Recommandation N°88-01
Accession à la propriété immobilière

BOCCRF du 30/06/1988

La commission des clauses abusives,

Vu le chapitre IV de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs de produits et de services;

Vu le code civil;

Vu la loi 79-596 du 13 juillet 1979, et notamment les articles 7 et 17 de cette loi.

Entendu les représentants des professionnels intéressés;

Considérant que la plupart des contrats ayant pour objet la réparation d’un immeuble, l’acquisition d’un logement ou du terrain destiné à recevoir la construction sont financés à l’aide de prêts;

Considérant que ces contrats sont généralement signés sans que le consommateur dispose d’éléments lui permettant d’apprécier ses possibilités d’emprunt ni les conditions d’endettement qui en résulteront;

Considérant que la plupart des prêteurs se refusent à formuler des offres de prêt avant la production d’un acte constatant l’accord des parties sur l’acquisition du bien ou du terrain nécessaire à la construction;

Considérant que pour pallier ces difficultés et éviter au consommateur d’être lié par un acte d’acquisition ou de construction sans pouvoir obtenir un prêt répondant à ses possibilités, la loi du 13 juillet 1979 a instauré un mécanisme de protection qui permet à ce consommateur de s’informer sur les modalités du financement et de renoncer éventuellement à son projet même après signature de l’acte d’acquisition dans la mesure où il n’obtient pas les prêts ou lorsqu’il estime que ces offres de prêts ne correspondent pas à ses possibilités;

Considérant que la protection instituée par cette loi consiste essentiellement:

  • d’une part à imposer que tout acte ayant pour objet l’une des opérations susmentionnées soit soumis à la conditions suspensive de l’obtention du ou des prêts nécessaires au financement; cette condition impliquant que si le prêt n’est pas obtenu le professionnel doit rembourser la totalité des sommes qu’il a pu percevoir;
  • d’autre part à permettre au consommateur de s’informer sur les modalités des prêts qui lui sont offerts et de lui donner le temps de réflexion utile pour les accepter ou les refuser;

Considérant, en conséquence, que la loi du 13 juillet 1979 confère au consommateur le droit et la possibilité de renoncer à accepter les prêts qui lui sont offerts sans qu’aucune dérogation contractuelle à ce texte d’ordre public soit possible;

Considérant que certains contrats contiennent:

  • des clauses ayant pour effet ou pour objet de dispenser le professionnel du remboursement ou de retarder celui-ci lorsque le consommateur aura, sans abus de droit, refusé l’offre de prêt;
  • des clauses qui prévoient la nécessité de plusieurs refus de prêts émanant de prêteurs et prouvés par le consommateur;
  • des clauses qui donnent mandat au professionnel, en cas de refus de prêt par le prêteur, de rechercher des financements dont les conditions sont indéterminées ou inacceptables pour le consommateur;
  • des clauses qui prévoient la possibilité d’une modification de l’objet du contrat à l’initiative unilatérale du professionnel pour l’adapter au financement obtenu;
  • des clauses qui imposent, à peine de déchéance des droits du consommateur, de déposer la demande de prêt dans un délai qui ne lui permet pas d’être en possession des éléments nécessaires pour la présenter,

Recommande:

Que soient éliminées des contrats les clauses ayant pour effet ou pour objet:

  1. De priver le consommateur du délai de réflexion de dix jours qui lui est conféré par l’article 7 de la loi du 13 juillet 1979 et du droit de refuser, sans abus de droit, le prêt qui lui est offert;
  2. De dispenser le professionnel du remboursement ou de retarder celui-ci lorsque le consommateur aura, sans abus de droit, refusé l’offre de prêt;
  3. De subordonner le droit au remboursement du consommateur à la preuve de plusieurs refus de prêts;
  4. De donner mandat au professionnel de rechercher des prêts sans que ce mandat soit exprès et comporte toutes les précisions utiles sur les conditions du prêt;
  5. De conférer au professionnel la faculté de modifier unilatéralement l’objet du contrat pour l’adapter aux conditions de financement résultant d’un refus partiel de prêt;
  6. D’imposer au consommateur, à peine de déchéance de ses droits, la preuve du dépôt d’une demande de prêt dans un délai insuffisant pour réunir les éléments nécessaires à sa présentation.

(Texte adopté le 22 janvier 1988 sur le rapport de M. Philippe Isabey.)
Voir également :

Jurisprudence relative aux clauses abusives dans le secteur de l’immobilier