Recommandation N°01-02
Durée des contrats conclus entre professionnels et consommateurs

BOCCRF du 23/05/2001

La Commission des clauses abusives,

Vu les dispositions du Code de la consommation et notamment les articles L 132-1 à L 132 ;

Considérant que, selon les caractéristiques des contrats, leur durée peut constituer un facteur de déséquilibre significatif au détriment des consommateurs et qu’à l’occasion de l’examen de plusieurs types de contrats, la Commission des clauses abusives a déjà recommandé l’élimination de diverses stipulations de nature à créer de ce chef un tel déséquilibre ;

Considérant que la fréquence de ces clauses dans les contrats conclus avec les consommateurs justifie, au vu des recommandations existantes et à la lumière des législations européennes en vigueur postérieurement à la directive CEE n° 93/13 du 5 avril 1993, l’adoption d’une recommandation à caractère général sur l’élimination des clauses qui, relatives à la durée initiale des contrats, à leur résiliation ainsi qu’à leur prorogation, présentent un caractère abusif ;

Clauses relatives à la durée initiale du contrat :

Considérant que divers contrats à exécution successive contiennent une clause de durée initiale minimale –par exemple, d’un an, deux ans, voire plus- pendant laquelle le consommateur ne peut rompre le lien contractuel pour quelque cause que ce soit ; que de telles clauses, qui excluent tout motif légitime qu’aurait le consommateur à se dégager du contrat avant l’échéance stipulée sont, eu égard à l’économie de celui-ci, susceptibles de déséquilibrer gravement la relation contractuelle à son détriment ;

Considérant que d’autres contrats autorisent le professionnel à en modifier unilatéralement la durée en cours d’exécution ; que de telles stipulations qui abandonnent la durée de la relation contractuelle à la discrétion du professionnel sont abusives ;

Clauses relatives à la résiliation du contrat :

Considérant que de nombreux contrats à durée déterminée contiennent des stipulations permettant directement ou indirectement au professionnel de mettre fin unilatéralement et discrétionnairement à la relation contractuelle en cours ; que de telles clauses, qui autorisent la rupture du contrat par le professionnel même en l’absence de tout motif légitime, déséquilibrent gravement la relation contractuelle au détriment du consommateur ;

Considérant que des clauses de divers contrats à durée indéterminée autorisent le professionnel à résilier le contrat sans avoir à respecter un délai raisonnable de préavis, et ce, alors même qu’il n’existerait aucun motif légitime pour ce faire ; que de telles stipulations qui, du fait du professionnel, maintiennent le consommateur dans une situation d’insécurité juridique, déséquilibrent de manière significative le contrat à son détriment ;

Considérant que dans certains contrats à durée indéterminée, des clauses subordonnent la résiliation du contrat à un délai de préavis plus long pour le consommateur que pour le professionnel ; que ces stipulations qui font varier ce délai non pas selon la cause de la résiliation, mais selon que celle-ci est demandée par le professionnel ou le consommateur, sont source d’un déséquilibre significatif dans la relation contractuelle au détriment de ce dernier ;

Considérant que diverses clauses, notamment dans des contrats à durée indéterminée, refusent au consommateur le droit de résilier le contrat en cas de manquement grave ou répété, par le professionnel, à ses obligations ; que de telles stipulations, qui forcent le consommateur à rester dans les liens d’un contrat qui, du fait de son inexécution, le prive en tout ou en partie des prestations convenues, présentent un caractère abusif ;

Considérant que d’autres clauses subordonnent la résiliation du contrat par le consommateur au versement d’une indemnité contractuelle au profit du professionnel ; que ces clauses ne se justifient pas lorsque la résiliation est fondée sur la force majeure ou l’inexécution par le professionnel de ses obligations ;

Clauses relatives à la prorogation ou à la reconduction tacite du contrat :

Considérant qu’un grand nombre de contrats à durée déterminée contiennent une clause de prorogation ou de reconduction tacite ; que lorsque, de ce fait, la relation contractuelle doit se poursuivre pour une durée excessive, spécialement lorsque celle-ci est supérieure à la durée initiale du contrat, le consommateur est empêché de contracter à des conditions plus avantageuses avec un autre professionnel ;

Considérant que d’autres clauses obligent le consommateur, pour faire obstacle à la prorogation ou la reconduction tacite du contrat à durée déterminée, à informer le professionnel de son intention parfois plusieurs mois avant l’arrivée du terme convenu ; que de telles stipulations sont de nature à faire concrètement obstacle au droit du consommateur de ne pas prolonger la relation contractuelle lorsque la date limite fixée pour exprimer son choix est trop éloignée du terme du contrat ; qu’elles sont alors de nature à déséquilibrer gravement la relation contractuelle au profit du professionnel ;

Recommande :

Que soient éliminés des contrats conclus entre professionnels et consommateurs les clauses ayant pour objet ou pour effet :

  1. d’imposer une durée initiale minimum du contrat sans en autoriser, eu égard à son économie, la résiliation anticipée par le consommateur pour motifs légitimes ;
  2. de permettre au professionnel, pendant le cours de l’exécution du contrat, d’en modifier unilatéralement la durée convenue ;
  3. de reconnaître, directement ou indirectement, au professionnel le droit de résilier unilatéralement le contrat à durée déterminée en l’absence de motif légitime ;
  4. d’autoriser le professionnel à rompre le contrat à durée indéterminée sans un délai raisonnable de préavis, à moins qu’il n’existe des motifs légitimes pour ce faire ;
  5. de soumettre la résiliation, dans les contrats à durée indéterminée, à un délai de préavis plus long pour le consommateur que pour le professionnel ;
  6. d’interdire au consommateur de demander la résiliation du contrat en cas de manquement grave ou répété par le professionnel à ses obligations ;
  7. de subordonner, en cas de force majeure ou d’inexécution par le professionnel de ses obligations, la résiliation du contrat par le consommateur au paiement d’une indemnité contractuelle au profit du professionnel ;
  8. de prévoir la prorogation ou la reconduction tacite d’un contrat à durée déterminée pour une période excessivement longue ;
  9. de contraindre le consommateur, pour éviter la prorogation ou la reconduction tacite d’un contrat à durée déterminée, à notifier son intention au professionnel à une date trop éloignée de l’arrivée du terme convenu.

(Texte adopté le 22 février 2001 sur le rapport de M. Gilles Paisant)