La Commission des clauses abusives,

Vu les dispositions du Code de la consommation et notamment les articles L 132-1 à L 132 ;

Considérant que, selon les caractéristiques des contrats, leur durée peut constituer un facteur de déséquilibre significatif au détriment des consommateurs et qu’à l’occasion de l’examen de plusieurs types de contrats, la Commission des clauses abusives a déjà recommandé l’élimination de diverses stipulations de nature à créer de ce chef un tel déséquilibre ;

Considérant que la fréquence de ces clauses dans les contrats conclus avec les consommateurs justifie, au vu des recommandations existantes et à la lumière des législations européennes en vigueur postérieurement à la directive CEE n° 93/13 du 5 avril 1993, l’adoption d’une recommandation à caractère général sur l’élimination des clauses qui, relatives à la durée initiale des contrats, à leur résiliation ainsi qu’à leur prorogation, présentent un caractère abusif ;

Clauses relatives à la durée initiale du contrat :

Considérant que divers contrats à exécution successive contiennent une clause de durée initiale minimale –par exemple, d’un an, deux ans, voire plus- pendant laquelle le consommateur ne peut rompre le lien contractuel pour quelque cause que ce soit ; que de telles clauses, qui excluent tout motif légitime qu’aurait le consommateur à se dégager du contrat avant l’échéance stipulée sont, eu égard à l’économie de celui-ci, susceptibles de déséquilibrer gravement la relation contractuelle à son détriment ;

Considérant que d’autres contrats autorisent le professionnel à en modifier unilatéralement la durée en cours d’exécution ; que de telles stipulations qui abandonnent la durée de la relation contractuelle à la discrétion du professionnel sont abusives ;

Clauses relatives à la résiliation du contrat :

Considérant que de nombreux contrats à durée déterminée contiennent des stipulations permettant directement ou indirectement au professionnel de mettre fin unilatéralement et discrétionnairement à la relation contractuelle en cours ; que de telles clauses, qui autorisent la rupture du contrat par le professionnel même en l’absence de tout motif légitime, déséquilibrent gravement la relation contractuelle au détriment du consommateur ;

Considérant que des clauses de divers contrats à durée indéterminée autorisent le professionnel à résilier le contrat sans avoir à respecter un délai raisonnable de préavis, et ce, alors même qu’il n’existerait aucun motif légitime pour ce faire ; que de telles stipulations qui, du fait du professionnel, maintiennent le consommateur dans une situation d’insécurité juridique, déséquilibrent de manière significative le contrat à son détriment ;

Considérant que dans certains contrats à durée indéterminée, des clauses subordonnent la résiliation du contrat à un délai de préavis plus long pour le consommateur que pour le professionnel ; que ces stipulations qui font varier ce délai non pas selon la cause de la résiliation, mais selon que celle-ci est demandée par le professionnel ou le consommateur, sont source d’un déséquilibre significatif dans la relation contractuelle au détriment de ce dernier ;

Considérant que diverses clauses, notamment dans des contrats à durée indéterminée, refusent au consommateur le droit de résilier le contrat en cas de manquement grave ou répété, par le professionnel, à ses obligations ; que de telles stipulations, qui forcent le consommateur à rester dans les liens d’un contrat qui, du fait de son inexécution, le prive en tout ou en partie des prestations convenues, présentent un caractère abusif ;

Considérant que d’autres clauses subordonnent la résiliation du contrat par le consommateur au versement d’une indemnité contractuelle au profit du professionnel ; que ces clauses ne se justifient pas lorsque la résiliation est fondée sur la force majeure ou l’inexécution par le professionnel de ses obligations ;

Clauses relatives à la prorogation ou à la reconduction tacite du contrat :

Considérant qu’un grand nombre de contrats à durée déterminée contiennent une clause de prorogation ou de reconduction tacite ; que lorsque, de ce fait, la relation contractuelle doit se poursuivre pour une durée excessive, spécialement lorsque celle-ci est supérieure à la durée initiale du contrat, le consommateur est empêché de contracter à des conditions plus avantageuses avec un autre professionnel ;

Considérant que d’autres clauses obligent le consommateur, pour faire obstacle à la prorogation ou la reconduction tacite du contrat à durée déterminée, à informer le professionnel de son intention parfois plusieurs mois avant l’arrivée du terme convenu ; que de telles stipulations sont de nature à faire concrètement obstacle au droit du consommateur de ne pas prolonger la relation contractuelle lorsque la date limite fixée pour exprimer son choix est trop éloignée du terme du contrat ; qu’elles sont alors de nature à déséquilibrer gravement la relation contractuelle au profit du professionnel ;

Recommande :

Que soient éliminés des contrats conclus entre professionnels et consommateurs les clauses ayant pour objet ou pour effet :

  1. d’imposer une durée initiale minimum du contrat sans en autoriser, eu égard à son économie, la résiliation anticipée par le consommateur pour motifs légitimes ;
  2. de permettre au professionnel, pendant le cours de l’exécution du contrat, d’en modifier unilatéralement la durée convenue ;
  3. de reconnaître, directement ou indirectement, au professionnel le droit de résilier unilatéralement le contrat à durée déterminée en l’absence de motif légitime ;
  4. d’autoriser le professionnel à rompre le contrat à durée indéterminée sans un délai raisonnable de préavis, à moins qu’il n’existe des motifs légitimes pour ce faire ;
  5. de soumettre la résiliation, dans les contrats à durée indéterminée, à un délai de préavis plus long pour le consommateur que pour le professionnel ;
  6. d’interdire au consommateur de demander la résiliation du contrat en cas de manquement grave ou répété par le professionnel à ses obligations ;
  7. de subordonner, en cas de force majeure ou d’inexécution par le professionnel de ses obligations, la résiliation du contrat par le consommateur au paiement d’une indemnité contractuelle au profit du professionnel ;
  8. de prévoir la prorogation ou la reconduction tacite d’un contrat à durée déterminée pour une période excessivement longue ;
  9. de contraindre le consommateur, pour éviter la prorogation ou la reconduction tacite d’un contrat à durée déterminée, à notifier son intention au professionnel à une date trop éloignée de l’arrivée du terme convenu.

(Texte adopté le 22 février 2001 sur le rapport de M. Gilles Paisant)

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services ;

Vu le code civil, et notamment ses articles 1101 à 1369, 1590, 1602 et suivants ;

Vu le nouveau code de procédure civile, et notamment ses articles 33 à 48 ;

Vu les recommandations n° 79-01 à 89-01 émises par la Commission des clauses abusives ;

Considérant que la répétition de certaines clauses déclarées abusives dans les diverses recommandations susvisées justifie qu’il en soit établi une synthèse,

Recommande :

Que, dans les contrats proposés par les professionnels aux non-professionnels ou consommateurs, soient présumées abusives, sous réserve de ce que, dans un modèle de contrat particulier, il ne soit pas établi qu’elles ne résultent pas d’un abus de puissance économique et n’entraînent pas un avantage excessif pour leur rédacteur, les clauses ou combinaisons de clauses qui ont pour objet ou pour effet de :

  1. Constater l’adhésion du non-professionnel ou consommateur à des stipulations contractuelles dont il n’a pas eu une connaissance effective au moment de la formation du contrat, soit en raison de la présentation matérielle des documents contractuels, notamment de leur caractère illisible ou incompréhensible, soit en l’absence de justification de leur communication réelle au consommateur ;
  2. Faire varier le prix en fonction d’éléments dépendant directement ou indirectement de la volonté arbitraire du professionnel contractant ;
  3. Prévoir, lors de la signature du contrat, un engagement immédiat et définitif du non-professionnel ou consommateur et un engagement éventuel du professionnel ;
  4. Restreindre l’obligation pour le professionnel de respecter les promesses faites, les garanties accordées ou les engagements pris par son préposé ou son agent ;
  5. Restreindre les obligations du professionnel au moyen de limitations qui ne seraient pas clairement reliées à l’énoncé de ces obligations ;
  6. Rendre inopposables au professionnel les informations et documents publicitaires remis au non-professionnel ou consommateur, dès lors que leur précision est de nature à déterminer son consentement ;
  7. Subordonner l’exécution du contrat à la seule volonté du professionnel ou à un événement dépendant de sa volonté arbitraire ;
  8. Réserver au professionnel la faculté de résilier le contrat de façon discrétionnaire sans accorder la même faculté au non-professionnel ou consommateur ;
  9. Stipuler que la date de livraison de la chose ou de l’exécution du service est donnée à titre indicatif ;
  10. Laisser au professionnel, postérieurement à la conclusion du contrat, le choix du lieu de livraison de la chose ou d’exécution du service ;
  11. Imposer au non-professionnel ou consommateur des frais supplémentaires pour une nouvelle livraison lorsque la première n’a pu avoir lieu du fait d’un manque de précision, imputable au professionnel, quant à la date de présentation ;
  12. Obliger le non-professionnel ou consommateur à exécuter ses obligations lors même que le professionnel n’aurait pas exécuté les siennes, par dérogation aux règles régissant l’exception d’inexécution et, spécialement, à la nécessité d’un équilibre raisonnable des inexécutions réciproques ;
  13. Obliger le non-professionnel ou consommateur, sans motif valable, à payer une part excessive du prix avant tout commencement d’exécution du contrat ;
  14. Interdire au non-professionnel ou consommateur de demander la résolution judiciaire du contrat dans le cas où le professionnel n’exécute pas ses obligations ;
  15. Exonérer le professionnel de sa responsabilité en cas d’inexécution ou d’exécution défectueuse, partielle ou tardive de ses obligations ;
  16. Limiter l’indemnité due par le professionnel en cas d’inexécution ou d’exécution défectueuse, partielle ou tardive de ses obligations ;
  17. Autoriser le professionnel à conserver des sommes versées par le non-professionnel ou consommateur, lorsque celui-ci renonce à conclure ou exécuter le contrat, sans prévoir que lesdites sommes seront restituées au double si le professionnel fait de même ;
  18. Déterminer le montant de l’indemnité due par le non-professionnel ou consommateur qui n’exécute pas ses obligations sans prévoir une indemnité de même ordre à la charge du professionnel qui n’exécute pas les siennes ;
  19. Supprimer, réduire ou entraver l’exercice par le non-professionnel ou consommateur des actions en justice ou des voies de recours, sous réserve des procédures facultatives susceptibles d’éviter le recours aux tribunaux ;
  20. Déroger aux règles légales de compétence territoriale ou d’attribution ;
  21. Réserver au professionnel le droit d’obliger son cocontractant à rembourser les frais et honoraires exposés pour obtenir l’exécution du contrat, sans donner au non-professionnel ou consommateur la même faculté ;
  22. Déroger aux règles légales régissant la preuve.

Texte adopté le 23 mars 1990 sur le rapport de M. Jacques Ghestin.

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil, et notamment ses articles 1126, 1129, 1134, 1135, 1163 et 1602;

Vu la recommandation n° 85-02 concernant les contrats achat de véhicules automobiles de tourisme (Bulletin officiel de la concurrence et de la consommation du 4 novembre 1985);

Vu les saisines émanant d’organisations de consommateurs;

Considérant que le consommateur signataire d’un contrat ne peut par avance adhérer à des clauses dont il ignore le contenu et qui sont susceptibles de modifier de façon importante le contrat d’origine;

Considérant que certains professionnels adressent aux consommateurs avec lesquels ils entretiennent des relations contractuelles un simple écrit, note ou document par lequel ils s’autorisent à modifier une ou plusieurs clauses du contrat d’origine, sauf avis contraire exprimé par le consommateur dans un délai donné ; que, dans un tel cas, le silence ne saurait valoir consentement et le consommateur ne se trouve aucunement lié par ces nouvelles clauses;

Considérant que certains professionnels, vendeurs de biens mobiliers ou prestataires de services, stipulent dans leurs contrats des clauses qui les autorisent à modifier unilatéralement une ou plusieurs caractéristiques, souvent essentielles, du bien à livrer ou du service à rendre à la seule condition que le consommateur en ait été dûment averti et qu’il n’ait pas exprimé par lettre son désaccord, dans un délai donné, fort bref au demeurant;

Considérant que, même si le professionnel laisse au consommateur la possibilité d’exprimer son désaccord lorsqu’il a pris connaissance des nouvelles clauses, avant un délai donné, le consommateur ne bénéficie que d’une protection illusoire contre les agissements unilatéraux du professionnel;

Considérant que, d’autre part, le professionnel aura, en cas de contestation, des difficultés pour prouver que le consommateur a bien pris connaissance des nouvelles clauses qu’il est censé avoir acceptées par avance ; que la généralisation des clauses dites de consentement implicite constitue un risque réel menaçant la sécurité des relations contractuelles, en contrepartie des facilités de gestion économique qui justifient leur existence aux yeux des professionnels,

Recommande:

Que soient éliminées des contrats liant un professionnel à un non professionnel ou consommateur les clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier à son gré des clauses d’un contrat, sans que le consommateur ait à exprimer de façon explicite son acceptation.

(Adopté le 19 juin 1987 sur le rapport de M. Gérard Bourger.)

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil notamment ses articles 1152, 1226 et suivants, et 1582 et suivants.

Considérant que dans de nombreux contrats dont l’exécution est stipulée pour une date postérieure à leur conclusion le consommateur paie néanmoins à l’avance une partie du prix convenu, à titre d’arrhes ou d’acompte; qu’il en est ainsi notamment des contrats de vente, d’entreprise, de location saisonnière, des contrats proposés par les agents de voyages, les hôteliers, les teinturiers, etc.;

Considérant qu’en cas d’inexécution du contrat par le fait du consommateur cette partie du prix reste très généralement acquise au professionnel soit, lorsqu’il s’agit d’arrhes, en application de l’article 1590 du code civil, soit, lorsqu’il s’agit d’un acompte, en vertu d’une clause du contrat qui a le caractère d’une clause pénale;

Considérant qu’en revanche, en cas d’inexécution du contrat par le fait du professionnel, de nombreux contrats stipulent seulement la restitution au consommateur de l’acompte qu’il a versé alors que, s’il s’agit d’arrhes, ces arrhes doivent être restituées au double, en application de l’article 1590 du code civil;

Considérant que le fait, pour le professionnel, d’être indemnisé sans formalité lorsque le consommateur renonce au contrat, alors que celui-ci doit intenter une action en justice pour être indemnisé en cas d’inexécution du contrat du fait du professionnel, confère à ce dernier un avantage excessif et rend, sur ce point, le contrat abusif au sens de l’article 35 de la loi du 10 janvier 1978 susvisée;

Considérant enfin que, sauf circonstances particulières, qui peuvent toujours être constatées par le juge, en application de l’article 1152 du code civil, le préjudice résultant de l’inexécution du contrat, tel qu’il peut être forfaitairement évalué au moment de la conclusion de ce contrat, est du même ordre pour le professionnel et pour le consommateur,

Recommande:

Que soient éliminées des contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs les clauses ayant pour effet de mettre à la charge du consommateur une indemnité lorsqu’il renonce au contrat, sans prévoir, en contrepartie, une indemnité égale, à la charge du professionnel responsable de l’inexécution du contrat.

Délibéré dans la séance du 25 novembre 1980, où siégeaient M. P. Lutz, conseiller à la Cour de cassation, président, MM. R. Bernard, L. Bihl, J. Calais-Auloy, M. Delcourt, R. Grise, B. Gross, P. Leclercq, P. Marleix, N. Renaudin, membre.

La Commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Considérant que le contrat est valablement conclu et engage les deux parties lorsqu’elles ont donné leur accord; que le professionnel ne peut s’octroyer un délai de réflexion pendant lequel il pourra vérifier notamment la solvabilité de son client que si, en contrepartie, est laissé au non-professionnel ou consommateur le même délai pendant lequel il pourra se rétracter;

Considérant que de nombreux contrats habituellement proposés aux non-professionnels ou consommateurs dans les secteurs d’activité les plus divers contiennent des clauses contraires aux principes ci-dessus; que ces clauses sont abusives au sens de l’article 35 de la loi du 10 janvier 1978 susvisée;

Émet la recommandation;

Que soient éliminées des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs toute clause qui a pour objet ou pour effet de prévoir lors de la signature du contrat un engagement immédiat et définitif du non-professionnel ou consommateur et un engagement éventuel du professionnel.

Adoptée dans la séance du 24 juin 1980 où siégeaient MM. P. Lutz, président, conseiller à la Cour de cassation, R. Bernard, L. Bihl, J. Calais-Auloy, Y. Cotte, M. Delcourt, R. Grise, B. Gross, P. Leclercq, P. Marleix, N. Renaudin et P. Simonet, membres.