CA Metz, 13 mars 2025, RG n°23/01447
– contrat de prêt – clause de déchéance du terme – clause abusive – exigibilité immédiate – préavis raisonnable – office du juge – imprescriptibilité –
EXTRAITS
« Cette clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat sans mise en demeure préalable de régler les échéances impayées ni préavis d’une durée raisonnable crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement. Il s’agit d’une clause abusive, et il importe peu à cet égard que la jurisprudence antérieure ait été différente.»
ANALYSE
En 2007, la Caisse régionale du Crédit Agricole Mutuel de Lorraine a consenti plusieurs prêts hypothécaires à un emprunteur pour l’acquisition d’une résidence principale. L’un des contrats, conclus entre un professionnel et un consommateur, renvoyait à des conditions générales prévoyant qu’en cas de déchéance du terme, notamment en cas de non-paiement d’une ou plusieurs échéances, le prêteur pouvait se prévaloir de l’exigibilité immédiate de la totalité de sa créance par simple lettre recommandée.
La Cour d’appel de Metz applique l’article L.132-1 du code de la consommation, dans sa version applicable au moment de la conclusion des prêts, et constate que la clause litigieuse entraîne un déséquilibre significatif au détriment du consommateur. En effet, elle permet une résiliation de plein droit du contrat de prêt sans préavis d’une durée raisonnable, ce qui expose l’emprunteur « à une aggravation soudaine des conditions de remboursement ». Elle en déduit que cette clause est abusive et réputée non écrite.
La Cour précise qu’il importe peu que la jurisprudence antérieure ait été différente, puisque, dès lors que le texte législatif est clair, la clause abusive doit être écartée.
Elle rappelle également que le droit du consommateur à invoquer le caractère abusif d’une clause est imprescriptible et que le juge a l’obligation de le soulever d’office.
Enfin, les juges du fond écartent pour les mêmes motifs une clause similaire d’un « contrat de prêts hypothécaires », également conclu entre un professionnel et des consommateurs et contenu dans un autre acte notarié . Cette clause permet au prêteur de se prévaloir de l’exigibilité immédiate des sommes prêtées en cas de non-paiement d’une seule échéance malgré mise en demeure de régulariser restée sans effet pendant 15 jours. Ce délai ne constitue pas un préavis raisonnable, et la Cour a déterminé que cette clause doit être jugée abusive et réputée non écrite.
En conséquence, la banque n’est pas fondée à se prévaloir de la déchéance du terme, même si elle avait procédé à plusieurs mises en demeure.
Voir égal.