La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services, et notamment ses articles 35 à 3 ;

Vu la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, modifiée par la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 ;

Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Vu le code civil, et notamment ses articles 1384 et 1721 ;

Vu le décret n° 78-469 du 24 mars 1978 ;

Vu les recommandations de la Commission des clauses abusives n°s 79-01, 79-02- 86-01, 87-01, 87-02 et 87-03 ;

Entendus les représentants des loueurs professionnels de matériels téléphoniques, de bricolage et jardinage, d’appareils audiovisuels et d’instruments de musique ;

Considérant que la location de biens meubles s’est développée au rythme de la diversification des objets de consommation offerts au public ;

Considérant que les contrats proposés par les loueurs de biens meubles sont élaborés par les seuls professionnels et offerts par eux à l’adhésion des consommateurs; que lesdits contrats entrent donc dans le champ d’application de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 susvisée ;

Considérant que ces contrats comportent des clauses nombreuses souvent imprimées en caractères pâles et de taille sensiblement inférieure au corps 8; qu’ainsi ces contrats manquent de lisibilité ;

Considérant que de nombreux contrats prévoient l’apposition de la signature du consommateur au recto du document contractuel alors que certaines clauses, le plus souvent les conditions générales, figurent au verso; que même s’il est mentionné au recto que les clauses générales sont au verso du document, cette présentation ne peut être regardée comme garantissant que le consommateur ait pris connaissance de l’ensemble des clauses, notamment de celles qui prévoient un comportement actif de sa part et au nombre desquelles il convient tout particulièrement de ranger les stipulations qui imposent une obligation d’assurance de la responsabilité du locataire ;

Considérant que le prix annoncé doit indiquer la dépense totale occasionnée par l’opération ; que tel n’est pas le cas lorsque des frais de transport élevés et des primes d’assurance obligatoires s’ajoutent à ce prix ;

Considérant que de nombreux contrats de longue durée – 24 mois et plus – comportent une clause définissant le mode de calcul de la variation du prix ; que ces formules, souvent fort complexes et faisant appel à des paramètres qui sont en pratique peu connus des consommateurs, ne permettent pas d’évaluer dans quelles marges le prix peut évoluer et ce d’autant plus que, le plus souvent, le moment de la mise en œuvre de la clause de variation du prix relève de la seule volonté du professionnel; que, par ailleurs, certains contrats se bornent à faire savoir que les prix sont  » révisables sans préavis  » ;

Considérant que certains contrats mettent à la charge du locataire une obligation de parfait entretien sans pour autant préciser quelle en est l’étendue; que, excepté le cas où le loueur s’engage à entretenir le matériel, ces contrats indiquent généralement que les objets loués ont été remis au locataire en parfait état de marche sans que mention soit faite de la possibilité d’essayer le matériel avant de le retirer du magasin du loueur ;

Considérant que la quasi-totalité des contrats posent en principe que le locataire est responsable du bien qui lui a été remis à l’égard des tiers, du loueur et de lui-même sans faire réserve du fait du loueur ou du vice caché de la chose ;

Considérant que les contrats envisagent les conséquences du sinistre total de la chose louée; qu’ils assimilent à cette situation le vol ou la perte de la chose louée; que les clauses contractuelles prévoient que la survenance de tels événements engage la responsabilité du locataire sans préciser cependant que le préjudice indemnisable ne saurait excéder le préjudice subi ;

Considérant qu’en cas de rupture du contrat à l’initiative du locataire les contrats prévoient une indemnisation du loueur qui peut atteindre le montant des loyers afférents à la période du contrat restant à courir; que, si l’indemnisation du loueur doit prendre en compte le fait que la définition du prix est souvent fonction de la durée du contrat, elle ne saurait cependant être hors de proportion avec le préjudice réel subi par le loueur ;

Considérant que le locataire doit pouvoir renoncer au contrat de location pour un motif légitime ;

Considérant que les contrats proposés par les professionnels comportent de nombreuses clauses de résiliation par le loueur, et notamment en cas de :

  • déclaration inexacte dans la demande de location ;
  • non-paiement d’une mensualité exigible ;
  • saisie des biens ou mise en règlement judiciaire du locataire ;
  • décès du locataire ;
  • non-exécution de l’une quelconque des clauses du contrat ;

Considérant que ces clauses sont fréquemment assorties de sanctions pécuniaires qui sont le plus souvent les mêmes que celles auxquelles le locataire s’exposerait en résiliant le contrat de sa propre initiative ;

Considérant que les déclarations faites lors de la signature du contrat ne sont pas toutes nécessaires à la bonne exécution de celui-ci; qu’une déclaration erronée, sans conséquence sur la parfaite exécution du contrat ou qui, du moins, ne démontre pas la mauvaise foi du locataire, ne saurait justifier la résiliation du contrat ;

Considérant que la résiliation du contrat du seul fait de la mise en règlement judiciaire est contraire à l’article 37 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Considérant que la saisie des biens du locataire est sans conséquence sur l’exécution du contrat ;

Considérant que le défaut du paiement ne saurait justifier la résiliation du contrat sans mise en demeure préalable ;

Considérant que le décès du locataire ne peut être assimilé à une rupture du contrat de son fait ;

Considérant qu’eu égard au nombre et à l’imprécision des obligations contractuelles, la résiliation pour non-respect de l’une quelconque des clauses du contrat est abusive ;

Considérant que, malgré les dispositions impératives de l’article 48 du nouveau code de procédure civile, plusieurs modèles de contrat attribuent compétence exclusive en cas de litige aux tribunaux du siège social du loueur; qu’une telle clause, outre qu’elle est nulle, doit être considérée comme abusive, ainsi que l’a déjà qualifiée la Commission des clauses abusives dans les recommandations n° 79-01 et n° 85-02 ;

Considérant que certains modèles de contrat attribuent compétence au seul tribunal de commerce; que, selon la jurisprudence, le commerçant demandeur doit assigner le non-commerçant devant le tribunal civil et que le non-commerçant peut exercer son action devant le tribunal civil ou devant le tribunal de commerce; que certaines décisions judiciaires reconnaissent cependant la validité de la clause attribuant compétence, dans un acte mixte, au seul tribunal de commerce; qu’une telle clause constitue, au regard des règles normales de compétence, une dérogation substantielle dont le consommateur peut sous-estimer l’importance; qu’en conséquence, et quelle que soit sa validité, une telle clause doit être tenue pour abusive ainsi que l’a déjà qualifiée la commission dans sa recommandation n° 79-01,

Recommande :

I. – Que la présentation matérielle des contrats, objet de la présente recommandation, proposés aux consommateurs par les loueurs de biens meubles obéisse aux règles suivantes ;

1° Les documents contractuels sont imprimés avec des caractères dont la hauteur ne saurait être inférieure au corps 8 ;

2° L’ensemble des clauses contractuelles précède les signatures des parties ;

3° Outre le prix de la location doivent être mentionnées les dépenses accessoires incombant au consommateur telles que, s’il y a lieu, celles liées à l’entretien de l’objet loué, à son transport ou à son assurance ;

4° Les professionnels qui incluent dans leur contrat une clause de variation de prix mettant en œuvre plusieurs paramètres l’assortissent d’un exemple chiffré tiré de l’évolution économique.

II. – Que soient éliminées des contrats de location de biens meubles les clauses qui ont pour objet ou pour effet :

1° De permettre, implicitement ou explicitement, au professionnel de décider unilatéralement du moment de la mise en œuvre d’une clause de variation des prix ou de modifier discrétionnairement le montant du loyer ;

2° De mettre à la charge du consommateur des obligations sans pour autant définir de manière précise et objective leur étendue, notamment en matière d’assurances – risques et personnes à couvrir – et d’entretien des objets loués ;

3° De mettre à la charge du locataire la responsabilité des accidents survenus aux tiers ou à lui-même du fait du loueur ou d’un vice caché du bien loué ;

4° De faire supporter au locataire en cas de sinistre total ou partiel de l’objet loué une indemnisation supérieure au préjudice subi par le loueur et, en cas de résiliation du contrat à l’initiative du consommateur, une indemnisation hors de proportion avec ce préjudice ;

5° D’interdire au locataire ou à ses ayants droit de renoncer au contrat pour motif légitime – départ pour une localité non desservie par le professionnel, décès du locataire… – sans s’exposer à l’application de clauses prévoyant une indemnisation du professionnel hors de proportion avec le préjudice subi par celui-ci ;

6° De reconnaître, directement ou indirectement, au professionnel un droit de résiliation discrétionnaire du contrat; que doivent notamment être assimilées à de telles clauses celles qui permettent au loueur de résilier le contrat sur le fondement :

  •  » d’un quelconque renseignement inexact dans la déclaration initiale du consommateur  » ;
  • d’un simple défaut de paiement sans aucune mise en demeure préalable ;
  • de la saisie, la mise en règlement judiciaire ou du décès du locataire;
  • de la non-exécution de  » l’une quelconque des clauses du contrat  » ;

7° De déroger aux règles de compétence territoriale ou d’attribution des juridictions.

Texte adopté le 6 juillet 1990, sur le rapport de M. Jean-Pierre Looten.

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services ;

Vu le code civil, notamment ses articles 1792 et suivants ainsi que son article 2270 ;

Vu le code de la construction et de l’habitation, notamment ses articles L. 231-1 et suivants, R. 231-1 et suivants dans leur rédaction en vigueur au 22 juin 1990 ;

Vu la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l’assurance dans le domaine de la construction ;

Vu la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 81-02 concernant les contrats de construction de maisons individuelles selon un plan établi à l’avance et proposé par le constructeur ;

Vu la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 88-01 concernant les clauses relatives aux prêts dans les contrats d’accession à la propriété immobilière conclus entre professionnels et consommateurs ou non-professionnels ;

Entendu les représentants des professionnels intéressés,

Considérant que de nouvelles clauses abusives ont été relevées depuis la publication de la précédente recommandation n° 81-02 relative aux contrats de construction de maisons individuelles; qu’il y a donc lieu de la compléter ;

Considérant que les clauses relatives à la condition suspensive de l’obtention des prêts dans les contrats immobiliers ont déjà fait l’objet d’une recommandation de la commission; que beaucoup de contrats visés par la présente recommandation sont concernés par cette recommandation n° 88-01 susvisée; qu’il y a donc lieu de s’y reporter pour tout ce qui a trait aux dites clauses ;

Considérant que la construction d’une maison individuelle est soumise à une loi d’ordre public qui impose que soient annexés au contrat des plans cotés avec indication des surfaces pour chaque pièce; qu’en cas d’erreurs dans les surfaces, il appartient au juge, compte tenu de leur importance, d’estimer si l’accédant subit ou non un préjudice; qu’en conséquence doivent être déclarées abusives toutes clauses qui suppriment ou limitent la responsabilité des constructeurs en cas d’erreurs dans les surfaces ;

Considérant que de nombreux contrats prévoient qu’en cas de consignation de fonds par le maître d’ouvrage soit avant l’ouverture du chantier à titre de dépôt de garantie, soit après la réception pour garantir la reprise des réserves, cette consignation devra se faire obligatoirement dans une banque choisie par le constructeur, alors que la loi prévoit simplement que cette consignation devra se faire auprès d’un établissement financier habilité ou chez un notaire; que ces deux possibilités offrent toutes garanties aux constructeurs; qu’il n’y a donc pas lieu de limiter la liberté des consommateurs de consigner où ils le souhaitent des fonds qui, à ce stade de la construction, leur appartiennent toujours ;

Considérant que de nombreux contrats stipulent que le maître d’ouvrage s’engage à signer toute procuration ou à donner toute délégation devant faciliter la gestion financière de l’opération, alors même que la pratique montre que de nombreux professionnels n’hésitent pas à faire signer au maître d’ouvrage des mandats en blanc pour obtenir le déblocage des fonds sans qu’il soit tenu compte de l’échelonnement légal des paiements et de l’état d’avancement des travaux; que cette pratique conduit souvent à des abus de blanc-seing mettant l’accédant dans des situations dramatiques en cas de défaillance de l’entreprise; que, pour ces raisons et parce qu’elles confèrent un pouvoir exorbitant aux professionnels, de telles clauses doivent être éliminées des contrats ;

Considérant que certains contrats interdisent au consommateur d’hypothéquer son terrain et sa maison, sauf pour les prêts immobiliers nécessaires à leur financement, tant que le prix de la maison n’est pas totalement réglé; que certains contrats vont même jusqu’à interdire la location dans les mêmes cas, alors que le non-paiement d’une partie du prix de la construction peut être fondé sur des motifs tout à fait légitimes; que de telles clauses peuvent constituer un moyen de rétorsion destiné à décourager l’accédant qui souhaiterait faire valoir ses droits; que ces interdictions qui portent gravement atteinte au droit de propriété de l’accédant donnent un avantage successif au constructeur qui dispose par ailleurs de nombreux autres moyens contractuels ou législatifs pour obtenir le paiement de ces créances; qu’il y a donc lieu de supprimer des contrats de telles clauses ;

Considérant que de nombreux contrats stipulent qu’en cas d’interruption de travaux pour retard de paiement, le constructeur n’assume plus la garde du chantier et que le maître d’ouvrage est responsable des désordres pouvant survenir sur le chantier; que cette limitation de responsabilité est abusive dès lors qu’elle est imposée par le professionnel au consommateur alors même que l’article R. 231-4 du code de la construction prévoit une sanction spécifique en cas de retard de paiement et qu’il appartient aux seuls tribunaux de limiter la responsabilité du constructeur en fonction de chaque cas d’espèce, compte tenu de l’importance des retards et des causes de ceux-ci ;

Considérant que de nombreux contrats indiquent que la délivrance d’un permis de construire avec réserve ou prescriptions architecturales ne constitue pas un refus; que cette clause met en échec la protection assurée par la loi au consommateur qui prévoit que « le contrat est conclu sous la condition suspensive qu’il soit satisfait à toutes les formalités réglementaires préalables à la construction », ce qui vise essentiellement le permis de construire; que celui-ci n’est véritablement obtenu qu’à partir du moment où le projet est conforme à toutes les prescriptions architecturales applicables sur le site et qu’il ne donne plus lieu à réserves; que des modifications demandées par l’administration à une demande initiale déposée par le consommateur peuvent entraîner une augmentation du prix et que de tels changements dans l’aspect ou la configuration de la maison peuvent contraindre l’accédant à renoncer à son projet de construction; qu’obliger ainsi un accédant à construire alors même que les modifications imposées pour l’obtention du permis de construire sont telles que l’équilibre du contrat s’en trouve rompu doit être considéré comme abusif ;

Considérant que certaines clauses stipulent que le client supportera le coût de la fourniture d’eau pour les besoins du chantier et du combustible nécessaire au préchauffage; que la stipulation d’une telle clause est contraire au caractère forfaitaire du prix imposé par les articles L. 231-1 et R. 231-4 du code de la construction ;

Considérant que de nombreuses clauses stipulent que l’acquéreur, dûment averti de la date prévue pour la réception, qui ne se présente pas, se verra notifier par lettre recommandée l’achèvement des travaux, cette notification entraînant sous huitaine l’exigibilité des sommes dues, d’autres disposant même qu’une telle absence vaut réception sans réserve, alors même que le consommateur peut avoir des motifs légitimes d’absence; que la loi a par ailleurs prévu qu’à défaut de réception à l’amiable ou à la demande de la partie la plus diligente, elle doit avoir lieu judiciairement et, en tout état de cause, être prononcée contradictoirement; qu’une clause qui ne prévoit qu’un mode de réception et à une date imposée au consommateur sans réserver la possibilité d’une réception judiciaire est contraire à la loi et est abusive ;

Considérant que la construction étant la propriété du consommateur, il apparaît abusif de stipuler dans le contrat que le constructeur se réserve le droit de laisser un panneau de chantier après la réception sans le consentement préalable du consommateur.

Recommande :

Que soient éliminées des contrats habituellement conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, acquéreurs de maisons individuelles à construire selon un plan établi à l’avance, les clauses ayant pour objet ou pour effet :

  1. de rendre inopposables aux constructeurs les erreurs de surfaces ;
  2. d’imposer la consignation de fonds par le maître d’ouvrage exclusivement auprès d’un établissement financier agréé par le constructeur ;
  3. d’obliger le consommateur à signer toute procuration ou à donner toute délégation au constructeur pour percevoir les fonds destinés au financement de l’opération ;
  4. d’interdire au consommateur d’hypothéquer son terrain et sa maison, sauf pour les prêts nécessaires à leur financement, ou de les donner en location ;
  5. de supprimer la responsabilité du constructeur relative à la garde du chantier en cas de non-paiement d’une fraction du prix par le consommateur ;
  6. de prévoir que la délivrance du permis de construire avec réserve ou prescriptions architecturales n’est pas assimilable à un refus de permis de construire;
  7. de prévoir que le client supportera le coût de la fourniture d’eau pour les besoins du chantier et les dépenses relatives au préchauffage ;
  8. de prévoir que l’absence du maître d’ouvrage à la date de la réception imposée par le constructeur vaut réception sans réserve et exigibilité des sommes dues ;
  9. de réserver le droit au constructeur de laisser un panneau de chantier après la réception sans l’accord préalable du propriétaire.

Texte adopté le 22 juin 1990 sur le rapport de Mme Frédérique Lahaye.
Voir également :

Recommandation n° 81-02

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur de l’immobilier

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil;

Vu la loi 79-596 du 13 juillet 1979, et notamment les articles 7 et 17 de cette loi.

Entendu les représentants des professionnels intéressés;

Considérant que la plupart des contrats ayant pour objet la réparation d’un immeuble, l’acquisition d’un logement ou du terrain destiné à recevoir la construction sont financés à l’aide de prêts;

Considérant que ces contrats sont généralement signés sans que le consommateur dispose d’éléments lui permettant d’apprécier ses possibilités d’emprunt ni les conditions d’endettement qui en résulteront;

Considérant que la plupart des prêteurs se refusent à formuler des offres de prêt avant la production d’un acte constatant l’accord des parties sur l’acquisition du bien ou du terrain nécessaire à la construction;

Considérant que pour pallier ces difficultés et éviter au consommateur d’être lié par un acte d’acquisition ou de construction sans pouvoir obtenir un prêt répondant à ses possibilités, la loi du 13 juillet 1979 a instauré un mécanisme de protection qui permet à ce consommateur de s’informer sur les modalités du financement et de renoncer éventuellement à son projet même après signature de l’acte d’acquisition dans la mesure où il n’obtient pas les prêts ou lorsqu’il estime que ces offres de prêts ne correspondent pas à ses possibilités;

Considérant que la protection instituée par cette loi consiste essentiellement:

  • d’une part à imposer que tout acte ayant pour objet l’une des opérations susmentionnées soit soumis à la conditions suspensive de l’obtention du ou des prêts nécessaires au financement; cette condition impliquant que si le prêt n’est pas obtenu le professionnel doit rembourser la totalité des sommes qu’il a pu percevoir;
  • d’autre part à permettre au consommateur de s’informer sur les modalités des prêts qui lui sont offerts et de lui donner le temps de réflexion utile pour les accepter ou les refuser;

Considérant, en conséquence, que la loi du 13 juillet 1979 confère au consommateur le droit et la possibilité de renoncer à accepter les prêts qui lui sont offerts sans qu’aucune dérogation contractuelle à ce texte d’ordre public soit possible;

Considérant que certains contrats contiennent:

  • des clauses ayant pour effet ou pour objet de dispenser le professionnel du remboursement ou de retarder celui-ci lorsque le consommateur aura, sans abus de droit, refusé l’offre de prêt;
  • des clauses qui prévoient la nécessité de plusieurs refus de prêts émanant de prêteurs et prouvés par le consommateur;
  • des clauses qui donnent mandat au professionnel, en cas de refus de prêt par le prêteur, de rechercher des financements dont les conditions sont indéterminées ou inacceptables pour le consommateur;
  • des clauses qui prévoient la possibilité d’une modification de l’objet du contrat à l’initiative unilatérale du professionnel pour l’adapter au financement obtenu;
  • des clauses qui imposent, à peine de déchéance des droits du consommateur, de déposer la demande de prêt dans un délai qui ne lui permet pas d’être en possession des éléments nécessaires pour la présenter,

Recommande:

Que soient éliminées des contrats les clauses ayant pour effet ou pour objet:

  1. De priver le consommateur du délai de réflexion de dix jours qui lui est conféré par l’article 7 de la loi du 13 juillet 1979 et du droit de refuser, sans abus de droit, le prêt qui lui est offert;
  2. De dispenser le professionnel du remboursement ou de retarder celui-ci lorsque le consommateur aura, sans abus de droit, refusé l’offre de prêt;
  3. De subordonner le droit au remboursement du consommateur à la preuve de plusieurs refus de prêts;
  4. De donner mandat au professionnel de rechercher des prêts sans que ce mandat soit exprès et comporte toutes les précisions utiles sur les conditions du prêt;
  5. De conférer au professionnel la faculté de modifier unilatéralement l’objet du contrat pour l’adapter aux conditions de financement résultant d’un refus partiel de prêt;
  6. D’imposer au consommateur, à peine de déchéance de ses droits, la preuve du dépôt d’une demande de prêt dans un délai insuffisant pour réunir les éléments nécessaires à sa présentation.

(Texte adopté le 22 janvier 1988 sur le rapport de M. Philippe Isabey.)
Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur de l’immobilier

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil, et notamment ses articles 1152, 1231, 1244 et 2037;

Vu la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 relative à l’information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit;

Vu le décret n° 78-373 du 17 mars 1978 pris pour l’application des articles 19, 20 et 21 de la loi n° 78-22 susvisée;

Vu le décret n° 78-509 du 24 mars 1978 pris pour l’application des articles 5 et 12 de la loi n° 78-22 susvisée, et notamment son modèle – type n° 9;

Les professionnels concernés entendus;

Considérant que la location avec promesse de vente, appelée encore location avec option d’achat, est souvent proposée aux consommateurs désireux d’acquérir certains biens de valeur, tels des véhicules automobiles, des caravanes, des bateaux de plaisance, des postes de télévision, des chaînes hi-fi, des magnétoscopes, des appareils photos de haut de gamme, des pianos, etc.;

Considérant que ce contrat qui permet à un particulier de jouir immédiatement d’un bien en qualité de locataire, puis de l’acquérir en fin de contrat grâce précisément à l’option d’achat incluse dans la convention, connaît un succès certain; que l’attrait des consommateurs pour la location avec option d’achat s’explique par la forte motivation psychologique qui pousse les particuliers à posséder les biens pouvant être financés sous cette forme; qu’il est renforcé par la possibilité offerte aux consommateurs d’obtenir un financement total; qu’il est lié, enfin, à la durée du contrat qui, variant de quatre à sept ans, conduit à un étalement des paiements et met ainsi le montant des mensualités à payer à la portée de personnes titulaires de revenus moyens;

Considérant que la location avec promesse de vente de biens de consommation présente toutefois des inconvénients; que le montage juridique complexe du contrat échappe à la compréhension de beaucoup de consommateurs, certains d’entre eux croyant bénéficier d’un crédit classique pensent à tort être devenus propriétaires du bien en cause dès l’origine; que d’une manière plus générale encore, les consommateurs, au moment de la conclusion du contrat, n’ont guère leur attention attirée sur l’importance des obligations mises à leur charge lorsqu’ils cessent de pouvoir payer les mensualités ou bien encore lorsque le bien loué est détruit accidentellement; qu’il est à observer que dans l’immense majorité des cas, la location avec option d’achat est proposée aux consommateurs non pas par des professionnels des opérations financières mais par les vendeurs de biens de consommation qui proposent les formules de contrat des établissements de crédit; qu’ainsi les consommateurs ont pour interlocuteurs des personnes qui ne sont pas toujours aptes à les renseigner et qui, au surplus, soucieuses d’obtenir une commande, n’ont pas le moindre intérêt à faire ressortir les risques de l’opération;

Considérant que la loi s’est certes préoccupée d’assurer la protection des consommateurs; qu’à ce titre la location avec promesse d’achat est notamment soumise aux dispositions des articles 1152 et 1231 du code civil ainsi qu’à celles de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 relative à la protection des emprunteurs dans le domaine du crédit à la consommation; mais considérant que si ce dernier texte en particulier limite la liberté contractuelle des établissements de crédit, il ne la supprime pas; que dans une assez large mesure, ces établissements conservent le droit de rédiger leurs contrats en choisissant les clauses qui leur conviennent; qu’en outre, des établissements de crédit donnent de certaines dispositions de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 une interprétation défavorable aux consommateurs;

Considérant que les documents contractuels des établissements de crédit encourent des critiques; que leur présentation est parfois défectueuse; qu’ils renferment aussi des clauses qui sont susceptibles d’être déclarées abusives par la commission;

Considérant que, conformément aux dispositions de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, la location avec promesse de vente doit donner lieu à la rédaction d’une offre préalable qui devient le contrat définitif après l’acceptation donnée par le destinataire, tout au moins s’il ne fait pas usage de la faculté de rétractation et s’il obtient l’agrément de l’établissement de crédit dans les cas où celui-ci s’est réservé ce droit;

Considérant que cette offre contient fréquemment les clauses de plusieurs contrats distincts: contrat de location avec option d’achat proprement dit, contrat de cautionnement, contrat (s) d’assurances et quelquefois même contrat d’entretien du matériel loué; que la signature apposée par le consommateur vaut acceptation non seulement du contrat principal mais également des contrats d’assurances ou d’entretien figurant dans l’offre; que cette pratique est abusive; qu’il importe que la présentation matérielle de l’offre permette aux consommateurs de se rendre compte de la pluralité de contrats insérés dans le document; que l’attention du consommateur doit être attirée sur le fait qu’il n’est pas obligé de souscrire à tous ces contrats; qu’il est nécessaire que l’acceptation par le consommateur du contrat de location avec option d’achat et éventuellement des contrats d’assurances et d’entretien prévus dans l’offre préalable fassent l’objet non pas d’une signature unique mais d’autant de signatures que de contrats conclus;

Considérant que dans certains contrats, la signature du consommateur et celle de la caution figurent au recto du document alors que les conditions générales sont mentionnées au verso; que le document contractuel se présente même parfois sous la forme d’une liasse dont le dernier exemplaire ne reproduit pas au verso les conditions générales; que lors de la signature du contrat, le consommateur peut donc ignorer l’existence de celles-ci; que la généralisation des signatures au pied des conditions générales est de nature à favoriser la prise de connaissance de celles-ci;

Considérant que toutes les offres préalables ne permettent pas au consommateur d’apprécier le coût des assurances facultatives que l’établissement de crédit lui propose; qu’en effet, les primes de ces assurances sont incorporées dans les loyers; qu’une bonne information du consommateur exige que le coût du contrat avec assurance et sans assurance lui soit communiqué; que si le contrat prévoit plusieurs contrats d’assurances, il paraît normal d’indiquer le coût de chacune de ces assurances;

Considérant que le consommateur qui souscrit à une ou plusieurs polices d’assurances figurant dans l’offre préalable doit être informé de l’acceptation de l’assureur;

Considérant que les contrats de location avec promesse de vente de voitures automobiles, de caravanes ou de bateaux de plaisance imposent habituellement au consommateur d’assurer la chose par une police qualifiée  » tous risques « ; que la conclusion d’une telle assurance induit souvent en erreur le consommateur sur l’étendue des garanties qui lui sont accordées; que de nombreux consommateurs estiment à tort être couverts de toutes les sommes qui sont dues à l’établissement de crédit en cas de perte, de vol ou de destruction de la chose alors que l’assurance  » tous risques  » couvre seulement la valeur vénale du bien; que le consommateur doit être informé clairement de la portée limitée de l’assurance  » tous risques  » et de la nécessité dans laquelle il se trouve de souscrire en plus une assurance dite  » financière complémentaire  » s’il veut être garanti totalement des sommes dues à l’établissement de crédit;

Considérant que des offres préalables se contentent de mentionner de brefs extraits des conditions générales des polices d’assurances; que la bonne information des consommateurs exige que ces extraits soient suffisamment significatifs;

Considérant que la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 n’oblige pas l’établissement de crédit à indiquer le taux effectif global d’intérêt (T.E.G.) de la loi du 28 décembre 1966 lorsque le contrat est fondé sur un contrat de location; que de ce fait, cette information ne figure sur aucun contrat; qu’il est regrettable que le consommateur ne soit en possession d’aucun renseignement à cet égard; qu’il est ainsi souhaitable que l’offre préalable fasse apparaître un taux d’intérêt calculé de façon analogue au T.E.G.;

Considérant que certaines clauses sont rédigées d’une manière incompréhensible pour un profane; que c’est le cas fréquemment des clauses qui définissent les obligations financières du consommateur en cas de sinistre total ou partiel de la chose louée; qu’un effort doit être entrepris pour faciliter la compréhension du contrat par le consommateur;

Considérant que des contrats avertissent la caution de son obligation de satisfaire à l’engagement du locataire si ce dernier est défaillant; que cette mention qui informe la caution de la portée de sa signature, et en particulier du montant maximum de son engagement, mérite d’être généralisée;

Considérant que l’article 8 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 autorise le juge d’instance statuant en référé dans les conditions prévues à l’article 1244 du code civil à suspendre les obligations du débiteur, notamment en cas de licenciement; que l’offre doit informer le locataire de la possibilité de s’adresser au juge dans l’hypothèse où il éprouverait des difficultés financières;

Considérant que de nombreuses clauses, qui se rencontrent plus ou moins fréquemment en pratique, sont abusives par leur contenu;

Considérant que d’une manière courante, le contrat contient un mandat général d’exercer les droits et actions du bailleur contre le vendeur donné par l’établissement de crédit au locataire; qu’à ce titre, le locataire peut, par exemple, agir en garantie des vices cachés directement contre le vendeur; que ce mandat qui est dans la logique du contrat de location avec option d’achat comporte parfois des réserves ou des limitations qui peuvent mettre en péril les intérêts du locataire; que s’il est normal de prévoir dans le contrat l’obligation pour le locataire qui veut agir en résolution de la vente, de se concerter avec le bailleur, il est abusif de réserver au seul établissement de crédit le droit d’intenter cette action ou de décider que le mandat donné au locataire est révocable à tout moment; qu’en pareil cas, le locataire peut être privé des dispositions d’ordre public de l’article 9 alinéa 2 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 suivant lesquelles le contrat de crédit  » est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé « ; qu’il peut ainsi être contraint de supporter le contrat alors que la chose louée, par ses défauts, est pratiquement inutilisable;

Considérant que les améliorations apportées à la chose par le locataire sont considérées comme devenant la propriété du bailleur soit immédiatement, soit à l’expiration de la location ; qu’il est abusif de ne pas permettre au consommateur de reprendre les adjonctions ou les améliorations du matériel loué à condition de mettre ce dernier en état;

Considérant que des clauses de révision des loyers figurent dans les contrats; qu’elles sont abusives si elles autorisent le bailleur à faire varier les loyers d’une manière unilatérale et arbitraire; que c’est le cas si l’établissement de crédit se reconnaît le droit de modifier les loyers lorsque des variations indépendantes de sa volonté appréciées par lui seul se produisent;

Considérant que la plupart des conditions générales réservent au bailleur le droit d’exiger de son client le versement d’un dépôt de garantie lors de la livraison du bien; que ce dépôt garantit les sommes dues par le locataire en cas de résolution du contrat ou, à défaut, il est imputé sur le prix de vente si le consommateur opte pour l’achat du bien; que ce dépôt est abusif uniquement si la publicité faite par l’établissement de crédit s’appuie sur la possibilité offerte au consommateur d’obtenir un financement total ou bien encore s’il apparaît que, malgré le versement d’un dépôt de garantie, les intérêts de la somme prêtée sont calculés en fonction d’un crédit total;

Considérant que tous les contrats envisagent les conséquences du sinistre total de la chose louée; qu’ils assimilent à cette situation le sinistre partiel si la chose est irréparable ou si les frais de réparation sont supérieurs à la valeur de la chose ainsi que le vol de la chose louée; que la survenance de l’un de ces événements entraîne la résiliation du contrat et ouvre un droit à indemnité au profit du bailleur; que le montant de cette indemnité est toujours élevé; que dans certains contrats l’indemnité est égale au montant des loyers hors taxes actualisés restant à courir majoré de la T.V.A.; que dans d’autres contrats, le locataire est redevable de l’indemnité prévue par l’article 21 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978; qu’elle est alors égale à la différence entre, d’une part, la somme des loyers non encore échus et de la valeur résiduelle du bien stipulé au contrat, et, d’autre part, la valeur vénale, à la date de la défaillance, du bien restitué (art. 3 du décret du 17 mars 1978); que dans de nombreux contrats, ces indemnités sont dues immédiatement au bailleur, c’est-à-dire sans attendre l’intervention éventuelle des assureurs;

Considérant que ces solutions sont d’une extrême sévérité pour le consommateur; qu’il paraît abusif d’assimiler systématiquement le sinistre total ou le vol de la chose à la défaillance du locataire et de mettre à sa charge l’indemnité très élevé de l’article 21 de la loi de 1978; que cette interprétation de la loi en déforme le sens;

Considérant qu’il est abusif de ne pas distinguer suivant les causes de perte ou de destruction de la chose; que si la perte ou la destruction de la chose est due à un cas de force majeure, le contrat est résilié et le bailleur doit en supporter les risques, conformément à l’article 1722 du code civil ; que si la perte ou la destruction de la chose se produit sans qu’une faute puisse être imputée au locataire, aucune somme de ce fait ne peut lui être réclamée; que c’est seulement si la disparition de la chose est due à la faute du locataire qu’une clause pénale peut être admise;

Considérant que de nombreuses autres clauses résolutoires sont insérées dans les locations avec option d’achat; que la résolution du contrat est prévue non seulement en cas de non-paiement des loyers par le consommateur mais encore s’il ne respecte pas l’une quelconque de ses obligations contractuelles, s’il est en état de cessation de paiement, de faillite, s’il y a diminution des garanties, des sûretés; qu’à ces causes s’ajoutent couramment la cessation d’activité et le décès du locataire; que dans un contrat, il est même stipulé qu’en cas de modification des barèmes de l’établissement de crédit, celui-ci pourra invoquer la résolution du contrat; qu’une telle énumération est abusive; que la résolution du contrat du seul fait de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire est contraire à l’article 37 (alinéa 5) de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985; que la possibilité de résoudre le contrat, s’il survient une modification des tarifs de l’établissement de crédit, est scandaleuse, même si le bailleur s’interdit de demander une indemnité à son locataire; que la résolution pour manquement du consommateur à l’une quelconque de ces obligations peut engendrer des abus, le bailleur pouvant profiter de la moindre défaillance du locataire pour mettre fin au contrat; que le jeu de la clause résolutoire, si le consommateur cesse son activité, est anormal, si cet événement ne se traduit pas par l’arrêt du paiement des loyers; qu’enfin la résiliation automatique du contrat au jour du décès du locataire est abusive car elle prive les héritiers d’un élément du patrimoine du défunt;

Considérant qu’il est encore plus grave pour l’établissement de crédit de prétendre dans tous les cas de résolution à l’indemnité prévue à l’article 21 de la loi de 1978; que si la défaillance du locataire, au sens de la loi, ne fait pas de doute en cas de non-paiement des loyers ou en cas de non-respect d’une obligation essentielle du contrat, en revanche, elle ne peut être invoquée si le contrat est résilié, à la demande du bailleur, à la suite du décès du locataire ou de la cessation de son activité professionnelle; que si le juge peut intervenir pour modérer l’indemnité mise à la charge du locataire conformément aux dispositions de la loi du 9 juillet 1975 il n’en reste pas moins que la stipulation contractuelle qui amalgame toutes les clauses de résolution est abusive;

Considérant que la restitution de la chose en fin de contrat si le locataire n’exerce pas l’option d’achat ou si le contrat est résilié donne lieu à des clauses dont certaines sont abusives; que, tout d’abord, des stipulations laissent au bailleur le choix du lieu de restitution; que si l’on songe au coût du transport de certains biens, comme par exemple un bateau, l’exercice de l’option du bailleur peut encore contribuer à alourdir les charges du consommateur; qu’ensuite il est des contrats de location avec promesse de vente de véhicules automobiles qui obligent le locataire à restituer la voiture conformément aux normes de l’Argus; qu’ainsi une indemnité est due au bailleur si notamment le kilométrage parcouru par la voiture est supérieur à cette norme; que cette clause est abusive, son jeu intervenant alors que l’amortissement financier du bien est réalisé ou bien encore s’il y a résiliation du contrat, elle conduit à majorer l’indemnité légale due par le locataire; qu’enfin, sans exiger une restitution conforme à des normes précises, de nombreux contrats imposent de rendre la chose louée en bon état; qu’il est abusif de laisser au seul bailleur le droit d’apprécier l’état de la chose et de contraindre le locataire à supporter le coût des réparations qu’il décide unilatéralement;

Considérant que les conditions dans lesquelles la chose reprise est vendue, en cas de défaillance du locataire, sont très souvent anormales; que le prix obtenu est généralement sensiblement inférieur à celui qui pouvait être escompté; qu’il s’ensuit une aggravation de la situation du locataire; que pour permettre au locataire défaillant de contribuer à la recherche d’une solution optimale, il semble raisonnable de lui permettre de présenter un acheteur dans un délai d’un mois à compter de la restitution du bien; que si, pour éviter une fraude éventuelle, l’établissement de crédit peut refuser une offre insuffisante, il doit dans cette hypothèse retenir un prix qui ne peut pas être inférieur à l’offre refusée;

Considérant qu’une clause répandue en pratique autorise le bailleur à mettre fin à tous les contrats de location avec option d’achat conclus avec le locataire s’il est amené à résilier l’un d’eux pour une raison quelconque; qu’on imagine facilement les conséquences pour le locataire de l’application de cette clause et en particulier du poids des indemnités de résiliation qu’elle peut faire peser sur lui; que cette clause est abusive si la défaillance du consommateur n’est pas générale;

Considérant que la cession du contrat à un tiers est le plus souvent autorisée avec l’accord du bailleur mais que certaines clauses maintiennent à la charge du cédant les obligations nées du contrat; que cet engagement solidaire du cédant est abusif, l’agrément donné par l’établissement de crédit à la personne du cessionnaire devant libérer le cédant de toutes ses obligations;

Considérant que la caution est amenée dans de nombreux contrats à renoncer au bénéfice de subrogation prévu par l’article 2037 du code civil; que cette clause doit désormais être réputée non écrite en raison des dispositions de l’article 49 de la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises,

Recommande:

A. – Que les contrats de location avec promesse de vente de biens de consommation comportent;

1. une présentation suffisamment claire permettant au consommateur de distinguer les différents contrats inclus dans le document contractuel;

2. plusieurs emplacements réservés à la signature séparée des différents contrats et principalement des contrats d’assurances que le consommateur accepte de conclure;

3. la signature du consommateur ainsi que celle de la caution au pied des conditions générales;

4. l’indication claire du coût de chacune des assurances facultatives proposées par l’établissement de crédit;

5. une clause prévoyant que le consommateur doit être informé de l’acceptation donnée par l’assureur aux contrats d’assurances souscrits par le particulier; à défaut de cette information, le risque qui aurait dû être couvert par l’assurance est supporté par le bailleur;

6. une mention informant clairement le consommateur que l’assurance  » tous risques  » de la chose louée couvre uniquement la valeur vénale du bien et qu’elle ne garantit pas le locataire de toutes les sommes dues à l’établissement de crédit en cas de résiliation du contrat;

7. la reproduction d’extraits significatifs des conditions générales des assurances proposées;

8. l’indication d’un taux d’intérêt calculé de façon analogue au T.E.G. de la loi du 28 décembre 1966;

9. une rédaction compréhensible pour le consommateur du mode de calcul des indemnités dues à l’établissement de crédit;

10. la mention que la caution s’engage à payer à l’établissement de crédit les sommes dues par le locataire en cas de défaillance de sa part ainsi que leur montant maximum;

11. le rappel des dispositions de l’article 8 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978.

B. – Que soient éliminées des contrats de location, avec promesse de vente de biens de consommation, les clauses abusives ayant pour objet ou pour effet :

1. de réserver au seul établissement de crédit le droit d’intenter l’action en résolution de la vente ou de permettre au bailleur de révoquer à tout moment le mandat donné au locataire d’agir à sa place contre le vendeur;

2. de refuser au locataire le droit de reprendre les adjonctions ou les améliorations de la chose à condition qu’il remette celle-ci en état;

3. d’autoriser le bailleur, en cas de révision de loyer, à faire varier les mensualités dues par le locataire d’une manière unilatérale et arbitraire;

4. de prévoir le versement d’un dépôt de garantie si la publicité faite par l’établissement financier ou par le vendeur annonce l’octroi d’un financement total aux consommateurs ou si les loyers réclamés au locataire sont calculés compte non tenu de ce dépôt de garantie;

5. d’assimiler le sinistre total ou le vol de la chose à la défaillance du locataire et de mettre à sa charge l’indemnité de l’article 21 de la loi de 1978;

6. en cas de perte ou de destruction de la chose due à un cas de force majeure ou sans qu’il y ait eu faute du locataire, de mettre à la charge de ce dernier une quelconque somme de ce fait;

7. de prévoir la résolution du contrat en se fondant :

  • sur l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire;
  • sur la variation des tarifs du bailleur;
  • sur l’inexécution de l’une des obligations du consommateur sans préciser de laquelle il doit s’agir;
  • sur la cessation d’activité du locataire sans exiger qu’il cesse de payer ses loyers;
  • sur une diminution des garanties sans dire de quelles garanties il s’agit;
  • sur le décès du locataire;

8. d’exiger le versement de l’indemnité prévue à l’article 21 de la loi de 1978 dans toutes les hypothèses de résolution du contrat alors que le texte suppose la défaillance du consommateur, c’est-à-dire le non-paiement des loyers ou le non-respect d’une obligation essentielle du contrat;

9. d’abandonner à l’établissement de crédit, au moment de la restitution, le choix du lieu où doit être rendue la chose louée;

10. d’imposer la restitution d’un véhicule suivant les normes Argus ou la restitution de la chose en fonction de l’état apprécié par le seul bailleur;

11. d’autoriser l’établissement de crédit à réaliser le bien repris en cas de défaillance du locataire sans même permettre à ce dernier de présenter un acheteur faisant une offre satisfaisante;

12. d’autoriser l’établissement de crédit à mettre fin à tous les contrats de location avec option d’achat conclus avec le même locataire dès qu’il constate la défaillance de celui-ci dans l’exécution de l’un de ces contrats;

13. d’engager solidairement le cédant et le cessionnaire en cas de cession du contrat approuvée par le bailleur;

14. de faire renoncer la caution au bénéfice de subrogation de l’article 2037 du code civil, contrairement aux dispositions de l’article 49 de la loi du 1er mars 1984.

(Texte adopté le 17 janvier 1986, sur le rapport de M. Bernard Gross.)

 

Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur financier

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil, notamment ses articles 1792 et suivants et 2270;

Vu le code de la construction et de l’habitation, notamment ses articles L. 231-1 et suivants, R. 231-1 et suivants;

Vu la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l’assurance dans le domaine de la construction;

Entendu les représentants des professionnels intéressés.

Considérant que, malgré la réglementation en vigueur, de nombreux contrats habituellement proposés aux acquéreurs de maisons individuelles à construire selon un plan établi à l’avance comportent des clauses qui dérogent à cette protection, la rendent inopérante ou aboutissent à déséquilibrer totalement le contrat conclu au profit du seul professionnel; qu’il convient tant dans l’intérêt de la protection des consommateurs que dans celui des professionnels en vue d’un assainissement des pratiques commerciales, d’éliminer de telles clauses;

Considérant que les contrats de construction de maisons individuelles sont des contrats synallagmatiques; que les clauses faisant dépendre la validité du contrat signé par les représentants des deux parties d’une confirmation par le professionnel ont pour effet d’engager unilatéralement le consommateur et de lui faire verser des sommes, alors que le professionnel, lui, n’est pas encore engagé; que de telles clauses contraires à l’équilibre des obligations contractées ont déjà été dénoncées par la commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 80-03 C.C.A. du 8 août 1980;

Considérant que de nombreux contrats posent en principe l’inopposabilité au professionnel des documents publicitaires établis par lui ou des maisons témoins exposées par lui; que, cependant, la consultation de ces documents et la visite de ces maisons constituent l’un des éléments déterminants du consentement du consommateur au contrat qui lui est proposé;

Considérant que l’article 45-1 de la loi du 27 juillet 1971, devenu les articles L. 231-1 et suivants susvisés du code de la construction et de l’habitation, dispose que le contrat est toujours conclu sous la condition suspensive d’octroi des autorisations administratives et qu’en cas de refus de celles-ci toutes les sommes versées par le consommateur devront lui être remboursées; que, cependant, certains contrats prévoient que le professionnel pourra conserver certaines sommes au titre des frais de dossier, des plans ou des études; que ces clauses sont contraires aux dispositions formelles de la loi et qu’elles ont pour effet d’annuler la protection que le législateur a ainsi voulu accorder à l’acquéreur;

Considérant que l’article *R. 231-9 du code de la construction et de l’habitation ouvre la possibilité pour l’une ou l’autre partie de prévoir la résiliation du contrat dans le mois qui suit sa signature; que si de nombreux contrats stipulent bien cette faculté, ils la réservent au seul professionnel;

Considérant que la plupart des contrats prévoient que le prix indiqué correspond à une construction réalisée sur un terrain de résistance normale; que le consommateur, non technicien, ne peut savoir ce qu’est un terrain de résistance normale et se trouve exposé à de nombreux frais supplémentaires qu’il ne pouvait prévoir et dont il ne peut vérifier le bien-fondé; qu’il appartient au professionnel, qui est, lui, un technicien averti et compétent, de s’assurer, avant la signature définitive du contrat, de la nature du terrain et qu’aucun supplément ne pourra être réclamé de ce chef, après la signature du contrat;

Considérant que de nombreux contrats stipulent que le professionnel pourra, pendant toute la durée des travaux, interdire l’accès du chantier à toute personne, y compris le consommateur acquéreur; que, certes, le professionnel doit être protégé contre toute immixtion abusive du consommateur sur le chantier; que, cependant, le consommateur est en droit de vérifier l’état d’avancement des travaux qui conditionnent les paiements, et la manière dont ces travaux sont effectués; qu’il convient, conformément aux usages du bâtiment, de prévoir dans les contrats une visite hebdomadaire du chantier à laquelle le consommateur pourra participer;

Considérant que selon la réglementation en vigueur (art. *R. 231-4 du code de la construction et de l’habitation susvisé), le prix fixé dans le contrat doit comprendre tous les frais et honoraires et ne peut plus être modifié, sauf avenants expressément acceptés par le consommateur; que, cependant, certains contrats parviennent à tourner cette protection par diverses clauses mettant à la charge de l’acquéreur, en sus du prix convenu, le coût des plans ou encore la remise en état du terrain ou de la voirie, ou même en rendant obligatoire pour le consommateur la signature des avenants proposés par le professionnel;

Considérant que de nombreux contrats prévoient des délais draconiens pour le paiement du prix des travaux, certains exigeant le paiement sous vingt-quatre heures ou quarante-huit heures; qu’un délai de quinze jours après présentation des situations paraît raisonnable; qu’au surplus, les sanctions prévues par contrat en cas de retard du consommateur dans ses paiements sont souvent exagérées; que, certes, de telles clauses pénales sont toujours réductibles par le juge aux termes de l’article 1152 du code civil, mais que le consommateur l’ignorant bien souvent, ces clauses qui vont jusqu’à prévoir, à la seule volonté du professionnel, la résiliation du marché et le paiement intégral du prix, dés le moindre retard dans les paiements, pèsent anormalement sur la volonté du consommateur; qu’il peut, au demeurant, avoir des motifs parfaitement fondés pour retarder un paiement qui ne correspondrait pas à l’avancement réel des travaux;

Considérant qu’inversement, les professionnels insèrent dans les contrats des clauses particulièrement favorables à leurs intérêts en ce qui concerne les délais d’exécution de leurs travaux; que ces délais, fixés par le contrat, ne doivent pouvoir être augmentés qu’en cas de force majeure, de cas fortuit ou d’intempéries; que tous les autres motifs d’allongement des délais doivent être interdits; que naturellement, en cas d’allongement des délais pour des motifs étrangers au contrat, les révisions de prix doivent être neutralisées;

Considérant que les contrats prévoient généralement, en cas de retard du professionnel dans l’exécution de ses travaux, des pénalisations dérisoires;

Considérant que la réception des travaux est un acte important de l’opération de construction; que la plupart des contrats contiennent des clauses qui ont pour effet, sinon pour finalité, d’obliger le consommateur à prononcer la réception sans réserves quand bien même les travaux ne seraient pas achevés ou que de nombreux défauts apparents existeraient; qu’en effet, la majorité des contrats stipulent que le consommateur n’a le choix qu’entre prononcer la réception sans aucune réserve ou refuser cette réception, auquel cas le professionnel ne lui remettra pas les clefs, et ce quand bien même les réserves ne porteraient que sur quelques vices apparents ou travaux de finition; que ces clauses pèsent de manière excessive sur la volonté du consommateur qui, pressé de prendre possession, accepte bien souvent de signer une réception sans réserves qui ne correspond ni à sa volonté ni à la réalité;

Considérant que les garanties dues par le professionnel sont clairement définies par les articles 1792 et suivants du code civil; que toutes les clauses limitant dans le temps ou dans l’étendue des réparations la garantie de parfait achèvement, la garantie biennale et la garantie décennale dues par le professionnel sont illégales et doivent être éliminées des contrats;

Considérant, en ce qui concerne la résiliation du contrat par le consommateur, que le professionnel est en droit de demander le règlement des travaux qu’il a effectués, des frais qu’il a exposés et du bénéfice qu’il était en droit d’espérer si le contrat avait été mené à son terme; que, par contre, les clauses du contrat prévoyant, outre le paiement des travaux et des frais, des indemnités forfaitaires allant jusqu’à 30 p. 100 du montant global du marché, sont manifestement excessives;

Considérant que toutes les clauses compromissoires ou celles obligeant le consommateur à recourir à une mesure d’expertise amiable préalable sont abusives; que de même sont abusives toutes les clauses faisant attribution de compétence au tribunal du siège social du professionnel, ou au tribunal de commerce,

Recommande:

Que soient éliminées des contrats habituellement conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, acquéreurs de maisons individuelles à construire selon un plan établi à l’avance, les clauses ayant pour objet ou pour effet:

1° de prévoir lors de la signature du contrat un engagement immédiat et définitif du consommateur et un engagement éventuel du professionnel;

2° de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat dans le mois qui suit sa signature sans que cette même faculté soit explicitement reconnue au consommateur;

3° de rendre inopposable au professionnel ses propres documents publicitaires ou la référence à ses maisons d’exposition;

4° de permettre au professionnel, contrairement à la loi, en cas de refus du permis de construire, de conserver tout ou partie des sommes versées par le consommateur;

5° de permettre au professionnel de modifier unilatéralement le prix convenu en fonction de la nature du terrain;

6° d’interdire l’accès du consommateur au chantier pendant toute la durée des travaux, la faculté pour le consommateur de participer à une réunion hebdomadaire sur le chantier pendant toute la durée des travaux devant être précisée dans le contrat;

7° de majorer le prix déterminé par le contrat notamment pour cause de travaux supplémentaires autrement que par voie d’avenants librement acceptés par le consommateur;

8° de prévoir pour le paiement des acomptes un délai inférieur à quinze jours à dater de la présentation des situations;

9° de fixer les pénalités dues par le consommateur, en cas de retard dans les paiements, à des sommes supérieures au montant correspondant aux usages et normes en vigueur dans le bâtiment;

10° de prévoir la résiliation du contrat, en cas de retard dans les paiements, sans que celle-ci ait été précédée d’une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, ladite résiliation ne pouvant intervenir moins d’un mois après cette mise en demeure;

11° de décharger le professionnel de son obligation d’exécuter les travaux dans les délais prévus par le contrat et notamment de prévoir des causes légitimes de retard autres que les intempéries et les cas de force majeure;

12° d’accorder au consommateur, en cas de retard du professionnel dans l’exécution de ses travaux, des indemnités et pénalités disproportionnées avec celles qui sanctionnent les retards du consommateur dans ses paiements;

13° de supprimer ou de réduire la faculté pour le consommateur d’émettre des réserves lors de la réception des travaux, et notamment de subordonner la remise des clefs à une réception sans réserves;

14° de subordonner la remise des clefs au paiement intégral du prix et de faire ainsi obstacle au droit du consommateur de consigner les sommes restant dues entre les mains d’un séquestre;

15° de réduire les garanties dues par le professionnel en vertu des articles 1792 et suivants du code civil;

16° d’attribuer au professionnel, en cas de résiliation du contrat du fait du consommateur, une indemnité supérieure au montant des travaux qu’il a effectués, des frais qu’il a exposés et du bénéfice qu’il était en droit d’espérer si le contrat avait été mené à son terme;

17° d’imposer le recours à un arbitrage pour un litige qui n’est pas encore né ou le recours à une expertise amiable préalablement à toute action en justice; de déroger aux règles légales de compétence territoriale ou d’attribution.

Délibéré sur le rapport de Me Bihl dans les séances des 16 septembre et 18 novembre 1980, où siégeaient M. P. Lutz, conseiller à la Cour de cassation, président, MM. R. Bernard, L. Bihl, J. Calais-Auloy, Y. Cotte, R. Grise, B. Gross, P. Leclercq, P. Marleix, N. Renaudin, J. Semler-Collery, P. Simonet, membres.

 

Voir également :

Recommandation n° 91-03
Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur de l’immobilier

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil;

Vu le nouveau code de procédure civile;

Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et pré enseignes;

Vu les saisines de la commission des clauses abusives émanant d’organisations de consommateurs agréées.

Considérant que les conditions de durée et les modalités de résiliation des contrats conclus entre bailleurs non professionnels, d’une part, et professionnels locataires d’emplacements publicitaires, d’autre part, sont fixées par la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 susvisée;

Considérant que le bailleur ne donne en location qu’un emplacement délimité et qu’il peut jouir à sa guise des autres parties de sa propriété pendant la durée du bail; qu’en particulier, il peut louer d’autres emplacements à qui bon lui semble;

Considérant que le propriétaire, après l’expiration du bail, peut louer au locataire de son choix tout emplacement, y compris celui ayant fait l’objet du bail;

Considérant que doivent être prises en compte, contradictoirement par le bailleur et le preneur, toutes les incidences, pour l’exploitation de l’emplacement publicitaire, des modifications et des réglementations administratives, des tracés des voies routières et de tout autre élément extérieur à la volonté des parties; que, dès lors, le preneur ne peut se réserver le droit de suspendre unilatéralement le contrat;

Considérant que s’il est conforme au droit, notamment à l’article 1719 du code civil, que le bailleur soit tenu d’entretenir l’emplacement publicitaire en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué, la charge qui en résulte doit être strictement limitée à la chose louée; que l’obligation de couper ou d’arracher la végétation masquant les panneaux n’incombe pas systématiquement au bailleur;

Considérant que la garantie de visibilité des panneaux publicitaires normalement due par le bailleur à son locataire ne peut être exigée lorsque les obstacles qui la rendent difficile ou impossible ne sont pas de son fait ou sont nécessités par des besoins de réparations urgentes; qu’il en est ainsi, notamment, des travaux effectués sur la voie publique ou de la réfection d’un mur sur lequel reposent les panneaux; que, dans ces cas, le bailleur ne peut être obligé de mettre en place des solutions de remplacement, par exemple des panneaux rehaussés;

Considérant que le locataire ne peut être laissé seul juge de la diminution du loyer, de la suspension du bail ou de sa résiliation; que, notamment, il ne peut apprécier unilatéralement une réduction de la valeur de l’emplacement publicitaire;

Considérant que le bailleur peut, en cas de litige, exercer tout recours devant les tribunaux légalement compétents selon les articles 42 et suivants du nouveau code de procédure civile;

Considérant que les clauses contraires aux principes énoncés ci-dessus sont abusives au sens de l’article 35 de la loi susvisée,

Émet la recommandation:

Que soient éliminées des contrats conclus entre bailleurs non professionnels, d’une part, et professionnels locataires d’emplacements publicitaires, d’autre part, les clauses suivantes ayant pour objet ou pour effet:

1° d’interdire au bailleur de louer un emplacement voisin à un autre locataire;

2° d’interdire au propriétaire de relouer après l’expiration du contrat le même emplacement au locataire de son choix;

3° de permettre au preneur de suspendre temporairement le contrat pour une raison qu’il apprécie unilatéralement;

4° d’imposer au bailleur des charges qui ne soient pas directement liées à l’entretien de la chose louée;

5° d’obliger le bailleur à garantir en tout état de cause la visibilité des panneaux publicitaires, de mettre à sa charge des solutions de remplacement en cas d’empêchement indépendant de sa volonté ou d’autoriser unilatéralement le preneur à diminuer le prix, à suspendre ou à résilier le contrat;

6° de supprimer ou de réduire le droit de recours du bailleur en cas de litige;

7° d’attribuer la compétence aux seuls tribunaux du ressort dont dépend le siège social de la société locataire.

Adoptée sur le rapport de M. Marleix dans la séance du 4 février 1980 où siégeaient: M. Paul Lutz, conseiller à la Cour de cassation, président, et Mme Achach, Mlle Aubertin, MM. Bihl, Cotte Grise, Gross, Lemontey, Marleix, Semler-Collery, Simonet, membres.

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services, et notamment son article 37 qui prévoit la compétence de la commission pour connaître des contrats « habituellement proposés par des professionnels à leurs contractants non professionnels ou consommateurs »;

Vu le code civil;

Vu la loi du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement;

Vu le décret n° 78-464 du 24 mars 1978 portant application du chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu les accords signés dans le cadre des travaux de la commission permanente pour l’étude des charges locatives et des rapports entre propriétaires, gestionnaires et usagers;

Vu le rapport du comité national de la consommation sur les clauses abusives dans les contrats de location de locaux à usage d’habitation;

Vu les saisines de la commission des clauses abusives émanant d’organisations de consommateurs agréées et de la commission elle-même;

Entendu M. Delmon, président de la commission permanente pour l’étude des charges locatives et des rapports entre propriétaires, gestionnaires et usagers;

Entendu les représentants des organisations de locataires et de professionnels intéressés.

Considérant que les contrats de location de locaux à usage d’habitation proposés aux locataires ne comportent pas toujours toutes les mentions utiles à l’information des locataires sur leurs droits et leurs obligations, qu’il en est ainsi plus particulièrement:

– de la référence au régime juridique auquel est assujetti le contrat; qu’une telle mention doit permettre au locataire de savoir si le contrat qu’il signe est régi ou non par la loi du 1er septembre 1948 susvisée ou toute autre réglementation, notamment relative aux logements sociaux;

– du texte intégral de tous les documents portant des obligations, en particulier du règlement intérieur régissant l’immeuble loué et du texte des accords susvisés signés dans le cadre de la commission permanente pour l’étude des charges locatives et des rapports entre propriétaires, gestionnaires et usagers lorsque le bailleur s’est engagé à les appliquer;

– de la détermination de la durée du contrat et de la date à laquelle il prend effet;

– de l’identification et de la qualité des parties contractantes; qu’il doit être indiqué si le signataire du contrat agit à titre personnel ou en tant que mandataire; qu’en outre il doit être précisé qu’en cas de décès du preneur, le contrat puisse bénéficier au conjoint;

– de l’état des lieux contradictoirement dressé;

Considérant que le bailleur est généralement tenu des trois obligations suivantes:

1° délivrer les lieux loués suivant les conditions prévues lors de la conclusion du contrat et en bon état de réparation; ne pas modifier la forme des lieux loués, ni diminuer ou supprimer unilatéralement les services prévus; et ne pas obliger le preneur à prendre les lieux loués dans l’état où ils se trouvent au moment de l’entrée en jouissance sans pouvoir demander aucune remise en état ou réparation en cours de contrat;

2° entretenir les lieux loués; cette obligation lui imposant d’effectuer pendant la durée du contrat toutes les réparations autres que celles d’entretien courant et les menues réparations;

3° garantir le locataire pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l’usage; il en est ainsi notamment des défauts cachés, des vices de construction, des infiltrations, des défauts dus à la vétusté; le bailleur est en outre responsable des fautes et des négligences de ses préposés; il est également garant de son fait personnel et du fait des tiers;

Considérant qu’il ne peut être dérogé aux obligations ci-dessus que lorsque le contrat prévoit une contrepartie exceptionnelle, par exemple sur le montant du loyer ou sur la durée de la location;

Considérant que le locataire est tenu notamment des trois obligations suivantes:

1° utiliser les lieux loués suivant la destination prévue par le contrat, en bon père de famille; toutefois, à condition de respecter ces limites, la jouissance des lieux est un droit qui ne peut être réduit: ainsi son bailleur ne peut lui interdire de fixer dans les lieux loués le siège d’une association; le bailleur ne peut lui interdire la possession d’animaux familiers;

2° payer le loyer et les charges; cependant, le bailleur ne peut augmenter le loyer en cours de contrat en fonction de conditions unilatéralement appréciées par lui-même; par ailleurs, le locataire n’est redevable que des charges récupérables telles qu’elles sont définies selon le régime juridique de la location considérée par l’article 38 de la loi du 1er septembre 1948 susvisée ou par les accords signés dans le cadre de la commission permanente pour l’étude des charges locatives et des rapports entre propriétaires, gestionnaires et usagers; en tout état de cause, le bailleur doit justifier ces charges et permettre au locataire d’en vérifier le montant réel;

3° restituer les lieux dans l’état où il les a reçus tels que constatés contradictoirement à l’origine, sous réserve de la vétusté; le locataire ne saurait être tenu de les remettre à neuf;

Considérant que lors de la conclusion des contrats de location, le dépôt de garantie exigé des locataires par certains bailleurs dépasse abusivement un montant équivalent à deux mois de loyer et qu’en fin de location ce dépôt de garantie est remboursé souvent tardivement, plus de trois mois après l’expiration du contrat;

Considérant que les clauses résolutoires peuvent être justifiées notamment à l’encontre du locataire de mauvaise foi qui ne paie pas son loyer, à condition qu’un délai suffisant soit toutefois accordé pour qu’il s’en acquitte; mais qu’elles peuvent être abusives lorsque le locataire se contente de faire valoir ses droits, en particulier, lorsqu’il demande la justification de la réalité des charges locatives et exige une juste répartition de celles-ci ou l’application d’une des clauses du contrat;

Considérant que les clauses prévoyant le paiement par le locataire des frais de recouvrement des loyers et des charges impayées s’analysent comme des clauses pénales qui en vertu des dispositions légales en vigueur peuvent être réduites par le juge;

Considérant que le locataire ne peut être tenu en cas de recouvrement judiciaire du remboursement de sommes autres que celles résultant de frais de justice stricto sensu et des intérêts des sommes dues; et qu’en cas de recouvrement non judiciaire, il ne peut être obligé que de rembourser les frais réels;

Considérant que le tribunal d’instance du lieu de l’immeuble loué est seul compétent pour connaître les litiges nés du contrat de location de locaux à usage d’habitation;

Considérant que les clauses contraires aux principes énoncés ci-dessus sont abusives au sens de l’article 35 de la loi susvisée du 10 janvier 1978,

Recommande:

I. — Que les contrats de location de locaux à usage d’habitation proposés aux locataires comportent:

1° l’indication des références du régime juridique auquel est assujettie la location;

2° la précision de la durée du contrat et de la date à laquelle il prend effet;

3° l’indication de l’identité et de la qualité des parties;

4° l’état des lieux contradictoirement dressé;

5° l’énumération des réparations locatives;

6° l’énumération des charges récupérables et une information sur l’évolution de leur montant et sur leur répartition au cours des douze derniers mois (notamment eau, chauffage, électricité, entretien);

7° une clause donnant au locataire toute la possibilité de vérifier le montant réel des charges dont le remboursement lui est demandé, par la production des pièces comptables justificatives ou celles des contrats que le bailleur a pu conclure à ce titre;

8° l’engagement par le bailleur de rembourser dans un délai maximum de trois mois à compter de la fin du contrat de location, le montant du dépôt de garantie, déduction faite, le cas échéant, des sommes qui lui sont dues;

II. — Que soient éliminées des contrats de location de locaux à usage d’habitation proposés aux locataires, les clauses suivantes ayant pour objet ou pour effet:

1° d’exonérer le bailleur de sa responsabilité en cas de non-délivrance des lieux loués dans les conditions prévues lors de la conclusion du contrat;

2° d’empêcher le locataire d’obtenir réparation du préjudice qu’il subit en cas de modifications unilatéralement effectuées par le bailleur, portant soit sur les lieux loués, soit sur les prestations prévues;

3° d’exonérer le bailleur de son obligation d’entretenir les lieux loués et de procéder aux réparations qui lui incombent;

4° d’obliger le locataire à souffrir toutes les réparations jugées utiles par le bailleur, sans aucune diminution du loyer, même si les réparations durent plus de quarante jours;

5° de limiter l’obligation de réparation du bailleur aux seuls travaux visés par l’article 606 du code civil;

6° de décharger le bailleur de son obligation de garantie, notamment en cas de défauts ou vices empêchant l’habitation des lieux loués dans des conditions normales;

7° de décharger le bailleur de sa responsabilité du fait de ses préposés;

8° de limiter le droit du locataire de jouir en bon père de famille des lieux loués, notamment d’interdire directement ou indirectement la constitution ou le fonctionnement d’associations;

9° de faire payer au locataire des charges autres que celles considérées comme récupérables;

10° de fixer une limite au droit du locataire de vérifier le montant des charges dont le paiement lui est réclamé;

11° d’exiger du preneur un dépôt de garantie supérieur à deux mois de loyer;

12° d’autoriser le bailleur à résilier unilatéralement le contrat en dehors des cas de mauvaise foi du locataire;

13° d’empêcher le jeu normal de l’article 1152 du code civil sur la révision des clauses pénales;

14° d’obliger le locataire à rembourser les frais et honoraires exposés pour le recouvrement judiciaire et de prévoir un remboursement forfaitaire des frais exposés en cas de recouvrement non judiciaire;

15° de déroger aux règles légales de compétence territoriale ou d’attribution.

Délibérée sur les rapports de MM. Bihl, Grise et Simonet dans ses séances des 27 mars, 24 avril, 26 juin, 25 septembre, 27 novembre 1979 et 4 février 1980 où siégeaient M. Paul Lutz, conseiller à la Cour de cassation, président, Mme Achach, Mlle Aubertin, MM. Bihl, Calais-Auloy, Cotte, Delcourt, Grise, Gross, Lemontey, Marleix, Semler-Collery, Simonet, membres.

 

Voir également :

Recommandation n° 00-01
Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur de l’immobilier

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil;

Vu le code des assurances;

Vu le décret n° 78-464 du 24 mars 1978;

Vu une saisine de la commission des clauses abusives.

Considérant la clause selon laquelle, dans un contrat de vente d’un bien immobilier, l’acquéreur est tenu de continuer l’assurance souscrite par le vendeur, de la faire transférer à son nom dès la réception de l’acte constatant le transfert de propriété et de la maintenir tant qu’il sera débiteur d’une fraction du prix de la vente;

Considérant qu’une telle clause n’est pas abusive au sens de l’article 35 de la loi susvisée; qu’en effet :

  • en vertu des dispositions de l’article L. 121-10 du code des assurances, en cas d’aliénation de la chose assurée, l’assurance continue de plein droit au profit de l’acquéreur et il est loisible soit à l’assureur, soit à l’acquéreur de résilier le contrat;
  • suivant la jurisprudence actuelle, si la faculté de résiliation ne peut être écartée par une stipulation au contrat d’assurance, aucune disposition de la loi n’interdit à l’acquéreur de renoncer volontairement à cette faculté, en particulier, en prenant vis-à-vis de son vendeur l’engagement de continuer la police;

Mais considérant que le vendeur est tenu d’informer l’acquéreur sur ses droits et ses obligations,

Émet la recommandation:

Que, lorsque le contrat de vente d’un bien immobilier prévoit la reprise par l’acquéreur d’une assurance souscrite par le vendeur:

1° soit communiqué à l’acquéreur le contrat d’assurance;

2° soit rappelée dans le contrat de vente la faculté de résiliation du contrat d’assurance dont bénéficie l’acquéreur.

Délibérée sur le rapport de M. Gross dans les séances du 27 mars, du 24 avril et du 22 mai 1979, où siégeaient: M. Lutz, conseiller de la Cour de cassation, président ; Mme Achach, Mlle Aubertin, MM. Bihl, Calais-Auloy, Cotte, Delcourt, Gross, Lemontey, Marleix, Semler-Collery, Simonet, Stirn, membres.

 

Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur :