CJUE, 8 septembre 2022, C-80/21, DBP
Clause de conversion – Effets de la constatation du caractère abusif d’une clause
EXTRAITS :
“L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent être interprétés en ce sens que : ils s’opposent à une jurisprudence nationale selon laquelle le juge national peut constater le caractère abusif non pas de l’intégralité de la clause d’un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel, mais uniquement des éléments de celle-ci qui lui confèrent un caractère abusif, de telle sorte que cette clause reste, après la suppression de tels éléments, partiellement effective, lorsqu’une telle suppression reviendrait à réviser le contenu de ladite clause en affectant sa substance, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier.”
ANALYSE :
La Cour de Justice de l’Union Européenne se prononce dans cet arrêt sur l’étendue des pouvoirs du juge national en matière de clauses abusives. Elle rappelle une jurisprudence constante selon laquelle le juge national ne peut pas réviser le contenu d’une clause abusive (pt 59) car cela éliminerait l’effet dissuasif de la pure et simple non-application d’une telle clause (pt 60) (CJUE, 26 mars 2019, Abance Corporacion Bancaria et Bankia, C-70/17 et C-179/17 pt 53 et pt 54).
Dans la limite de cette interdiction de révision, avait déjà été admise la possibilité, pour le juge national, de supprimer uniquement l’élément abusif d’une clause sous réserve du respect de deux conditions : l’élément supprimé consiste en une obligation contractuelle distincte, susceptible de faire l’objet d’un examen individualisé, et la législation nationale assure l’objectif dissuasif poursuivi par la directive 93/13 en réglementant la clause litigieuse (pt 62) (CJUE, 29 avril 2021, Bank BPH, C-19/20).
Néanmoins, dans cette espèce, la Cour constate que ces deux conditions ne sont pas remplies (pt 63). Dès lors, le fait, pour le juge national, de supprimer uniquement les éléments abusifs d’une clause non réglementée qui ne constituent pas des obligations contractuelles distinctes s’apparente à une révision de la clause qui en affecte la substance (pt 64).