’a pas la qualité de consommateur (CJUE, 11 avril 2024, C-173/23- Air Europa Líneas Aéreas). La deuxième question était de savoir dans les cas où le juge constate d’office le caractère abusif de la clause s’il doit en informer le consommateur, non partie au litige, pour qu’il puisse s’en prévaloir ou qu’il consente tout de même à l’application de cette clause, en vertu du principe du contradictoire  

 

La CJUE rappelle qu’e,n vertu de l’arrêt Banif Plus Bank du 21 février 2013, le juge doit informer le professionnel et le consommateur, parties au litige du caractère abusif de la clause qu’il a pu examiner afin que ces dernières puissent en débattre contradictoirement et que le consommateur puisse le cas échéant renoncer à ce que la clause abusive soit écartée. En l’espèce, les parties au litige étant deux professionnels (la société cessionnaire de la créance du consommateur et le transporteur aérien), le juge n’est pas tenu d’informer le consommateur de cet examen d’office ni de recueillir ses observations. En revanche, le juge doit faire respecter le débat contradictoire entre les deux parties au litige, et s’assurer du fait que la société commerciale cessionnaire souhaite que ladite clause soit déclarée inapplicable. 

 

 

CJUE, 11 avril 2024, C-173/23- e Air Europa Líneas Aéreas   

 

 

Cession à une société commerciale de la créance du passager à l’égard du transporteur aérien – Clause contractuelle interdisant une telle cession –Contrôle d’office du caractère abusif de la clause interdisant la cession des droits des passagers – Modalités de ce contrôle dans le cadre d’un litige opposant la société cessionnaire au transporteur aérien – Principes d’équivalence et d’effectivité  

 

EXTRAITS :  

 

« L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus en combinaison avec le principe d’effectivité, doivent être interprétés en ce sens que :  

 

le juge national n’est pas tenu d’examiner d’office le caractère éventuellement abusif d’une clause qui, figurant dans le contrat de transport conclu entre un passager aérien et un transporteur aérien, prohibe la cession des droits dont jouit ce passager à l’égard de ce transporteur, lorsque ce juge est saisi d’une action en réparation formée, contre ledit transporteur, par une société commerciale cessionnaire de la créance de dommages et intérêts dudit passager, pour autant que cette société dispose ou ait disposé d’une possibilité effective de se prévaloir, devant ledit juge, du caractère éventuellement abusif de la clause en question.  

 

Le principe d’équivalence doit être interprété en ce sens que :  

 

si, en vertu des règles de droit national, le même juge dispose de la faculté ou a l’obligation d’apprécier d’office la contrariété d’une telle clause aux règles nationales d’ordre public, il doit également disposer de la faculté ou avoir l’obligation d’apprécier d’office la contrariété d’une telle clause à l’article 6 de la directive 93/13, dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet. » 

 

 

ANALYSE :  

 

La Cour de Justice de l’Union Européenne a été saisie d’une question préjudicielle par le tribunal de commerce de Majorque concernant un litige opposant Eventmedia Soluciones SL, cessionnaire de la créance d’un passager aérien, à Air Europa Líneas Aéreas SAU (ci-après « Air Europa ») au sujet de la réparation du dommage résultant d’un retard dans le transport des bagages de ce passager à l’occasion d’un vol effectué par Air Europa. La question était de savoir si le juge est tenu d’examiner d’office le caractère éventuellement abusif d’une clause qui interdit au consommateur de céder ses droits dès lors que l’action en réparation a été exercée par le cessionnaire qui n’a pas la qualité de consommateur.  

 

À titre liminaire, en vertu de l’arrêt de la Cour du 18 novembre 2020, DelayFix, la Cour rappelle que le champ d’application de la directive 93/13 ne dépend non pas de l’identité des parties au litige mais de la qualité au contrat. Ainsi, rien n’indique que le passager a acheté son billet à titre professionnel, il entre donc dans la catégorie des consommateurs. Le contrat conclu entre ce dernier et Air Europa répond au critère de la directive 93/13. 

 

Pour répondre à la question qui lui est posée, la réponse de la Cour repose sur deux principes. En vertu de l’arrêt du 17 mai 2022, SPV Project, le juge encadre la manière dont le juge national doit assurer la protection des droits que les consommateurs tirent de cette directive avec une obligation de relever d’office. Néanmoins, aucune harmonisation n’a été exigée par l’Union Européenne quant à ce contrôle, il en revient donc aux Etats membres, selon le principe d’autonomie procédurale, d’établir leurs propres règles pourvu qu’elles respectent le principe d’équivalence et d’effectivité. Ainsi, il revient donc à la juridiction de renvoi de vérifier si elle a la faculté ou l’obligation d’apprécier la contrariété d’une clause interdisant la cession des droits du consommateur aux règles nationales d’ordre public, en vertu de son droit interne, en l’espèce espagnol. Dans le cas échéant, le juge national doit avoir la faculté ou l’obligation d’apprécier cette contrariété à l’article 6 de la directive 93/13, s’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet. 

 

Enfin, pour que la disposition nationale soit effective, il ne faut pas qu’elle rende impossible ou difficile l’application du droit de l’Union, en l’occurrence la protection du consommateur, partie faible au contrat, pour pallier le déséquilibre des droits et obligations avec le professionnel. En l’espèce, l’action en réparation oppose deux professionnels. L’effectivité du système de protection des consommateurs n’est donc pas en cause. Cependant le principe d’effectivité des droits suppose que la société commerciale cessionnaire de la créance du consommateur dispose ou ait disposé d’une possibilité effective de se prévaloir, devant le juge national, du caractère éventuellement abusif de la clause contenue dans le contrat signé par ce consommateur. 

CJUE, 9 avril 2024, Profi Credit Polska, C-582/21  

Principes d’équivalence et d’effectivité – Principe d’interprétation conforme du droit national – Législation nationale prévoyant une voie de recours extraordinaire permettant la réouverture d’une procédure civile clôturée par un jugement définitif – Application extensive de cette voie de recours – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Absence de vérification d’office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles 

EXTRAIT : 

« 2) Le principe d’interprétation conforme du droit national doit être interprété en ce sens que :  

Il appartient à la juridiction nationale d’apprécier si une disposition de droit national établissant une voie de recours extraordinaire, permettant à une partie de demander la réouverture d’une procédure clôturée par un jugement définitif si elle a été privée de la possibilité d’agir en raison d’une violation du droit, peut faire l’objet d’une interprétation extensive de manière à inclure dans son champ d’application la situation dans laquelle le juge ayant fait droit à une demande d’un professionnel fondée sur un contrat conclu avec un consommateur, par un jugement définitif rendu par défaut, a omis d’examiner d’office ce contrat au regard de l’existence éventuelle de clauses abusives, en violation des obligations qui lui incombaient en vertu de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, et dans laquelle il s’avérerait que les modalités procédurales de l’exercice par ce consommateur de son droit de former opposition à ce jugement par défaut sont de nature à engendrer un risque non négligeable que ledit consommateur y renonce et ne permettent, par conséquent, pas d’assurer le respect des droits que ce dernier tire de cette directive. Si une telle interprétation extensive n’est pas concevable en raison des limites que constituent les principes généraux du droit et l’impossibilité de procéder à une interprétation contra legem, le principe d’effectivité impose que le respect de ces droits soit assuré dans le cadre d’une procédure d’exécution de ce jugement par défaut ou d’une procédure subséquente distincte. » 

ANALYSE : 

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), en grande chambre, est saisie du point de savoir si le principe d’interprétation du droit national doit être compris en ce sens qu’une disposition de droit national permettant la réouverture d’un jugement définitif peut être traduite de manière à inclure une situation où, dans un jugement par défaut, le juge n’a pas examiné d’office un contrat entre un consommateur et un professionnel pour y détecter d’éventuelles clauses abusives, en violation des obligations imposées par la directive 93/13/CEE. 

La CJUE rappelle qu’il appartient aux juridictions nationales de décider si et dans quelle mesure une disposition de droit national est susceptible d’être interprétée en conformité avec les dispositions pertinentes du droit de l’Union en vertu du principe d’interprétation conforme du droit national (CJUE, 17 avril 2018, Egengerber, C-414/16). Cependant, ce principe est limité par les principes généraux du droit et ne permet pas une interprétation contra legem du droit national (CJUE, 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C-261/20). La CJUE rappelle également que les autorités juridictionnelles ont l’obligation de procéder à l’examen d’office du caractère abusif de certaines clauses contenues dans un contrat conclu avec un consommateur (CJUE, 7 novembre 2019, Profi Credit Polska, C-419/18 et C-483/18).  

À la suite de ces rappels, la CJUE précise qu’il est nécessaire d’observer les modalités procédurales entourant l’exercice du droit de former opposition au jugement afin que celles-ci ne soient pas de nature à engendrer un risque non négligeable que les consommateurs concernés ne forment pas opposition en raison de la violation de l’obligation d’examiner d’office le caractère éventuel abusif des clauses du contrat. Il s’agit, ainsi, d’une interprétation extensive de la législation nationale qui prévoit une voie de recours extraordinaire permettant la réouverture d’une procédure civile clôturée par un jugement définitif. 

 Par ailleurs, la CJUE rappelle que l’autonomie procédurale des États membres est subordonnée au respect des principes d’équivalence et d’effectivité. En effet, les États membres doivent s’assurer que les droits conférés par le droit de l’Union, comme la protection contre les clauses abusives (CJUE, 7 novembre 2019, Profi Credit Polska, C-419/18 et C-483/18), puissent être exercés de manière effective, sans obstacles procéduraux disproportionnés. Par conséquent, la CJUE affirme que si une telle interprétation extensive est impossible compte tenu de ses limites, le principe d’effectivité impose que les droits du consommateur soient protégés dans le cadre d’une procédure d’exécution.  

En telle hypothèse, lorsqu’un professionnel a obtenu un titre exécutoire contre un consommateur sans que le caractère éventuellement abusif des clauses du contrat ne soit analysé, le juge saisi de l’exécution de ce titre peut procéder d’office à cet examen (CJUE 18 février 2016, Finanmadrid EFC, C-49/14, point 55). La procédure d’exécution peut alors être suspendue jusqu’à ce que le juge compétent ait effectué le contrôle du caractère éventuellement abusif des clauses du contrat concerné afin que la protection des consommateurs par la directive 93/13 soit pleinement effective (CJUE, 17 juillet 2014, Sánchez Morcillo et Abril García, C-169/14 et CJUE, 17 mai 2022, Impuls Leasing România, C-725/19). 

Enfin, la CJUE ajoute que le consommateur, pour exercer pleinement et effectivement ses droits aux termes des articles 6§1 et 7§1 de la directive 93/13, peut invoquer dans une procédure subséquente distincte le caractère abusif des clauses du contrat et obtenir la réparation du préjudice financier causé par l’application des clauses (CJUE, 17 mai 2022, Ibercaja Banco, C-600/19).  

La CJUE estime donc qu’il appartient à la juridiction nationale de permettre à une partie la réouverture d’un procès, même en cas de décision devenue définitive, si cette partie a été privée de la possibilité d’agir en appel en raison de la violation d’un droit. Ce principe peut faire l’objet d’une interprétation extensive dans la situation dans laquelle un juge ayant omis d’examiner d’office le caractère éventuellement abusif de clauses contenues dans un contrat de consommation fait droit à la demande du professionnel dans un jugement rendu par défaut et la situation dans laquelle le consommateur pourrait, du fait des modalités procédurales, renoncer à son droit de former opposition au jugement. Le principe d’effectivité impose que le droit de faire opposition à une décision devenue définitive puisse se faire dans le cadre d’une procédure d’exécution de ce jugement rendu par défaut ou une procédure subséquente distincte si une interprétation extensive n’est pas concevable.

CJUE, 21 mars 2024, C-714/22 S.R.G. c/ Profi Credit Bulgaria EOOD  

  

Contrat entre établissement de crédit et consommateur – Contrat de prêt – Appréciation caractère abusif – rôle des juridictions – Clause accessoire crédit – Rééchelonnement des mensualités – Disproportion des coûts 

  

EXTRAIT   

« l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’une clause d’un contrat de crédit à la consommation permettant au consommateur concerné de reporter ou de rééchelonner les mensualités du crédit moyennant le paiement de coûts supplémentaires, alors même qu’il n’est pas certain que ce consommateur fera usage de cette possibilité, est susceptible de revêtir un caractère abusif, lorsque, notamment, ces coûts sont manifestement disproportionnés par rapport au montant du prêt octroyé. » 

 

  

ANALYSE   

 

Dans cette décision, la CJUE était saisie de la question de savoir si l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses portant sur des services accessoires à un contrat de crédit à la consommation, qui accordent au consommateur achetant ces services une priorité dans l’examen de sa demande de crédit et la mise à disposition de la somme empruntée ainsi que la possibilité de reporter le remboursement des mensualités ou d’en réduire le montant, relèvent de l’objet principal de ce contrat, au sens de cette disposition, et échappent donc à l’appréciation de leur caractère abusif (voir  CJUE, 21 mars 2024, C-714/22 S.R.G. c/ Profi Credit Bulgaria EOOD)

 

La Cour était également saisie du point de savoir si si l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, lu en combinaison avec le point 1, sous o), de l’annexe de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’une clause d’un contrat de crédit à la consommation permettant au consommateur concerné de reporter ou de rééchelonner les mensualités du crédit moyennant le paiement de coûts supplémentaires, alors même qu’il n’est pas certain que ce consommateur fera usage de cette possibilité, revêt un caractère abusif. 

La Cour observe que la clause litigieuse n’est pas prévue dans la liste de la directive de clauses pouvant être abusives. La Cour rappelle cependant que cette liste n’étant pas limitative, le caractère abusif de la clause peut tout de même être relevé notamment si celle-ci est non négociée et qu’elle crée un déséquilibre signification entre les obligations des contractants.  

 

S’agissant de l’appréciation de ce caractère, l’article 4 paragraphe 1 de la directive 93/13 prévoit la nécessaire prise en compte de l’ensemble contractuel à savoir toutes les circonstances entourant la situation lors de la conclusion du contrat.  

 

Aussi, la Cour rappelle sa jurisprudence (CJUE, 10 sept 2020-C-738/19-A) selon laquelle, pour déterminer si une clause contractuelle est potentiellement abusive, il appartient au tribunal national de statuer en fonction de ces circonstances propres au cas d’espèce. Cependant, c’est à la Cour de justice de l’Union européenne de définir, à partir de l’interprétation de ladite directive, les critères que le juge national doit ou peut utiliser pour évaluer ces clauses. 

 

 

A cet effet, la Cour énonce les critères pouvant être pris en compte qu’il s’agisse d’une part de la transparence de la clause et d’autre part de la marge d’appréciation dont l’établissement de crédit bénéficie en cas de demande de modification du plan de remboursement.  

 

Enfin, la CJUE considère qu’une mise en balance doit être effectuée entre le coût du service accessoire, objet de la clause, et le coût de l’objet principal du contrat.
En rappelant sa jurisprudence (arrêt du 23 novembre 2023, aff. C321 /22 – Provident Polska), elle énonce qu’une analyse économique quantitative peut suffire à faire constater un déséquilibre significatif. Ce dernier pouvant résulter par exemple, dans un contrat de crédit, de frais d’octroi et de gestion manifestement disproportionnés par rapport au montant emprunté.  

 

Elle en déduit que la clause d’un contrat de crédit à la consommation permettant au consommateur concerné de reporter ou de rééchelonner les mensualités du crédit moyennant le paiement de coûts supplémentaires, alors même qu’il n’est pas certain que ce consommateur fera usage de cette possibilité, est susceptible de revêtir un caractère abusif, lorsque, notamment, ces coûts sont manifestement disproportionnés par rapport au montant du prêt octroyé. 

 

Voir également 

 

CJUE 10 sept. 2020-C-738/19

CJUE, 23 nov. 2023, aff. C321 /22 – Provident Polska

 

CJUE, 21 mars 2024, C-714/22 S.R.G. c/ Profi Credit Bulgaria EOOD

Contrats de crédit à la consommation – Services accessoires à un contrat de crédit – 

  

EXTRAIT  

« L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses portant sur des services accessoires à un contrat de crédit à la consommation, qui accordent au consommateur achetant ces services une priorité dans l’examen de sa demande de crédit et la mise à disposition de la somme empruntée ainsi que la possibilité de reporter le remboursement des mensualités ou d’en réduire le montant, ne relèvent pas, en principe, de l’objet principal de ce contrat, au sens de cette disposition, et n’échappent donc pas à l’appréciation de leur caractère abusif. » 

ANALYSE   

En l’espèce, un contrat de crédit à la consommation a été conclu entre un client et un professionnel dans lequel le client a souscrit des services accessoires payants en plus du crédit principal. Le client conteste la validité de ces clauses, estimant que les clauses contractuelles établissant l’obligation de payer ces intérêts et ces services sont nulles.  

 

La CJUE a dû statuer sur le point de savoir si l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété de manière à inclure les clauses concernant les services accessoires dans l’évaluation de leur caractère abusif.  

La Cour rappelle les clauses contractuelles qui relèvent de la notion d’« objet principal du contrat », doivent s’entendre comme étant celles qui fixent les prestations essentielles de ce contrat et qui, comme telles, caractérisent celui-ci. 

 

Elle précise que pour un contrat de crédit, les prestations essentielles sont, pour le prêteur, la mise à disposition de l’emprunteur une certaine somme d’argent, et pour ce dernier, le remboursement de cette somme selon les échéances prévues [voir, en ce sens, arrêt du 16 mars 2023, Caixabank (Commission d’ouverture du prêt), C565/21, EU:C:2023:212, point 18 et jurisprudence citée]. 

 

Elle rappelle aussi sa jurisprudence selon laquelle l’obligation de rémunérer des services liés à l’examen, à l’octroi et au traitement du prêt ou d’autres services similaires inhérents à l’activité du prêteur occasionnée par l’octroi du prêt ne saurait être considérée comme relevant des prestations essentielles résultant d’un contrat de crédit [arrêt du 16 mars 2023, Caixabank (Commission d’ouverture du prêt), C565/21, EU:C:2023:212, points 22 et 23]. 

 

Elle énonce ensuite que les clauses portant sur des services accessoires à un contrat de crédit à la consommation, qui accordent au consommateur achetant ces services une priorité dans l’examen de sa demande de crédit et la mise à disposition de la somme empruntée ainsi que la possibilité de reporter le remboursement des mensualités ou d’en réduire le montant, ne touchent pas à l’essence même du rapport contractuel concerné, à savoir, d’une part, la mise à disposition d’une somme d’argent par le prêteur et, d’autre part, le remboursement de cette somme.  

 

Elle en déduit que ces clauses ne relèvent pas, en principe, de l’objet principal de ce contrat. Elles sont donc soumises à une évaluation de leur caractère abusif.