Cour de cassation
Le juge doit rechercher d’office le caractère abusif d’une clause permettant à la banque de prouver de manière irréfragable son obligation d’information par des documents élaborés unilatéralement

Cass. com., 19 janvier 2022, n° 20-13.719

Cass. com., 19 janvier 2022, n° 20-13.719  

Contrat de prêt — Caution — Obligation d’information annuelle – Modes de preuve – Office du juge — Déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties 

EXTRAITS : 

« Vu l’article L. 132-1, alinéa 1er, devenu L. 212-1, alinéa 1er, du code de la consommation : 

En statuant ainsi, alors qu’il incombait à la cour d’appel de rechercher d’office le caractère abusif de la clause précitée, en ce qu’elle permettait à la banque de rapporter irréfragablement la preuve de l’exécution de son obligation d’information annuelle à l’égard de la caution par des documents qu’elle avait élaborés unilatéralement, et, le cas échéant, d’examiner, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, la valeur et la portée des éléments de preuve invoqués par la banque à titre de preuve de l’exécution de cette obligation, la cour d’appel a violé le texte susvisé. » 

ANALYSE : 

La chambre commerciale de la Cour de cassation énonce que le juge national doit relever d’office le caractère abusif d’une clause permettant à la banque de prouver de manière irréfragable l’exécution de son obligation d’information à l’aide de documents qu’elle a elle-même déterminés.  

La clause litigieuse énonçait que « compte tenu du système de gestion automatisée de cette information mis au point par la banque, les parties conviennent que la production d’un listing informatique fera preuve de l’information entre elles »,  

La Cour de cassation ne se prononce pas sur le caractère abusif de la clause mais rappelle que le juge national est tenu d’apprécier d’office ce caractère dès lors qu’il dispose des moyens de faits et de droits nécessaires. La Cour de justice de l’Union Européenne a en effet confirmé récemment dans l’arrêt CJUE, 11 mars 2020,  C511/17, Lintner  « l’obligation pour le juge national d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause, conformément à l’article 6 paragraphe 1 de la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives et à l’arrêt du 4 juin 2009, Pannon GSM (C-243/08, EU:C:2009:350) dès lors qu’il dispose des éléments de faits et de droit nécessaires à cet examen, (arrêts du 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen, C-147/16, EU:C:2018:320, point 29, et du 20 septembre 2018, OTP Bank et OTP Faktoring, C-51/17, EU:C:2018:750 point 87) » (site de la CCA)  

En l’espèce au regard des faits, la Cour de cassation semble considérer que suffisamment d’éléments permettent au juge de soulever et d’apprécier le caractère abusif de la clause. La Cour de cassation considère donc que le fait que la clause permette à la banque de prouver de manière irréfragable son obligation d’information à l’aide de documents qu’elle a unilatéralement déterminés est suffisant pour permettre au juge national d’exercer son devoir de relever d’office le caractère abusif de la clause. 

Voir également : 

-  Site de la CCA : CJUE, 11 mars 2020, C511/17, Lintner 

– CJCE, 4 juin 2009, C-243/08, Pannon GSM  

– CJUE, 17 mai 2018, C-147/16, Karel de Grote-Hogeschool Katholieke Antwerpen 

– CJUE, 20 septembre 2018, C-51/17 OTP Bank et OTP Faktoring