CJUE, 18 janvier 2024, aff. C-531/22 – Getin Noble Bank E.A
Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Titre exécutoire ayant acquis force de chose jugée – Pouvoir de juger d’office le caractère éventuellement abusif d’une clause dans le cadre du contrôle d’une procédure d’exécution
EXTRAIT
“{…} L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs {…} s’opposent à une réglementation nationale prévoyant qu’une juridiction nationale ne peut procéder d’office à un examen du caractère éventuellement abusif des clauses figurant dans un contrat et en tirer les conséquences, lorsqu’elle contrôle une procédure d’exécution forcée fondée sur une décision prononçant une injonction de payer définitive revêtue de l’autorité de la chose jugée: – si cette réglementation ne prévoit pas un tel examen au stade de la délivrance de l’injonction de payer ou – lorsqu’un tel examen est prévu uniquement au stade de l’opposition formée contre l’injonction de payer concernée, s’il existe un risque non négligeable que le consommateur concerné ne forme pas l’opposition requise soit en raison du délai particulièrement court prévu à cette fin, soit eu égard aux frais qu’une action en justice entraînerait par rapport au montant de la dette contestée, soit parce que la réglementation nationale ne prévoit pas l’obligation que soient communiquées à ce consommateur toutes les informations nécessaires pour lui permettre de déterminer l’étendue de ses droits.”
ANALYSE
La Cour rappelle que dans une situation où un examen d’office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles était réputé avoir eu lieu et être revêtu de l’autorité de la chose jugée, la Cour a jugé que l’exigence d’une protection juridictionnelle effective exige que le juge de l’exécution puisse apprécier le caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles qui ont servi de fondement à une injonction de payer contre laquelle le débiteur n’a pas formé d’opposition (voir arrêt du 17 mai 2022, SPV Project 1503 e.a., C-693/19 et C-831/19, EU:C:2022:395, points 65et 66).
Elle considère donc qu’il en va a fortiori de même lorsqu’aucun examen d’office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles figurant au contrat concerné n’est réputé avoir eu lieu, ainsi que cela semble être le cas dans l’espèce qui lui était soumise.
Elle juge que le fait que le consommateur ait été passif au cours des procédures menées devant les juridictions ordinaires ne libère pas la juridiction de renvoi de l’obligation lui incombant d’effectuer cet examen d’office si celle-ci établit que le consommateur n’a pas formé opposition aux injonctions de payer en cause au principal, si le droit national ne prévoit pas un tel examen lorsque le consommateur concerné conteste une injonction de payer et qu’il existe un risque non négligeable que le consommateur ne forme l’opposition requis soit en raison du délai particulièrement court prévu, soit eu égard aux frais qu’une action en justice entraînerait par rapport au montant de la dette contestée, soit parce que le droit national ne prévoit pas l’obligation que soient communiquées audit consommateur toutes les informations nécessaires pour lui permettre de déterminer l’étendue de ses droits.
Ainsi, une réglementation nationale qui prévoit qu’une juridiction nationale ne peut contrôler d’office le caractère abusif des clauses d’un contrat lors du contrôle d’une procédure d’exécution fondée sur une injonction de payer revêtue de l’autorité de la chose jugée si : d’une part, cette réglementation ne prévoit pas un tel examen au stade de la délivrance de l’injonction ou d’autre part, lorsque l’examen prévu au stade de l’opposition formée contre l’injonction de payer concernée, s’il existe un risque non-négligeable que le consommateur concerné ne forme pas l’opposition requise soit en raison du délai particulièrement court prévu à cette fin, soit eu égard aux frais d’une action justice entraînerait par rapport au montant de la dette constatée, soit parce que la réglementation nationale ne prévoit pas l’obligation que soient communiquées à ce consommateur toutes les informations nécessaires pour lui permettre de déterminer l’étendue de ses droits. En effet, tout ceci serait contraire à l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs.
La CJUE avait déjà statué en ce sens dans un arrêt 5 octobre 2023, aff. C 25/23 Princess Holdings
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