Recommandation N°23-01
Places de marché en ligne de vente de biens

Recommandation n°23-01 publiée au BOCCRF du  7 décembre 2023

La Commission des clauses abusives,

 

Vu le règlement (CE) n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Rome I, en son article 6 ;

 

Vu le règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale dit Bruxelles I bis, en ses articles 17 et 19 ;

 

Vu le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD), notamment en ses articles 4, 5, 6, 7, 13, 14, 15 et 32 ;

 

Vu la directive (CE) 2000/31 du 8 juin 2000 sur le commerce électronique, notamment en son article 11 ;

 

Vu la directive (UE) 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, notamment en ses considérants 20 et 37 ;

 

Vu le code civil, notamment en ses articles 544, 545, 549, 550, 1103, 1120, 1127-1, 1127-2, 1193, 1210, 1218, 1226, 1229, 1230, 1240, 1241, 1352-1, 1352-4, 1356, 1367, 1915, 2061, 2224, 2227, 2274 et 2276 ;

 

Vu le code de la consommation, notamment en son article liminaire et ses articles L. 211-1, L. 212-1, L. 217-1 et suivants, L. 218-1, L. 221-5, L. 221-14, L. 221-15, L. 221-18 et suivants, L. 224-25-12, L. 224-65, L. 612-4, R. 212-1 et suivants, R. 612-5 et R. 631-3 ;

 

Vu le code de procédure civile, notamment en ses articles 1448 et 1506 ;

 

Vu le code de la propriété intellectuelle, notamment en ses articles L. 121-1, L. 131-3, L. 513-2, L. 712-1, L. 714-1 ;

 

Vu la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, notamment en ses articles 29 et suivants ;

 

Vu la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés ;

 

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment en ses articles 4 et 121 ;

 

Vu la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française, notamment en son article 2 ;

 

Vu la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), notamment en son article 6 ;

 

Vu le décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique ;

 

Analysées les observations des représentants des professionnels concernés ;

I- Contexte de la recommandation

 

Les contrats formés en ligne par les consommateurs avec des professionnels étaient initialement conclus directement à partir du site internet du professionnel. De nouveaux opérateurs se sont désormais immiscés dans cette relation. Ces derniers proposent soit de faciliter les recherches des consommateurs en répertoriant les offres de contracter et en les redirigeant vers le site du prestataire, soit de constituer un nouvel espace mis à la disposition de leurs utilisateurs, dont des professionnels, pour leur permettre de conclure des contrats avec des consommateurs.

 

La diversité des activités de ces nouveaux opérateurs a posé des difficultés quant à leur définition.

 

Le Conseil d’État, dans son étude annuelle de 2014 intitulée « Le numérique et les droits fondamentaux » (La Documentation française, septembre 2014, p. 21 et 338), a suggéré de créer une nouvelle catégorie juridique, celle des plateformes, qui « proposent des services de classement ou de référencement de contenus, de biens ou services mis en ligne par des tiers ».

 

Le Conseil national du numérique, dans son rapport intitulé « Neutralité des plateformes. Réunir les conditions d’un environnement numérique ouvert et soutenable » (CNNum, mai 2014), constate que les plateformes proposent des espaces numériques d’intermédiation et offrent « un support aux différentes formes d’interactions sociales entre les individus ».

 

Afin de protéger les internautes, les lois Hamon du 17 mars 2014 (loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation), Macron du 6 août 2015 (loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, article 134) et pour une République numérique du 7 octobre 2016 (loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, article 49) ont identifié une nouvelle catégorie d’intermédiaires : les opérateurs de plateforme en ligne. Ceux-ci sont définis à l’article L. 111-7, I. du code de la consommation comme :

 

« Toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur :

1° Le classement ou le référencement, au moyen d’algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers ;

2° Ou la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service ».

 

La première catégorie couvre les sites qui servent de point de passage pour accéder à d’autres contenus. Ces sites proposent donc du contenu informatif : moteurs de recherche, agrégateurs ou comparateurs de prix, etc.

 

La seconde catégorie regroupe les sites dont l’objet est de permettre la mise en relation entre plusieurs personnes en vue de la conclusion d’un contrat (plateformes de consommation collaborative, marketplaces) ou de partages de contenus informationnels (plateformes de partage de vidéos, réseaux sociaux).

 

Depuis la transposition de la directive 2019/2161 du 27 novembre 2019 dite Omnibus par l’ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, les plateformes de mise en relation en vue de la conclusion d’un contrat font l’objet d’une définition qui leur est propre sous la dénomination générale de place de marché en ligne. L’article liminaire, 14° du code de la consommation dispose ainsi qu’une place de marché en ligne est « un service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d’autres professionnels ou consommateurs ». Par ailleurs, cette même disposition aborde, en son 15°, l’opérateur de place de marché en ligne comme « tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs, au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 ».

=> La place de marché en ligne doit donc s’entendre comme constituant une sous-catégorie de plateforme en ligne, dont l’objet particulier est de mettre en relation des consommateurs avec des professionnels ou d’autres consommateurs en vue de la conclusion d’un contrat.

 

Les places de marché en ligne font l’objet de certaines dispositions spécifiques dans le code de la consommation (article L. 111-7, II. dudit code, mettant à leur charge un devoir de loyauté ; article L. 121-3 du même code relatif à certaines pratiques commerciales trompeuses).

Outre ces règles spécifiques, l’utilisation des services des places de marché en ligne par les consommateurs est subordonnée à l’acceptation par ces derniers des conditions générales d’utilisation accessibles sur le site du professionnel, ce qui s’analyse comme la conclusion d’un contrat de fourniture de prestation de service entre un professionnel et un consommateur. Cette relation contractuelle relève du champ du droit de la consommation, dont les règles ont alors vocation à s’appliquer. En vertu de l’article L. 822-4 du code de la consommation, la Commission des clauses abusives est donc compétente pour rechercher, dans les modèles de convention habituellement proposés par les professionnels (conclus par les consommateurs avec les places de marché en ligne), s’ils contiennent des clauses qui pourraient présenter un caractère abusif.

A l’exception des dispositions applicables à la médiation de la consommation (article L. 611-1 et s. c. consom.) et aux contrats conclus à distance (article L. 221-1 et s. c. consom.) qui ont vocation à s’appliquer aux seuls contrats conclus entre professionnels et consommateurs, les modèles de convention des professionnels seront analysés chaque fois qu’ils peuvent être utilisés dans des relations contractuelles établies avec des consommateurs ou des non-professionnels.

 

 

II- Périmètre de la recommandation

 

Le périmètre de la recommandation sera déterminé de la façon suivante :

– sa limitation aux places de marché en ligne (A) ;

– la détermination du périmètre de la recommandation dans les relations établies par l’intermédiaire d’une place de marché en ligne (B) ;

– la limitation du périmètre de la recommandation aux places de marché en ligne de vente de biens (C).

 

A- Limitation du périmètre de la recommandation aux places de marché en ligne

 

Sont exclues de l’analyse :

 

1°- les plateformes telles que définies à l’article L. 111-7, I., 1° du code de la consommation dont l’objet est « le classement ou le référencement, au moyen d’algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers » : moteurs de recherche, plateformes de partage de vidéo, agrégateurs ou comparateurs de prix, etc.

Ces plateformes se distinguent nettement de celles de mise en relation (places de marché en ligne) de par leurs finalités respectives. Certes, elles peuvent, in fine, aboutir à la conclusion d’un contrat entre un professionnel et un consommateur, ce dernier étant orienté vers le site d’un professionnel afin d’acquérir un produit ou de bénéficier d’un service. L’intermédiation est cependant indirecte, la conclusion du contrat ne se faisant pas, le plus souvent, depuis une place de marché en ligne, c’est-à-dire un espace commun, mais directement sur le site du professionnel choisi par le consommateur.

 

2°- Parmi les plateformes telles que définies à l’article L. 111-7, I., 2° du code de la consommation, sont exclues celles qui offrent de partager des contenus telles que les plateformes de partage de photos ou de vidéos ou les réseaux sociaux.

Ces plateformes se distinguent des places de marché en ligne en ce qu’elles ne partagent pas la même finalité. Par ailleurs, les réseaux sociaux ont fait l’objet d’une recommandation de la Commission des clauses abusives (Recommandation N° 14-02 Contrats de fourniture de services de réseaux sociaux), ce qui justifie, de plus fort, leur mise à l’écart de la présente recommandation.

 

3°- Les places de marché présentent plusieurs formes en raison de la variété de leurs activités. Certaines sont appelées places de marché natives, ou « pure marketplaces », parce que créées pour mener cette activité dès leur origine. D’autres ont adossé ce modèle à leur activité initiale de vendeur ou revendeur. Ce sont enfin des vendeurs à distance plus traditionnels ou des distributeurs disposant d’une enseigne physique qui ont utilisé ce modèle pour diversifier leurs activités.

Parmi ces différentes activités menées par les places de marché, sont exclues du champ de la recommandation les activités au cours desquelles les places de marché se comportent comme vendeurs directs. L’objet de la recommandation porte donc sur l’activité d’intermédiation des places de marché.

 

 

B- Détermination du périmètre de la recommandation dans les relations établies par l’intermédiaire d’une place de marché en ligne

 

Parmi les places de marché en ligne au sens de l’article L. 111-7, I, 2° du code de la consommation, celles permettant à des professionnels de conclure des contrats avec d’autres professionnels par leur intermédiation doivent être exclues du champ de la recommandation.

Qu’il s’agisse du contrat conclu entre les professionnels par l’entremise de la plateforme, ou du contrat conclu par les professionnels utilisateurs de la plateforme avec celle-ci pour utiliser son service d’intermédiation, aucun ne relève du droit de la consommation.

 

 

 

Deux types de places de marché en ligne sont par conséquent susceptibles de donner lieu à la conclusion de contrats relevant du champ de compétence de la Commission des clauses abusives :

 

Les places de marché en ligne permettant la conclusion d’un contrat

entre un professionnel et un consommateur

 

Les places de marché en ligne permettant la conclusion d’un contrat

entre deux consommateurs

(places de marché dites de « consommation collaborative »)

 

 

Le champ de la recommandation est déterminé de la sorte.

 

Est exclu :

 

1°- lorsque la plateforme met en relation un professionnel avec un consommateur en vue de la conclusion d’un contrat, le contrat d’utilisation de la plateforme conclu entre le professionnel et la plateforme est un contrat conclu entre professionnels. Il ne relève donc pas du champ de compétence de la Commission des clauses abusives.

 

 

Sont inclus :

 

1°- le contrat d’utilisation de la place de marché en ligne conclu entre la place de marché et ses utilisateurs chaque fois que l’utilisateur a la qualité de consommateur (contrat B2C) ;

 

2°- le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise lorsque la place de marché met en relation un professionnel et un consommateur (contrat B2C) ;

 

3°- le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise lorsque la place de marché met en relation deux consommateurs (contrat C2C).

 

L’inclusion des 2° et 3° se justifie par le constat que de nombreuses conditions générales de places de marché en ligne encadrent la formation et l’exécution du contrat conclu entre ses utilisateurs par son entremise, qui plus est sans distinguer ou en distinguant mal les règles applicables à raison de la qualité des parties.

Dans la mesure où la place de marché s’immisce dans le rapport contractuel auquel elle se prétend pourtant tiers et qu’elle impose des conditions contractuelles à ses utilisateurs, ces conditions doivent entrer dans le champ de la recommandation chaque fois qu’elles produisent des effets à l’égard de l’une des parties, lorsqu’elle a la qualité de consommateur.

 

 

C- Limitation du périmètre de la recommandation aux places de marché en ligne de vente de biens

 

Les places de marché en ligne permettent aux consommateurs d’accéder à une grande variété de biens et de services fournis par des tiers professionnels ou consommateurs : vente de biens, livraison de repas, locations touristiques, prise de rendez-vous médicaux, locations de biens, etc. La variété de ces prestations amène a autant de qualifications distinctes des relations contractuelles ainsi établies et à une adaptation casuistique des conditions générales établies par les professionnels.

Afin de conserver la cohérence d’ensemble de la recommandation, la Commission des clauses abusives a fait le choix de limiter son périmètre aux seules places de marché en ligne de vente de biens.

 

 

=> Le périmètre de la recommandation de la Commission des clauses abusives porte sur les trois relations contractuelles citées ci-dessous et établies à la suite de l’utilisation d’une place de marché en ligne de vente de biens :

1°- le contrat d’utilisation de la place de marché en ligne conclu entre la place de marché et ses utilisateurs chaque fois que l’utilisateur a la qualité de consommateur (contrat B2C) ;

2°- le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise lorsque la place de marché met en relation un professionnel et un consommateur (contrat B2C) ;

3°- le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise lorsque la place de marché met en relation deux consommateurs (contrat C2C).

 

 

I- Présentation des contrats

 

L’article L. 211-1, alinéa 1er du code de la consommation dispose que :

« Les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible ».

 

Plusieurs places de marché en ligne contreviennent à cette disposition en ce que leurs modèles de convention ne sont pas présentés de façon claire et compréhensible soit dans leur ensemble, soit en certaines de leurs clauses.

 

A- Absence de conditions générales de contracter

 

  • En vertu de l’article 1127-1 du code civil, « Quiconque propose à titre professionnel, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de services, met à disposition les stipulations contractuelles applicables d’une manière qui permette leur conservation et leur reproduction ».

 

En outre, tout consommateur doit être en mesure de connaître les droits et obligations qui découlent du contrat dont la conclusion lui est proposée. La lisibilité et la compréhensibilité des clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs (C. consom., article L. 211-1) supposent ainsi, au préalable, que ces clauses soient facilement accessibles.

 

Or la Commission a constaté que les conditions générales d’utilisation des places de marché en ligne, destinées à favoriser la conclusion de vente à distance, étaient parfois :

 

– introuvables ;

 

– difficilement accessibles, obligeant le consommateur à effectuer une recherche fastidieuse.

 

En définitive, l’absence de mise à disposition des conditions générales viole l’article 1127-1 du code civil, tandis que la mise à disposition des conditions générales, dans des conditions telles qu’elle oblige le consommateur à faire une recherche fastidieuse, contrevient à l’obligation faite au professionnel de rendre les conditions générales de son service accessibles. Cette absence ou ce manque d’accessibilité, duquel découle un défaut de clarté des clauses, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties, au détriment du consommateur, le professionnel connaissant parfaitement, pour sa part, les conditions générales d’utilisation.

 

 

B- Impression impossible ou parcellaire

 

  • Les conditions générales d’utilisation de certaines places de marché destinées à favoriser la vente de biens sont difficilement lisibles à l’écran comme sur papier après impression. Ce faisant, elles contreviennent aux exigences de l’article L. 211-1, alinéa 1er du code de la consommation, la clarté et le caractère compréhensible des clauses visant aussi bien le fond que la forme des clauses.

 

Ce défaut de lisibilité, qui ne permet pas un accès effectif au contenu du contrat, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ou du non-professionnel (v. déjà Recommandation N° 14-02 Contrats de fourniture de services de réseaux sociaux, spéc. n° 1).

 

 

C- Langue des contrats

 

À deux égards, la Commission a relevé des difficultés relatives à la langue des contrats et, plus précisément, relatives à la traduction en français de conditions générales rédigées initialement dans une autre langue. D’une part, la traduction en français est parfois de piètre qualité (3). D’autre part, cette traduction est, dans certains contrats, privée de sa portée normative (4).

 

  • Certains contrats présentent des conditions générales traduites automatiquement en langue française. Lesdites traductions sont alors de faible qualité et contreviennent, en conséquence, à l’obligation de présenter, au consommateur, des clauses claires et compréhensibles.

 

Parce qu’elles empêchent un accès effectif au contenu du contrat, les clauses mal traduites créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur.

 

  • Parfois, les contrats de place de marché contiennent des clauses qui précisent que les conditions générales d’utilisation ont fait l’objet d’une traduction en français depuis une autre langue. Ils ajoutent alors que la version élaborée dans une autre langue prime sur la version française, qui n’est donnée qu’à titre informatif.

 

C’est dire que la version française est privée de sa portée normative, les droits et les obligations des parties étant, au fond, déterminés par la version écrite en langue étrangère. Pire, la version française est susceptible d’induire le consommateur en erreur sur l’étendue de ses droits et obligations, en cas de problèmes de traduction.

 

Ainsi, en forçant le consommateur, pour connaître la réalité de ses droits et de ses obligations, à consulter les conditions générales d’utilisation écrites dans une langue étrangère, la clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties, au détriment du consommateur.

 

En outre, ce type de clauses contourne l’obligation d’utiliser la langue française dans la présentation d’un service (article 2, Loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française).

 

En définitive, la clause, qui a pour effet ou pour objet de faire primer la version des conditions générales d’utilisation écrites en langue étrangère sur la version française est illicite et, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin), abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui ont pour effet ou pour objet de faire primer la version des conditions générales d’utilisation, écrite en langue étrangère, sur la traduction française de celle-ci.

 

 

 

 

D- Clarté des clauses du contrat

 

1- Détermination du champ d’application des clauses du contrat

 

  • Plusieurs places de marché en ligne prévoient des conditions générales d’utilisation ou de contracter dans lesquelles sont mentionnées des clauses applicables aux relations contractuelles liant la place de marché à un utilisateur professionnel et d’autres clauses applicables aux relations contractuelles liant la place de marché à un utilisateur consommateur ou non-professionnel, sans indiquer clairement dans chacune de ces clauses ou ensemble de clauses quelle est la qualité de l’utilisateur de la place de marché en ligne.

D’autres places de marché en ligne prévoient des conditions générales d’utilisation ou de contracter dans lesquelles sont mentionnées des clauses applicables au contrat de vente conclu directement entre la place de marché en ligne et le consommateur ou le non-professionnel, et d’autres clauses applicables au contrat de vente conclu par le consommateur ou le non-professionnel par l’entremise de la place de marché en ligne, sans distinguer clairement ni le champ d’application de chacune de ces clauses, ni la qualité de la place de marché en ligne (vendeur direct ou prestataire d’un service d’intermédiation en vue de la conclusion d’un contrat de vente) dans le contrat ainsi conclu.

 

Conformément à la jurisprudence, le manque de transparence de ces clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, aff. C-96/14, Van Hove, points 40-41 ; 28 juillet 2016, aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

L’accumulation désordonnée des stipulations et l’absence de distinction à raison de leur champ d’application contrevient aux exigences de l’article L. 211-1, al. 1er du code de la consommation, qui dispose que « les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible ». Ce défaut de lisibilité, qui ne permet pas un accès effectif au contenu du contrat, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ou du non-professionnel.

 

 

2- Clauses déterminant la portée de l’intitulé des autres clauses du contrat

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne contiennent une clause selon laquelle les intitulés des articles composant leurs conditions générales d’utilisation peuvent ne pas correspondre à leur contenu.

 

Ces clauses sont susceptibles de créer une ambiguïté dans l’esprit du consommateur ou du non-professionnel en ce que l’intitulé d’un article peut ne pas refléter la réelle portée de son engagement.

Conformément à la jurisprudence, le manque de transparence de ces clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, Aff. C-96/14, Van Hove, points 40-41 ; 28 juillet 2016, Aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, Aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, Aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, Aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

En raison de cette ambiguïté, ces clauses ne sont pas conformes à l’article L. 211-1, alinéa 1er du code de la consommation, qui dispose que « les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible ». Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ou du non-professionnel en ce qu’elle le prive d’une information claire et compréhensible quant à l’existence ou la portée de ses engagements. Elle est donc abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que leur intitulé est susceptible de ne pas correspondre à leur contenu.

 

 

E- Clauses de renvoi

 

1- Clauses renvoyant à d’autres contrats non identifiés

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne contiennent une clause indiquant que le contrat auquel le consommateur ou le non-professionnel a accès peut être complété par des stipulations présentes dans un autre contrat. Par ailleurs, la place de marché en ligne ne fournit aucune indication quant au contrat susceptible de s’appliquer en plus de celui auquel le consommateur ou le non-professionnel a accès.

Ces clauses ont pour effet de permettre l’application au consommateur ou au non-professionnel de clauses auxquelles il n’a pas accès, et dont il ne peut pas prendre connaissance, lors de la conclusion du contrat. Par application de l’article R. 212-1, 1° du code de la consommation, qui vise les clauses qui ont pour objet ou pour effet de « constater l’adhésion du consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il accepte ou qui sont reprises dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n’a pas eu connaissance avant sa conclusion », ces clauses sont présumées irréfragablement abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses indiquant que le contrat auquel le consommateur ou le non-professionnel a accès pourra être complété par des stipulations présentes dans un autre contrat, sans indication supplémentaire.

 

 

2- Contrats renvoyant à d’autres documents par l’utilisation de liens hypertextes

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne se présentent soit sous la forme de documents gigognes accessibles par différents liens hypertextes, soit sous la forme de clauses qui renvoient les unes aux autres.

Ces renvois successifs peuvent nuire à l’accès effectif de l’utilisateur à ces documents contractuels lorsqu’ils ne permettent pas un accès global au contrat ou rendent difficiles la distinction entre les stipulations relevant du domaine contractuel et celles relevant du domaine informatif, préjudiciant ainsi à l’appréciation de sa cohérence d’ensemble (dans ce sens, TGI Paris, 9 avril 2019, UFC – Que Choisir c/ Société Facebook Ireland Limited, n° RG 14/07298).

 

Ces renvois successifs à d’autres documents ou d’autres clauses contreviennent aux exigences de l’article L. 211-1, alinéa 1er du code de la consommation en ce qu’ils portent atteinte à la compréhensibilité du contrat et à l’étendue des droits et obligations du consommateur ou du non-professionnel. Ce défaut de lisibilité, qui ne permet pas un accès effectif au contenu du contrat, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ou du non-professionnel.

 

F- Clauses contenant des références textuelles erronées

 

  • Plusieurs clauses de places de marché en ligne mentionnent ou renvoient à des dispositions légales ou réglementaires dont le contenu, ou les références et le contenu, est erroné ou n’a pas été mis à jour.

En indiquant des dispositions dont le contenu, ou la numérotation et le contenu, ne correspond pas au droit en vigueur, ces clauses sont de nature à induire en erreur le consommateur ou le non-professionnel sur l’étendue de ses droits. En cela, elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ou du non-professionnel. Elles sont donc abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui mentionnent ou renvoient à des dispositions légales ou réglementaires dont le contenu, ou les références et le contenu, est erroné ou n’a pas été mis à jour.

II- Clauses applicables à l’ensemble du contrat conclu avec la place de marché en ligne

 

A- Clauses relatives aux données à caractère personnel

 

  • La Commission des clauses abusives rappelle qu’elle n’a pas, en principe, pour mission de veiller au respect, par les professionnels, des obligations qui s’imposent à eux en vertu de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ou au règlement 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD), une telle mission relevant des attributions de la CNIL. Toutefois, il revient à la Commission des clauses abusives de recommander la suppression des clauses qui, ayant pour effet de dispenser le professionnel de ses obligations de recueil du consentement du consommateur ou d’information de celui-ci sur le traitement de ses données à caractère personnel prévues aux articles 5, 6, 7, 13, 14 et 15 du RGPD, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment de ce dernier.

De même, la Commission constate que de nombreuses clauses relatives à l’utilisation des données à caractère personnel ne sont pas conformes aux exigences résultant des articles 13 et 14 du RGPD en ce que le consommateur ne reçoit pas l’exhaustivité des informations prévues par ces textes. Or, l’application de ces dispositions revêt un caractère obligatoire.

 

 

B- Clause relative à la force majeure

 

  • Certains contrats d’utilisation de place de marché contiennent des clauses relatives à la force majeure.

 

Or, certaines de ces clauses ont pour objet d’ajouter au rang des évènements de force majeure, par dérogation à l’article 1218 du code civil, la survenance d’évolutions technologiques imprévisibles pour le professionnel, sans exiger que cette évolution ait, en outre, un caractère insurmontable.

 

L’évolution technologique imprévisible « remettant en cause les normes et standards » de la profession n’a pas nécessairement des effets inévitables sur l’exécution du contrat, au sens de l’article 1218 du code civil.

 

C’est dire que le périmètre de la force majeure est étendu à des évènements qui, n’étant pas nécessairement irrésistibles, ne sont pas, en principe, exonératoires de responsabilité.

 

Or, dans plusieurs décisions, la CJUE a décidé que le déséquilibre significatif devait s’apprécier par comparaison avec les « règles nationales applicables en l’absence d’accord entre les parties », c’est-à-dire par comparaison avec les règles supplétives (CJUE 26 janvier 2017, Aff. C-421/14, Banco Primus ; CJUE 16 janvier 2014, Aff. C-226/12, Constructora Principado. ; V. rapport annuel de la Commission des clauses abusives 2018).

 

En l’espèce, la clause de force majeure visant une évolution technologique imprévisible « remettant en cause les normes et standards » de la profession place le consommateur dans une situation moins favorable que celle prévue par la règle supplétive de l’article 1218 du code civil ; elle est donc déjà abusive.

 

En outre, cet événement de force majeure ne peut être invoqué que par le professionnel, l’imprévisibilité s’appréciant uniquement à son égard. Ainsi, il ne peut profiter qu’au professionnel, sans que ne soit prévu, en faveur du consommateur, un pouvoir équivalent ou une contrepartie.

 

Dès lors, la clause qui élève au rang d’événement de force majeure une évolution technologique imprévisible du point de vue du professionnel, est encore abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui élèvent au rang d’événement de force majeure une évolution technologique imprévisible du point de vue du professionnel, sans que ne soit mentionné son caractère irrésistible.

 

 

 

C- Clause de survie des effets du contrat

 

  • Une clause, dite de survie, a pour effet de maintenir le contrat en dépit de sa résiliation par le consommateur.

 

Or la clause qui, en dépit de la résiliation du consommateur ou de sa désinscription du service proposé par le professionnel, organise la survie du contrat pour l’avenir prive cette résiliation ou cette désinscription de tout effet.

 

Elle laisse ainsi entendre au consommateur qu’il ne peut pas échapper à l’application du contrat, et ce alors que l’article 1210 du code civil prohibe les engagements perpétuels et autorise, en tout état de cause, chaque contractant à mettre fin à ce type de contrat dans les mêmes conditions que dans les contrats à durée indéterminée.

 

En outre, en vertu de l’article 1230 du code civil, seules certaines clauses, celles qui sont précisément destinées à produire effet en cas de résolution, peuvent survivre à cette dernière.

 

La clause de survie, illicite en ce qu’elle est stipulée en contravention des dispositions impératives de l’article 1210 du code civil et en contrariété avec l’article 1230 du même code, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties en défaveur du consommateur, dès lors qu’elle a pour objet ou pour effet de placer celui-ci dans une situation juridique moins favorable que celle prévue par le droit national.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui organisent la survie du contrat, pour le tout, en dépit de la résiliation ou de la désinscription du consommateur.

 

D- Clauses de loi applicable

 

  • Certaines clauses désignent une loi étrangère au titre de la loi applicable au contrat d’utilisation de la plateforme de marché.

 

L’article 6§1 du règlement du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Rome I, énonce que :

 

« Sans préjudice des articles 5 et 7, un contrat conclu par une personne physique (ci-après « le consommateur »), pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, avec une autre personne (ci-après «le professionnel»), agissant dans l’exercice de son activité professionnelle, est régi par la loi du pays où le consommateur a sa résidence habituelle, à condition que le professionnel :

  1. a) exerce son activité professionnelle dans le pays dans lequel le consommateur a sa résidence habituelle, ou
  2. b) par tout moyen, dirige cette activité vers ce pays ou vers plusieurs pays, dont celui-ci,

et que le contrat rentre dans le cadre de cette activité ».

 

Certes, en vertu de l’article 6§2, « nonobstant les dispositions du paragraphe 1, les parties peuvent choisir la loi applicable à un contrat satisfaisant aux conditions du paragraphe 1, conformément à l’article 3 ».

 

Toutefois, aux termes de la même disposition, « ce choix ne peut (…) avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui aurait été applicable, en l’absence de choix, sur la base du paragraphe 1 ».

 

La CJUE a ainsi décidé qu’est abusive la clause en vertu de laquelle le droit applicable est celui de l’État membre du professionnel « lorsqu’elle induit ce consommateur en erreur en lui donnant l’impression que seule la loi de cet État membre s’applique au contrat, sans l’informer du fait qu’il bénéficie également (…) de l’article 6, paragraphe 2, du règlement [Rome I], de la protection que lui assurent les dispositions impératives du droit national qui serait applicable en l’absence de cette clause » (CJUE 3 octobre 2019, Aff. C-272/18, Verein für Konsumenteninformation c/ TVP Treuhand- und Verwaltungsgesellschaft für Publikumsfonds mbH & Co KG).

 

Par ailleurs, la CJUE a donné, dans une décision du 7 décembre 2010 (Aff. C-585/08, Peter Pammer et Aff. C-144/09, Hotel Alpenhof GesmbH), un certain nombre d’indices qui permettent de savoir si un site internet « dirige » l’activité d’un professionnel vers les pays tiers :

 

« Les éléments suivants, dont la liste n’est pas exhaustive, sont susceptibles de constituer des indices permettant de considérer que l’activité du commerçant est dirigée vers l’État membre du domicile du consommateur, à savoir la nature internationale de l’activité, la mention d’itinéraires à partir d’autres États membres pour se rendre au lieu où le commerçant est établi, l’utilisation d’une langue ou d’une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel est établi le commerçant avec la possibilité de réserver et de confirmer la réservation dans cette autre langue, la mention de coordonnées téléphoniques avec l’indication d’un préfixe international, l’engagement de dépenses dans un service de référencement sur Internet afin de faciliter aux consommateurs domiciliés dans d’autres États membres l’accès au site du commerçant ou à celui de son intermédiaire, l’utilisation d’un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l’État membre où le commerçant est établi et la mention d’une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents États membres. »

 

En l’espèce, il ne fait aucun doute que les plateformes de vente de biens dirigent, au sens de la jurisprudence précitée, leurs activités vers la France. Ainsi, les clauses litigieuses, qui désignent la loi étrangère sans réserver l’application des règles impératives de la loi de la résidence du consommateur, en contradiction avec l’article 6§2 du règlement Rome I, induisent le consommateur en erreur en lui laissant croire qu’il ne dispose pas de la protection des règles impératives que lui assure la loi française.

 

Ces clauses créent, en conséquence, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur (v. déjà Recommandation N° 14-02 Contrats de fourniture de services de réseaux sociaux, spéc. n° 47).

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui désignent un droit étranger en tant que loi applicable, sans réserver l’application des dispositions impératives de la loi française qui assurent une protection supplémentaire au consommateur.

 

 

E- Clauses attributives de juridiction

 

La Commission a constaté que certaines clauses attribuaient la compétence exclusive, en cas de litige, à une juridiction étrangère (1°), tandis que d’autres dérogeaient aux règles d’attribution de compétence interne (2°).

 

 

1- Clauses attribuant la compétence à une juridiction étrangère

 

  • Certaines clauses obligent le consommateur à agir en justice devant les juridictions d’un État étranger.

 

En vertu de l’article 17 du règlement du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale dit Bruxelles I bis, l’action intentée par le consommateur contre le professionnel peut être portée, soit devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domicilié le professionnel, soit, quel que soit le domicile du professionnel, devant la juridiction du lieu où le consommateur est domicilié, au moins lorsque « le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités ».

 

Les clauses attributives de compétences ne peuvent pas restreindre ce choix.

 

L’article 19 du règlement Bruxelles I bis précise en effet qu’« il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions :

  • postérieures à la naissance du différend ;

2)  qui permettent au consommateur de saisir d’autres juridic­tions que celles indiquées à la présente section ; ou

3)  qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur résidence habituelle dans un même État membre, attribuent compétence aux juridictions de cet État membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions. »

Même lorsque les articles 17 à 19 du règlement Bruxelles I bis ne sont pas applicables, comme en matière de contrat de transport (article 17§3), la CJUE a décidé (CJUE, 18 novembre 2020, Aff. C519/19, Ryanair DAC), qu’est abusive une clause, non négociée, « qui confère une compétence exclusive à la juridiction dans le ressort de laquelle le siège » du professionnel « est situé » (v. déjà, en ce sens, CJUE 27 juin 2000, Aff. C-240/98 à C-244/98, Océano Grupo Editorial et Salvat Editores, point 24 ; CJUE 4 juin 2009, Aff. C-243/08, Pannon GSM, point 40 ; CJUE 9 novembre 2010, Aff. C-137/08, VB Pénzügyi Lízing, point 53).

 

En effet, « une telle clause entre dans la catégorie de celles ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou d’entraver l’exercice d’actions en justice » (CJUE 18 novembre 2020, préc., point. 59 ; C. consom., article R. 212-2, 10°) puisqu’elle est de nature à engendrer, au détriment du consommateur, des frais sans commune mesure avec l’importance du litige (CJUE 27 juin 2000, préc., point 22).

 

Cette clause, qui contrevient au règlement Bruxelles I bis et/ou qui est de nature à dissuader le consommateur de faire valoir ses droits en justice, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment de consommateur.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et non-professionnels les clauses qui attribuent la compétence exclusive aux juridictions d’un pays autre que celui de la résidence du consommateur.

 

 

2- Clauses dérogeant à la compétence territoriale interne

 

  • Certaines clauses dérogent aux règles de compétences territoriales applicables en France.

 

Une de ces clauses prévoit que le tribunal compétent en cas de litige est, exclusivement, le tribunal de commerce de Paris, dès lors qu’un membre a agi à titre professionnel. Cette clause est donc applicable non seulement au conflit qui opposerait des membres professionnels entre eux, mais également au conflit opposant un membre professionnel à un membre consommateur.

 

Pour l’ensemble des clauses visées, l’article 48 du code de procédure civile prohibe la clause attributive de compétence entre professionnels et consommateurs.

 

En outre, l’article R. 631-3 du code de la consommation, qui est d’ordre public, énonce que « le consommateur peut saisir, soit l’une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, soit la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable ».

 

Est donc prohibée la clause qui oblige le consommateur à agir exclusivement devant un tribunal prédéterminé, quel que soit son lieu.

 

Ces clauses, illicites parce qu’elles dérogent aux règles impératives de compétence territoriale, créent nécessairement, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin), un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties en défaveur du consommateur.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui dérogent aux règles impératives de compétence territoriale interne.

 

 

F- Clauses relatives aux modes amiables de règlement des différends (MARD)

 

1- Clause imposant de passer exclusivement par un MARD

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne oblige le consommateur ou le non-professionnel à régler leur différend avec la place de marché en ligne en recourant à un arbitrage ou à un mode amiable de règlement des différends (MARD).

Selon cette clause, les acheteurs consommateurs acceptent que leurs litiges avec la place de marché en ligne soient résolus par arbitrage, qui plus est en langue anglaise. Les vendeurs, qui peuvent être des consommateurs, sont également obligés de soumettre leur litige à une médiation et renoncent à plusieurs types de voies de recours. Or, outre cette renonciation, le lien hypertexte présent dans la clause pointe vers un contenu qui ne concerne que les cas dans lesquels le vendeur est un professionnel.

 

L’article R. 212-2, 10° du code de la consommation dispose que « dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives […] les clauses ayant pour objet ou pour effet de […] supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d’arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges ».

Cette règle a été rappelée par la Cour de cassation, dans un arrêt de la troisième chambre civile du 19 janvier 2022, selon lequel, en application des articles L. 132-1, devenu L. 212-1, et R. 132-2, 10°, devenu R. 212-2, 10° du code de la consommation, la clause qui contraint le consommateur, en cas de litige avec un professionnel, à recourir obligatoirement à un mode amiable de règlement des différends avant la saisine du juge, est présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire (Cass. civ. 3e, 19 janvier 2022, n° 21-11.095).

En matière d’arbitrage, la Cour de cassation, dans un arrêt de la première chambre civile du 30 septembre 2020, a également retenu que, s’il résulte de l’article 1448 du code de procédure civile, applicable à l’ arbitrage international en vertu de l’article 1506 du même code, sauf si les parties n’en sont autrement convenues, lorsqu’un litige relevant d’une convention d’ arbitrage est porté devant une juridiction de l’État, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et si la convention d’arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable. Cependant, la règle procédurale de priorité édictée par ce texte ne peut avoir pour effet de rendre impossible, ou excessivement difficile, l’exercice des droits conférés au consommateur par le droit communautaire que les juridictions nationales ont l’obligation de sauvegarder. Dès lors, au nombre des moyens adéquats et efficaces devant garantir aux consommateurs un droit à un recours effectif doit figurer la possibilité d’introduire un recours ou de former opposition dans des conditions procédurales raisonnables, de sorte que l’exercice de leurs droits ne soit pas soumis à des conditions, notamment de délais ou de frais, qui amenuisent l’exercice des droits garantis par la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (CJUE, 21 avril 2016, Aff. C-377/14, Ernst Georg Radlinger, Helena Radlingerov, point 46). La Cour de cassation en a déduit que la cour d’appel, qui écarte en raison de son caractère abusif la clause compromissoire figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel, après en avoir examiné l’applicabilité, en tenant compte de tous les éléments de droit et de fait nécessaires dont elle disposait, a, sans méconnaître les dispositions de l’article 1448 du code de procédure civile, accompli son office de juge étatique auquel il incombe d’assurer la pleine efficacité du droit communautaire de protection du consommateur (Cass. civ. 1re, 30 septembre 2020, n° 18-19241).

Par ailleurs, l’article L. 612-4 du code de la consommation dispose qu’ « est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge ».

 

Enfin, la Commission des clauses abusives, dans sa Recommandation N° 20/01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, en son n° 113, a également considéré comme abusive, par l’application combinée des articles 1448 du code de procédure civile, 2061 alinéa 2 du code civil et R. 212-2, 10° du code de la consommation, la clause qui permet au professionnel d’initier une procédure d’arbitrage sans obtenir préalablement l’accord du consommateur ou d’obliger le consommateur ou le non-professionnel à recourir exclusivement à une procédure arbitrale pour trancher toute contestation relative à l’utilisation du service proposé par le professionnel.

 

Puisque cette clause impose de recourir à un arbitrage ou à une médiation à l’exclusion d’autres voies de recours dont un consommateur ou un non-professionnel pourrait se prévaloir, parfois dans une langue autre que la langue française, et en renvoyant en outre à des stipulations qui ne sont applicables qu’à des professionnels, cette clause contrevient à l’article R. 212-2, 10° du code de la consommation. Elle est donc présumée abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui imposent au consommateur ou au non-professionnel de recourir à un arbitrage ou à une médiation, à l’exclusion d’autres voies de recours dont un consommateur ou un non-professionnel pourrait se prévaloir.

 

 

2- Clause prévoyant un délai de résolution du litige par le MARD choisi

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne stipule que, si les parties décident de recourir à un mode amiable de règlement des différends (MARD), celui-ci devra être tranché dans un délai de trente jours, à défaut de quoi seuls les tribunaux français seront compétents.

Cette clause impose un délai impératif de résolution du litige de trente jours si les parties décident de recourir à un MARD. Si les parties décident d’entrer en médiation en suivant la procédure de médiation de la consommation, cette clause n’est pas conforme à l’article R. 612-5 du code de la consommation, qui dispose que « l’issue de la médiation intervient, au plus tard, dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de [la notification de sa saisine par le médiateur aux parties]. Le médiateur peut prolonger ce délai, à tout moment, en cas de litige complexe. Il en avise immédiatement les parties ».

Cette clause laisse croire que la résolution du litige par un MARD doit survenir dans un délai inférieur à celui prévu par des dispositions réglementaires impératives, en méconnaissance des dispositions de l’article R. 612-5 précité. Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Elle doit être déclarée abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses prévoyant que, si les parties décident de recourir à un MARD, celui-ci devra être tranché dans un délai de trente jours, à défaut de quoi seuls les tribunaux français seront compétents.

 

 

3- Clause relative au champ d’application de la médiation de la consommation

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne prévoit que le professionnel n’est pas obligé d’utiliser des MARD comme la médiation de la consommation.

L’article L. 612-1 du code de la consommation dispose que « tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l’oppose à un professionnel. A cet effet, le professionnel garantit au consommateur le recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation ».

En prévoyant que le professionnel n’est pas obligé et ne s’engage pas à recourir à la médiation de la consommation, il prive ses utilisateurs consommateurs d’un recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation. Cette clause est illicite et, maintenue dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, abusive, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin).

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas obligé d’utiliser des MARD comme la médiation de la consommation.

 

En outre, cette même clause exclut la médiation de la consommation pour les contrats conclus entre vendeurs et acheteurs, sans distinction de la qualité de professionnel ou de consommateur des parties au contrat de vente formé par l’entremise de la place de marché en ligne.

Cette place de marché en ligne permet la conclusion de contrats de vente entre particuliers, mais aussi entre professionnels et consommateurs. En ce que cette clause ne réserve pas l’exclusion de la médiation de la consommation aux seules hypothèses dans lesquelles le contrat de vente n’est pas conclu entre un professionnel et un consommateur, elle n’est pas conforme à l’article L. 611-2 du code de la consommation qui dispose que « la médiation de la consommation s’applique à un litige national ou transfrontalier entre un consommateur et un professionnel ». Cette clause laisse donc croire au consommateur, en violation de dispositions impératives, qu’il ne peut pas bénéficier de la médiation de la consommation alors qu’il a contracté avec un professionnel. Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ou non-professionnel, et doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui excluent la possibilité de recourir à la médiation de la consommation, même lorsque le contrat est conclu entre un professionnel et un consommateur.

III- Clauses portant sur l’utilisation de la place de marché en ligne

 

A- Clauses de gratuité

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne affirment que l’accès au service de mise en relation est gratuit alors que la conclusion de contrats par l’entremise de la place de marché en ligne est subordonnée à la création d’un compte personnel.

 

Les places de marché en ligne se définissent, selon l’article liminaire, 14° du code de la consommation, comme « un service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d’autres professionnels ou consommateurs ». Il s’agit plus précisément d’un service numérique. En effet, selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs.

Ces services numériques font l’objet d’un contrat conclu à distance entre un professionnel (la place de marché en ligne) et un consommateur. L’article L. 221-1, III. du code de la consommation relatif au champ d’application de la réglementation des contrats conclus à distance entre professionnels et consommateurs dispose que « les dispositions du présent titre s’appliquent également aux contrats par lesquels le professionnel fournit ou s’engage à fournir au consommateur un contenu numérique sans support matériel ou un service numérique et pour lesquels le consommateur lui fournit ou s’engage à lui fournir des données à caractère personnel, sauf lorsque ces données sont exclusivement traitées par lui pour fournir le contenu numérique sans support matériel ou le service numérique, ou lui permettre de remplir les obligations légales qui lui incombent ». Il s’ensuit que, chaque fois que le traitement de données à caractère personnel des consommateurs ne se justifie pas par une obligation légale incombant au professionnel ou par la nécessité de leur fourniture pour l’exécution du contrat, cette fourniture s’analyse comme une contrepartie non pécuniaire à la prestation fournie. Le contrat ainsi conclu entre un professionnel et un consommateur relève donc du champ d’application du droit de la consommation.

Cette analyse, conforme à l’article 1107 du code civil qui définit le contrat à titre onéreux comme celui dans lequel « chacune des parties reçoit de l’autre un avantage en contrepartie de celui qu’elle procure », a déjà été adoptée dans une précédente Recommandation de la Commission des clauses abusives N° 14-02 relative aux contrats de fourniture de services de réseaux sociaux. Cette position est également celle des tribunaux chaque fois que les données traitées font l’objet d’une exploitation puis d’une valorisation au profit du professionnel responsable du traitement (TGI Paris, 7 août 2018, UFC–Que Choisir c/ Société Twitter Inc., n° RG 14/07300 ; TGI Paris, 9 avril 2019, UFC–Que Choisir c/ Société Facebook Ireland Limited, n° RG 14/07298).

 

Plusieurs clauses indiquent au consommateur que l’accès à la place de marché en ligne et la prestation de mise en relation avec des vendeurs sont gratuits alors que la conclusion de contrats de vente avec ces derniers est subordonnée à la création d’un compte, consistant à fournir a minima un identifiant et un mot de passe qualifiables de données à caractère personnel au sens de l’article 4, 1° du règlement 2016/679 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD). Le traitement de ces données à caractère personnel n’est pas justifié par une obligation légale incombant au professionnel ou par la nécessité de leur fourniture pour l’exécution du contrat, de sorte que ces données constituent une contrepartie non pécuniaire, potentiellement valorisable par le professionnel, à la prestation de mise en relation fournie par la place de marché en ligne. Ces clauses laissent alors croire au consommateur ou au non-professionnel que le service de mise en relation est dépourvu de toute contrepartie de sa part alors que ces données à caractère personnel constituent une telle rémunération.

 

L’ambiguïté de ces clauses autorise leur examen par une interprétation a contrario de l’article L. 212-1, alinéa 3 du code de la consommation, qui dispose que « l’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ».

De plus, conformément à la jurisprudence, le manque de transparence de ces clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, Aff. C-96/14, Van Hove, points 40 et 41 ; 28 juillet 2016, Aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, Aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, Aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, Aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

Ces clauses laissent croire au consommateur que le service est fourni à titre gratuit alors que son prix consiste en la fourniture de données à caractère personnel non imposée par une obligation légale pesant sur le responsable du traitement ou nécessaire à la bonne exécution du contrat conclu. De par leur ambiguïté et leur manque de transparence, elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Elles sont donc abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui affirment que l’accès au service de mise en relation est gratuit alors que la conclusion de contrats par l’entremise de la place de marché en ligne est subordonnée à un traitement de données à caractère personnel qui n’est pas justifié par une obligation légale ou nécessaire à la bonne exécution du contrat.

 

 

B- Clauses relatives à l’accès au service

 

  • Certains contrats de place de marché réservent au professionnel le droit de refuser, sans avoir à donner aucun motif, l’inscription d’un consommateur, alors que cette inscription est un préalable indispensable à l’accès au service.

 

De même, certains contrats offrent au professionnel le droit d’agir sur le compte du consommateur afin de le suspendre, de le modifier, de le remplacer ou de le supprimer, là encore sans que le professionnel n’ait à fournir d’explication.

 

Ce faisant, ces clauses confèrent au professionnel un droit discrétionnaire de refuser au consommateur l’accès au service ou de modifier cet accès. Elles créent donc nécessairement un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur au sens de l’article L. 212-1 du code de la consommation. Elles sont donc abusives (v. déjà Recommandation N° 20-01, n° 10 et 15).

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui permettent au professionnel de suspendre, modifier, remplacer ou refuser discrétionnairement l’accès du consommateur au service.

 

 

C- Clauses relatives aux identifiants de compte en ligne

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que l’utilisateur est le seul responsable de la confidentialité des identifiant et mot de passe de son compte en ligne créé pour l’utilisation du service d’intermédiation fourni par le professionnel. Certaines de ces clauses indiquent en outre que toutes les actions effectuées depuis le compte en ligne de l’utilisateur sont réputées être effectuées par lui et qu’il en est donc responsable.

 

Le règlement 2016/679 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) affirme, en son article 4, 1°, que les identifiants en ligne sont des données à caractère personnel. A ce titre, le responsable du traitement est tenu, par application de l’article 32, 1° de garantir un niveau de sécurité adapté aux risques encourus par le traitement.

La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dispose en son article 4, 6°, que « les données à caractère personnel doivent être traitées de façon à garantir une sécurité appropriée des données à caractère personnel, y compris la protection contre le traitement non autorisé ou illicite et contre la perte, la destruction ou les dégâts d’origine accidentelle, ou l’accès par des personnes non autorisées, à l’aide de mesures techniques ou organisationnelles appropriées ». Cette même loi indique ensuite, en son article 121, que « le responsable du traitement est tenu de prendre toutes précautions utiles, au regard de la nature des données et des risques présentés par le traitement, pour préserver la sécurité des données et, notamment, empêcher qu’elles soient déformées, endommagées, ou que des tiers non autorisés y aient accès ».

 

En faisant peser sur le seul utilisateur la responsabilité de la sécurité des identifiant et mot de passe du compte en ligne et des conséquences en résultant, sans réserver les cas dans lesquels le professionnel a manqué à son obligation de sécurité des données à caractère personnel traitées, ces clauses ont pour effet d’exonérer le professionnel de sa responsabilité éventuelle.

Par conséquent, par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, en ce qu’elles ont pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations », ces clauses sont présumées irréfragablement abusives (déjà dans ce sens, Recommandation N° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, n° 99).

 

Par ailleurs, en ce que ces clauses font peser sur le seul utilisateur la sécurité des identifiant et mot de passe de son compte en ligne et des conséquences en résultant, elles excluent la possibilité pour le consommateur ou le non-professionnel de rapporter la preuve qu’il a été victime d’une fraude commise par un tiers.

Par conséquent, par application de l’article R. 212-2, 9° du code de la consommation, en ce que ces clauses ont pour objet ou pour effet de « limiter indûment les moyens de preuve à la disposition du consommateur », ces clauses sont présumées abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que l’utilisateur est le seul responsable de la confidentialité des identifiant et mot de passe de son compte en ligne et/ou qui réputent effectuées par lui toutes les actions effectuées depuis son compte en ligne, sans réserver les cas dans lesquels le professionnel a manqué à son obligation de sécurité des données à caractère personnel traitées et/ou dans lesquels le consommateur ou le non-professionnel a été victime d’une fraude commise par un tiers.

 

 

D- Clauses relatives aux renonciations à recours

 

  • Certaines clauses prévoient que le consommateur renonce à son recours contre le professionnel lorsqu’il a subi un préjudice du fait d’un autre utilisateur ou du fait de la plateforme elle-même.

 

Ces clauses ont pour effet de dispenser la plateforme de réparer le dommage qu’elle aurait causé, par sa faute, au consommateur.

 

Ces renonciations à recours s’apparentent ainsi à des clauses qui suppriment le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, clauses qui sont irréfragablement présumées abusives par l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation et ont pour effet d’interdire au consommateur le droit de demander la résolution ou la résiliation du contrat en cas d’inexécution par le professionnel de ses obligations au sens de l’article R. 212-1, 7° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses par lesquelles le consommateur renonce à son recours contre le professionnel lorsqu’il a subi un préjudice du fait d’un autre utilisateur ou du fait de la plateforme elle-même.

 

 

E- Clauses relatives à l’objet de l’obligation de la place de marché en ligne

 

1- Clauses prévoyant la fourniture des services « tels quels » ou « en l’état »

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne stipulent que le service est fourni par le professionnel « en l’état ».

 

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

 

Ces clauses laissent entendre que le professionnel pourrait fournir une prestation imparfaite sans engager sa responsabilité. Elles tendent donc à l’exonérer de toute responsabilité en cas de dysfonctionnement des prestations fournies au consommateur ou au non-professionnel, contrairement aux dispositions précitées. Par conséquent, par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, en ce qu’elles ont pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations », ces clauses sont présumées irréfragablement abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le service est fourni « en l’état », sans réserver les cas dans lesquels les dysfonctionnements sont dus à un manquement du professionnel à ses obligations.

 

 

2- Clauses prévoyant une obligation de moyens quant à l’accès et au fonctionnement du site internet

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne stipulent que le professionnel est tenu d’une obligation de moyens quant à la continuité, l’accès et le fonctionnement de son site internet permettant la fourniture du service de mise en relation.

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

 

Le choix de cette qualification d’obligation de moyens a pour conséquence de mettre à la charge du consommateur l’obligation de rapporter la preuve de la faute du professionnel pour engager la responsabilité de ce dernier. Or, cette qualification est inadaptée aux caractéristiques de l’obligation concernée portant sur le bon fonctionnement du site internet du professionnel. Le critère principal dégagé par la doctrine pour distinguer les obligations de moyens et les obligations de résultat réside dans l’existence d’un aléa dans la fourniture de la prestation (par ex., Fr. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Fr. Chénédé, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 12e éd., 2018, n° 852). L’obligation est de moyens lorsque sa réalisation est entachée d’une fort part d’aléa, alors qu’elle est de résultat dans le cas contraire.

L’obligation consistant à garantir le bon fonctionnement d’un site internet est une obligation présentant peu d’aléa, de sorte qu’elle devrait être qualifiée d’obligation de résultat. La qualification d’obligation de moyens est donc inadaptée aux caractéristiques de la prestation fournie et a donc pour effet d’imposer au consommateur la charge de la preuve de la faute du professionnel alors qu’en application du droit positif, il devrait incomber au professionnel de rapporter la preuve que le manquement ne lui est pas imputable. Par conséquent, par application de l’article R. 212-1, 12° du code de la consommation, cette clause est présumée irréfragablement abusive [v. déjà dans ce sens, Recommandation N° 17-02 Contrats relatifs aux Services de médias audiovisuels à la demande (SMAD), n° 42].

 

En outre, chaque fois qu’un contrat est conclu à distance entre un professionnel et un consommateur, il est fait application de l’article L. 221-15 du code de la consommation qui dispose que « le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient exécutées par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Toutefois, il peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure ».

La clause prévoyant que la place de marché en ligne est débitrice d’une obligation de moyens entre en contradiction de cette disposition dans la mesure où elle permet au professionnel de s’exonérer par la preuve de son absence de faute, alors que l’article précité ne prévoit pas ce moyen d’exonération.

Cette clause a donc pour effet de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations. Elle est donc irréfragablement abusive au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que l’obligation du professionnel de permettre l’accès et le fonctionnement de son site internet est de moyens en contrariété du droit applicable.

 

 

F- Clause limitative de responsabilité

 

  • Un contrat de place de marché entend, d’une part, plafonner à une certaine somme la réparation à laquelle le professionnel sera tenu en cas de mise en œuvre de sa responsabilité et, d’autre part, limiter sa responsabilité à ses « négligences graves » et, croit-on comprendre, à ses fautes intentionnelles. Autant dire que le professionnel en question n’entend être responsable que pour ses fautes graves et intentionnelles et encore dans la limite d’un plafond de dommages et intérêts.

 

Deux autres contrats entendent limiter la réparation que le professionnel devra « au montant que le Client a effectivement versé au titre de ses commandes au cours du mois précédant le fait dommageable à l’origine du préjudice invoqué » ou « aux plus élevés des deux montants » que la clause vise.

 

Ces clauses qui, pour la première, mêlent exonération et limitation de responsabilité et, pour les autres, plafonnent la réparation à un certain montant, sans exclure le consommateur de leur périmètre, sont des stipulations qui suppriment ou réduisent « le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations » (v. déjà Recommandation N° 20-01, n° 105).

 

Elles sont donc irréfragablement présumées abusives en vertu de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées, dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels, les clauses par lesquelles le professionnel entend, sous une forme quelconque, plafonner le montant de la réparation qu’il doit au consommateur ou limiter sa responsabilité à ses fautes graves.

 

 

G- Clauses exonératoires de responsabilité

 

1- Clause écartant la responsabilité délictuelle du professionnel

 

  • Un contrat de place de marché entend, par une de ses clauses, empêcher que la responsabilité délictuelle du professionnel soit engagée.

 

Pourtant, il est communément admis que « les articles 1382 et 1383, devenus 1240 et 1241 du Code civil, sont d’ordre public et que leur application ne peut être neutralisée contractuellement par anticipation, de sorte que sont nulles les clauses d’exonération ou d’atténuation de la responsabilité en matière délictuelle » (Cass. civ. 1re, 5 juillet 2017, n° 16-13407. V. aussi Cass. civ. 2e, 17 février 1955, n° 55-02.810 ; Bull. civ. II, n° 100 – 1 ; Cass. civ. 2e, 15 juin 1994, n° 92-18.048 ; Bull. civ. II, n° 155).

 

C’est dire que la responsabilité délictuelle du fait personnel est d’ordre public (Cass. civ., 2e, 28 novembre 1962, Bull. civ. n° 755 : « qu’en cette matière sont nulles les clauses d’exonération ou d’atténuation de responsabilité, les articles 1382 et 1383 du code civil étant d’ordre public et leur application ne pouvant être paralysée d’avance par une convention »).

 

Cette clause, illicite, crée nécessairement un déséquilibre entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur ou du non-professionnel, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin). En outre, en ce que cette clause a pour objet ou pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations », elle est irréfragablement abusive par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher que la responsabilité délictuelle du professionnel soit engagée.

 

 

2- Clauses relatives à la fourniture de la prestation du fait de sa transmission par l’internet

 

  • De nombreux contrats de places de marché en ligne prévoient que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas de dysfonctionnements, anomalies ou perturbations du service liées aux caractéristiques du réseau internet.

 

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

De par leur généralité, ces clauses ne permettent pas de déterminer quels sont les dysfonctionnements dont le professionnel dégage sa responsabilité et, par conséquent, si ces clauses ont pour effet d’exonérer le professionnel en cas de manquement à ses obligations résultant de l’article L. 224-25-12 du code de la consommation précité.

 

De plus, l’article L. 221-15 du code de la consommation dispose que, lorsqu’un contrat est conclu à distance entre un professionnel et un consommateur, « le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient exécutées par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Toutefois, il peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure ».

De par leur généralité, ces clauses écartent la responsabilité du professionnel chaque fois que le dysfonctionnement est lié à l’usage de l’internet, sans distinguer selon l’origine du dysfonctionnement. Ainsi, ces clauses ont pour effet d’écarter la responsabilité du professionnel alors que le dysfonctionnement pourrait résider dans le fait d’un opérateur de télécommunications ou un fournisseur d’accès à internet choisi par le professionnel, de sorte que, dans une telle hypothèse, il devrait en être responsable de plein droit à l’égard du consommateur par application de l’article L. 221-15 du code de la consommation précité.

 

Enfin, conformément à la jurisprudence, le manque de transparence de ces clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, Aff. C-96/14, Van Hove, points 40 et 41 ; 28 juillet 2016, Aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, Aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, Aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, Aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

En raison de leur ambiguïté et de leur généralité, ces clauses, qui ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, sont présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation (v. dans ce sens, Recommandation N° 17-02 Contrats relatifs aux Services de médias audiovisuels à la demande, n° 47).

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable en cas de dysfonctionnements, anomalies ou perturbations du service liées aux caractéristiques du réseau internet, sans réserver les cas dans lesquels ces dysfonctionnements seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations.

 

 

3- Clauses relatives aux dysfonctionnements et dommages causés au matériel du consommateur

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne prévoient que la place de marché en ligne n’est pas responsable du dysfonctionnement ou de tout dommage causé au matériel de l’utilisateur en raison de l’utilisation des services fournis par le professionnel.

 

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

 

De par leur généralité, ces clauses ne distinguent pas selon que le dysfonctionnement ou le dommage causé au matériel de l’utilisateur trouve son origine dans un manquement de ce dernier dans la sécurisation de son matériel informatique ou dans un manquement du professionnel quant à son obligation de fournir un service présentant la qualité et la sécurité à laquelle un consommateur peut légitimement s’attendre.

 

En raison de leur ambiguïté et de leur généralité, ces clauses, qui ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, sont présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable du dysfonctionnement ou de tout dommage causé au matériel de l’utilisateur en raison de l’utilisation des services qu’il fournit, sans réserver les cas dans lesquels ces dommages seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations.

 

 

4- Clauses relatives au fonctionnement du site internet et du service du professionnel

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne prévoient que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas de dysfonctionnement de son site internet ou du service fourni par le biais de son site internet, ou en cas d’inaccessibilité de leur site pour des raisons d’ordre technique ou des incidents techniques.

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

 

De par leur généralité, ces clauses ont pour effet d’écarter la responsabilité du professionnel dans tous les cas de dysfonctionnement ou d’inaccessibilité de son site ou de son service, sans limiter cette exonération aux cas dans lesquels ces manquements ne lui sont pas imputables (v. dans ce sens, Recommandation n° 17-02 Contrats relatifs aux Services de médias audiovisuels à la demande, n° 44 ; Recommandation n° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, n° 104. Qualifiant l’accès au service promis, en l’occurrence une prestation de fourniture d’accès à l’internet, comme étant une obligation de résultat, Cass. civ. 1re, 8 novembre 2007, n° 05-20.637 ; 19 novembre 2009, n° 08-21.645). Ces clauses ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations. Elles sont donc présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable en cas de dysfonctionnement de son site internet ou du service fourni par le biais de son site internet, ou en cas d’inaccessibilité de son site pour des raisons d’ordre technique ou des incidents techniques, sans réserver les cas dans lesquels ces dysfonctionnements seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations.

 

 

5- Clauses relatives à la sécurité du site internet du professionnel

 

  • De nombreuses clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas d’intrusion ou d’attaque informatique, de présence de virus informatiques sur son site et de la perte des données du consommateur qui pourrait en résulter dans les serveurs du professionnel ou sur le matériel de l’utilisateur.

 

Selon l’article liminaire, 7° du code de la consommation, un service numérique se définit comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service ». Les places de marché en ligne permettant aux consommateurs ou aux non-professionnels de consulter des offres de vente de bien en ligne et de conclure le contrat avec les vendeurs, la prestation d’intermédiation s’analyse comme un service permettant une interaction avec des données sous forme numérique téléversées par le consommateur ou d’autres utilisateurs. Le régime relatif aux services numériques, prévu dans le code de la consommation, est donc applicable aux places de marché en ligne.

A ce titre, l’article L. 224-25-12 du code de la consommation dispose que « le professionnel fournit un contenu numérique ou un service numérique conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 224-25-14 » du même code. Selon cette dernière disposition, le service numérique est conforme notamment s’il « est propre à l’usage habituellement attendu d’un contenu numérique ou d’un service numérique de même type » et s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de fonctionnalité, de compatibilité, d’accessibilité, de continuité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des contenus numériques ou des services numériques de même type ».

 

En outre, chaque fois que les données perdues sont des données à caractère personnel, l’article 32, 1° du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD), dispose que le responsable du traitement doit garantir un niveau de sécurité adapté au risque du traitement. En droit national, l’article 4, 6° de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés dispose que les données à caractère personnel doivent être « traitées de façon à garantir une sécurité appropriée […], y compris la protection contre le traitement non autorisé ou illicite et contre la perte, la destruction ou les dégâts d’origine accidentelle, ou l’accès par des personnes non autorisées, à l’aide de mesures techniques ou organisationnelles appropriées » (v. dans ce sens, Recommandation N° 17-02 Contrats relatifs aux Services de médias audiovisuels à la demande, n° 23).

 

Ces clauses ont pour effet d’exonérer le professionnel de ses obligations relatives à la sécurité de son service et des données à caractère personnel qu’il pourrait avoir traitées et stockées lors de la fourniture de celui-ci. Elles ont donc pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, et sont présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui ont pour objet ou pour effet d’écarter la responsabilité du professionnel en cas de manquement à son obligation de sécurité des données qu’il traite ou qu’il stocke.

 

 

 

 

 

6- Clauses relatives au contenu des sites internet vers lesquels le site internet du professionnel renvoie par l’utilisation de liens hypertextes

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que le professionnel n’est pas responsable de la licéité, fiabilité ou exactitude du contenu des sites internet vers lesquels son propre site internet renvoie à l’aide de liens hypertextes.

 

L’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) envisage, dans son III, le régime juridique des éditeurs, définis comme « les personnes dont l’activité est d’éditer un service de communication au public en ligne ». Les éditeurs sont responsables des contenus qu’ils publient soit sur le fondement des articles 29 et suivants de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, prévoyant plusieurs délits contre les personnes (dans ce sens, Cass. civ. 1re, 6 octobre 2011, n° 10-18.142), soit sur le fondement du droit commun de la responsabilité extracontractuelle dans les autres hypothèses (rappelant le champ d’application respectif de chacun de ces fondements, Cass. civ. 1re, 29 octobre 2014, n° 13-15850).

Dans l’hypothèse où l’exploitant d’un site internet reproduit des liens hypertextes pointant vers des sites dont le contenu est illicite, la jurisprudence procède à une analyse casuistique. Ainsi, la chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt du 10 avril 2019 (n° 17-81.302), a pu retenir la responsabilité de l’exploitant d’un blog ayant publié un lien hypertexte menant à une vidéo contenant des menaces de mort à l’encontre d’un fonctionnaire, sans avoir émis aucun commentaire critique.

 

Ces clauses ne distinguent pas qui est l’auteur du lien hypertexte publié sur le site internet de la place de marché en ligne, que ce soit le professionnel lui-même ou un utilisateur dans un espace de publication mis à sa disposition (avis en ligne, forum, etc.). Par ailleurs, ces clauses exonèrent le professionnel de sa responsabilité du fait du contenu des sites internet vers lesquels son site pointe par l’usage de liens hypertextes, sans réserver les cas dans lesquels le professionnel devrait être responsable du fait de la nature ou de l’évidence de l’illicéité du contenu du site vers lequel il redirige. De par leur généralité, dans des relations de nature contractuelle, ces clauses ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, et sont présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui écartent la responsabilité du professionnel du fait du contenu des liens hypertextes qu’il mentionne sur son site, sans distinguer qui est l’auteur du lien hypertexte et sans réserver les hypothèses dans lesquelles il est responsable de par la nature manifestement illicite du contenu pointé.

 

 

7- Clauses relatives aux contenus diffusés sur la place de marché en ligne par ses utilisateurs

 

  • Plusieurs clauses de contrats de place de marché en ligne prévoient que le professionnel n’est pas responsable des contenus diffusés sur la place de marché en ligne par ses utilisateurs. Ces clauses visent aussi bien le contenu des annonces publiées par les utilisateurs que les commentaires, communications ou toutes autres sortes de contenus que les utilisateurs peuvent diffuser ou échanger sur le site internet du professionnel.

 

L’article 6, I., 2° et 3°, de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) envisage la responsabilité des « personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services », autrement dénommés hébergeurs. Même si les hébergeurs ne sont pas débiteurs d’une obligation de surveillance (LCEN, art. 6, I., 7°), leurs responsabilités civile et pénale ne peuvent pas être engagées s’ils « n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, [ils] ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ». Par une interprétation a contrario, les hébergeurs de contenus sont donc responsables civilement et pénalement a posteriori, notamment s’ils n’ont pas agi promptement pour retirer ou rendre inaccessible des contenus dont le caractère illicite leur a été notifié en respectant la procédure prévue à l’article 6, I., 5° de la LCEN.

En prévoyant que seuls les utilisateurs sont responsables des contenus qu’ils publient sur le site internet du professionnel, ou que le professionnel n’est pas responsable du contenu publié par les utilisateurs de ses services, ces clauses ne réservent pas les hypothèses dans lesquelles le professionnel n’a pas agi promptement pour retirer ou rendre inaccessible un contenu dont le caractère illicite lui a été signalé (dans ce sens, Recommandation N° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, n° 82).

 

En outre, certaines de ces clauses n’indiquent pas ou ne distinguent pas selon que le professionnel a mis en place ou non un dispositif visant à la modération des contenus des utilisateurs diffusés sur son site internet.

Chaque fois que le professionnel se sera contractuellement engagé à procéder à une modération des contenus diffusés, non seulement sa qualité d’hébergeur est contestable et, de surcroit, la diffusion d’un contenu illicite caractérise un manquement à ses obligations contractuelles.

 

En raison de leur généralité, ces clauses ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations, et sont présumées irréfragablement abusives au sens de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable du fait des contenus publiés par les utilisateurs sur son site, sans réserver les cas dans lesquels sa responsabilité doit être engagée en sa qualité d’hébergeur de contenus et, le cas échéant, à raison du dispositif de modération qu’il a mis en place.

 

 

H- Clauses relatives à la résolution du contrat

 

1- Clause prévoyant la prise d’effet de la résolution au jour de l’expédition de la notification à l’utilisateur

 

  • L’article 1226 du code civil énonce, en matière de clause résolutoire, que « la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution ».

 

Par ailleurs, en vertu de l’article 1229 du code civil, « la résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice ».

 

Un contrat de place de marché précise pourtant que la clause résolutoire qui lui profite en cas de manquement du consommateur à une de ses obligations, entrainera la résolution, non seulement sans mise en demeure préalable, mais encore à la date d’envoi de la mise en demeure, c’est-à-dire avant même que le consommateur soit informé de la volonté du professionnel de résoudre le contrat.

 

Or, en vertu du droit supplétif normalement applicable, le débiteur devrait, d’une part, être mis en demeure afin qu’il puisse corriger son exécution, la résolution ne pouvant, d’autre part, intervenir qu’au jour de la réception de la notification contenant résolution unilatérale.

 

C’est dire que la clause qui, tout à la fois, dispense le professionnel de mise en demeure et avance la résolution au jour de l’envoi de la notification, place le consommateur dans une situation plus défavorable que celle qui résulterait de l’application du droit supplétif (CJUE 26 janvier 2017, Aff. C-421/14, Banco Primus ; CJUE 16 janvier 2014, Aff. C-226/12, Constructora Principado. V. rapport annuel de la Commission des clauses abusives 2018). Elle entraine en conséquence un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur et doit être réputée non écrite.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui dispensent le professionnel de mise en demeure et avancent la résolution au jour de l’envoi de sa notification.

 

 

2- Clause accordant au professionnel une résolution de plein droit alors qu’une mise en demeure est exigée pour le consommateur

 

  • Un contrat de place de marché contient une clause résolutoire asymétrique. En effet, cette clause oblige le consommateur, en cas de défaut de livraison, à mettre en demeure le vendeur de procéder à la livraison dans un nouveau délai. Ce n’est qu’à l’issue de ce nouveau délai, si la livraison n’a toujours pas eu lieu, que le consommateur pourra alors résoudre le contrat.

 

Au contraire, si le consommateur venait à ne pas respecter son obligation, en l’espèce celle d’être présent au jour et à l’heure prévus pour la livraison, le professionnel pourrait « annuler » de plein droit la commande, c’est-à-dire procéder immédiatement à la résolution du contrat.

 

Le professionnel bénéficie donc d’une clause résolutoire de plein droit et sans sommation, à la différence du consommateur.

 

Or, la clause résolutoire qui subordonne la résolution pour inexécution à l’initiative du consommateur à une formalité à laquelle le professionnel n’est pas soumis est présumée abusive en vertu de l’article R. 212-2, 8° du code de la consommation.

 

En l’espèce, la différence de traitement entre le professionnel et le consommateur n’est pas justifiée par une différence objective de situation entre le professionnel et le consommateur.

 

En conséquence, elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur. Elle doit donc être réputée non écrite.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses résolutoires qui accordent au professionnel une résolution de plein droit alors qu’une mise en demeure est exigée pour le consommateur.

 

 

I- Clause relative aux modes de preuve

 

  • Un contrat prévoit qu’en cas de litige entre les utilisateurs, sans d’ailleurs distinguer selon la nature de la relation contractuelle visée (BtoB ou BtoC), les enregistrements sur les serveurs du professionnel « feront foi » entre les parties.

 

Cette clause supprime, ou en tout cas laisse croire au consommateur qu’est supprimée, la possibilité de rapporter la preuve contraire, et ce alors que, s’agissant de faits juridiques, la preuve par tous moyens est admissible (v. déjà Recommandation N° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, spéc. n° 22. V. aussi Recommandation N° 21-01 Contrats de crédit à la consommation, spéc. n° 3).

 

En effet, en vertu de l’article 1356 du code civil, les parties ne peuvent « établir au profit de l’une des parties une présomption irréfragable ».

 

Dès lors, si cette clause entend établir une présomption de véracité au profit des « enregistrements sur les serveurs » du professionnel, cette présomption ne peut être que simple.

 

Or, la formulation de cette clause laisse croire au consommateur qu’il ne pourra combattre ces enregistrements.

 

En outre, cette clause crée une asymétrie de pouvoir entre le professionnel et le consommateur, ce dernier n’ayant pas accès aux informations contenues sur les serveurs du professionnel, et ce alors que ces dernières pourraient lui être favorables.

 

C’est dire que cette clause est susceptible de ne jouer que lorsque lesdites informations sont favorables au professionnel.

 

Ce faisant, cette clause vient « limiter indûment les moyens de preuve à la disposition du consommateur », au sens de l’article R. 212-2, 9° du code de la consommation. Elle est donc présumée abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que les enregistrements sur les serveurs du professionnel « feront foi » entre les parties.

 

 

 

 

J- Clauses relatives à la cession de contrat

 

  • Deux contrats de place de marché prévoient la possibilité pour la plateforme de céder discrétionnairement le contrat, sans réserver l’hypothèse dans laquelle cette cession est susceptible d’engendrer une diminution des droits du consommateur (v. Recommandation N° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, spéc. n° 109).

 

Elles sont donc présumées abusives au titre de l’article R. 212-2, 5° du code de la consommation.

 

En outre, ces clauses interdisent au consommateur de céder le contrat.

 

Elles réservent donc une prérogative au professionnel, sans que cette prérogative ne soit par ailleurs compensée par l’octroi d’une contrepartie quelconque et, notamment, d’un pouvoir dont le consommateur serait seul à disposer.

 

À cet égard, il est inopérant que l’une des clauses ait « offert » la possibilité au consommateur de résilier le contrat en cas de cession par le professionnel, cette résiliation étant de droit dans les contrats à durée indéterminée. La faculté de résiliation ne peut donc pas être considérée comme étant la contrepartie du droit de céder le contrat que le professionnel s’est réservé.

 

Unilatérales et non compensées, ces clauses de cession de contrat créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur. Elles sont donc abusives.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient la possibilité pour la plateforme de céder discrétionnairement le contrat, sans réserver l’hypothèse dans laquelle cette cession est susceptible d’engendrer une diminution des droits du consommateur.

 

 

K- Clauses relatives à la conservation, par le professionnel, de sommes d’argent ou de biens

 

1- Clauses prévoyant la conservation par le professionnel des intérêts des sommes immobilisées

 

  • Plusieurs contrats précisent que le prix de vente, qui transite par la place de marché, peut être « immobilisé » et que le vendeur renonce alors à demander, en sus du prix, les intérêts de ce dernier.

 

En vertu de l’article 549 du code civil, « le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il possède de bonne foi ». Or, par application de l’article 550 du même code, « le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, en vertu d’un titre translatif de propriété dont il ignore les vices ».

 

C’est dire, qu’en principe, le possesseur et, a fortiori le simple détenteur d’un bien, doit restituer les fruits à son propriétaire.

 

En l’espèce, le consommateur est propriétaire du « prix » depuis l’échange des consentements, la place de marché détenant les fonds pour son compte. Le consommateur a donc droit, en principe, aux intérêts de la somme immobilisée par la place de marché.

 

En définitive, ces clauses, qui ne portent ni sur la définition de l’objet principal du contrat, ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au service offert, placent le consommateur dans une situation moins favorable que ce que prévoit le droit supplétif en permettant au professionnel de s’approprier les intérêts des sommes conservées.

 

Elles créent donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur et sont donc abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses par lesquelles le consommateur renonce à demander, en sus du prix, les intérêts éventuellement produits par ce dernier lorsqu’il est immobilisé sur la plateforme.

 

2- Clauses prévoyant la conservation des sommes disponibles ou des biens par le professionnel

 

  • En vertu de l’article 544 du code civil, « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements».

 

Par ailleurs, « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité » (C. civ., article 545).

 

Enfin, le droit de propriété est imprescriptible (C. civ., article 2227), ce qui explique qu’il ne se perde pas, de jurisprudence constante, par le non-usage (Cass. civ. 3e, 5 juin 2002, n° 00-16.077).

 

Pourtant, plusieurs clauses prévoient que le professionnel deviendra propriétaire des sommes non-utilisées par le consommateur ou des biens non réclamés par le consommateur (vendeur ou acheteur), à l’expiration d’un certain délai.

 

D’abord, comme le professionnel est un simple dépositaire, tenu d’une obligation de restitution au sens de l’article 1915 du code civil, il ne peut se prévaloir ni de la prescription acquisitive instantanée de l’article 2276 du code civil, ni de l’usucapion trentenaire, faute de possession utile.

 

Ensuite, aucun transfert de propriété conventionnel ne peut se produire en l’absence d’une manifestation de volonté du consommateur, le silence ne valant pas acceptation en vertu de l’article 1120 du code civil.

 

Enfin, la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés, qui permet au professionnel de revendre les biens qui lui ont été confiés dès lors qu’ils n’ont pas été retirés dans le délai d’un an (trois mois pour les véhicules terrestres à moteur) n’est pas applicable aux situations visées par les clauses. Quoi qu’il en soit, même si tel était le cas, la procédure prévue par cette loi (autorisation du juge, vente aux enchères) n’est pas respectée par ces clauses.

 

En conséquence, ces clauses ont pour effet, sans base légale, de priver le consommateur de la propriété des sommes d’argent ou des biens par le seul écoulement du temps.

 

Elles placent ainsi le consommateur dans une situation moins favorable que celle qui résulte du droit supplétif. Elles créent donc nécessairement un déséquilibre entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le professionnel deviendra propriétaire des sommes non-utilisées par le consommateur ou des biens non réclamés par le consommateur (vendeur ou acheteur), à l’expiration d’un certain délai.

 

 

L- Clauses relatives aux droits de propriété intellectuelle

 

1- Clauses prévoyant l’octroi au professionnel d’une licence perpétuelle et irrévocable sur les contenus publiés par les utilisateurs

 

  • Deux clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que l’utilisateur d’une place de marché en ligne accorde au professionnel une licence d’utilisation perpétuelle et irrévocable des contenus qu’il publie sur le site internet de ce dernier.

 

Lorsque ces contenus sont protégés par le droit d’auteur, l’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle prévoit, en son alinéa 1er, que « le domaine d’exploitation des droits cédés [doit être] délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ».

Lorsque les contenus sont protégés par le droit des marques, l’article L. 714-1 du code de la propriété intellectuelle dispose, en son alinéa 4, que les droits attachés à une marque peuvent faire l’objet d’une concession de licence d’exploitation exclusive ou non exclusive. Cependant, l’alinéa 5 du même article rappelle que le licencié est tenu de respecter les modalités de la licence accordée sur la marque, notamment en ce qui concerne sa durée. En effet, une marque étant protégée pour dix ans renouvelables à compter de son enregistrement (art. L. 712-1, al. 2nd, c. propr. intel.), une concession de licence d’exploitation ne peut porter sur celle-ci que pour une durée inférieure ou égale à celle de protection de la marque, sauf à ce que le concédant ne s’engage expressément au renouvellement de l’inscription de la marque à l’échéance de sa protection. En tout état de cause, la concession de licence d’exploitation ne peut pas être perpétuelle.

Lorsque les contenus sont protégés en tant que dessins et modèles, l’article L. 513-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que « sans préjudice des droits résultant de l’application d’autres dispositions législatives, notamment des livres Ier et III du présent code, l’enregistrement d’un dessin ou modèle confère à son titulaire un droit de propriété qu’il peut céder ou concéder ». A défaut de disposition spéciale dans ledit code, il convient alors d’en revenir au droit commun des contrats. Ainsi, en cas de licence portant sur un dessin et modèle, et plus largement pour tout contenu ne bénéficiant pas d’un régime spécifique, l’article 1210 du code civil dispose que « les engagements perpétuels sont prohibés. Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée ».

 

En prévoyant que l’utilisateur de la place de marché en ligne consent au professionnel une licence perpétuelle et irrévocable d’exploitation des contenus publiés sur la place de marché en ligne, ces clauses ne respectent pas l’obligation de délimiter dans la durée le domaine d’exploitation des droits transmis lorsqu’ils sont protégés par le droit d’auteur.

Par ailleurs, si le contenu publié par l’utilisateur consiste en une marque, ces clauses ne respectent pas la durée de protection dont bénéficie la marque du fait de son enregistrement.

Enfin, si le contenu publié par l’utilisateur consiste en un dessin ou modèle ou en tout contenu qui ne bénéficie pas d’un régime spécifique de protection, ces clauses entrent en contradiction du principe de la prohibition des engagements perpétuels.

En laissant croire aux consommateurs et aux non-professionnels que des clauses illicites s’appliquent à leur contrat, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des consommateurs et des non-professionnels, au sens de l’article L. 212-1 du code de la consommation. Conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin), elles sont donc abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que l’utilisateur d’une place de marché en ligne accorde à cette dernière une licence d’utilisation perpétuelle et irrévocable des contenus qu’il publie sur son site internet, en méconnaissance des dispositions légales applicables.

 

2- Clause prévoyant une renonciation aux droits moraux de l’utilisateur

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que les utilisateurs acceptent de n’exercer aucun droit moral visant à protéger les contenus qu’ils publient sur le site internet du professionnel.

 

Lorsque ces contenus sont protégés par le droit d’auteur, l’article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit, en son alinéa 3, que le droit moral de l’auteur « est perpétuel, inaliénable et imprescriptible » et, qu’en cela, il est d’ordre public (Rappelant que les clauses de cession d’œuvres futures ne sont pas valables si elles sont incompatibles avec le droit moral de l’artiste, Cass. civ. 1re, 19 janvier 1970, n° 68-12.432 ; Bull. civ. I, n° 21).

La clause, par laquelle les utilisateurs acceptent de n’exercer aucun droit moral sur leurs contenus, s’analyse donc en une clause de renonciation à un droit d’ordre public. Sur ce point, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 3 novembre 2011 (pourvoi n° 10-26.203) a pu retenir que, « ayant retenu à bon droit que l’article 1184 du code civil n’est pas d’ordre public et qu’un contractant peut renoncer par avance au droit de demander la résolution judiciaire du contrat et relevé que la clause de renonciation, rédigée de manière claire, précise, non ambiguë et compréhensible pour un profane, était non équivoque, la cour d’appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ». Par une interprétation a contrario, une clause de renonciation à un droit n’est pas valable chaque fois qu’elle a pour effet de faire renoncer une partie à un droit d’ordre public.

 

Cette clause, en ce qu’elle a pour effet de faire renoncer l’utilisateur de la place de marché en ligne à son droit moral qui est d’ordre public, crée donc un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ou du non-professionnel au sens de l’article L. 212-1 du code de la consommation. Elle est donc abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que l’utilisateur renonce à ses droits moraux sur les contenus qu’il publie sur le site internet du professionnel, en méconnaissance des dispositions légales applicables.

 

 

IV- Clauses portant sur le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise

 

A- Clauses relatives à la formation du contrat

 

De nombreuses clauses abusives concernent les règles relatives à la formation du contrat lato sensu, à savoir le processus de formation du contrat ou les règles relatives à sa validité.

 

1- Clauses prévoyant que la commande doit être confirmée par le prestataire offrant

 

  • De très nombreux contrats de plateforme de marché dérogent, par une clause, au processus normal de formation d’un contrat de vente à distance.

 

Ces clauses prévoient que le consommateur devra suivre un parcours l’amenant à s’engager fermement et définitivement à acquérir le bien en renseignant, in fine, ses coordonnées bancaires pour procéder au paiement.

 

Pourtant, contrairement à ce que pourrait légitimement penser le consommateur, le contrat n’est pas encore définitif une fois les coordonnées bancaires renseignées. Il ne le sera que si et seulement si le vendeur confirme la commande dans le délai prévu par la plateforme de marché.

 

C’est dire que le consommateur est définitivement engagé alors que le vendeur ne l’est pas tant qu’il n’a pas confirmé le contrat. Mieux, ou pire c’est selon, le consommateur est tenu de procéder au paiement pour confirmer sa commande alors que le vendeur ne sera engagé que si bon lui semble. Il suffit en effet au vendeur de ne pas confirmer la commande, dans le délai prévu par les conditions générales d’utilisation, pour ne pas être engagé.

 

Les conditions générales prévoient alors que la commande ou le contrat est automatiquement « annulé », et ce alors que le prix aura parfois été d’ores et déjà débité. Certes, en cas d’annulation, si le prix a été débité, il sera à nouveau crédité.

 

Il n’en reste pas moins que le consommateur déçu n’aura droit à aucune indemnité, et ce alors qu’il aura pu valablement croire à la conclusion définitive du contrat.

 

Les clauses, qui permettent au vendeur, en ne confirmant pas la commande, de provoquer « l’annulation » du contrat, alors que le consommateur est d’ores et déjà engagé s’apparentent ainsi :

  • Soit à des clauses qui, au sens de l’article R. 212-1, 8° du code de la consommation reconnaissent « au professionnel le droit de résilier discrétionnairement le contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur». Sur ce fondement, elles sont donc irréfragablement présumées abusives.

 

  • Soit à des clauses qui, au sens de l’article R. 212-2, 1° du code de la consommation, prévoient un engagement ferme du consommateur, alors que l’exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté. Sur ce fondement, elles sont donc simplement présumées abusives.

 

Quoi qu’il en soit, la Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le contrat ne sera définitif qu’au moment de la confirmation de la commande par le professionnel alors que le consommateur est, pour sa part, définitivement engagé.

 

 

2- Clause prévoyant que le vendeur peut annuler le contrat tant qu’il n’a pas envoyé le bien

 

  • Un contrat de place de marché prévoit, qu’en dépit de la rencontre des volontés, le vendeur a la possibilité d’« annuler la transaction tant qu’il n’a pas envoyé le Bien à l’acheteur ».

 

Pourtant, en vertu de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ainsi, « les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise » (C. civ., art. 1193).

 

Ce faisant, cette clause, qui méconnaît la force obligatoire du contrat, offre au professionnel, au sens de l’article R. 212-1, 8° du code de la consommation « le droit de résilier discrétionnairement le contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur ».

 

Elle est donc irréfragablement présumée abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que le vendeur peut annuler le contrat tant qu’il n’a pas envoyé le bien acquis à l’acheteur.

 

 

3- Clauses subordonnant la conclusion du contrat à une condition résolutoire de disponibilité des produits

 

  • Plusieurs contrats de place de marché dissimulent la précarité du contrat conclu derrière une « condition résolutoire de disponibilité du produit ».

 

Or, une condition, qu’elle soit résolutoire ou suspensive, ne peut pas porter sur l’objet même de la convention, à savoir ici le bien acquis.

 

La Cour de cassation a en effet décidé que « la clause qui prévoit une condition portant sur un élément essentiel à la formation du contrat doit être réputée non écrite » (Cass. civ. 3e, 22 octobre 2015, n° 14-20.096).

 

En outre, la clause qui prévoit la condition résolutoire de disponibilité du produit laisse croire au consommateur qu’il a d’ores et déjà conclu le contrat alors que celui-ci ne pourra l’être que si le bien, objet du contrat, est disponible.

 

Elle a ainsi pour objet de lier définitivement le consommateur alors que le vendeur ne le sera que s’il confirme la disponibilité du produit, ce qu’il est libre de faire sans que le consommateur puisse contrôler la réalité de l’indisponibilité. L’introduction d’une telle condition résolutoire crée donc un déséquilibre significatif car le professionnel peut, en fait, mettre fin au contrat, alors que le consommateur est privé de la même possibilité, le tout sans compensation. En cela, elle est abusive.

 

Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, le manque de transparence des clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, aff. C-96/14, Van Hove, points 40-41 ; 28 juillet 2016, aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

 

Ainsi, manque à son obligation de transparence le professionnel qui laisse figurer sur son site la mention « en stock », tout en se réservant la possibilité, par une clause des conditions générales de vente, la possibilité de se dégager du contrat, sans frais, s’il s’avérait finalement que l’objet vendu n’était pas disponible. La clause crée ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elle est donc abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui prévoient que le contrat est conclu sous la condition résolutoire de la disponibilité des produits.

 

 

4- Clause permettant la conclusion du contrat en un clic

 

  • Une plateforme de vente en ligne propose à ses clients une conclusion du contrat simplifiée, dite en « un seul clic ».

 

Or, l’article 1127-2 du code civil précise que « le contrat n’est valablement conclu que si le destinataire de l’offre a eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son prix total et de corriger d’éventuelles erreurs avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation définitive ».

 

Ce texte est issu de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique qui énonce dans son article 11.2 que « les États membres veillent, sauf si les parties qui ne sont pas des consommateurs en ont convenu autrement, à ce que le prestataire mette à la disposition du destinataire du service des moyens techniques appropriés, efficaces et accessibles lui permettant d’identifier les erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger, et ce avant la passation de la commande ».

 

Le but de l’article 1127-2 du code civil est donc de protéger le destinataire d’une offre en lui offrant la possibilité de corriger ses erreurs, avant même la conclusion du contrat.

 

La sanction encourue en cas de méconnaissance de cette procédure est alors la nullité du contrat.

 

L’article 1127-2 du code civil est donc empreint d’un ordre public de protection. Le but du législateur ne pourrait en effet être atteint si, par une clause de style, il pouvait être dérogé au processus légal de conclusion du contrat électronique.

 

Telle était d’ailleurs l’ambition du législateur européen, au moins s’agissant des rapports entre professionnels et consommateurs.

 

En outre, il apparaît inopérant que la plateforme autorise, en cas de conclusion du contrat en un seul clic, une modification plus souple du contrat pendant un certain délai, d’ailleurs très bref, cette faculté ne compensant pas l’illégalité, a priori, de la formation du contrat.

 

Enfin, on notera que la plateforme en question n’ouvre cette faculté de modification que lorsqu’elle vend elle-même le produit, et non lorsque le produit en question est vendu par un tiers, utilisateur de la plateforme de marché. Dans cette hypothèse, la modification ne peut être obtenue, sans garantie d’ailleurs, que par un appel au service client.

 

En définitive, la clause du contrat qui met en place un système de conclusion du contrat en un seul clic est illicite, l’article 1127-2 du code civil étant d’ordre public. Partant, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin), elle est abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que la conclusion du contrat électronique peut se réaliser en un seul clic.

 

 

5- Clause prévoyant que le double clic vaut signature électronique

 

  • Une place de marché assimile, par une clause de ses conditions générales d’utilisation, le « double clic », qui permet au consommateur de conclure le contrat, à une « signature électronique ».

 

Or, en vertu de l’article 1367 du code civil lorsqu’elle est électronique, la signature « consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache ».

 

Cette clause laisse ainsi croire au consommateur que le double clic entraîne signature électronique, signature à laquelle le code civil attache une présomption de fiabilité jusqu’à preuve contraire.

 

Or, toujours selon l’article 1367 du code civil, la fiabilité d’une signature électronique n’est présumée que « lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ».

 

C’est dire que la clause qui laisse croire que le double clic vaut signature électronique, alors que les conditions du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique ne sont pas nécessairement remplies, est susceptible d’induire en erreur le consommateur sur l’étendue de ses droits (v. déjà Recommandation N° 07-02 Contrats de vente mobilière conclue par internet, spéc. n° 6). Elle entraîne en conséquence un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur. Elle est donc abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que le double clic équivaut à une signature électronique, sans autre précision.

 

 

6- Clause relative à l’information du consommateur sur les restrictions de livraison

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché énonce que c’est « au cours de la passation de sa commande» que le consommateur sera informé de la possibilité pour le vendeur de livrer en Europe et donc en France.

 

Or, l’article L. 221-14, alinéa 3 du code de la consommation énonce que « les sites de commerce en ligne indiquent clairement et lisiblement, au plus tard au début du processus de commande, les moyens de paiement acceptés par le professionnel et les éventuelles restrictions de livraison ».

 

La clause qui permet au professionnel de n’informer le consommateur des restrictions de livraison qu’au « cours de la commande » est donc illicite. Partant, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin), elle est abusive.

 

La Commission recommande ainsi que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que le consommateur sera informé des restrictions de livraison « au cours de sa commande ».

 

7- Clause relative à la présomption d’acte de la vie courante et à l’accord des représentants légaux

  • Un contrat de plateforme prévoit que tous les achats de moins de 200 euros effectués par un mineur seront considérés comme des actes de la vie courante et réputés faits avec l’accord des représentants légaux.

 

Cette clause fait présumer l’existence du consentement du représentant légal afin d’empêcher la remise en cause de la validité du contrat passé avec le mineur.

 

Sous couvert d’une présomption, elle revient ainsi à donner au silence du représentant légal la valeur d’une acceptation, et ce en contradiction avec le principe posé par l’article 1120 du code civil.

 

Ce dernier énonce en effet que « le silence ne vaut pas acceptation, à moins qu’il n’en résulte autrement de la loi, des usages, des relations d’affaires ou de circonstances particulières ».

 

Or, en l’espèce, aucune des exceptions légales ne permet de donner valeur au silence.

 

En conséquence, la clause qui tente de pallier l’absence du consentement exprès du représentant légal est illicite puisqu’elle a vocation à interdire la remise en cause du contrat par les représentants légaux du mineur. Partant, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16968, publié au bulletin), elle est abusive [v. déjà Recommandation N° 17-02 Contrats relatifs aux Services de médias audiovisuels à la demande (SMAD)].

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui fait présumer le consentement des représentants légaux au contrat conclu par leur enfant mineur .

 

 

B- Clauses relatives au droit de rétractation

 

Selon l’article L. 221-1, I, 1° du code de la consommation, un contrat à distance se définit comme « tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat ». Cette définition doit s’interpréter conformément à l’article 2, 7°, de la directive 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, dont elle est la transposition en droit national. Le considérant n° 20 de cette directive indique que « la notion de système organisé de vente ou de prestation de service à distance devrait inclure les systèmes proposés par un tiers autre que le professionnel mais utilisés par ce dernier, par exemple une plateforme en ligne ». Il en résulte que, chaque fois qu’un consommateur conclut un contrat avec un professionnel par l’entremise d’une place de marché en ligne, qui relève de la catégorie plus large de plateforme en ligne, celui-ci est qualifiable de contrat conclu à distance, dont le régime a alors vocation à s’appliquer.

À ce titre, le consommateur contractant à distance avec un professionnel bénéficie d’un droit de rétractation, dont le régime est prévu aux articles L. 221-18 et suivants du code de la consommation. Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne contreviennent à ces dispositions.

 

 

1- Clause relative à l’exclusion du droit de rétractation pour la fourniture de contenus numériques dématérialisés

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne prévoit que le consommateur ne bénéficie pas du droit de rétractation prévu aux articles L. 221-18 et suivants du code de la consommation chaque fois que le contrat consiste en la fourniture de contenus numériques non fournis sur un support matériel si l’exécution a commencé avec l’accord préalable exprès du consommateur.

 

L’article L. 221-28, 13° du code de la consommation dispose que le droit de rétractation est exclu pour les contrats consistant en la « fourniture d’un contenu numérique sans support matériel dont l’exécution a commencé avant la fin du délai de rétractation et, si le contrat soumet le consommateur à une obligation de payer, lorsque :

  1. a) Il a donné préalablement son consentement exprès pour que l’exécution du contrat commence avant l’expiration du délai de rétractation ; et
  2. b) Il a reconnu qu’il perdra son droit de rétractation ; et
  3. c) Le professionnel a fourni une confirmation de l’accord du consommateur conformément aux dispositions du deuxième l’alinéa de l’article L. 221-13».

Cette disposition prévoit un formalisme en trois temps destiné à protéger le consommateur : le consentement exprès du consommateur pour le commencement de l’exécution du contrat, la reconnaissance expresse par le consommateur de la perte de son droit de rétractation, la confirmation par le professionnel de l’accord du consommateur à ces deux derniers points.

 

La clause du contrat de place de marché en ligne subordonne l’exclusion du droit de rétractation à l’accomplissement d’une seule des formalités prévues par l’article L. 221-28, 13° du code de la consommation. Cette clause, contraire à la disposition précitée, a donc pour effet de réduire la protection du consommateur. Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, cette clause doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui subordonne la mise à l’écart du droit de rétractation d’un contrat de fourniture de contenus numériques à l’accomplissement de la seule formalité de l’accord préalable et exprès du consommateur au commencement d’exécution du contrat, à l’exclusion des autres formalités impératives prévues légalement.

 

 

2- Clause ajoutant une nouvelle exception légale au droit de rétractation

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que, par application de l’article L. 221-28 du code de la consommation, le consommateur ne peut pas exercer son droit de rétractation lorsque celui-ci porte sur « un composant d’un lot de vente rendu seul ».

 

Conformément à la jurisprudence, le manque de transparence des clauses doit être pris en considération dans l’appréciation de leur caractère abusif (par ex., CJUE, 23 avril 2015, aff. C-96/14, Van Hove, points 40-41 ; 28 juillet 2016, aff. C-191/15, Verein für Konsumenteninformation, point 68 ; 3 octobre 2019, aff. C-621/17, CIB Bank Zrt, point 49 ; 10 juin 2021, aff. C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 94 ; 10 juin 2021, aff. C-609/19, BNP Paribas Personal Finance SA, point 62).

La clause exclut le droit de rétractation pour « un composant d’un lot de vente rendu seul ». Cette dernière formule, ambiguë, ne permet pas au consommateur d’identifier clairement les cas dans lesquels le professionnel entend écarter le droit de rétractation dont le consommateur bénéficie. De par son manque de transparence, cette clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elle doit donc être considérée comme abusive.

 

Par ailleurs, l’article L. 221-28 du code de la consommation prévoit une liste limitative de treize cas dans lesquels le consommateur ne peut pas exercer son droit de rétractation. Cette disposition étant d’ordre public selon l’article L. 221-29 du même code, un professionnel ne peut ajouter un nouveau cas d’exclusion du droit de rétractation en s’appuyant sur ce fondement textuel.

Cette clause laisse donc croire au consommateur qu’il ne dispose pas du droit de se rétracter en vertu d’une exception légale pourtant non prévue par l’article L. 221-28 du code de la consommation. Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, cette clause doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui a pour objet d’ajouter de nouveaux cas d’exclusions du droit de rétractation aux exceptions légales prévues par l’article L. 221-28 du code de la consommation.

 

 

3- Clauses relatives au point de départ du délai de rétractation

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que le délai de rétractation dont bénéficie le consommateur court à compter de la date de conclusion du contrat ou de la date de livraison de la marchandise.

 

L’article L. 221-18 du code de la consommation dispose que le délai de quatorze jours dont bénéficie le consommateur pour se rétracter court, lorsque le contrat consiste en une vente de biens, à compter « de la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui ».

Cette disposition étant d’ordre public, par application de l’article L. 221-29 du même code, le professionnel ne peut pas déroger à cette disposition pour prévoir que le délai de rétractation commencera à courir à compter d’un événement antérieur à la réception de la marchandise, diminuant ainsi le temps au cours duquel le consommateur peut se rétracter après être entré en possession du bien.

En outre, en stipulant que le délai de rétractation court « à compter de la date d’achat du Produit ou de la date de livraison » ou « à compter de la conclusion du contrat mais peut être différé à la date de la réception des Produits », ces clauses désignent deux événements dont la survenance fait courir le délai de rétractation sans pour autant mettre le consommateur en mesure de déterminer quel est le point de départ à appliquer au contrat conclu.

 

En raison de leur ambiguïté et de leur contravention à l’article L. 221-18 du code de la consommation, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Elles doivent donc être considérées comme abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui ne permettent pas de déterminer quel est le point de départ du délai de rétractation dont le consommateur peut se prévaloir.

 

 

4- Clauses interdisant l’utilisation de la marchandise achetée

 

  • Deux clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que, pour exercer valablement son droit de rétractation, le consommateur ne doit pas avoir utilisé ou testé la marchandise. En outre, une de ces clauses impose de retourner la marchandise dans son emballage d’origine.

 

Selon le considérant 37 de la directive (UE) 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, le droit de rétractation prévu au bénéfice des consommateurs contractant à distance se justifie par le constat que « le consommateur n’est pas en mesure de voir le bien qu’il achète avant de conclure le contrat ». A ce titre, il est « autorisé à essayer et inspecter le bien qu’il a acheté, dans la mesure nécessaire pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien ».

En outre, l’article L. 221-23 du code de la consommation dispose que « le consommateur renvoie ou restitue les biens au professionnel ou à une personne désignée par ce dernier, sans retard excessif et, au plus tard, dans les quatorze jours suivant la communication de sa décision de se rétracter conformément à l’article L. 221-21, à moins que le professionnel ne propose de récupérer lui-même ces biens.

Le consommateur ne supporte que les coûts directs de renvoi des biens, sauf si le professionnel accepte de les prendre à sa charge ou s’il a omis d’informer le consommateur que ces coûts sont à sa charge. Néanmoins, pour les contrats conclus hors établissement, lorsque les biens sont livrés au domicile du consommateur au moment de la conclusion du contrat, le professionnel récupère les biens à ses frais s’ils ne peuvent pas être renvoyés normalement par voie postale en raison de leur nature.

La responsabilité du consommateur ne peut être engagée qu’en cas de dépréciation des biens résultant de manipulations autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de ces biens, sous réserve que le professionnel ait informé le consommateur de son droit de rétractation, conformément au 7° de l’article L. 221-5.» du même code. Par une interprétation a contrario, il résulte de ce texte que le consommateur peut utiliser le bien acheté à distance pour en vérifier la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement.

 

De par leur généralité, ces clauses, en ce qu’elles interdisent toute utilisation de la chose sans réserver les cas dans lesquels cette utilisation a pour objet d’établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien acheté, privent le consommateur des prérogatives inhérentes à l’existence de son droit de rétractation.

De plus, en ce que l’une de ces clauses impose au consommateur de retourner la marchandise dans son emballage d’origine, en dehors de toute exigence légale, celle-ci crée, à la charge du consommateur, une obligation supplémentaire de nature à entraver l’exercice de son droit de rétractation.

Ces clauses créent donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elles doivent donc être considérées comme abusives.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui imposent le retour de la marchandise dans leur emballage d’origine et/ou qui interdisent aux consommateurs d’utiliser la marchandise, sans réserver les cas dans lesquels cette utilisation consiste en l’exercice par le consommateur de ses prérogatives attachées à son droit de rétractation.

 

 

 

 

 

5- Clause prévoyant une décote forfaitaire de la valeur du bien acheté

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit des décotes forfaitaires selon la nature des utilisations et détériorations que le bien objet de l’exercice du droit de rétractation a subi.

 

L’article L. 221-23 du code de la consommation dispose, en son alinéa 2, que « la responsabilité du consommateur ne peut être engagée qu’en cas de dépréciation des biens résultant de manipulations autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de ces biens, sous réserve que le professionnel ait informé le consommateur de son droit de rétractation, conformément au 7° de l’article L. 221-5 » du même code. La responsabilité du consommateur peut donc être engagée, au titre de l’exercice de son droit de rétractation, chaque fois qu’un comportement fautif lui est imputable quant à l’utilisation de la chose. Par une interprétation a contrario, il résulte de ce texte que le consommateur peut utiliser le bien acheté à distance pour en vérifier la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement.

En dehors de cette hypothèse, l’article 1352-1 du code civil, relatif à la prise en charge des moins-values lors de l’exécution d’une obligation de restitution, dispose que « celui qui restitue la chose répond des dégradations et détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu’il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute ». Il s’ensuit que, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation, il ne doit supporter la charge des détériorations du bien que si sa faute et sa mauvaise foi sont prouvées.

 

Cette clause a pour effet de mettre à la charge du consommateur qui exerce son droit de rétractation une décote forfaitaire dans deux cas et indépendamment de la gravité des détériorations.

Le premier cas concerne la détérioration de l’emballage extérieur, en dehors des dispositions légales prévues par l’article L. 221-23 du code de la consommation précité.

Le second cas concerne l’accès au produit et sa détérioration. La clause ne réserve pas les cas dans lesquels cette utilisation a pour objet d’établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien acheté, ni les cas dans lesquels les détériorations ne sont pas dues au comportement fautif du consommateur, conformément aux dispositions précitées.

De par sa généralité, cette clause crée un déséquilibre significatif au détriment de ce dernier en ce qu’elle a pour objet ou pour effet de lui imposer la charge d’une moins-value en dehors des hypothèses légales. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elle doit donc être déclarée abusive.

 

En outre, la clause prévoit des décotes de 70 à 80 % de la valeur du bien acheté sans distinguer selon la gravité et l’imputabilité de la détérioration.

La clause prévoit ainsi des décotes à caractère forfaitaire disproportionnées car ne correspondant pas à la perte réelle de la valeur du bien et du préjudice subi par le professionnel. Elle crée donc un déséquilibre significatif au détriment du consommateur en ce que, par application de l’article R. 212-2, 3° du code de la consommation, elle a pour objet ou pour effet d’« imposer au consommateur qui n’exécute pas ses obligations une indemnité d’un montant manifestement disproportionné ». Cette clause est donc présumée abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui prévoit une décote forfaitaire de la valeur du bien acheté lors de l’exercice du droit de rétractation, indépendamment du comportement fautif du consommateur et de la dépréciation réelle de la valeur du bien concerné.

 

 

6- Clauses faisant peser sur le consommateur la charge des détériorations de la marchandise lors de son retour au professionnel

 

  • Plusieurs contrats de places de marché en ligne prévoient que, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation, le retour de la marchandise au professionnel s’effectue aux risques et périls du consommateur.

 

L’article L. 221-27 du code de la consommation dispose que l’exercice du droit de rétractation met fin à l’obligation des parties d’exécuter le contrat à distance, de sorte que ce droit a pour effet d’éteindre le contrat conclu et de mettre à la charge des parties une obligation de restitution le cas échéant.

Dans la mesure où l’article L. 221-23 du code de la consommation, qui dispose que le consommateur renvoie ou restitue les biens au professionnel ou à une personne désignée par ce dernier, sans retard excessif et, au plus tard, dans les quatorze jours suivant la communication de sa décision de se rétracter, est silencieux quant à la responsabilité de chacune des parties en cas de détérioration du bien objet de la restitution, il convient d’en revenir au droit commun des restitutions.

L’article 1352-1 du code civil dispose que « celui qui restitue la chose répond des dégradations et détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu’il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute ». La charge des moins-values ne pèse donc sur le débiteur de l’obligation de restitution, en l’occurrence le consommateur, que si deux conditions cumulatives sont réunies : un comportement fautif d’une part ; la preuve de sa mauvaise foi d’autre part.

 

Les différentes clauses des places de marché en ligne stipulent que le consommateur supporte la responsabilité ou les risques et périls de la restitution de la marchandise suite à l’exercice de son droit de rétractation, sans précision supplémentaire. Ces clauses ne réservent pas les cas dans lesquels la détérioration de la marchandise ne résulterait pas d’un comportement fautif du consommateur et/ou ce dernier serait pourtant de bonne foi.

De par leur généralité, ces clauses créent donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elles doivent donc être considérées comme abusives.

 

En outre, une de ces clauses répute le consommateur responsable en cas de détérioration des produits lors de leur retour au professionnel. Cette clause présume donc les conditions de l’article 1352-4 du code civil remplies, c’est-à-dire le comportement fautif et la mauvaise foi du consommateur, alors que la preuve du comportement fautif du débiteur de l’obligation de restitution incombe au demandeur et que la bonne foi est présumée, sauf à ce que celui qui allègue la mauvaise foi en rapporte la preuve, par application de l’article 2274 du même code.

Cette clause, qui impose au consommateur la charge de la preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat, est irréfragablement abusive au sens de l’article R. 212-1, 12° du code de la consommation.

 

La Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui, à la suite de l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation, compte tenu de leur généralité, mettent à la charge de ce dernier les risques et périls de la restitution de la marchandise, et/ou réputent le consommateur responsable des détériorations de la marchandise survenues lors de sa restitution en raison du renversement de la charge de la preuve qu’elles produisent.

 

7- Clauses excluant le remboursement des frais de livraison en cas de rétractation partielle du consommateur

 

  • Plusieurs clauses de contrats de places de marché en ligne prévoient que, si le consommateur décide d’exercer son droit de rétractation en ne retournant qu’une partie de la marchandise objet du contrat de vente conclu avec le professionnel vendeur, le consommateur n’obtiendra que le remboursement du prix de la marchandise restituée, à l’exclusion des frais de livraison.

 

L’article L. 221-24 du code de la consommation dispose que « lorsque le droit de rétractation est exercé, le professionnel rembourse le consommateur de la totalité des sommes versées, y compris les frais de livraison, sans retard injustifié et au plus tard dans les quatorze jours à compter de la date à laquelle il est informé de la décision du consommateur de se rétracter ».

Cette disposition, d’ordre public par application de l’article L. 221-29 du même code, ne distingue pas selon que le droit de rétractation porte sur tout ou partie de la commande. L’exclusion pure et simple du remboursement des frais de livraison en raison d’une restitution partielle de la marchandise objet du contrat de vente est, de par sa généralité, contraire à l’article L. 221-24 précité.

En outre, l’exclusion systématique du remboursement des frais de livraison en cas de rétractation partielle du consommateur est de nature à dissuader celui-ci de se rétracter. En effet, l’exercice de ce droit lui fera supporter, in fine, la charge des frais de livraison, qu’ils correspondent ou non au coût du transport des marchandises conservées.

 

En ce que ces clauses aboutissent à une exclusion générale du remboursement, fût-ce partiellement, des frais de livraison, dissuadant ainsi le consommateur d’exercer son droit de rétractation quant à une partie des biens objet du contrat de vente, ces clauses créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elles doivent donc être considérées comme abusives.

 

En ce qu’elles dissuadent les consommateurs d’exercer leur droit de rétractation et en ce qu’elles sont contraires aux règles d’ordre public prévoyant le régime des restitutions en cas d’exercice de ce droit, la Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs les clauses qui ont pour objet d’exclure tout remboursement des frais de livraison en cas de rétractation partielle de ce dernier.

 

 

8- Clause portant sur les moyens utilisables pour manifester sa volonté de se rétracter

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne prévoit que le consommateur doit prendre contact avec le professionnel vendeur à partir de son espace client en ligne pour exercer son droit de rétractation.

 

L’article L. 221-21 du code de la consommation dispose que le consommateur peut exercer son droit de rétractation en adressant au professionnel vendeur soit le formulaire de rétractation de l’article L. 221-5, 7° du même code, soit une déclaration dénuée d’ambiguïté exprimant sa volonté de se rétracter, soit en se connectant et en manifestant sa volonté de se rétracter à partir de son espace client sur le site internet du professionnel si ce dernier lui octroie cette prérogative.

Cette disposition étant d’ordre public, par application de l’article L. 221-29 du code de la consommation, le professionnel ne peut restreindre l’exercice du droit de rétractation par le consommateur à l’une seule des différentes modalités envisagées à l’article L. 221-21 susvisé.

 

Ainsi, la clause susvisée, qui oblige le consommateur à exercer son droit de rétractation depuis son espace client, sans lui permettre de l’exercer autrement par l’envoi du formulaire de rétractation ou d’une déclaration dénuée d’ambiguïté, est contraire à l’article L. 221-21 du code de la consommation.

 

En ce que cette clause, illicite, laisse croire au consommateur qu’il ne peut se rétracter qu’en manifestant sa volonté depuis son espace client en ligne, elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin). Par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, elle doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui n’autorise l’exercice du droit de rétractation par le consommateur que par une manifestation de volonté émise depuis son espace client en ligne sur le site internet du professionnel, à l’exclusion des autres moyens pourtant prévus par la loi.

 

 

9- Clause relative à la disparition des contrats accessoires au contrat principal dont le consommateur s’est rétracté

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne prévoit que, si le consommateur exerce son droit de rétractation, il est mis également fin aux contrats accessoires du contrat principal objet de la rétractation, sauf à ce que les contrats accessoires aient été exécutés.

 

L’article L. 221-27 du code de la consommation prévoit, en son alinéa 2, que « l’exercice du droit de rétractation d’un contrat principal à distance ou hors établissement met automatiquement fin à tout contrat accessoire, sans frais pour le consommateur autres que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25 » du même code. Cette disposition pose donc en principe que l’exercice du droit de rétractation d’un contrat entraine la disparition de ses contrats accessoires, sans réserver d’exception à cette disparition. Les exceptions à la disparition d’un contrat du fait de l’exercice du droit de rétractation doivent donc s’apprécier eu égard à l’article L. 221-28 du code de la consommation, qui prévoit treize cas dans lesquels le droit de rétractation ne peut pas être exercé.

 

Si le contrat accessoire consiste en une vente de biens, le droit de rétractation ne peut être écarté que dans les cas prévus à l’article L. 221-28 susvisé.

Si le contrat accessoire consiste en une prestation de services, le droit de rétractation n’est écarté, conformément à l’article L. 221-28, 1° du code de la consommation, que si le service a été « pleinement exécuté avant la fin du délai de rétractation et, si le contrat soumet le consommateur à une obligation de payer, dont l’exécution a commencé avec son accord préalable et exprès et avec la reconnaissance par lui de la perte de son droit de rétractation, lorsque la prestation aura été pleinement exécutée par le professionnel ». Si ce formalisme n’est pas respecté, le consommateur pourra exercer son droit de rétractation. De même, si le service n’est pas pleinement exécuté, le consommateur pourra exercer son droit de rétractation mais devra verser au professionnel un montant correspondant au service fourni jusqu’à la communication de sa décision de se rétracter, par application de l’article L. 221-25, alinéa 2 du même code.

 

Cette clause, de par sa généralité, en ce qu’elle prévoit que le contrat accessoire à un contrat principal dont le consommateur s’est rétracté est maintenu du seul fait de son exécution, sans limiter cet effet aux seuls cas dans lesquels le droit de rétractation est légalement exclu lorsque le contrat accessoire consiste en une vente de biens, et sans distinguer selon que le service a été pleinement ou partiellement exécuté lorsque le contrat accessoire est une prestation de services, est contraire aux articles L. 221-25, L. 221-27 et L. 221-28 du code de la consommation. Elle est donc illicite et, maintenue dans un contrat entre un professionnel et un consommateur, doit être considérée comme abusive, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin).

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui a pour objet d’écarter les effets du droit de rétractation sur les contrats accessoires du contrat principal ainsi anéanti, sans se limiter aux seuls cas légaux dans lesquels le droit de rétractation est écarté et, le cas échéant, sans en respecter le formalisme imposé.

 

 

10- Clause écartant le droit de rétractation lorsqu’une partie de la commande est indisponible

 

  • Une clause d’un contrat d’une place de marché en ligne encadre l’exercice du droit de rétractation par le consommateur. A ce titre, elle prévoit que l’indisponibilité d’un ou plusieurs produits d’une même commande auprès d’un ou plusieurs vendeurs professionnels ne constitue pas un motif légitime de rétractation quant à la totalité de la commande.

 

L’article L. 221-18 du code de la consommation indique que « le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25 » du même code. Hormis les cas dans lesquels le droit de rétractation est exclu, par application de l’article L. 221-28 du code de la consommation, le consommateur peut exercer son droit de rétractation de façon discrétionnaire, donc sans avoir à motiver sa décision. Par ailleurs, l’article L. 221-28 susvisé n’écarte pas le droit de rétractation lorsqu’une partie des biens d’une commande plus large est indisponible.

 

Cette clause, en ce qu’elle a pour effet d’interdire au consommateur de se rétracter lorsqu’une partie des produits commandés n’est pas disponible, est contraire au caractère discrétionnaire de l’exercice du droit de rétractation de l’article L. 221-18 du code de la consommation et crée une exception à ce même droit non prévue à l’article L. 221-28 du même code. Cette clause laisse donc croire au consommateur qu’il ne peut pas se rétracter dans de telles circonstances. Elle crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur et, par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui écarte le droit de rétractation lorsqu’une partie de la commande est indisponible, en méconnaissance de l’article L. 221-28 du code de la consommation qui prévoit une liste limitative d’exclusions du droit de rétractation.

 

C- Clause relative à l’objet du contrat

Clause limitant les ventes aux besoins « normaux » ou « moyens » d’un foyer

 

  • Une clause restreint la vente « aux besoins moyens habituels d’un foyer » ou à « l’usage normal d’un acheteur consommateur ».

 

Elle permet ainsi au professionnel, après qu’une commande a été passée de ne pas l’honorer (« de ne pas valider et/ou de suspendre l’exécution de la commande ») s’il estime que la quantité ou le nombre de commandes passées par un acheteur s’éloigne de ce qui est « normal » pour un consommateur ou un foyer « moyen », et ce « même après l’envoi de l’email de validation de la commande ».

 

Que le professionnel souhaite limiter, en amont, la quantité ou le nombre de commandes identiques par un même consommateur est sans doute légitime. Des solutions techniques permettent d’empêcher de commander au-delà d’une certaine quantité ou d’interdire de renouveler une commande identique au-delà d’un certain nombre.

 

Toutefois, le procédé qui consiste à modifier ou à bloquer l’exécution d’un contrat par ailleurs régulièrement formé est contestable.

 

Les clauses litigieuses tombent en effet sous le coup des clauses « noires » de l’article R. 212-1 du code de la consommation :

 

  • D’une part, elles permettent au professionnel de réduire la quantité commandée à ce qui est considéré comme un usage « normal » ou « moyen » pour un consommateur. C’est dire qu’elle lui offre le choix discrétionnaire de l’objet ou de l’exécution du contrat en méconnaissance de l’article R. 212-1, 4° du code de la consommation ;

 

  • D’autre part et à défaut, elles pourraient permettre au professionnel d’anéantir unilatéralement, et discrétionnairement, compte tenu de sa maîtrise de l’appréciation des quantités « moyennes » ou « normales », le contrat valablement conclu, sans que le même droit soit reconnu au consommateur, en contrariété avec l’article R. 212-1, 8° du code de la consommation.

 

En conséquence, la Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui a pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de résilier ou de modifier unilatéralement le contrat valablement conclu au seul motif que la quantité ou le nombre de commandes dépasse l’usage « moyen » ou « normal » d’un consommateur.

 

 

D- Clauses relatives à l’exécution du contrat

 

1- Clause relative aux frais de livraison en cas d’indisponibilité d’une partie des biens achetés

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que, si un ou plusieurs biens d’une commande portant sur plusieurs biens ne sont pas disponibles, les frais de livraison ne seront pas remboursés.

 

Hormis le cas dans lequel les frais de livraison sont déterminés de façon forfaitaire, leur montant, payé par le professionnel au transporteur mais supporté in fine par le consommateur lors de l’exécution de son obligation de paiement, est déterminé à raison de la taille, du poids ou encore du nombre de biens achetés au vendeur. Ainsi, plus le nombre de biens achetés est important, plus le montant des frais de livraison va croissant.

Si une partie des biens objets du contrat de vente est indisponible, ce qui est imputable au vendeur, le professionnel paiera au transporteur une somme moindre que celle qu’il aurait dû payer si tous les biens objets du contrat avaient été disponibles et expédiés.

 

En prévoyant que, si une partie des biens objets du contrat est indisponible, les frais de livraison ne seront pas remboursés, le consommateur ou le non-professionnel est conduit à payer au professionnel des frais de livraison ne correspondant pas aux frais engagés par ce dernier auprès du transporteur pour l’acheminement de la commande.

Ces sommes, conservées par le professionnel, ne constituent pas la contrepartie d’une prestation fournie par ce dernier au consommateur. Cette clause crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ou du non-professionnel et, par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, doit être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui, en ce qu’elle permet au professionnel de conserver des sommes d’argent indues, prévoit que les frais de livraison ne seront pas remboursés si une partie de la commande est indisponible.

 

 

2- Clause excluant des biens consomptibles du champ d’application de la garantie de conformité

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que la garantie légale de conformité ne s’applique pas aux pièces et accessoires d’un bien qui doivent être régulièrement remplacés, tels que des piles, sacs pour aspirateur, cartouches d’encre ou ampoules.

 

L’article L. 217-5, I. du code de la consommation dispose qu’un bien est conforme s’il est délivré avec ses accessoires (article L. 217-5, I., 4° c. consom.), s’il est propre à l’usage habituellement attendu d’un bien du même type (article L. 217-5, I., 1° c. consom.) et s’il répond aux exigences de durabilité auxquelles un consommateur peut légitimement s’attendre (article L. 217-5, I., 6° c. consom.).

Si la garantie de conformité n’est pas destinée à garantir le consommateur ou le non-professionnel de l’usure de la chose du fait de son usage, elle n’est pour autant pas exclue du seul fait que le bien objet du contrat est consomptible chaque fois que la non-conformité de la chose est étrangère à son usure par son utilisation normale.

 

De par sa généralité, en ce qu’elle ne réserve pas les cas dans lesquels la non-conformité de ces biens consomptibles est due à une cause autre que leur seule détérioration du fait de leur usage normal, cette clause a pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations » et interdit « au consommateur le droit de demander la résolution ou la résiliation du contrat en cas d’inexécution par le professionnel de ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ». Par application des articles R. 212-1, 6° et 7° du code de la consommation, elle est donc présumée irréfragablement abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui écarte la garantie légale de conformité de la vente de biens consomptibles, sans réserver les cas dans lesquels les causes de la détérioration ou du dysfonctionnement du bien sont étrangères à son caractère consomptible.

 

 

3- Clause imposant la validation par le transporteur des réserves émises par le consommateur

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que si le bien livré est endommagé, les réserves émises par le consommateur sur le bon du transporteur doivent être obligatoirement validées par ce dernier.

 

Cette clause subordonne l’exercice par le consommateur ou le non-professionnel de son droit d’émettre des réserves en cas de réception d’un bien non-conforme au pouvoir discrétionnaire du transporteur, qui participe à l’exécution du contrat conclu entre le professionnel et le consommateur.

Parce que le transporteur pourrait s’opposer discrétionnairement à la validation des réserves émises par le consommateur ou le non-professionnel, empêchant ce dernier de réaliser les formalités préalables nécessaires à la mise en œuvre de la garantie de conformité en cas de non-conformité apparente, cette clause a pour effet d’« accorder au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ». Par application de l’article R. 212-1, 4° du code de la consommation, cette clause est présumée irréfragablement abusive.

 

Par ailleurs, l’article L. 224-65 du code de la consommation, relatif aux contrats de transport hors déménagement conclus entre un professionnel et un consommateur, dispose que « lorsque le consommateur prend personnellement livraison des objets transportés et lorsque le voiturier ne justifie pas lui avoir laissé la possibilité de vérifier effectivement leur bon état, le délai mentionné à l’article L. 133-3 du code de commerce (trois jours, non compris les jours fériés, à compter du lendemain de la réception) qui éteint toute action contre le voiturier est porté à dix jours ».

En ce que la clause prévoit que les réserves émises par le consommateur doivent être obligatoirement validées par le transporteur, elle laisse croire au consommateur qu’il n’est pas en mesure de contester l’état de la marchandise livrée si le transporteur le refuse ou s’il ne lui en laisse pas le temps, en contrariété de l’article L. 224-65 du code de la consommation précité. En cela, la clause crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Elle doit donc être considérée comme abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui subordonne la validation des réserves émises par l’acheteur à la validation discrétionnaire du transporteur.

 

 

4- Clause octroyant au professionnel un droit discrétionnaire de bloquer ou refuser le paiement

  • Un contrat de place de marché réserve au professionnel le droit discrétionnaire (« pour quelque raison que ce soit») de bloquer ou de refuser d’effectuer le paiement lorsque l’acheteur et le vendeur ont décidé d’utiliser le service de paiement intégré de la plateforme.

 

Si certains motifs peuvent légitimement permettre à la plateforme de ne pas procéder au paiement, comme le respect de la législation anti-blanchiment ou la mise en application de sanctions économiques ou commerciales décidées au niveau étatique, le fait que la plateforme se réserve le droit discrétionnaire de ne pas effectuer le paiement entraîne un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur.  En effet, il permet au professionnel de s’affranchir de la force obligatoire du contrat, la clause ayant pour effet, sinon pour objet, de reconnaître au professionnel le droit de résilier discrétionnairement le contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur, le tout en méconnaissance de l’article R. 212-1, 8° du code de la consommation.

 

C’est dire que la clause qui permet à la plateforme de ne pas respecter la prestation de paiement intégré qu’elle offre au consommateur ou au non-professionnel, « pour quelque raison que ce soit », crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties. Elle est donc abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui permet à la plateforme de bloquer ou de refuser le paiement de façon discrétionnaire lorsque l’acheteur et le vendeur ont décidé d’utiliser le service de paiement intégré de la plateforme.

 

 

E- Clause relative à la conservation des coordonnées bancaires du consommateur

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que, pour toute utilisation de ses services nécessitant l’usage d’une carte bancaire, le consommateur consent à ce que le professionnel, l’entité de paiement ou ses affiliés puissent sauvegarder les informations de paiement, en l’occurrence les numéros de carte bancaire et les dates d’expiration, communiquées par le consommateur pour les utiliser ensuite comme méthode de paiement par défaut.

 

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a, dans une délibération du 6 septembre 2018 (Délibération n° 2018-303 du 6 septembre 2018 portant adoption d’une recommandation concernant le traitement des données relatives à la carte de paiement en matière de vente de biens ou de fourniture de services à distance et abrogeant la délibération n° 2017-222 du 20 juillet 2017), adopté une recommandation dans laquelle elle indique que les données bancaires ne peuvent être collectées et traitées par une société vendant des biens ou des services à distance que pour permettre la réalisation d’une transaction lors de l’exécution d’un contrat et que la conservation de ces données afin de faciliter d’éventuels paiements ultérieurs n’est possible que si les personnes auxquelles ces données se rapportent ont donné préalablement et explicitement leur consentement, à moins qu’elles aient souscrit un abonnement donnant accès à des services additionnels, traduisant leur inscription dans une relation commerciale régulière.

 

Le Conseil d’État, dans un arrêt des 10ème et 9ème chambres réunies, du 10 décembre 2020 (n° 429571) a affirmé que, par application de l’article 6 du règlement général sur la protection des données (RGPD) du 27 avril 2016, « la conservation des numéros de cartes bancaires pour certains clients des sites de commerce en ligne non abonnés pour faciliter des achats ultérieurs n’est nécessaire ni au respect d’une obligation légale, ni à l’exécution d’une mission d’intérêt public, ni à la sauvegarde des intérêts vitaux de la personne concernée ou d’une autre personne. S’agissant de l’exécution d’un contrat auquel la personne concernée est partie, la conservation du numéro de carte bancaire ne saurait se justifier une fois ce contrat exécuté ». En outre, il a indiqué que « si la société soutient que la conservation du numéro de carte bancaire du client qui a procédé à un achat en ligne est nécessaire aux fins de l’intérêt légitime consistant à faciliter des paiements ultérieurs en dispensant le client de le saisir à chacun de ses achats, notamment dans le cadre d’une fonctionnalité d’achat rapide – dite  » en un clic  » – cet intérêt ne saurait prévaloir sur l’intérêt des clients de protéger ces données, compte tenu de la sensibilité de ces informations bancaires et des préjudices susceptibles de résulter pour eux de leur captation et d’une utilisation détournée, et alors que de nombreux clients qui utilisent des sites de commerce en ligne en vue de réaliser des achats ponctuels ne peuvent raisonnablement s’attendre à ce que les entreprises concernées conservent de telles données sans leur consentement ».

Il en résulte que, chaque fois qu’un professionnel désire conserver les informations bancaires d’un consommateur qui n’est pas abonné à un service que le professionnel propose, il est tenu de recueillir le consentement exprès de ce dernier, condition qu’une clause noyée dans les stipulations contractuelles par laquelle le consommateur affirme donner son consentement ne remplit pas (sur le consentement exprès à un traitement de données, v. Recommandation n° 14-02 Contrats de fourniture de services de réseaux sociaux, n° 20).

 

Cette clause prévoit que le consommateur accepte que ses données bancaires soient conservées par le professionnel, l’entité de paiement ou ses affiliés.

Elle ne remplit pas les conditions formelles du consentement exprès du consommateur en ce qu’elle est noyée parmi les autres stipulations contractuelles, sans nécessiter une quelconque action du consommateur pour manifester son acceptation spécifique à un tel traitement de données.

Par ailleurs, elle ne respecte pas les conditions de fond de ce traitement de données en ce qu’elle présume le consentement du consommateur, quelle que soit la nature du lien unissant ce dernier à la place de marché en ligne. Ainsi, les données bancaires du consommateur sont enregistrées par le professionnel, notamment en vue de faciliter le paiement des achats futurs, peu important que le consommateur ait créé un compte auprès du professionnel pour bénéficier de services ultérieurs de façon répétée, ou qu’il ait procédé à un achat unique sans la création d’un compte.

Cette clause, en ce qu’elle n’est pas conforme aux conditions prévues par l’article 6 du règlement général sur la protection des données (RGPD) du 27 avril 2016, est illicite et, maintenue dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, abusive, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16968, publié au bulletin).

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui prévoit que le professionnel peut conserver les coordonnées bancaires de l’utilisateur sans que le professionnel n’ait à recueillir le consentement exprès de ce dernier et quelle que soit la nature de la relation contractuelle unissant l’utilisateur à la place de marché en ligne.

 

 

F- Clauses exonératoires de responsabilité du vendeur

 

1- Clause exonératoire de la responsabilité du vendeur en cas d’avaries du bien

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que le vendeur n’est pas responsable lorsque le produit est oxydé, cassé ou lorsque des composants ont été manipulés par l’acheteur.

 

L’article L. 217-3 du code de la consommation dispose que « le vendeur délivre un bien conforme au contrat ainsi qu’aux critères énoncés à l’article L. 217-5. Il répond des défauts de conformité existant au moment de la délivrance du bien au sens de l’article L. 216-1, qui apparaissent dans un délai de deux ans à compter de celle-ci. ». Cet article est complété par l’article L. 217-7, alinéas 1er et 2ème, du même code qui dispose que « les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, y compris du bien comportant des éléments numériques, sont, sauf preuve contraire, présumés exister au moment de la délivrance, à moins que cette présomption ne soit incompatible avec la nature du bien ou du défaut invoqué. Pour les biens d’occasion, ce délai est fixé à douze mois ».

 

La clause a pour effet d’écarter la responsabilité du vendeur lorsque le bien vendu est oxydé ou cassé, alors même que ces détériorations pourraient ne pas être imputables au consommateur ou au non-professionnel, mais au professionnel lui-même ou à tout tiers participant à l’exécution du contrat et dont le professionnel doit répondre au titre de l’article L. 221-15 du code de la consommation.

 

La clause écarte par ailleurs la responsabilité du professionnel lorsque des composants ont été manipulés par l’acheteur.

Cependant, le contrat étant conclu à distance entre un professionnel et un consommateur par l’entremise de la place de marché, le consommateur dispose d’un droit de rétractation prévu aux articles L. 221-18 et suivants du code de la consommation. Selon le considérant 37 de la directive 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, le droit de rétractation prévu au bénéfice des consommateurs contractant à distance se justifie par le constat que « le consommateur n’est pas en mesure de voir le bien qu’il achète avant de conclure le contrat ». A ce titre, il est « autorisé à essayer et inspecter le bien qu’il a acheté, dans la mesure nécessaire pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien ».

En écartant la responsabilité du vendeur du seul fait par le consommateur d’avoir exercé son droit à essayer et à inspecter le bien, sans se limiter au cas dans lequel le consommateur a adopté un comportement fautif ayant entrainé la non-conformité, cette clause a une nouvelle fois pour effet d’écarter la responsabilité du vendeur alors que les détériorations ne sont pas imputables au consommateur.

 

Dans son ensemble, cette clause a donc pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est présumée irréfragablement abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui écarte la responsabilité du professionnel vendeur en cas d’avaries du bien acheté et de sa manipulation par l’acheteur, sans réserver les cas dans lesquels les avaries et défauts sont imputables au professionnel.

 

 

2- Clause exonératoire de la responsabilité du vendeur du fait de l’incompatibilité du bien vendu avec d’autres matériels

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que le vendeur n’est pas responsable en cas d’impossibilité pour le consommateur d’utiliser le bien acheté en raison de son incompatibilité avec d’autres matériels.

 

L’article L. 217-4 du code de la consommation dispose, en son 1°, que le bien est conforme au contrat notamment s’il « correspond à la description, au type, à la quantité et à la qualité, notamment en ce qui concerne la fonctionnalité, la compatibilité, l’interopérabilité, ou toute autre caractéristique prévues au contrat ». De plus, l’article L. 217-5 du même code indique que le bien est conforme s’il « correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de durabilité, de fonctionnalité, de compatibilité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des biens de même type, eu égard à la nature du bien ainsi qu’aux déclarations publiques faites par le vendeur, par toute personne en amont dans la chaîne de transactions, ou par une personne agissant pour leur compte, y compris dans la publicité ou sur l’étiquetage ».

 

En prévoyant que le vendeur n’est pas responsable en cas d’incompatibilité du bien acheté avec d’autres matériels, cette clause a pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à son obligation de garantir la compatibilité et l’interopérabilité du bien vendu telles que prévues au contrat et auxquelles le consommateur peut légitimement s’attendre. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est donc présumée irréfragablement abusive.

 

La Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui écarte la responsabilité du professionnel vendeur en cas d’incompatibilité du bien vendu, sans réserver les cas dans lesquels cette incompatibilité lui est imputable.

 

 

3- Clause exonératoire de la responsabilité du vendeur en cas d’impossibilité de livraison par le transporteur

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que le vendeur n’est pas responsable des retards et retours de livraison dus à une impossibilité pour le transporteur de livrer la commande à l’adresse indiquée.

 

L’article L. 221-15 du code de la consommation dispose que, chaque fois qu’un contrat est conclu à distance entre un professionnel et un consommateur, « le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient exécutées par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Toutefois, il peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure ».

Cette disposition a vocation à s’appliquer chaque fois qu’un contrat est conclu entre un professionnel et un consommateur à distance, y compris par l’entremise d’une plateforme (dir. 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, cons. 20).

 

Cette clause exonère le vendeur de sa responsabilité du fait de l’inexécution par le transporteur de son obligation de livraison, sans se limiter aux seuls cas dans lesquels cette inexécution est due à une faute du consommateur.

De par sa généralité, elle a pour effet d’écarter la responsabilité de plein droit pesant sur le professionnel contractant à distance avec un consommateur, au-delà des seuls cas légaux dans lesquels le professionnel peut s’exonérer. Elle supprime ou réduit donc le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est présumée irréfragablement abusive.

 

En ce qu’elle est contraire à l’article L. 221-15 du code de la consommation, la Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause écartant la responsabilité du professionnel vendeur du fait de l’inexécution de son obligation de livraison par le transporteur.

 

 

G- Clauses exonératoires de responsabilité de la place de marché en ligne

 

1- Clauses écartant la responsabilité de la place de marché en ligne en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat de vente conclu par son entremise

 

  • De nombreuses clauses de contrats de place de marché en ligne affirment que ce professionnel n’est pas responsable de toute inexécution ou mauvaise exécution du contrat de vente conclu par son entremise en ce qu’il n’est qu’un simple intermédiaire et reste donc étranger à ce contrat.

Ces clauses peuvent être considérées comme abusives pour deux raisons.

 

1- Les places de marché en ligne relèvent de la catégorie des hébergeurs au sens de l’article 6, I., 2° de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) qui les définit comme « les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ». Ces prestataires ne sont pas débiteurs d’une obligation de surveillance des contenus qu’ils permettent de diffuser (LCEN, article 6, I., 7°). Pour autant, leurs responsabilités civile et pénale peuvent être engagées immédiatement si le caractère illicite du contenu est manifeste, ou a posteriori lorsque le contenu n’a pas été promptement retiré ou rendu inaccessible après avoir pris connaissance de son existence.

Certaines de ces clauses prévoient que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat qu’elle a permis de conclure par son entremise. Cependant, cette inexécution ou mauvaise exécution peut résulter de la fourniture d’informations illicites ou erronées quant à l’offre de vente, ce dont la place de marché peut être tenue pour responsable selon les modalités décrites ci-dessus.

De par leur généralité, ces clauses, en ce qu’elles ne réservent pas les cas dans lesquels la place de marché en ligne peut être responsable des contenus qu’elle permet de diffuser en sa qualité d’hébergeur, suppriment le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une de ses obligations. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elles sont présumées irréfragablement abusives.

 

2- L’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat de vente conclu par l’entremise de la place de marché en ligne peut trouver son origine dans un manquement de la place de marché en ligne à l’une de ses obligations dans sa relation avec l’une des parties au contrat (par ex., exécution d’une obligation de stockage ou de livraison de la marchandise du vendeur, mise en place d’un dispositif de paiement sur le site internet de la place de marché en ligne, etc.).

Chaque fois que la place de marché en ligne manque à l’une de ses obligations, la clause a pour effet de l’exonérer totalement de sa responsabilité à l’égard du créancier (vendeur ou acheteur) de cette obligation, sans se limiter aux cas d’exonération légaux. Elle supprime donc le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est présumée irréfragablement abusive.

 

De surcroit, la Cour de cassation, dans deux arrêts rendus en Assemblée plénière du 6 octobre 2006 (n° 05-13255) et du 13 janvier 2020 (n° 17-19963) affirme que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ». Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que « les articles 1382 et 1383, devenus 1240 et 1241 du Code civil, sont d’ordre public et que leur application ne peut être neutralisée contractuellement par anticipation, de sorte que sont nulles les clauses d’exonération ou d’atténuation de la responsabilité en matière délictuelle » (Cass. civ. 1re, 5 juillet 2017, n° 16-13407. V. aussi Cass. civ. 2e, 17 février 1955, n° 55-02.810 ; Bull. civ. II, n° 100 – 1 ; Cass. civ. 2e, 15 juin 1994, n° 92-18.048 ; Bull. civ. II, n° 155).

Ainsi, lorsque l’inexécution ou la mauvaise exécution de ses obligations par la plateforme cause un préjudice à un tiers (vendeur ou acheteur dans le contrat de vente conclu par son entremise), la clause a pour effet d’écarter sa responsabilité extracontractuelle. En cela, de par sa généralité, cette clause est une clause exonératoire de responsabilité extracontractuelle illicite et, maintenue dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur ou un non-professionnel, abusive par application de l’article L. 212-1 du code de la consommation, conformément à la jurisprudence (Cass. civ. 1re, 15 juin 2022, n° 18-16.968, publié au bulletin).

 

De par leur généralité, la Commission recommande que soient supprimées dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels les clauses qui écartent purement et simplement la responsabilité de la place de marché en ligne en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat conclu par son entremise.

 

 

2- Clause écartant la responsabilité de la place de marché en ligne en cas de non-conformité du produit à la législation locale

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable si l’article livré ne respecte pas la législation du pays de livraison.

 

Les places de marché en ligne relèvent de la catégorie des hébergeurs au sens de l’article 6, I., 2° de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) qui les définit comme « les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ». Ces prestataires ne sont pas débiteurs d’une obligation de surveillance des contenus qu’ils permettent de diffuser (LCEN, article 6, I., 7°). Pour autant, leurs responsabilités civile et pénale peuvent être engagées si le caractère illicite du contenu est manifeste, ou a posteriori lorsque le contenu n’a pas été promptement retiré ou rendu inaccessible après avoir pris connaissance de son existence.

La clause prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable de la non-conformité du bien qu’elle a permis de vendre par son entremise, sans réserver les cas dans lesquels sa responsabilité pourrait être engagée en sa qualité d’hébergeur d’un contenu non-conforme à la législation locale. De par sa généralité, cette clause supprime le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur ou le non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à l’une de ses obligations. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est présumée irréfragablement abusive.

 

De par sa généralité, en ce qu’elle ne réserve pas les cas dans lesquels la place de marché en ligne est responsable en sa qualité d’hébergeur, la Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs et aux non-professionnels la clause qui prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas de non-conformité du produit à la législation du lieu de résidence de l’acheteur.

 

3- Clause exonérant la place de marché en ligne du fait des transporteurs qu’elle a désignés

 

  • Une clause d’un contrat de place de marché en ligne prévoit que, pour que la place de marché en ligne exécute son obligation contractuelle de vérification de la conformité du bien vendu par un vendeur particulier à un consommateur, le bien est envoyé par le vendeur particulier à la place de marché en ligne, qui lui a adressé un bon d’envoi prépayé. Elle énonce ensuite que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas de perte ou détérioration du bien lors du transport.

 

Cette clause produit des effets entre la place de marché en ligne et un vendeur particulier. Puisqu’elle oblige un professionnel et un consommateur ayant conclu un contrat à distance consistant en l’utilisation de la place de marché en ligne et de ses services annexes, les règles des articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation ont vocation à s’appliquer.

L’article L. 221-15 du code de la consommation dispose, en son alinéa 1er, que « le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient exécutées par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Toutefois, il peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure ».

Dans la mesure où le transporteur est désigné par la place de marché en ligne lors de la fourniture au consommateur d’un bon d’envoi prépayé, le transporteur participe à l’exécution des obligations pesant sur le professionnel. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. civ. 1re, 13 novembre 2008, n° 07-14856), ce prestataire ne peut pas être qualifié de tiers au sens de la disposition précitée (dans ce sens, Recommandation N° 20-01 Contrats de location de transports individuels en libre-service, n° 103).

Cette clause a donc pour effet d’exonérer le professionnel de sa responsabilité du fait des prestataires qui participent à l’exécution du contrat. Par application de l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation, elle est donc présumée irréfragablement abusive.

 

En ce qu’elle entre en contrariété avec l’article L. 221-15 du code de la consommation, la Commission recommande que soit supprimée dans les contrats habituellement proposés aux consommateurs la clause qui prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable du fait des transporteurs qu’elle désigne pour l’exécution de ses obligations.

 

 

 

 

Par conséquent, la Commission des clauses abusives :

 

Sur la présentation des contrats :

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne doivent être rendues accessibles aux consommateurs et aux non-professionnels de manière effective ;

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne doivent être lisibles à l’écran comme sur papier après impression ;

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne traduites en langue française doivent être claires et compréhensibles ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui ont pour effet ou pour objet de faire primer la version des conditions générales d’utilisation, écrite en langue étrangère, sur la traduction française de celle-ci ;

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne doivent indiquer le champ d’application des clauses qu’elles contiennent à raison de la qualité des utilisateurs de la place de marché et du contrat qu’elles concernent ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que leur intitulé est susceptible de ne pas correspondre à leur contenu ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses indiquant que le contrat auquel le consommateur ou le non-professionnel a accès pourra être complété par des stipulations présentes dans un autre contrat, sans indication supplémentaire ;

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne ne doivent pas opérer des renvois successifs à d’autres documents ou clauses du contrat accessibles par des liens hypertextes ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui mentionnent ou renvoient à des dispositions légales ou réglementaires dont le contenu, ou les références et le contenu, est erroné ou n’a pas été mis à jour ;

 

 

Sur les clauses applicables à l’ensemble du contrat conclu avec la place de marché en ligne :

 

  • Rappelle que les conditions générales de contracter des places de marché en ligne doivent respecter les dispositions impératives issues de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés et du règlement 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui élèvent au rang d’événement de force majeure une évolution technologique imprévisible du point de vue du professionnel, sans que ne soit mentionné son caractère irrésistible ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui organisent la survie du contrat, pour le tout, en dépit de la résiliation ou de la désinscription du consommateur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui désignent un droit étranger en tant que loi applicable, sans réserver l’application des dispositions impératives de la loi française qui assurent une protection supplémentaire au consommateur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui attribuent la compétence exclusive aux juridictions d’un pays autre que celui de la résidence du consommateur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui dérogent aux règles impératives de compétence territoriale interne ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui imposent au consommateur ou au non-professionnel de recourir à un arbitrage ou à une médiation, à l’exclusion d’autres voies de recours dont un consommateur ou un non-professionnel pourrait se prévaloir ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses prévoyant que, si les parties décident de recourir à un mode amiable de règlement des différends, le litige devra être tranché dans un délai moindre que les délais imposés par des dispositions impératives applicables au mode amiable de règlement des différends choisi ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas obligé d’utiliser des modes amiables de règlement des différends comme la médiation de la consommation ou qui excluent la possibilité de recourir à la médiation de la consommation, même lorsque le contrat est conclu entre un professionnel et un consommateur ;

 

 

Sur les clauses portant sur l’utilisation de la place de marché en ligne :

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui affirment que l’accès au service de mise en relation est gratuit alors que la conclusion de contrats par l’entremise de la place de marché en ligne est subordonnée à un traitement de données à caractère personnel qui n’est pas justifié par une obligation légale ou nécessaire à la bonne exécution du contrat ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui permettent au professionnel de suspendre, modifier, remplacer ou refuser discrétionnairement l’accès du consommateur au service ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que l’utilisateur est le seul responsable de la confidentialité des identifiant et mot de passe de son compte en ligne et/ou qui réputent effectuées par lui toutes les actions effectuées depuis son compte en ligne, sans réserver les cas dans lesquels le professionnel a manqué à son obligation de sécurité des données à caractère personnel traitées et/ou dans lesquels le consommateur ou le non-professionnel a été victime d’une fraude commise par un tiers ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses par lesquelles le consommateur renonce à son recours contre le professionnel lorsqu’il a subi un préjudice du fait d’un autre utilisateur ou du fait de la plateforme elle-même ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le service est fourni « en l’état », sans réserver les cas dans lesquels les dysfonctionnements sont dus à un manquement du professionnel à ses obligations ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que l’obligation du professionnel de permettre l’accès et le fonctionnement de son site internet est de moyens, en contrariété du droit applicable ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses par lesquelles le professionnel entend, sous une forme quelconque, plafonner le montant de la réparation qu’il doit au consommateur ou limiter sa responsabilité à ses fautes graves.

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher que la responsabilité délictuelle du professionnel soit engagée ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable en cas de dysfonctionnements, anomalies ou perturbations du service liées aux caractéristiques du réseau internet, sans réserver les cas dans lesquels ces dysfonctionnements seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable du dysfonctionnement ou de tout dommage causé au matériel de l’utilisateur en raison de l’utilisation des services qu’il fournit, sans réserver les cas dans lesquels ces dommages seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable en cas de dysfonctionnement de son site internet ou du service fourni par le biais de son site internet, ou en cas d’inaccessibilité de son site pour des raisons d’ordre technique ou des incidents techniques, sans réserver les cas dans lesquels ces dysfonctionnements seraient dus à un manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui ont pour objet ou pour effet d’écarter la responsabilité du professionnel en cas de manquement à son obligation de sécurité des données qu’il traite ou qu’il stocke ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui écartent la responsabilité du professionnel du fait du contenu des liens hypertextes qu’il mentionne sur son site, sans distinguer qui est l’auteur du lien hypertexte et sans réserver les hypothèses dans lesquelles il est responsable de par la nature manifestement illicite du contenu pointé ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel n’est pas responsable du fait des contenus publiés par les utilisateurs sur son site, sans réserver les cas dans lesquels sa responsabilité doit être engagée en sa qualité d’hébergeur de contenus et, le cas échéant, à raison du dispositif de modération qu’il a mis en place ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui dispensent le professionnel de mise en demeure lors de la résolution du contrat et avancent la résolution au jour de l’envoi de sa notification ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses résolutoires qui accordent au professionnel une résolution de plein droit alors qu’une mise en demeure est exigée pour le consommateur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que les enregistrements sur les serveurs du professionnel « feront foi » entre les parties ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient la possibilité pour la plateforme de céder discrétionnairement le contrat, sans réserver l’hypothèse dans laquelle cette cession est susceptible d’engendrer une diminution des droits du consommateur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses par lesquelles le consommateur renonce à demander, en sus du prix, les intérêts éventuellement produits par ce dernier lorsqu’il est immobilisé sur la plateforme ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le professionnel deviendra propriétaire des sommes non-utilisées par le consommateur ou des biens non réclamés par le consommateur (vendeur ou acheteur), à l’expiration d’un certain délai ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que l’utilisateur d’une place de marché en ligne accorde à cette dernière une licence d’utilisation perpétuelle et irrévocable des contenus qu’il publie sur son site internet, en méconnaissance des dispositions légales applicables ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que l’utilisateur renonce à ses droits moraux sur les contenus qu’il publie sur le site internet du professionnel, en méconnaissance des dispositions légales applicables ;

 

 

Sur les clauses portant sur le contrat conclu entre les utilisateurs de la place de marché en ligne par son entremise :

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le contrat ne sera définitif qu’au moment de la confirmation de la commande par le professionnel alors que le consommateur est, pour sa part, définitivement engagé ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que le vendeur peut annuler le contrat tant qu’il n’a pas envoyé le bien acquis à l’acheteur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui prévoient que le contrat est conclu sous la condition résolutoire de la disponibilité des produits ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que la conclusion du contrat électronique peut se réaliser en un seul clic ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que le double clic équivaut à une signature électronique, sans précision supplémentaire ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que le consommateur sera informé des restrictions de livraison « au cours de sa commande » ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui fait présumer le consentement des représentants légaux au contrat conclu par leur enfant mineur ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui subordonne la mise à l’écart du droit de rétractation d’un contrat de fourniture de contenus numériques à l’accomplissement de la seule formalité de l’accord préalable et exprès du consommateur au commencement d’exécution du contrat, à l’exclusion des autres formalités impératives prévues légalement ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui a pour objet d’ajouter de nouveaux cas d’exclusions du droit de rétractation aux exceptions légales prévues par l’article L. 221-28 du code de la consommation ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui ne permettent pas au consommateur de déterminer quel est le point de départ du délai de rétractation dont il peut se prévaloir ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui imposent le retour de la marchandise dans leur emballage d’origine et/ou qui interdisent aux consommateurs d’utiliser la marchandise, sans réserver les cas dans lesquels cette utilisation consiste en l’exercice par le consommateur de ses prérogatives attachées à son droit de rétractation ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit une décote forfaitaire de la valeur du bien acheté lors de l’exercice du droit de rétractation, indépendamment du comportement fautif du consommateur et de la dépréciation réelle de la valeur du bien concerné ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui, à la suite de l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation, compte tenu de leur généralité, mettent à la charge de ce dernier les risques et périls de la restitution de la marchandise, et/ou réputent le consommateur responsable des détériorations de la marchandise survenues lors de sa restitution en raison du renversement de la charge de la preuve qu’elles produisent ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui ont pour objet d’exclure tout remboursement des frais de livraison en cas de rétractation partielle du consommateur en ce qu’elles le dissuadent d’exercer son droit de rétractation et en ce qu’elles sont contraires aux règles d’ordre public prévoyant le régime des restitutions en cas d’exercice de ce droit ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui n’autorise l’exercice du droit de rétractation par le consommateur que par une manifestation de volonté émise depuis son espace client en ligne sur le site internet du professionnel, à l’exclusion des autres moyens pourtant prévus par la loi ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui a pour objet d’écarter les effets du droit de rétractation sur les contrats accessoires du contrat principal ainsi anéanti, sans se limiter aux seuls cas légaux dans lesquels le droit de rétractation est écarté et, le cas échéant, sans en respecter le formalisme imposé ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui écarte le droit de rétractation lorsqu’une partie de la commande est indisponible, en méconnaissance de l’article L. 221-28 du code de la consommation qui prévoit une liste limitative d’exclusions du droit de rétractation ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui a pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de résilier ou de modifier unilatéralement le contrat valablement conclu au seul motif que la quantité ou le nombre de commandes dépasse l’usage « moyen » ou « normal » d’un consommateur ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui, en ce qu’elle permet au professionnel de conserver des sommes d’argent indues, prévoit que les frais de livraison ne seront pas remboursés si une partie de la commande est indisponible ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui écarte la garantie légale de conformité de la vente de biens consomptibles, sans réserver les cas dans lesquels les causes de la détérioration ou du dysfonctionnement du bien sont étrangères à son caractère consomptible ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui subordonne la validation des réserves émises par l’acheteur à la validation discrétionnaire du transporteur ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui permet à la plateforme de bloquer ou de refuser le paiement de façon discrétionnaire lorsque l’acheteur et le vendeur ont décidé d’utiliser le service de paiement intégré de la plateforme ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que le professionnel peut conserver les coordonnées bancaires de l’utilisateur sans que le professionnel n’ait à recueillir le consentement exprès de ce dernier et quelle que soit la nature de la relation contractuelle unissant l’utilisateur à la place de marché en ligne ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui écarte la responsabilité du professionnel vendeur en cas d’avaries du bien acheté et de sa manipulation par l’acheteur, sans réserver les cas dans lesquels les avaries et défauts sont imputables au professionnel ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui écarte la responsabilité du professionnel vendeur en cas d’incompatibilité du bien vendu, sans réserver les cas dans lesquels cette incompatibilité lui est imputable ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause écartant la responsabilité du professionnel vendeur du fait de l’inexécution de son obligation de livraison par le transporteur ;

 

  • Recommande que soient supprimées les clauses qui écartent purement et simplement la responsabilité de la place de marché en ligne en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat conclu par son entremise ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable en cas de non-conformité du produit à la législation du lieu de résidence de l’acheteur, sans réserver les cas dans lesquels elle serait responsable en sa qualité d’hébergeur ;

 

  • Recommande que soit supprimée la clause qui prévoit que la place de marché en ligne n’est pas responsable du fait des transporteurs qu’elle désigne pour l’exécution de ses obligations.

 

 

Recommandation adoptée le 25 mai 2023 sur le rapport de M. Geoffray Brunaux, Professeur à l’Université de Reims Champagne-Ardenne, et de M. Mathias Latina, Professeur à l’Université Côte d’Azur.