Le Tribunal de grande instance de Paris juge abusives des clauses des conditions générales de « Prixtel », opérateur de téléphonie mobile 

TGI de Paris, 2 juillet 2019, PRIXTEL, N° RG 12/09994

TGI de Paris, 2 juillet 2019, PRIXTEL, N° RG 12/09994 

Clauses blanches – clause pénale – clause de résiliation – clause limitative de responsabilité – clause de dépôt de garantie – clause de suivi de consommation 

ANALYSE : 

Sur une action en cessation intentée par l’association de consommateurs UFC-QUE CHOISIR, le Tribunal relève un certain nombre de clauses illicites dont l’analyse du caractère illicite ne sera pas ici détaillée. Il s’agit d’une part de clauses contraires à la Loi Informatique et Libertés, et d’autre part des clauses contraires au code de la consommation. Certaines de ces clauses illicites sont considérées comme abusives par le Tribunal et réputées non écrites. Sur le lien entre clauses illicites et abusives : voir rapport annuel d’activité de la Commission pour l’année 2018. 

Le Tribunal juge un certain nombre de clauses abusives en application de l’article L. 212-1 du code de la consommation 

CLAUSE DE DEPOT DE GARANTIE 

L’article 5.2 des Conditions générales de service (CGS) de la Société PRIXTEL, en vigueur depuis le 24 octobre 2013, et l’article 5.2 des Conditions générales abonnement (CGA) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, sont ainsi libellés 

Contenu de la clause: « 5.2. PRIXTEL se réserve la possibilité de demander une garantie de 450 € ou une avance sur facturation du même montant, dans l’un des cas suivants : – si non réception d’un paiement à son échéance ou rejet de paiement, – si l’adresse de facturation est une poste restante ou une Boîte Postale. » 

Analyse des clauses 5.2 des conditions générales de service et 5.2 des conditions générales d’abonnement : « la société PRIXTEL se réserve effectivement le droit et le pouvoir de déterminer unilatéralement une des modalités essentielles de la facturation suivant qu’elle constitue un dépôt de garantie avec effet de blocage ou une simple avance de facturation […] cette clause apparaît donc indéniablement contraire aux dispositions de l’article R.212-1 du code de la consommation ». 

CLAUSE PENALE

L’article 5.3 des Conditions générales de service (CGS) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis le 02 novembre 2015, et l’article 5.3 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société 

PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, sont ainsi libellés : 

Contenu de la clause : « En cas de défaut partiel ou total de paiement à échéance d’une facture, le CLIENT est redevable d’une indemnité forfaitaire égale à 10 € TTC. Si ledit défaut de paiement est inférieur à 15 € TTC, le montant de l’indemnité forfaitaire est ramené à 5 euros TTC. Les frais de recouvrement seront à 

la charge du CLIENT en cas d’obtention par PRIXTEL d’un titre exécutoire ou d’exécution forcée contre lui. » 

Analyse des articles 5.3 des Conditions générales de service (CGS) et 5.3 des Conditions générales d’abonnement : “Le libellé de cette clause, d’une part ne précise pas que le client peut toutefois avoir des motifs légitimes de réserver le cas échéant tout ou partie de son paiement au titre de l’exception d’inexécution contractuelle en cas de manquement de l’opérateur à ses propres obligations, et d’autre part ne procède au rappel d’aucune règle réciproque s’appliquant au droit à indemnité du consommateur en cas d’inexécution totale ou partielle de l’opérateur à ses propres obligations. Par ailleurs, ce montant prévu de 10,00 euros à titre de clause pénale apparaît objectivement disproportionné, […], au regard du montant de 19,99 euros applicable à l’abonnement mensuel « tout illimité » ainsi que des montants des forfaits bloqués qui sont proposés aux pris de 2,00 euros TTC ou de 5,99 euros TTC”, cette clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 du code de la consommation). 

CLAUSE DE RESILIATION  

L’article 7.3 des Conditions générales de service (CGS) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis le 31 mars 2015, est ainsi libellé :  

Contenu de la clause : « Résiliation par PRIXTEL PRIXTEL peut résilier le Contrat à tout moment de plein droit et par courrier recommandé en cas de survenance de l’un des événements suivants : – Défaut de paiement non régularisé conformément à l’Article 6 ci-dessus, – Retrait aux opérateurs exploitant de réseau de téléphonie mobile partenaires de PRIXTEL des autorisations administratives nécessaires à la fourniture du Service avec un préavis de 1 mois, – Terme du contrat conclu entre PRIXTEL et l’un de ses cocontractants en vue de la fourniture du Service, à condition qu’aucun contrat avec un autre opérateur mobile et ayant le objet ne succède à celui-ci, avec un préavis de 1 mois, – Fausse déclaration du CLIENT lors de la procédure de souscription et, plus généralement, violation avérée de l’une quelconque des obligations pesant sur le CLIENT en vertu des présentes clauses, hors les obligations liées au paiement des factures, sans préavis. Dans tous les cas, le Contrat étant à durée indéterminée, PRIXTEL peut le dénoncer par courrier recommandé en respectant un préavis d’un mois, en particulier en cas d’arrêt de l’offre concernée. » 

Analyse l’article 7.3 des Conditions générales de service : « À défaut de mise en place d’un tel dispositif de mise en demeure préalable, les éléments précités de cette clause sont constitutifs d’« (…) un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. » « (…) au détriment du consommateur (…) », au sens des dispositions de l’article L.212-1 alinéa 1er du code de la consommation. Il sera donc fait droit à la demande d’annulation de cette clause dans la limite des cas particuliers de résiliation pour défaut de paiement non régularisé et de fausse déclaration du client lors de la souscription du contrat ainsi que dans le cas général de violation avérée par le client de l’une quelconque de ses obligations contractuelles ». 

CLAUSE DE SUIVI DE CONSOMMATION 

L’article 6.2 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, est ainsi libellé : 

Contenu de la clause : « Lorsque le suivi de consommation du CLIENT fait apparaître une dérive de consommation susceptible d’entraîner des conséquences pécuniaires significatives, ce seuil étant fixé à 150 € TTC de communications vers/depuis l’international ou vers des numéros surtaxés, PRIXTEL adressera au CLIENT un SMS d’avertissement le prévenant et l’invitant à vérifier cette situation et à régler une provision d’un montant de 75 € par internet sur l’Espace Client du site www.prixtel.com. A défaut de règlement, le service sera suspendu. Lors des 60 jours suivant l’activation de la ligne, PRIXTEL se réserve la possibilité, en cas d’atteinte de ce seuil, de restreindre partiellement le service objet de la dérive, sans impact sur les autres services fournis. A défaut de règlement de la provision, le service restera suspendu. » 

Analyse de l’article 6.2 des Conditions générales d’abonnement : « cette clause entend sanctionner des pics ponctuels de consommation alors que l’abonné n’a fait précédemment l’objet d’aucun incident de paiement ni d’aucune absence de régularisation suite à des incidents de paiement et qu’il n’a pas davantage été constaté un changement significatif dans ses habitudes de consommation, ce qui conduirait dès lors plutôt à une adaptation de sa formule contractuelle, à l’instauration d’un dépôt de garantie ou à la modification du dépôt de garantie préexistant […] , la réserve que se donne la société PRIXTEL de restreindre partiellement le service objet de la dérive lors des 60 jours suivant l’activation de la ligne en cas d’atteinte du seuil précité ne peut se dispenser d’une quelconque forme de prévenance ou d’avertissement préalable de l’utilisateur. ». Cette clause devra être annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation). 

CLAUSES  EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE 

L’article 8.3 des Conditions générales de service (CGS), en vigueur depuis le 31 mars 2015, et l’article 8.3 des Conditions générales d’abonnement (CGA), en vigueur depuis mars 2017, de la société PRIXTEL, sont ainsi libellés : 

Contenu de la clause : « En cas d’arrêt total du service, PRIXTEL s’engage à le rétablir en 48 heures maximum. A défaut du rétablissement dans ce délai non justifié par une faute du CLIENT, le CLIENT peut notamment demander un dédommagement à PRIXTEL qui correspond au nombre de jours pendant lequel les Services susvisés n’ont pas été fournis, sous la forme d’un avoir à valoir sur les prochaines factures. » 

Analyse des 8.3 des Conditions générales de service et 8.3 des Conditions générales d’abonnement : « les opérateurs de télécommunications sont assujettis à l’instar des fournisseurs d’accès Internet à une obligation contractuelle de résultat, devant en conséquence garantir à leurs abonnés un accès permanent et dénué de toute interruption à l’ensemble des services souscrits par les consommateurs. La société PRIXTEL ne peut en conséquence s’exonérer de cette responsabilité de plein droit du professionnel que dans les cas avérés de mauvaise exécution personnellement imputable à l’abonné ou résultant de situations de force majeure définies comme des événements imprévisibles et insurmontables, conformément par ailleurs aux dispositions des articles 14 et 15 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 de confiance dans l’économie numérique. » Ainsi, « ne répond aucunement à cette obligation légale de résultat ne prévoyant en définitive l’exonération de responsabilité de l’opérateur que dans les cas de faute personnelle imputable à l’abonné ou dans les situations de cas fortuits ou de force majeure. Pour les mêmes motifs, le principe même d’une franchise de 48 heures apparaît totalement antinomique avec le principe de cette obligation de résultat. Enfin, l’avoir sur facturation comme mode exclusif d’indemnisation en cas d’interruption de service apparaît également abusif ». La clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation). 

L’article 9.4 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société PRIXTEL de mars 2017, est ainsi libellé :  

Contenu de la clause : « Généralement, le CLIENT est seul responsable de l’utilisation du Service et il s’engage à respecter en permanence les dispositions légales, réglementaires ou administratives en vigueur au moment de son utilisation du Service et applicables à cette dernière. Il tiendra PRIXTEL indemne de tout dommage et/ou de toute plainte ou réclamation de tiers à son utilisation du Service. Il reconnaît que la transgression de ses obligations peut, notamment, avoir pour effet de l’exclure du Service. » 

Analyse de la clause : « la formulation de cette clause, de portée trop générale et dénuée de toute nuance, procède d’un véritable a priori d’exclusion de toute garantie de l’opérateur téléphonique et fournisseur d’accès Internet quant à l’utilisation de l’ensemble des services proposés. Cette clause laisse dès lors entendre que le consommateur n’a aucun recours contre son fournisseur en cas de dysfonctionnements de l’un quelconque des services proposés, pour quelque motif que ce soit. ». Cette clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation).