Recommandation N°13-01
Location non saisonnière de logement meublé

BOCCRF du 13/09/2013

La Commission des clauses abusives,

Vu la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et, notamment, son article 8.1,

Vu le code de la consommation et, notamment, ses articles L. 132-1 à L. 132-5 et R. 132-1 à R. 132-2-1,

Vu le code de la construction et de l’habitation et, notamment, ses articles L. 632-1 à L. 633-10,

Vu le code civil et, notamment, ses articles 9, 1148, 1315 et 1714 et suivants,

Vu le code des procédures civiles d’exécution et, notamment, son article L. 111-8,

Vu la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et, notamment, ses articles 3-1, 6 et 20-1,

Vu la loi n° 70-598 du 9 juillet 1970 modifiant et complétant la loi du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et, notamment, son article 10, I,

Vu la loi du 2 juillet 1966 relative à l’installation d’antennes réceptrices de radiodiffusion et notamment son article 2,

Vu les recommandations de la Commission des clauses abusives n°80-04 et n°00-01 concernant les contrats de location de locaux à usage d’habitation,

Entendu les représentants des professionnels concernés,

Considérant que les logements meublés sont des biens recherchés, en particulier, par les étudiants et les jeunes actifs qui souhaitent y établir leur résidence principale, même pendant quelques mois, car, à la différence des logements nus, le locataire n’a besoin, pour y vivre, que d’apporter ses effets personnels,

Considérant que sont concernés les contrats rédigés par des professionnels, associations, fédérations, sociétés privées, pour une utilisation généralisée à destination des consommateurs,

Considérant que, comme le précise l’article L. 632-3, alinéa 2, du code de la construction et de l’habitation, les locations saisonnières, tout comme les logements-foyers ou les logements gérés par les CROUS, ne relèvent pas du dispositif protecteur sur lequel se fonde la présente recommandation ;

Considérant que la présente étude ne porte pas sur les logements-foyers régis par les articles L. 633-1 et suivants du code précité, le contrat qui lie l’occupant et le foyer s’analysant en un contrat de prestation de services et non en un contrat de location.

Considérant que ces documents contractuels contiennent des clauses dont le caractère abusif au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation peut être relevé,

A / CLAUSES RELATIVES A LA FORMATION ET A LA QUALIFICATION DU CONTRAT

1° Clauses relatives à la qualification du contrat

1. Considérant que certains contrats sont dénommés « contrat d’hébergement de logements meublés à durée indéterminée », « convention d’occupation » ou indiquent que la location concerne des « locaux loués semi-meublés » ; que ces dénominations laissent croire aux consommateurs, que les dispositions protectrices des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation sont inapplicables ; qu’elles créent ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

2° Clauses relatives au droit applicable

2. Considérant que des clauses stipulent que les locaux meublés objet du contrat ne constituent pas la résidence principale du locataire ; que certains contrats précisent qu’ils sont soumis uniquement aux dispositions des articles 1714 et suivants du code civil ; que d’autres encore excluent expressément l’application des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ; que, lorsque le logement loué constitue, en réalité, la résidence principale du locataire, ces clauses sont illicites en ce qu’elles contreviennent aux articles L. 632-1 et suivants précités qui sont d’ordre public ; que, dès lors, maintenues dans un contrat, ces clauses sont abusives ;

3. Considérant que des clauses mentionnent que le locataire « déclare que les biens loués ne seront jamais sa résidence principale » et lui imposent de fixer celle-ci en un autre lieu, sous peine de la résiliation immédiate du bail ; que, lorsque ce dernier est destiné à assurer le logement principal du consommateur, notamment étudiant, ces clauses qui tendent à soustraire le contrat aux dispositions d’ordre public des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

3° Clauses relatives à la durée du contrat

4. Considérant que des clauses imposent une durée de contrat différente de celle prévue par les articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ; que ces clauses sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

 

4° Clauses relatives aux frais, droits et honoraires

5. Considérant que certaines clauses prévoient que seront à la charge du locataire tous les frais, droits et honoraires du bail ainsi que ceux qui en sont la suite ou la conséquence ; que ces clauses, dès lors qu’elles n’indiquent ni la nature ni le montant de l’ensemble de ces frais, ne permettent pas au locataire de connaître précisément l’étendue de son engagement ; qu’elles créent à son détriment un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, et sont abusives ; qu’elles sont donc abusives ;

6. Considérant que des clauses mettent à la charge du locataire les frais et honoraires du mandataire du bailleur ; que ces clauses, qui font peser sur le locataire la charge de prestations bénéficiant exclusivement au bailleur, créent un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’elles sont donc abusives ;

 

B / CLAUSES RELATIVES AU CONTENU DU CONTRAT

a) Clauses relatives aux dépenses mises à la charge du locataire

1. Clauses relatives à des prestations dites complémentaires

7. Considérant que des clauses imposent le versement par le locataire d’une « contribution forfaitaire » mensuelle, correspondant à « l’ensemble des prestations individuelles au titre du mobilier et des équipements particuliers », alors que le locataire règle le loyer d’un appartement meublé, censé être garni d’un mobilier suffisant pour permettre une habitation normale ; que ces clauses qui ont pour effet de rémunérer deux fois le bailleur pour la même prestation de fourniture de meubles, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu’elles sont donc abusives ;

2. Clauses relatives aux impôts et taxes

8. Considérant que des clauses stipulent que le locataire acquittera, en sus du loyer, les impôts et taxes dus par le bailleur ; que ces clauses mettent à la charge du locataire des obligations incombant au bailleur et créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

3. Clauses relatives au paiement des sommes dues

9. Considérant que des clauses prévoient le paiement par le preneur de sommes supplémentaires en fonction du mode de paiement choisi par lui ; que ces clauses qui contreviennent à l’article L. 112-12 du code monétaire et financier, sont illicites ; que, maintenues dans un contrat, elles sont abusives ;

4. Clauses relatives à la modification unilatérale du prix par le bailleur

10. Considérant que des clauses prévoient la faculté pour le bailleur de modifier, à tout moment, les prix et/ou de supprimer les services offerts dans la résidence qui sont des prestations indissociables de la location ; que l’article R. 132-1, 3°, du code de la consommation dispose que la clause qui a pour objet ou pour effet « de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre (…) » est abusive de manière irréfragable » ; qu’ainsi, ces clauses, en ce qu’elles permettent au bailleur de modifier unilatéralement le prix des prestations, sont abusives ;

b) Clauses relatives aux interdictions faites au preneur

1. Clauses relatives à l’hébergement des tiers

11. Considérant que des clauses restreignent la possibilité pour le locataire de recevoir ou héberger des amis et de la famille, même de manière très temporaire, notamment en limitant l’accès de l’immeuble aux seuls résidents, ou en prévoyant des normes d’occupation très strictes ; que ces clauses, dans la mesure où elles privent le locataire de la possibilité de recevoir ou héberger ses proches même dans les conditions d’une occupation paisible, sont contraires à l’article 8.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que ces clauses sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives

12. Considérant que des clauses prévoient que le bailleur pourra vérifier ou faire vérifier le respect des conditions d’occupation à tout moment ; que l’article 9 du code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée » ; qu’ainsi, les clauses stipulant la faculté d’une intrusion permanente dans les locaux du preneur sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

13. Considérant que des clauses prévoient, en cas de non-respect des conditions contractuelles d’occupation, une majoration substantielle du loyer, rétroactivement à compter de la prise d’effet du contrat ; que le caractère rétroactif de cette pénalité est de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’au surplus, il convient de rappeler qu’en vertu de l’article R. 132-2 du code de la consommation, est présumée abusive la clause imposant au consommateur défaillant « une indemnité d’un montant manifestement disproportionné » ;

2. Clauses relatives à la détention d’animaux

14. Considérant que des clauses interdisent la détention d’animaux familiers ; que l’article 10. I de la loi n° 70-598 du 9 juillet 1970 modifiant et complétant la loi du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel indique : « est réputée non écrite toute stipulation tendant à interdire la détention d’un animal dans un local d’habitation dans la mesure où elle concerne un animal familier. Cette détention est toutefois subordonnée au fait que ledit animal ne cause aucun dégât à l’immeuble ni aucun trouble de jouissance aux occupants de celui-ci » ; qu’ainsi ces clauses sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

c) Clauses relatives aux obligations imposées au preneur

15. Considérant que des clauses stipulent que le locataire a l’obligation de se raccorder à l’antenne collective et de participer aux différents frais liés à celle-ci ; que l’article 2 de la loi du 2 juillet 1966 relative à l’installation d’antennes réceptrices de radiodiffusion dispose que « le propriétaire qui a installé à ses frais une antenne collective ou un réseau interne à l’immeuble fournissant un service collectif est fondé à demander à chaque usager […], à titre de frais de branchement et d’utilisation, une quote-part des dépenses d’installation, d’entretien et de remplacement » et précise qu’au préalable, ledit locataire aura dû « [accepter] de se raccorder à cette antenne collective ou à ce réseau interne » ; que ces clauses, en ce qu’elles ne prévoient pas l’accord préalable du locataire, sont illégales et, maintenues dans un contrat, abusives ;

 

C / CLAUSES RELATIVES A L’EXECUTION DU CONTRAT

1. Clauses relatives à la limitation de jouissance paisible du logement

16. Considérant que des clauses imposent, pour permettre un bon entretien des locaux loués, que le locataire laisse visiter l’appartement par le gérant, ou ses préposés, chaque fois que l’entretien le nécessitera et au moins une fois par trimestre pour s’assurer de l’état de celui-ci ; que ces clauses exigent du locataire qu’il s’engage à laisser pénétrer chez lui, sans nécessité et, sauf urgence, sans avertissement préalable, le bailleur ou toute entreprise missionnée par celui-ci ; que de telles clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur, contraint de subir un trouble injustifié à la jouissance paisible à laquelle il peut prétendre en vertu de l’article 1719, 3°, du code civil et ce, sans aucune contrepartie ; qu’elles sont donc abusives ;

17. Considérant que des clauses indiquent qu’en cas de congé donné ou reçu, ainsi qu’en cas de vente, le locataire devra laisser visiter son logement, pendant plusieurs mois, de nombreuses heures chaque jour, excepté le dimanche ; que ces clauses, qui contraignent le locataire à laisser visiter son logement pendant une durée excessive au regard des usages et du droit au respect de la vie privée, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

18. Considérant que des clauses prévoient que le bailleur se réserve le droit d’exécuter toutes sortes de travaux, y compris dans le logement loué ; que, pour ceux-ci, le locataire devra sans indemnité laisser pénétrer dans les lieux les ouvriers diligentés par le bailleur et retirer à ses frais tous les aménagements qu’il aura effectués dans le local ; que l’article 1723 du code civil énonce que « le bailleur ne peut, pendant la durée du bail, changer la forme de la chose loué » ; que l’article 1724 du même code dispose, que « si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu’à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu’elles lui causent, et quoiqu’il soit privé, pendant qu’elles se font, d’une partie de la chose louée. Mais, si ces réparations durent plus de quarante jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé » ; que, selon l’article R. 132-1, 5°, du code de la consommation, sont « de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions du premier et du troisième alinéa de l’article L. 132-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de (…) contraindre le non-professionnel ou le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou son obligation de fourniture d’un service » ; qu’ainsi ces clauses qui autorisent le bailleur à modifier la forme de la chose louée et à exécuter des travaux même non urgents et d’une durée non limitée, sans diminution de loyer et en imposant divers frais au locataire, sont irréfragablement présumées abusives ;

19. Considérant que des clauses indiquent que le constat d’entrée dans les lieux prévoit des travaux à effectuer et que, quelle que soit leur importance, le preneur s’engage à laisser pénétrer dans le logement, pendant les premiers mois d’occupation, les entreprises mandatées par le bailleur pour les effectuer ; qu’en vertu de l’article 1719, 1°, du code civil, le bailleur est obligé « de délivrer au preneur la chose louée » ; que, selon l’article R. 132-1, 5°, du code de la consommation, sont « de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions du premier et du troisième alinéa de l’article L. 132-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de (…) contraindre le non-professionnel ou le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou son obligation de fourniture d’un service » ; que ces clauses, qui autorisent une délivrance seulement partielle du local loué, pour une durée indéterminée et sans diminution de loyer, sont irréfragablement présumées abusives ;

20. Considérant que des clauses indiquent qu’aucune garantie n’est donnée quant au degré de température du chauffage et de l’eau chaude ; qu’en vertu de l’article 1719, 3°, du code civil le bailleur s’engage à « faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail » du logement ; que ces clauses, qui exonèrent le bailleur de cette obligation, créent un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

2. Clauses relatives aux obligations du locataire, à l’entretien et à la réparation des locaux loués

21. Considérant que des clauses font peser sur le locataire toutes les charges, « quelle qu’en soit la nature », y compris les réparations afférentes tant au bien loué qu’à l’immeuble ; que ces clauses, dans la mesure où elles ont pour objet ou pour effet de transférer sur le preneur des dépenses non locatives, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

22. Considérant que des clauses imposent au locataire de faire procéder à ses frais à :

  • la réparation de tous les robinets et canalisations d’eau et de gaz,
  • la réparation de tous les siphons de vidange des appareils sanitaires, des réservoirs de chasse et des canalisations jusqu’au raccordement à la descente commune des W.C.,
  • la réparation des appareils sanitaires, des canalisations,
  • la réparation des stores et volets,
  • la réparation des dommages en cas d’infiltrations dues à des accidents causés par le gel ou la fonte des neiges,
  • toutes les modifications d’arrivée, de branchement, de remplacement de compteur ou d’installations intérieures pouvant être exigées par les compagnies distributrices des eaux, du gaz, de l’électricité et du chauffage ;

que ces clauses, en ce qu’elles mettent à la charge du locataire divers travaux sans distinguer, conformément aux articles 1719, 2°, et 1720, alinéa 2, du code civil, les réparations locatives des travaux incombant au bailleur, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

D / CLAUSES RELATIVES A LA FIN DU CONTRAT

a) Clauses relatives à l’état des lieux de sortie et à la remise en état du logement

 

1. Clauses relatives à l’état des lieux de sortie des locaux loués et au dépôt de garantie

23. Considérant que les clauses de certains contrats précisent que le dépôt de garantie ne sera remis au locataire qu’après la survenance d’un certain nombre d’événements dépendant de la volonté du bailleur ou de ses prestataires et sans stipulation d’une durée raisonnable ; que, dès lors, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

24. Considérant que des clauses stipulent qu’à défaut d’état des lieux d’entrée, le local est présumé loué neuf ; que, cependant, l’article 1731 du code civil prévoit qu’à défaut d’état des lieux, les locaux seront réputés être en bon état de réparations locatives ; que ces clauses, qui font peser sur le locataire la charge de la preuve contraire à la présomption contractuelle, alors qu’il appartiendrait normalement au bailleur de prouver, en l’absence d’état des lieux, que le local a été délivré neuf, et qui tendent ainsi à faire supporter par le preneur en fin de bail des réparations excédant celles qu’il devrait normalement prendre en charge, sont irréfragablement présumées abusives par application de l’article R. 132-1, 12°, du code de la consommation selon lequel sont interdites les clauses ayant pour objet ou effet d’« imposer au non-professionnel ou au consommateur la charge de la preuve, qui, en vertu du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat » ;

2. Clauses relatives à la remise en état du logement

25. Considérant que des clauses prévoient une liste de sommes forfaitairement mises à la charge du preneur pour chaque dégradation subie par le logement ; que le locataire s’engage à des remboursements sur la base d’une qualification unilatérale des dégradations par le bailleur et d’une estimation faite par avance au titre des réparations à réaliser ; que ces clauses qui sont de nature à faire supporter par le locataire le paiement de sommes injustifiées, créent, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

b) Clauses relatives aux causes et aux modalités de résiliation du bail

1. Clauses relatives aux possibilités de résiliation par le bailleur

26. Considérant que certains contrats prévoient au bénéfice du bailleur une faculté de résiliation du bail pour des motifs autres que ceux limitativement prévus par les articles L. 632-1 et L. 632-2 du code de la construction et de l’habitation ; que ces clauses contreviennent au statut protecteur établi par le législateur au bénéfice du locataire ; que ces clauses sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

27. Considérant que des clauses énoncent qu’en cas d’inexécution par le locataire d’une seule des clauses du bail, celui-ci sera résilié de plein droit sans qu’il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire ; que ces clauses, qui prévoient la résiliation de plein droit du contrat, en cas de manquement même mineur du preneur, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

28. Considérant que des clauses imposent le paiement de prestations para-hôtelières, telles « un petit déjeuner mensuel » et « un ménage trimestriel de l’appartement », sous peine de résiliation de plein droit du contrat ; que la sanction prévue par ces clauses en cas de défaut de paiement de prestations étrangères à l’objet principal du contrat, qui est la location d’un logement meublé, est disproportionnée ; que, dès lors, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

29. Considérant qu’une clause indique que, si les locaux loués viennent à être détruits partiellement ou totalement, la location sera résiliée de plein droit si bon semble au bailleur sans aucune indemnité à sa charge ; alors que l’article 1722 du code civil dispose que « si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement » ; que cette clause, en ce qu’elle offre le choix au seul bailleur de résilier ou non le bail en cas de destruction totale ou partielle du logement loué, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

2. Clauses relatives aux modalités de délivrance du congé

30. Considérant qu’il est stipulé dans certaines clauses relatives à la délivrance du congé que :

  • soit le bailleur peut donner congé avec un préavis d’un mois ou de trois mois avant la fin du bail, sans conditions,
  • soit le locataire est tenu du paiement des loyers jusqu’à relocation et à défaut jusqu’à la fin du bail,
  • soit le locataire ne peut donner congé que par un préavis de trois mois avant la date anniversaire du bail ;

que ces clauses comportent des violations caractérisées des dispositions de l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation ; qu’ainsi, elles sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

31. Considérant que des clauses fixent la date d’effet du préavis du locataire nécessairement au dernier jour du mois et stipulent que tout départ anticipé donnera lieu à la facturation d’un « complément de redevance » ; que l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation prévoit que le locataire « peut résilier le contrat à tout moment sous réserve du respect d’un préavis d’un mois » ; que ces clauses sont donc illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

32. Considérant que des clauses prévoient que le contrat de bail expire de plein droit à l’issue d’une durée de 12 mois et que, si le locataire souhaite à nouveau louer le logement, il devra payer les frais de rédaction d’un nouveau contrat ; que l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation dispose que, dans le cas d’un bail de 12 mois, le contrat est renouvelable tacitement ; que ces clauses sont donc illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

3. Clauses relatives aux modalités de résiliation du contrat de bail

33. Considérant que des clauses imposent, dans le cas d’un départ du locataire avant un nombre de mois déterminé, l’augmentation rétroactive du loyer ; que d’autres contrats prévoient un montant de loyer dégressif avec réajustement des premiers loyers en fonction de la durée d’occupation du logement ; que ces différentes clauses dissimulent une indemnité de résiliation en contravention avec l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation selon lequel « le locataire peut résilier le contrat à tout moment sous réserve du respect d’un préavis d’un mois » ; que ces clauses sont donc illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

34. Considérant que des clauses énoncent que le dépôt de garantie sera restitué au locataire dans les deux mois suivant la date de résiliation « acceptée » par le mandataire du bailleur ; que l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation prévoit, pour le preneur, le droit de résilier le contrat à tout moment, sans que le bailleur soit en mesure de s’y opposer ; que ces clauses qui laissent croire que le bailleur serait en droit d’accepter, ou non, le congé régulièrement donné par le preneur, sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

E / CLAUSES RELATIVES AUX CONTENTIEUX

1. Clauses relatives à la charge de la preuve

35. Considérant que des clauses prévoient que le locataire sera tenu pour responsable de toute dégradation des parties communes ; que le bailleur est déchargé par ces clauses de l’obligation de prouver l’imputabilité au preneur des détériorations causées aux parties communes ; que ces clauses font peser sur le locataire une responsabilité de plein droit en méconnaissance des règles relatives à la charge de la preuve telles que définies par l’article 1315, alinéa 1er, du code civil ; qu’elles sont présumées irréfragablement abusives par l’article R. 132-1, 12°, du code de la consommation en ce qu’elles imposent « au non-professionnel ou au consommateur la charge de la preuve, qui, en vertu du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat » ;

36. Considérant que des clauses indiquent que le locataire répondra des dégradations survenant pendant la durée du contrat de location dans les locaux dont il a la jouissance ; que l’article 1732 du code civil énonce que le preneur « répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute » ; que ces clauses, qui laissent croire au locataire que la réparation des dégradations qui ne lui sont pas imputables sera à sa charge, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et sont abusives ;

37. Considérant que des clauses prévoient que le bailleur sera toujours réputé satisfaire à toutes ses obligations et, notamment, à celles visées à l’article 1719 du code civil ; qu’en vertu de l’article 1315, alinéa 2, du code civil, « celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation » ; que ces clauses, qui tendent à décharger le bailleur de l’obligation de rapporter cette preuve et font peser sur le locataire la preuve contraire, sont irréfragablement abusives en vertu de l’article R. 132-1, 12°, du code de la consommation ;

2. Clauses pénales

38. Considérant que des clauses prévoient, en cas de retard dans le paiement du loyer, une majoration forfaitaire des sommes dues, alors que ces contrats ne contiennent aucune clause pénale en cas d’inexécution par le bailleur de ses obligations de délivrance ou d’entretien ; que ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

3. Indemnités conventionnelles

39. Considérant que des clauses prévoient que, si le locataire obtenait des délais pour libérer les lieux à l’issue du bail, il devrait une indemnité supérieure au montant du loyer ; que ces clauses, en ce qu’elles constituent un obstacle à l’exercice du droit pour le locataire de solliciter du juge l’octroi de délais en application de l’article L. 613-1 du code de la construction et de l’habitation, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

40. Considérant que des clauses prévoient une indemnité égale à la totalité du dépôt de garantie en cas d’envoi du préavis par un moyen autre qu’une lettre recommandée ; que ces clauses, en ce qu’elles prévoient une sanction sans lien avec le manquement reproché au locataire, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elles sont donc abusives ;

4. Frais et honoraires de recouvrement

41. Considérant que des clauses indiquent que l’ensemble des frais pour le recouvrement des sommes impayées et pour toutes poursuites devra être remboursé par le locataire ; que l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, dispose « les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s’ils concernent un acte dont l’accomplissement est prescrit par la loi. Toute stipulation contraire est réputée non écrite, sauf disposition législative contraire. Cependant, le créancier qui justifie du caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance peut demander au juge de l’exécution de laisser tout ou partie des frais ainsi exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi » ; que ces clauses qui mettent à la charge du preneur les frais et honoraires de recouvrement en l’absence de titre exécutoire, sont illicites et, maintenues dans un contrat, abusives ;

5. Clauses de réduction ou d’exclusion de garantie du bailleur

42. Considérant que des clauses prévoient de multiples cas d’exclusion de la responsabilité du bailleur, sans distinguer selon que lui sont imputables, ou non, les troubles de jouissance subis par le preneur ; qu’en vertu de l’article R. 132-1, 6°, du code de la consommation, est irréfragablement présumée abusive la clause ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le non-professionnel ou le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations » ; que, dès lors, ces clauses sont abusives ;

6. Clauses relatives à l’élection de domicile

43. Considérant que des clauses prévoient que, pour l’exécution du bail et, notamment, pour la signification de tous les actes de poursuites, le locataire fait élection de domicile dans les lieux loués ; que ces clauses sont applicables même après le départ du locataire des lieux loués ; qu’en ce qu’elles permettent au bailleur de notifier des actes de procédure à une adresse à laquelle il sait que le locataire ne réside plus, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;

Recommande que soient supprimées des contrats les clauses ayant pour objet ou pour effet :

1. de laisser croire au locataire d’un logement meublé qui constitue son habitation principale, qu’il ne bénéfice pas des dispositions des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ;

2. d’exclure l’application des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation lorsque le logement loué constitue, en réalité, la résidence principale du locataire ;

3. d’imposer au consommateur, pour obtenir et conserver la location du bien, de renoncer au régime protecteur d’ordre public institué par les articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ;

4. de prévoir une durée de location contraire aux dispositions des articles L. 632-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ;

5. de prévoir, de manière générale, que seront à la charge du locataire l’ensemble des frais, droits et honoraires du bail ainsi que leur suite et conséquence, sans en indiquer précisément ni la nature ni le montant ;

6. de faire peser sur le locataire les frais et honoraires du mandataire du bailleur ;

7. de prévoir un supplément de rémunération pour la fourniture du mobilier et des équipements nécessaires à une habitation normale, par ailleurs incluse dans le loyer ;

8. de mettre à la charge du locataire, en sus du loyer, des impôts et taxes relatifs au bien loué, incombant au bailleur ;

9. d’imposer des frais supplémentaires au consommateur en fonction du mode de paiement qu’il choisit ;

10. de prévoir la faculté pour le bailleur de modifier unilatéralement, à tout moment, le prix et la nature des prestations prévues dans le contrat de bail ;

11. de restreindre le droit pour le locataire de recevoir ou héberger ses proches dans les lieux loués, même dans les conditions d’une occupation paisible ;

12. de porter atteinte à la jouissance paisible des lieux loués en prévoyant la possibilité pour le bailleur de vérifier ou de faire vérifier à tout moment les conditions d’occupation des locaux ;

13. de prévoir une pénalité rétroactive en cas de non-respect des conditions contractuelles d’occupation ;

14. d’empêcher le locataire de détenir des animaux domestiques dans les lieux loués dès lors que ceux-ci ne causent pas de dégâts et ne troublent pas la jouissance des autres occupants de l’immeuble ;

15. d’imposer des frais à un locataire alors qu’il n’a pas, au préalable, accepté de bénéficier du service de raccordement à une antenne collective ;

16. de limiter la jouissance paisible du locataire en l’obligeant à laisser visiter le bien loué par le gérant, ses préposés ou ses prestataires, soit sans nécessité, soit, en cas de nécessité, sans avertissement préalable, sauf urgence ;

17. de contraindre le locataire à laisser visiter son logement, en cas de congé ou de vente, pendant une durée excessive au regard des usages et du droit au respect de la vie privée ;

18. de prévoir que le bailleur pourra effectuer tous travaux dans les lieux loués, en toutes circonstances, sans limitation de durée et sans aucune indemnité ;

19. d’autoriser une délivrance seulement partielle du local loué, pour une durée indéterminée et sans diminution de loyer ;

20. de dispenser le bailleur de ses obligations de fourniture de chauffage et d’eau chaude ;

21. de faire peser sur le preneur des dépenses non locatives ;

22. de mettre à la charge du locataire divers travaux susceptibles d’incomber au bailleur ;

23. de soumettre la restitution du dépôt de garantie à la survenance d’un certain nombre d’événements dépendant de la volonté du bailleur ou de ses prestataires et sans stipulation d’une durée raisonnable ;

24. de stipuler qu’à défaut d’état des lieux d’entrée, le local est présumé loué neuf ;

25. de mettre à la charge du locataire des sommes forfaitaires pour chaque dégradation subie par le logement ;

26. de prévoir une faculté de résiliation du contrat par le bailleur pour des motifs autres que ceux limitativement prévus par les articles L. 632-1 et L. 632-2 du code de la construction et de l’habitation ;

27. de prévoir la résiliation du bail de plein droit en cas d’inexécution, par le locataire, de l’une quelconque de ses obligations, même mineure ;

28. de prévoir une clause résolutoire de plein droit en cas de défaut de paiement d’une prestation étrangère à l’objet principal du contrat de location d’un logement meublé ;

29. de permettre au bailleur de résilier, ou non, le bail en cas de destruction totale ou partielle des locaux loués, en méconnaissance de l’article 1722 du code civil ;

30. de prévoir la résiliation du contrat, par le locataire comme par le bailleur, dans des conditions contraires à l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation ;

31. de reporter, dans tous les cas, au dernier jour du mois, la date d’effet du congé donné par le locataire ;

32. d’imposer la rédaction d’un nouveau bail à l’expiration du contrat, alors qu’il est tacitement renouvelé par application de l’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation ;

33. d’imposer au locataire résiliant son contrat de bail de manière anticipée, une indemnité de résiliation, quelle que soit sa forme, notamment un réajustement du montant des loyers ;

34. de prévoir que le bailleur ou son mandataire peut accepter ou refuser le congé régulièrement donné par le locataire ;

35. de faire peser sur le locataire une présomption de responsabilité dans la survenance des dégradations des parties communes ;

36. d’empêcher le locataire de faire valoir des causes de non-imputabilité des dégradations du logement loué ;

37. de faire bénéficier le bailleur d’une présomption d’exécution de ses obligations ;

38. de prévoir une pénalité en cas de retard dans le paiement du loyer, sans réciprocité en cas d’inexécution par le bailleur de ses obligations ;

39. de prévoir le versement d’une indemnité contractuelle supérieure au loyer en cas d’obtention d’un délai judiciaire pour libérer les lieux à l’expiration du bail

40. de prévoir contractuellement des indemnités sans lien avec le manquement reproché au locataire ;

41. de mettre à la charge du locataire, sans décision de justice, l’ensemble des frais de recouvrement des sommes impayées ;

42. de supprimer le droit à réparation du preneur en cas de manquement du bailleur à ses obligations ;

43. de prévoir que le locataire fait élection de domicile dans les lieux loués, même après la résiliation du contrat.

Recommandation adoptée le 6 juin 2013 sur le rapport de Nathalie Bricks et Raphaëlle Petit-Macur