La Commission des clauses abusives,

Vu les dispositions du Code de la Consommation et notamment les articles L. 132-1 à L.132-5 ;

Vu les dispositions du Code Civil et notamment les articles 1316 à 1316-4 ;

Vu les dispositions du Code du Commerce et notamment les articles L. 241-7, L. 246-1 et L. 251-17 ;

Vu l’article 27 du Code de l’Industrie Cinématographique ;

Vu le décret 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l’application de l’article 1316-4 du Code Civil, relatif à la signature électronique ;

Vu l’auto-saisine de la Commission des clauses abusives lors de sa séance du 20 avril 2000 ;

 

Entendu les représentants des professionnels intéressés ;

 

Considérant que depuis la fin du mois de mars 2000, certains exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques proposent aux consommateurs des formules d’abonnement au cinéma donnant droit à des entrées multiples pour une durée initiale annuelle ou semestrielle payable mensuellement et permettant un accès illimité aux salles de leur réseau, ainsi qu’à celles des exploitants indépendants s’étant associés à cette formule ;

a) Présentation matérielle des contrats:

1 – Considérant que la plupart des contrats sont imprimés en petits caractères ; qu’ainsi ces contrats manquent de lisibilité ;2 – Considérant que le contrat est signé en un exemplaire unique, composé de parties détachables, qui est remis ou adressé au professionnel ; que cette situation est préjudiciable au consommateur puisque celui-ci ne conserve pas de double du contrat et se trouve dans l’incertitude de ses droits et obligations de telle sorte que peuvent lui être opposées des conditions générales différentes ;

3 – Considérant qu’aucun des contrats examinés ne mentionne la dénomination sociale et l’adresse du co-contractant professionnel ni dans les conditions particulières, ni dans les conditions générales, que seuls figurent dans les conditions particulières, le nom et l’adresse de l’organisme créancier dans un cadre détachable réservé à l’autorisation de prélèvement ; qu’une telle information est obligatoire ; que son absence est préjudiciable au consommateur en ce que, d’une part, le cocontractant responsable de la mauvaise exécution ou de l’inexécution du contrat peut être différent du « créancier » du prix de l’abonnement, tout comme l’abonné peut ne pas être le payeur ; et que, d’autre part, la carte peut être proposée par des sociétés distinctes ;

4 – Considérant que tous les contrats, en raison de leur présentation matérielle, laissent croire que seul le paiement par prélèvement automatique est possible ;

5 – Considérant que les droits et obligations de l’abonné et du payeur – s’il est différent – ne sont pas distingués dans les contrats ; que cette absence de précision crée une ambiguïté dans la connaissance des droits et obligations de chacun d’eux ; qu’il est nécessaire que les droits et obligations de l’utilisateur de la carte et du payeur soient clairement définis et distingués ;

6 – Considérant que le professionnel, débiteur des obligations contractuelles, n’est pas identifié alors que les contrats font référence à un « service abonnés » ou à un « service abonnement » qui est investi d’un certain nombre de prérogatives mais dont l’adresse est différente de celle de « l’organisme créancier » ; qu’il est nécessaire que les contrats définissent et distinguent les droits et obligations de chacun;

7 – Considérant, qu’en cas de règlement de l’abonnement en totalité lors de sa souscription, certains contrats prévoient qu’avant leur terme, le professionnel proposera au consommateur la poursuite du contrat au tarif en vigueur avec option soit pour un paiement mensuel par prélèvement automatique, soit pour une nouvelle durée fixe avec paiement forfaitaire :

– Qu’un contrat ne prévoit pas le délai d’acceptation de la proposition et n’envisage pas les conséquences du refus; que cette absence de précision est préjudiciable aux consommateurs ;– Que la plupart des contrats ne définissent pas clairement les obligations du consommateur en ce qui concerne une éventuelle obligation de restituer la carte ; que cette absence de précision est préjudiciable aux consommateurs contre lesquels des pénalités sont stipulées en cas de non restitution;

 

b) Formation du contrat:

8 – Considérant qu’un contrat prévoit que, par sa souscription, l’abonné s’engage à respecter les obligations d’une « charte » qui n’est affichée que dans les salles de cinéma ; qu’une telle clause déséquilibre le rapport contractuel dans la mesure où cette « charte » n’est pas remise et n’a pas de valeur contractuelle ;9 – Considérant que tous les contrats prévoient un engagement ferme du consommateur avant celui du professionnel ;

10 – Considérant que, d’une part, lorsque le contrat est conclu par voie postale, certaines clauses induisent que le consommateur commence à régler son abonnement avant d’avoir reçu sa carte alors que l’expédition de celle-ci ne dépend que du professionnel ; que ces clauses emportent un déséquilibre au détriment du consommateur en ce qu’elles le conduisent à verser des sommes sans bénéficier d’une prestation en contrepartie ;

11 – Considérant que, d’autre part, tous les contrats contiennent une clause aux termes de laquelle : » Tout dossier incomplet ou illisible sera retourné en l’état à l’expéditeur  » ou  » tout dossier incomplet ou illisible ne sera pas accepté « , et que la plupart de contrats comportent un cadre d’une couleur qui le distingue du reste du texte, demandant au consommateur de fournir des renseignements, qui ne semblent pas indispensables à la délivrance de la carte (e-mail, profession ou catégorie professionnelle,  » en recherche d’emploi  » et  » autres « , salle ou cinéma fréquenté…) ; qu’aucune mention ne précise si ces renseignements sont obligatoires ou facultatifs en violation de l’article 27 de la loi du 6 janvier 1978, que ces clauses sont illicites, et, maintenues dans les contrats, sont abusives ;

12 – Considérant que tous les contrat contiennent des clauses permettant au professionnel de refuser de contracter avec toute personne dont un précèdent abonnement a été résilié pour « fraude » (lors de la souscription du contrat ou dans « l’utilisation de la carte ») ou pour « défaut de paiement »; que ces clauses sont abusives en raison de leur imprécision due à l’absence de définition des obligations du payeur et de l’abonné et permettent au professionnel de sanctionner, en ne souscrivant pas le contrat, quelqu’un qui n’est pas nécessairement responsable des manquements à un précédent contrat;

 

c) Durée du contrat:

13 – Considérant que si tous les contrats prévoient que pendant la période initiale, fixée généralement à 6 ou 12 mois, le consommateur peut résilier le contrat pour un motif légitime, ils réservent aux professionnels le droit d’accepter ou de refuser de façon discrétionnaire le motif invoqué ; que le caractère abusif de cette faculté est renforcé lorsque le contrat propose des exemples de motifs légitimes s’apparentant par trop à la force majeure ;14 – Considérant qu’en cas d’acceptation du motif légitime, celle-ci ne prend effet qu’à l’issue du « 2e mois suivant celui au cours duquel la demande de résiliation a été reçue par le service abonnés » ; qu’un tel délai n’est pas justifié, s’agissant d’une résiliation pour motif légitime, alors que, d’une part, le professionnel n’est pas soumis à un tel délai lorsqu’il résilie le contrat pour un motif non lié à la violation d’une obligation contractuelle de l’abonné et que, d’autre part, il peut « désactiver » immédiatement la carte en cas de non paiement ou fraude ; que ce déséquilibre entre les droits et obligations des parties est générateur d’un abus ;

 

d) Exécution du contrat:

15 – Considérant que tous les contrats prévoient qu’en cas de résiliation pour motif légitime accepté, le consommateur ne pourra souscrire un nouvel abonnement avant l’expiration d’un délai de 6 mois suivant la prise d’effet de la résiliation; qu’une telle clause, en ce qu’elle peut avoir pour effet de dissuader le consommateur de se prévaloir d’un motif légitime, est abusive;16 – Considérant, par ailleurs, que les mêmes contrats prévoient que l’abonné ne peut, en cas de vol, de perte ou dysfonctionnement de la carte, obtenir le remboursement des billets achetés jusqu’à la réception de sa nouvelle carte, que ni la suspension des prélèvements automatiques ni la prorogation du terme du contrat ne sont prévues ; que de telles clauses sont abusives en ce qu’elles créent un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, le consommateur devant régler une prestation dont il ne bénéficie pas, et en ce que l’envoi d’une nouvelle carte dépend de la seule volonté du professionnel ;

17 – Considérant que tous les contrat prévoient, en cas de règlement mensuel, comme seul moyen de paiement, le prélèvement automatique ; que de telles clauses, qui imposent cet unique moyen de paiement, déséquilibrent les obligations contractuelles ;

18 – Considérant, de même, qu’en cas de règlement de l’abonnement en totalité lors de sa souscription, seul le paiement par chèque et parfois par carte de crédit est prévu, à l’exclusion d’un règlement en espèces ; qu’une telle clause est illicite ; que maintenue dans les contrats, elle est abusive ;

19 – Considérant que tous les contrats prévoient que le « service » informera l’abonné de toute modification tarifaire deux mois avant l’entrée en vigueur de celle-ci et procédera à un ajustement des prélèvements automatiques proportionnel aux augmentations du prix de l’abonnement; que de telles clauses en ce qu’elles s’appliquent pendant la période à durée déterminée du contrat, sont abusives ;

20 – Considérant que certains contrats prévoient que les hausses décidées par le professionnel prendront effet dans un certain délai après avoir été notifiées ; que ces mêmes contrats imposent au consommateur un délai de préavis de résiliation d’une durée supérieure ; que de la combinaison de ces clauses, il résulte que le consommateur ne pourra échapper à une hausse qu’il n’a pas acceptée ; que de telles clauses, qui déséquilibrent le rapport contractuel, sont abusives ;

 

e) Clauses exonératoires de responsabilité:

21 – Considérant que tous les contrats prévoient que le « service » ainsi que les sociétés associées ne peuvent être tenus pour responsables en cas de fermeture d’une salle même appartenant à un partenaire indépendant, et ce quel qu’en soit le motif ; que certains contrats prévoient la même exonération si une salle cesse d’accepter la carte ; que lorsque ces circonstances limitent significativement les conditions d’usage de la carte, de telles clauses sont de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ;22 – Considérant qu’un contrat prévoit expressément qu’en cas d’interruption ou de suspension du service, le consommateur n’aura droit qu’au remboursement des paiements mensuels effectués d’avance sans pouvoir réclamer quelque indemnité que ce soit ; qu’une telle clause est abusive ;

 

f) Clauses relatives à la résiliation du contrat :

23 – Considérant que tous les contrats à durée indéterminée imposent un délais de préavis, à la charge du consommateur, pour résilier le contrat, sans prévoir le même préavis, en cas de résiliation par le professionnel ; que cette absence de réciprocité est source de déséquilibre contractuel au détriment du consommateur ;24 – Considérant que tous les contrats subordonnent la résiliation du contrat à l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception ; que si une telle clause peut se justifier, pour ménager au consommateur une preuve, elle est abusive en ce que le consommateur doit pouvoir procéder à la résiliation par tout moyen à sa convenance lui ménageant la preuve de sa réception par le professionnel, notamment par remise de la carte dans une salle de cinéma contre récépissé ;

25 – Considérant que certains contrats opèrent une distinction entre la date d’effet de la résiliation effectuée par le consommateur (réception de la lettre recommandée avec accusé de réception par le professionnel) et celle effectuée par le professionnel (date d’expédition de la lettre notifiant cette résiliation) ; que ces clauses sont susceptibles de constituer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;

26 – Considérant que tous les contrats prévoient des cas de « résiliation immédiate » du contrat en cas de fausse déclaration ; que cette notion, appliquée à une demande de renseignements non essentiels pour la formation du contrat, confère à la clause un caractère abusif ;

27 – Considérant que tous les contrats prévoient des cas de « résiliation immédiate » du contrat en cas d’utilisation « anormale » de la carte ; qu’en raison de son imprécision, cette clause est susceptible de créer un déséquilibre significatif détriment du consommateur ;

28 – Considérant qu’un contrat prévoit, comme motif de résiliation, tout manquement à la « charte » que l’abonné s’est contractuellement engagé à respecter et qu’à défaut le spectateur peut être expulsé et sa carte confisquée ; que cette clause est abusive en ce qu’elle prévoit la résiliation du contrat pour la violation d’obligations non contractuelles, la charte n’étant pas annexée au contrat mais uniquement affichée dans les salles ;

29 – Considérant que la plupart des contrats prévoient que le professionnel peut mettre fin à la formule de carte d’abonnement « à tout moment et pour toute cause légitime », sans avoir à respecter de préavis, alors que le consommateur désireux de résilier le contrat doit, dans tous les cas, observer un délai de préavis ; que ces clauses sont abusives en raison de l’absence de réciprocité des obligations des parties contractantes ;

30 – Considérant qu’en cas de cessation du service à l’initiative du professionnel, un contrat prévoit que lorsque le service a été réglé en totalité lors de la souscription, le consommateur n’aura droit au remboursement des sommes payées d’avance que s’il en fait la demande ; qu’un autre contrat exclut le remboursement au prorata pour le mois en cours ; que ces clauses, qui subordonnent le remboursement des sommes dues au consommateur à une demande expresse ou qui excluent tout remboursement au prorata pour le mois en cours, sont abusives en ce qu’elles rémunèrent le professionnel, sans contrepartie ;

31 – Considérant que dans tous les cas de résiliation, et alors que la carte a été désactivée, l’abonné doit la restituer dans un délai déterminé ; que certains contrats imposent la restitution en cas de suspension ou d’interruption du service ; que tous les contrats prévoient, qu’à défaut de restitution, l’abonné devra verser une indemnité ; que de telles clauses, en ce qu’elles laissent à l’abonné la charge de la restitution de la carte, stipulée au seul profit du professionnel, sont abusives;

 

g) Clauses relatives aux indemnités forfaitaires.

32 – Considérant que tous les contrats prévoient des pénalités à la charge du consommateur dans certaines hypothèses de manquements par lui à ses obligations ; qu’aucune clause de ces mêmes contrats ne sanctionne le manquement du professionnel à ses propres obligations ; que cette absence de réciprocité est source de déséquilibre contractuel au détriment du consommateur ;33 – Considérant que des contrats prévoient que le professionnel conservera l’ensemble des sommes versées d’avance lorsqu’il refuse de contracter avec toute personne dont un précèdent abonnement a été résilié pour « fraude » ou pour « défaut de paiement » ; que de telles clauses sont abusives en ce que le professionnel perçoit une rémunération sans contrepartie ;

 

h) Clauses d’aggravation des charges

34 – Considérant que la plupart des contrats prévoient qu’en cas de résiliation de l’abonnement, les frais et honoraires nécessaires au recouvrement des sommes dues seront à la charge de l’abonné ; que certains contrats précisent qu’en cas de défaut de paiement, l’abonné remboursera les frais de gestion occasionnés par l’incident y compris les frais facturés par la banque ; que de telles clauses sont illicites au regard de l’article 32 de la loi du 9 juillet 1991 ; que, maintenues dans les contrats, ces clauses sont abusives; 

i) Clauses attributives de compétence

35 – Considérant que la plupart des contrat donnent en cas de litige, compétence exclusive au Tribunal de Grande Instance de Paris ; que de telles clauses sont illicites ; que, maintenues dans les contrats, ces clauses sont abusives ; 

Recommande:

A/ Que la présentation matérielle du contrat obéisse aux règles suivantes:

1 – Qu’il soit imprimé lisiblement avec des caractères dont la hauteur ne saurait être inférieure au corps 8 ;2 – Qu’il soit rédigé en autant d’exemplaires que de parties, c’est à dire d’une part, le professionnel, d’autre part l’abonné et enfin, le payeur s’il est différent de l’abonné ;

3 – Qu’il mentionne la dénomination sociale et le siège social du co-contractant responsable en cas de mauvaise exécution ou d’inexécution du contrat ;

 

B/ Que le contrat contienne les clauses suivantes ayant pour objet ou pour effet :

4 – D’indiquer au même emplacement de façon claire les différents modes de paiement proposés aux consommateurs ;5 – De définir et distinguer les droits et obligations de l’utilisateur de la carte de ceux du payeur ;

6 – De définir et distinguer les droits et obligations de chaque professionnel intervenant ;

7 – De préciser en cas de règlement de l’abonnement en totalité lors de sa souscription et lorsque le professionnel propose le renouvellement de celui-ci :

– les modalités et délais d’acceptation de la proposition de renouvellement ;– les obligations du consommateur au terme du contrat ;

 

C/ Que soient éliminées les clauses ayant pour objet ou pour effet :

8 – D’obliger le consommateur à respecter des stipulations qu’il n’a pas expressément acceptées ;9 – De prévoir, lorsque le contrat est souscrit par voie postale, un engagement du consommateur avant celui du professionnel ;

10 – De prévoir le paiement par le consommateur avant réception de la carte ;

11 – De permettre aux professionnels de refuser de contracter en raison du défaut de réponse à des demandes de renseignements non indispensables à la délivrance de la carte et dont il n’est pas indiqué s’ils sont obligatoires ou facultatifs ;

12 – De permettre aux professionnels, en l’état de l’absence de définition et de distinction des obligations du payeur et de l’abonné, de sanctionner celui d’entre eux qui n’est pas responsable des manquements à un précédent contrat ;

13 – De réserver aux professionnels le droit d’accepter ou de refuser, discrétionnairement, le motif légitime invoqué par le consommateur pour résilier le contrat durant la période initiale ;

14 – D’imposer au consommateur le respect d’un préavis, excédant le mois en cours, en cas de résiliation pour motif légitime pendant la durée déterminée du contrat ;

15 – De prévoir en cas d’acceptation de la résiliation pour motif légitime que le consommateur ne pourra souscrire un nouvel abonnement avant l’expiration d’un certain délai suivant la prise d’effet de la résiliation ;

16 – D’exclure, en cas de vol, de perte ou de dysfonctionnement de la carte, le remboursement des billets achetés, dès lors que le contrat ne prévoit pas de prorogation de son terme pour une durée égale à la période comprise entre la déclaration de l’incident et la délivrance de la nouvelle carte ;

17 – De prévoir, en cas de règlement mensuel, comme unique moyen de paiement le prélèvement automatique ;

18 – D’exclure le paiement en espèces en cas de règlement de l’abonnement en totalité lors de sa souscription ;

19 – De permettre, durant la période initiale du contrat, la hausse du prix de l’abonnement ;

20 – D’imposer au consommateur une hausse de tarif, dés lors que le contrat prévoit un délai de préavis de résiliation d’une durée supérieure au délai d’application de la hausse ;

21 – D’exclure, dans tous les cas, la responsabilité du professionnel pour la fermeture d’une de ses salles concernées par l’abonnement ou si un exploitant cesse d’accepter la carte ;

22 – De prévoir en cas d’interruption ou de suspension du service le seul remboursement des paiements mensuels effectués d’avance à l’exclusion de toute autre indemnisation ;

23 – D’imposer, après la période initiale, au consommateur un préavis en cas de résiliation de l’abonnement, sans prévoir un préavis identique en cas de résiliation par le professionnel ;

24 – De prévoir comme seule modalité de résiliation du contrat, l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception ;

25 – De prévoir des dates d’effet différentes lorsque la résiliation est effectuée par le professionnel ou par le consommateur ;

26 – De prévoir la résiliation immédiate du contrat, en cas de fausse déclaration relative à une demande de renseignements non essentiels à la formation du contrat ;

27 – De prévoir la résiliation immédiate du contrat en cas d’utilisation anormale de la carte ;

28 – De prévoir la résiliation immédiate du contrat, en cas de violation de stipulations qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il signe ;

29 – De permettre aux professionnels de mettre fin à la formule d’abonnement, sans avoir à respecter un délai de préavis, alors que l’observation d’un tel délai est requise du consommateur ;

30 – De subordonner, en cas de cessation du service du fait du professionnel, le remboursement des sommes dues au consommateur à une demande expresse de sa part ou d’exclure tout remboursement au prorata pour le mois en cours ;

31 – D’exiger du consommateur dans tous cas de résiliation, de suspension ou d’interruption de service, la restitution de la carte et de prévoir, qu’à défaut, une indemnité de retard sera due ;

32 – De mettre une pénalité contractuelle à la charge du consommateur qui manquerait à ses obligations sans prévoir une pénalité du même ordre à l’encontre du professionnel qui n’exécuterait pas les siennes ;

33 – De prévoir que toute somme versée d’avance sera conservée par le professionnel en cas de refus de contracter de sa part ;

34 – De laisser croire au consommateur qu’il devra payer tous les frais et honoraires nécessaires au recouvrement des sommes dues ;

35 – De déroger aux règles de compétence territoriale ou d’attribution des juridictions.

(Texte adopté le 18 octobre 2001 sur le rapport de M. Pierre Bouaziz)

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services ;

Vu le code civil, et notamment ses articles 1152 et 1231 ;

Entendu les représentants des professionnels intéressés.

Considérant qu’il est d’usage courant pour les laboratoires photographiques ou cinématographiques et pour les négociants de reconnaître à leurs clients, expressément ou tacitement, le seul droit d’obtenir un nombre de films vierges équivalent à celui des films confiés au professionnel et perdus ou détériorés par le fait de ce dernier ;

Considérant que ce mode d’indemnisation est défavorable au consommateur ;

Considérant tout d’abord que cette réparation en nature ne permet pas toujours au consommateur d’être indemnisé de ses débours ; qu’en particulier, si la remise d’un film vierge peut paraître compenser la perte du film confié au professionnel, elle ne répare pas, en revanche, le dommage matériel subi par le consommateur qui a supporté certains frais comme, par exemple, les frais d’expédition de la pellicule au laboratoire de développement ;

Considérant ensuite que le mode de réparation prévu est à plus forte raison peu satisfaisant pour le consommateur lorsque ce dernier peut faire état d’un préjudice particulier ; qu’il en est ainsi lorsque les films perdus ou détériorés ont été pris ou tournés à l’occasion d’événements irréversibles de la vie comme notamment au cours de cérémonies familiales ou de voyages lointains ;

Considérant enfin qu’il est abusif d’imposer dans tous les cas au consommateur une indemnisation sous forme de remplacement ;

Considérant que la réparation forfaitaire actuellement pratiquée par les professionnels n’aboutit donc fréquemment qu’à réparer d’une manière insuffisante, voire même dérisoire, le dommage éprouvé par le non-professionnel ou consommateur ; que la clause analysée tombe incontestablement sous le coup des dispositions des articles 35 et suivants de la loi du 10 janvier 1978 ; qu’elle est tout d’abord prévue dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs ; qu’elle concerne ensuite l’étendue des responsabilités ; qu’elle est imposée enfin au non-professionnel ou consommateur par un abus de la puissance économique de l’autre partie et confère à cette dernière un avantage excessif ; qu’en définitive la clause étudiée doit être dénoncée comme abusive ;

Considérant toutefois que le caractère abusif de la clause examinée n’entraîne pas pour autant la condamnation de toute clause qui assurerait une réparation forfaitaire du préjudice invoqué par le non-professionnel ou consommateur ; que pour des raisons de simplicité et de rapidité il peut être de l’intérêt du non-professionnel ou consommateur de faire jouer à son profit une clause pénale ;

Considérant à cet égard que le professionnel peut proposer une réparation forfaitaire dont l’obtention ne suppose la preuve d’aucune faute de sa part et à la condition de présenter au non-professionnel ou consommateur un choix entre deux ou plusieurs valeurs déclarées, la valeur minimale de celle-ci ne pouvant être inférieure au prix du film vierge majoré des frais du consommateur et sa valeur maximale ne pouvant être inférieure au préjudice normalement prévisible causé par la perte ou la détérioration de films jugés importants par un consommateur ;

Considérant cependant qu’un tel système forfaitaire ne peut être jugé satisfaisant que si certaines conditions sont remplies ;

Considérant, en premier lieu, que le contrat doit laisser au consommateur la liberté d’accepter ou non le système de réparation forfaitaire qui lui est proposé, qu’au moment du dépôt du film, en vue de son traitement, il doit avoir la possibilité de refuser ce mode de réparation, ce qui lui laisse le droit de mettre éventuellement en jeu à une date ultérieure la responsabilité du professionnel sur le fondement du droit commun de la responsabilité contractuelle ;

Considérant, en second lieu, que le contrat doit laisser au consommateur, même s’il avait opté pour le système forfaitaire, la possibilité de choisir, après la réalisation du dommage, de mettre en jeu la responsabilité contractuelle du professionnel, à charge en ce cas de prouver la faute de ce dernier, ainsi que la réalité et l’importance du préjudice subi ;

Considérant enfin que le consommateur doit recevoir une information claire sur les choix qui lui sont offerts,

Recommande :

A. – Que soient éliminées des documents contractuels proposés à leurs clients non-professionnels ou consommateurs par les laboratoires photographiques ou cinématographiques et par les négociants les clauses ayant pour objet ou pour effet d’exonérer ces derniers de leur responsabilité en cas de pertes ou d’avaries des films ou de limiter leur responsabilité au simple remplacement des films perdus ou avariés par des films vierges ;

B. – Que figurent dans ces documents contractuels des clauses permettant une juste réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de pertes ou d’avaries des films, aux termes desquelles :

– le consommateur a le choix entre un système de réparation forfaitaire et la mise en jeu de la responsabilité du professionnel sur le fondement du droit commun de la responsabilité ;

– la réparation forfaitaire résulte elle-même d’une option offerte au consommateur entre deux ou plusieurs valeurs déclarées au moment de la conclusion du contrat en fonction de l’importance qu’il donne à ses travaux, sa valeur minimum ne pouvant être inférieure au prix des films vierges majoré des frais occasionnés et la valeur maximum ne pouvant être inférieure au préjudice normalement prévisible causé par la perte ou la détérioration de films jugés importants pour un consommateur ;

– après la réalisation du dommage, si la preuve de la faute est apportée, le consommateur, quand bien même aurait-il choisi le système de réparation forfaitaire, peut encore mettre en jeu la responsabilité du professionnel sur le fondement du droit commun de la responsabilité.

Délibéré sur le rapport de M. Bernard Gross, dans les séances des 19 mars, 18 juin, 9 juillet et 24 septembre 1982.

 

Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur du développement des pellicules photographiques