Recommandation N°98-01
Abonnement au câble et à la télévision à péage

BOCCRF du 31/12/1998

La Commission des clauses abusives,

Vu le code de la consommation, et notamment ses articles L. 132-1 à L. 132-5 ;

Vu le code civil ;

Vu la recommandation de synthèse n° 91-02 ;

Entendu les représentants des professionnels du câble et de la télévision à péage ;

Considérant que la réception télévisuelle par câble a connu un développement significatif particulièrement marqué ces dernières années et que 10 % des foyers français l’utilisent effectivement ;

Considérant que de nouvelles formes de télévision à péage se développent rapidement ;

Considérant que les contrats proposés par les opérateurs du câble et de la télévision à péage sont élaborés par les seuls professionnels et offerts par eux à l’adhésion des consommateurs ; que lesdits contrats entrent donc dans le champ d’application des articles du code de la consommation susvisés ;

Considérant que, dans l’énoncé des contrats, la partie réservée aux services offerts par les opérateurs est limitée, qu’en particulier la liste des chaînes et programmes disponibles ne figure que dans les documents publicitaires et que l’opérateur n’entend pas s’engager sur ce point ;

Considérant que l’on retrouve dans la plupart des contrats d’abonnement à la télévision par câble une clause selon laquelle l’opérateur  » se réserve la faculté de modifier, sans notification préalable, tout ou partie des programmes annoncés et diffusés, n’assurant (lui)-même que la réception et la distribution aux abonnés de certains programmes sur le réseau  » ;

Considérant que le consommateur décide de contracter en fonction de la sélection de chaînes qui lui sont proposées au moment de la conclusion du contrat et que les modifications de cette sélection ne sont pas exceptionnelles ; que les clauses qui rendent opposable au consommateur toute modification de la liste des chaînes sans information préalable et sans lui offrir la faculté de résilier le contrat pour ce motif déséquilibrent gravement le contrat à son détriment ;

Considérant que l’abonnement est conclu pour une durée minimale d’un an ou de six mois, et que la résiliation ne peut intervenir avant le terme de l’abonnement sauf cas de force majeure ; que de telles clauses, en ce qu’elles n’autorisent pas le consommateur à résilier le contrat pour motifs légitimes déséquilibrent le contrat ;

Considérant que des contrats comportent des clauses permettant au professionnel de modifier à tout moment les tarifs applicables, sans informer clairement à cette occasion le consommateur des conditions de résiliation, ni lui donner la possibilité d’exercer effectivement cette faculté ;

Considérant que certains prévoient une clause d’acceptation tacite des modifications de prix ; que de telles clauses, distinctes des clauses d’indexation, ont été qualifiées d’abusives ;

Considérant que certains contrats prévoient comme mode unique de paiement le prélèvement automatique mensuel ; que ce mode de paiement est susceptible de nuire aux intérêts du consommateur en ce qu’il réduit fortement ses possibilités de recours contre le professionnel en cas de contestation sur les sommes prélevées ; que l’alternative proposée dans la plupart des contrats est le paiement annuel d’avance ; qu’une telle modalité paraît abusive si ne sont pas prévues les conditions de restitution des sommes perçues en cas de résiliation justifiée du contrat ;

Considérant que les contrats prévoient que le raccordement s’effectue en présence de l’abonné ou de son mandataire afin de déterminer la  » ligne de passage  » du câble ; que les professionnels facturent des frais de déplacement à l’abonné en cas d’absence de celui-ci lorsque le rendez-vous n’a pas été annulé au moins quarante-huit heures à l’avance ; qu’aucun dédommagement de l’abonné n’est prévu en cas d’absence du préposé du professionnel lors du rendez-vous convenu ; que cette absence de réciprocité est source de déséquilibre contractuel au détriment du consommateur ; qu’en outre ces frais devraient être fixés dans le contrat ;

Considérant que les délais de raccordement ne sont pas toujours indiqués dans le contrat, que l’absence de cette indication, qui fait dépendre l’exécution du contrat de la volonté du professionnel, est abusive ;

Considérant que le matériel nécessaire à la réception des signaux télévisuels est mis à la disposition de l’abonné mais reste la propriété du professionnel ; qu’une indemnité est généralement prévue à la charge de l’abonné à défaut de restitution du matériel à l’expiration de l’abonnement dans un délai donné ; que le montant de cette indemnité n’est généralement pas fixé au contrat ;

Considérant que plusieurs contrats limitent la responsabilité du professionnel à l’acheminement des signaux des chaînes  » dans les meilleures conditions possibles  » et excluent sa responsabilité en cas d’interruption du service due  » à des travaux, au fait d’un tiers ainsi qu’à des aléas inévitables de l’état de la technique  » ; que de telles clauses, qui ont pour objet ou pour effet d’exonérer le professionnel de sa responsabilité pour des cas qui ne constituent pas une cause étrangère, sont abusives ;

Considérant que certains contrats prévoient en cas d’interruption de la diffusion une indemnisation sous forme de crédit d’abonnement correspondant à la durée de cette interruption avec une franchise de huit jours ; qu’une telle stipulation, qui limite substantiellement le droit à réparation du consommateur, déséquilibre le contrat à son détriment ;

Considérant qu’en cas de défaut de paiement, certaines clauses imposent au consommateur des frais de recouvrement non judiciaires ; que ces frais doivent rester à la charge du créancier ; que de telles clauses sont illicites ;

Recommande :

Que soient éliminées des contrats d’abonnement au câble ou à la télévision à péage les clauses ayant pour objet ou pour effet :

1° De permettre au professionnel de modifier la liste des chaînes annoncées sans information préalable et sans offrir au consommateur la faculté de résilier son contrat pour ce motif ;

2° D’imposer une durée minimale au contrat, en excluant, dans la limite de cette durée toute rupture anticipée, même pour motifs légitimes ;

3° De permettre au professionnel de modifier à tout moment les tarifs, sans que le consommateur en ait été averti dans un délai utile pour résilier le contrat ;

4° De stipuler l’acceptation tacite des modifications de prix ;

5° D’imposer au consommateur le prélèvement automatique mensuel comme unique mode de paiement, ou de prévoir un paiement annuel d’avance sans spécifier les conditions de restitution des sommes perçues en cas de résiliation justifiée du contrat ;

6° De prévoir sans réciprocité des frais à la charge du consommateur lorsqu’il annule un rendez-vous pris en vue du raccordement ou de prévoir à cette occasion des frais dont le montant n’est pas contractuellement déterminé ;

7° De laisser au seul professionnel la détermination des délais de raccordement ;

8° De prévoir à la charge des abonnés des frais non fixés à l’avance, à défaut de restitution du matériel dans le délai prévu à la fin du contrat ;

9° D’exclure, par la généralité ou l’imprécision des cas d’exonération qu’elles prévoient, la responsabilité des professionnels, lorsque l’interruption du service n’est pas la conséquence d’une cause étrangère ;

10° De limiter l’indemnité due par le professionnel au montant de l’abonnement pendant la durée de l’interruption avec une franchise excessive ;

11° D’imposer au consommateur des frais de recouvrement non judiciaires en cas de défaut de paiement.

(Texte adopté le 15 octobre 1998 sur le rapport de Mme Virginie Beaumeunier et M. Bernard Siouffi.)

Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur des communications électroniques