Cour d'appel
Dans un crédit affecté la clause autorisant le prêteur à verser les fonds empruntés au prestataire du contrat principal n’est pas abusive

CA D’AGEN, 13 AVRIL 2022, S. A. SOLFINEA, N° RG 21/00144

CA D’AGEN, 13 AVRIL 2022, S. A. SOLFINEA, N° RG 21/00144 

– clause d’affectation des fonds 

EXTRAITS 

 « Les intimés invoquent le caractère abusif de la clause suivante stipulée au contrat de crédit : 

‘L’emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l’exécution de la prestation de service et après expiration du délai de rétractation. 

Mais n’est abusive au sens de l’ancien article L. 132-1 du code de la consommation, applicable au contrat souscrit le 15 février 2013, que les clauses qui ont pour objet ou pour effet dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.   

Le décret visé par ce texte, qui détermine une liste de clauses présumées abusives, ne mentionne pas la clause en litige.   

Ensuite, les fonds empruntés dans le cadre d’un crédit affecté ne sont pas à la libre disposition des emprunteurs et ne sont destinés qu’à financer le contrat principal.  

Ils ont donc vocation à être versés exclusivement au co contractant des emprunteurs dans le contrat principal.   

En outre, la clause en litige ne permet pas à la banque de les verser librement, mais subordonne, au contraire, ce versement, à un ordre de l’emprunteur constatant que la prestation du contrat principal a été exécutée.   

Ainsi, le contrat stipule également :   

‘Condition de mise à disposition des fonds : à la livraison du bien, par chèque ou virement au bénéficiaire mentionné dans l’attestation de fin de travaux.’   

L’emprunteur a donc toute possibilité, tant que le bien commandé n’a pas été livré, ou que la prestation de service n’a pas été réalisée, ou même qu’elle n’a pas été réalisée correctement, de s’abstenir de signer l’attestation de fin de travaux.   

Par suite, la clause en litige est étrangère à toute notion de déséquilibre au détriment du consommateur. » 

Cette clause ne sera donc pas annulée, n’étant pas une des clauses présumées abusives de la liste de l’article R.212-1 du Code de la consommation, ne créant pas de déséquilibre significatif caractérisant une clause abusive comme prévu par l’article L.212-1 du Code de la consommation et en prenant en considération les autres clauses du contrat dans lequel elle est insérée. 

 

ANALYSE :  

La Cour d’appel était saisie du caractère abusif d’une clause insérée dans un contrat de crédit affecté au financement d’un centrale solaire photovoltaïque.  

La clause litigieuse était ainsi libellée : « L’emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l’exécution de la  prestation de service et après expiration du délai de rétractation. » 

 

Le Tribunal judiciaire d’Agen avait jugé la clause abusive. Pour infirmer le jugement, la Cour d’appel observe que ladite clause ne figure pas dans la liste de clauses présumées abusives. Cependant, la Cour d’appel ajoute que ladite stipulation ne permet pas à la banque de verser librement les fonds, mais subordonne, au contraire, ce versement, à un ordre de l’emprunteur constatant que la prestation du contrat principal a été exécutée.  Le consommateur ayant la possibilité de s’abstenir de signer l’attestation de fin de travaux, et donc de refuser le versement des fonds si la prestation de service n’est pas exécutée, la clause ne créée pas de déséquilibre significatif.