Cour de cassation
Les clauses des CGV de la société Chronopost relatives aux plafonds d’indemnisation du consommateur sont abusives

Cass. civ. 1ère, 8 nov. 2023, n° 21-22.655

Cass. civ. 1ère, 8 nov. 2023, n° 21-22.655 

Clauses abusives – Domaine d’application – Contrat type applicable en matière de transport public routier de marchandises – Règles applicables en cas de perte et avaries – Application supplétive – Convention écrite entre les parties – Clause n’accordant pas un niveau d’indemnisation conforme ou supérieur aux dispositions supplétives – Clause limitative de réparation 

 

EXTRAITS : 

« Il résulte de la combinaison des articles L. 132-1, alinéa 1, devenu L. 212-1, alinéa 1, R.132-1, 6°, devenu R. 212-1, 6°, du code de la consommation, de l’article L. 1432-4 du code des transports et des articles 21 du décret n° 99-269 du 6 avril 1999 et 22 du décret n° 2017-461 du 31 mars 2017 relatifs au contrat type applicable en matière de transport public routier de marchandises, que les règles applicables en cas de perte et avaries énoncées par ces deux derniers textes s’appliquent de manière supplétive en l’absence de convention écrite conclue entre les parties et qu’en présence d’une telle convention, les clauses qui n’accordent pas un niveau d’indemnisation conforme ou supérieur aux dispositions supplétives sont abusives. Dès lors qu’elle a relevé que les clauses critiquées fixaient des plafonds d’indemnisation inférieurs aux plafonds réglementaires, dont elles ne rappelaient pas l’existence, et fait ressortir qu’elles n’accordaient pas une indemnisation conforme ou supérieure aux dispositions supplétives qu’elles évinçaient, une cour d’appel en a exactement déduit qu’elles étaient abusives » 

 

ANALYSE : 

 

En l’espèce, le Conseil national des associations familiales laïques (CNAFAL), invoquant le caractère abusif de plusieurs clauses figurant depuis le mois de juin 2015 dans les contrats offerts par la société Chronopost, l’a assigné afin que celles-ci soient réputées non écrites et que soient ordonnées leur suppression et la mise en conformité des contrats proposés. Ces clauses prévoyaient des plafonds d’indemnisation en cas de pertes et avaries d’une part, et de retard d’autre part. Condamnée sous astreinte par la cour d’appel de Paris à supprimer les clauses, à payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs, et à publier le dispositif de l’arrêt, la société Chronopost a formé un pourvoi devant la première chambre civile de la Cour de cassation au motif que les clauses ne pouvaient être déclarées abusives dans les matières régies de manière supplétive par des contrats-types de nature réglementaire. 

La Cour de cassation considère que ces clauses sont abusives car elles fixaient des plafonds d’indemnisation inférieurs aux plafonds réglementaires, dont elles ne rappelaient pas l’existence et ainsi, n’accordaient pas une indemnisation conforme ou supérieure aux dispositions supplétives qu’elles évinçaient.  

De plus, ces clauses sont jugées abusives car elles venaient limiter le droit à réparation du consommateur et ainsi, elles étaient moins favorables que les prévisions du contrat type, en ce qu’elles n’avertissaient pas le consommateur de sa faculté de faire une déclaration d’intérêt spécial à la livraison ayant pour effet de substituer le montant de cette déclaration au plafond de l’indemnité fixée. 

En cela, la Cour vise l’article R. 212-1, 6° du code de la consommation qui présume abusives de manière irréfragable dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, les clauses ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas du manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ». 

Ce faisant, elle considère que les clauses fixant des plafonds d’indemnisation inférieurs aux plafonds réglementaires, dont elles ne rappelaient pas l’existence, et qui n’accordent pas une indemnisation conforme ou supérieure aux dispositions supplétives qu’elles évincent, sont des clauses “noires” dans les contrats de consommation. 

Par conséquent, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société Chronopost.